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Date : 20041122

Dossier : IMM-9458-04

Référence : 2004 CF 1627

ENTRE :

                                                         Fatma Zohra KHEMIRI

                                                                                                                               Demanderesse

                                                                          - et -

                                       LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                        Défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

[1]                Voici les motifs à l'appui du sursis de l'exécution d'une mesure de renvoi accordé mercredi le 16 novembre 2004.

[2]                La demanderesse est une citoyenne de la Tunisie qui craint la colère de son père, un musulman conservateur qui voudrait se venger sur elle du fait qu'elle avait été promise par lui en mariage à un neveu, s'est esquivée du foyer familial pour rejoindre son amant qui étudiait à Montréal et qu'elle a épousé par la suite en 2003.

[3]                Sa demande de sursis est greffée à une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire d'une décision rendue le 10 septembre 2004 par un agent chargé de l'examen des risques avant renvoi qui lui a été remise le 2 novembre 2004.

[4]                Un sursis d'une mesure de renvoi n'est accordé par cette Cour que si la demanderesse démontre l'existence de trois conditions bien connues:

(1)        une question sérieuse à juger;

(2)        un préjudice irréparable; et

(3)        la prépondérance des inconvénients.

[5]                La Cour suprême du Canada dans R.J.R. - Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, à la page 337, sur les indicateurs d'une question sérieuse à juger écrit ceci:

¶ 49       Quels sont les indicateurs d'une "question sérieuse à juger"? Il n'existe pas d'exigences particulières à remplir pour satisfaire à ce critère. Les exigences minimales ne sont pas élevées. Le juge saisi de la requête doit faire un examen préliminaire du fond de l'affaire... .

¶ 50       Une fois convaincu qu'une réclamation n'est ni futile ni vexatoire, le juge de la requête devrait examiner les deuxième et troisième critères, même s'il est d'avis que le demandeur sera probablement débouté au procès. Il n'est en général ni nécessaire ni souhaitable de faire un examen prolongé du fond de l'affaire.

[6]                Après avoir entendu longuement les conseillers des parties, j'estime que la demanderesse a démontré l'existence des questions sérieuses suivantes:


1)          l'agente d'évaluation des risques avant renvoi a-t-elle ignoré une preuve documentaire importante déposée par la demanderesse au soutien de sa demande de protection, notamment, l'étude intitulée "Discriminations et violences contre les femmes en Tunisie", (voir dossier de la demanderesse page 64);

2)         l'agente d'évaluation des risques avant renvoi a-t-elle commis une erreur en n'évaluant pas la preuve contradictoire sur la protection de l'État tunisien accordée aux femmes tunisiennes se trouvant dans une situation semblable à celle de la demanderesse;

3)          est-ce que la décision récente de cette Cour dans Cecilia c. Canada (Solliciteur général), 2004 CF 1428, s'applique au cas de la demanderesse;

4)         est-ce que l'agente d'évaluation des risques avant renvoi a commis une erreur en s'appuyant sur les conclusions tirées par un agent d'évaluation des risques avant renvoi dans ce même dossier dont la décision a été cassée sur consentement des deux parties;

5)         l'agente d'évaluation des risques avant renvoi a-t-elle exigé une preuve au-delà de la simple prépondérance des probabilités.

[7]                Quant au deuxième critère, celui du préjudice irréparable, j'estime que le risque allégué par la demanderesse est celui d'une menace à sa vie ou de menaces de violence qu'elle subirait. De telles atteintes constituent un préjudice irréparable.


[8]                Ayant soulevé des questions sérieuses à juger et démontré un préjudice irréparable, la balance des inconvénients favorise la demanderesse.

[9]                Pour tous ces motifs, un sursis de l'exécution de la mesure de renvoi visant la demanderesse est accordé, jusqu'à ce que soit décidée la demande d'autorisation de contrôle judiciaire et, si cette autorisation est donnée, jusqu'à ce que soit entendue et décidée la demande de contrôle judiciaire dans le présent dossier.

                                                                                                                                                                        

                                                                                                  J u g e                     

Ottawa (Ontario)

le 22 novembre 2004


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                     

DOSSIER :                IMM-9458-04

INTITULÉ :               Fatma Zohra KHEMERI

          - et -

Le Solliciteur Général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Ottawa, Ontario

DATE DE L'AUDIENCE :                            le17 novembre 2004

MOTIFS de l'ordonnance : Monsieur le juge Lemieux

DATE DES MOTIFS :                                   le 22 novembre 2004

                                                     

COMPARUTIONS :

Me Sébastien Dubois                                         POUR LE DEMANDEUR

Me Marie Nicole Moreau                                              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Saint-Pierre Grenier Avocats                                         POUR LE DEMANDEUR

Montréal, Québec

Sous-Procureur Général du Canada                   POUR LE DÉFENDEUR


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