Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20201126


Dossier : T‑739‑20

Référence : 2020 CF 1092

[TRADUCTION FRANÇAISE RÉVISÉE PAR L’AUTEUR]

Ottawa (Ontario), le 26 novembre 2020

En présence de monsieur le juge Sébastien Grammond

ENTRE :

LE CONSEILLER BLAIR OWEN

demandeur

et

LA PREMIÈRE NATION DE LITTLE GRAND RAPIDS, REPRÉSENTÉE PAR LE CHEF RAYMOND KEEPER, LA CONSEILLÈRE DIANE KEEPER, LE CONSEILLER CLINTON KEEPER, LE CONSEILLER ROY DUSNFORD, LA CONSEILLÈRE HILDA CROW ET LA CONSEILLÈRE WENDY LEVEQUE

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 26 novembre 2020)

[1]  Monsieur Owen sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Première Nation de Little Grand Rapids l’a destitué de son poste de conseiller. La Première Nation et les défendeurs, à titre individuel, n’ont ni comparu ni participé de quelque manière que ce soit à la présente instance, bien que la demande leur ait été dûment signifiée. Monsieur Owen a présenté une preuve démontrant que sa destitution était illégale. Par conséquent, j’accueille sa demande de contrôle judiciaire.

[2]  La Première Nation de Little Grand Rapids est régie par la Loi sur les Indiens, LRC 1985, c I‑5, et n’a pas adopté son propre code électoral. Ses élections sont, en conséquence, régies par les articles 74 à 79 de la Loi sur les Indiens.

[3]  En particulier, l’article 78 de la Loi sur les Indiens porte sur la destitution des conseillers :

78. […]

78. […]

(2) Le poste de chef ou de conseiller d’une bande devient vacant dans les cas suivants :

(2) The office of chief or councillor of a band becomes vacant when

[…]

[…]

b) le ministre déclare qu’à son avis le titulaire, selon le cas :

(b) the Minister declares that in his opinion the person who holds that office

[…]

[…]

(ii) a, sans autorisation, manqué les réunions du conseil trois fois consécutives […]

(ii) has been absent from three consecutive meetings of the council without being authorized to do so […]

[4]  Le 22 novembre 2019, lors d’une assemblée communautaire, une résolution destituant M. Owen a été adoptée au motif qu’il s’était absenté trois fois consécutives. Cette résolution est intégrée dans une lettre du 13 janvier 2020 adressée à M. Owen et signée par le chef et quatre conseillers, soit le quorum du conseil. Le 20 avril 2020, le chef et cinq conseillers ont écrit au ministre des Services aux Autochtones pour lui demander de confirmer la décision de destituer M. Owen du conseil. Le dossier ne contient aucune information au sujet de la réponse que le ministre a pu donner à cette demande.

[5]  Monsieur Owen affirme que ce n’est que le 24 juin 2020 qu’il a reçu une copie de ces documents, après avoir demandé maintes fois à la Première Nation pourquoi on ne lui avait pas versé son salaire depuis décembre 2019. Il affirme également n’avoir reçu aucun préavis de l’assemblée du 22 novembre 2019 ni aucune indication qu’il risquait de perdre son poste de conseiller.

[6]  La Première Nation n’a pas le pouvoir de destituer un conseiller. Suivant l’alinéa 78(2)b) de la Loi sur les Indiens, ce pouvoir revient au ministre. C’est pourquoi la résolution adoptée en novembre 2019 pourrait tout au plus être considérée comme une demande priant le ministre d’exercer son pouvoir. Or, la Première Nation l’a interprétée comme une décision qui produit des effets juridiques et a cessé de rémunérer M. Owen. Cela n’était pas conforme à la Loi sur les Indiens. Par conséquent, la décision de destituer M. Owen du conseil doit être annulée.

[7]  Monsieur Owen sollicite les dépens sur la base avocat‑client. Dans la décision Whalen c Première Nation no 468 de Fort McMurray, 2019 CF 1119, j’ai analysé la question de l’adjudication des dépens dans des instances relatives à la gouvernance des Premières Nations. J’ai souligné qu’il faut généralement prouver l’existence d’une conduite répréhensible pour justifier l’adjudication des dépens sur la base avocat‑client. Je ne dispose d’aucun élément qui me permettrait de comprendre pourquoi les défendeurs n’ont pas comparu, ni de faits me permettant de conclure que leur conduite était répréhensible. Compte tenu des circonstances de l’espèce, j’adjugerai un montant global de 5 000 $.

 


JUGEMENT dans le dossier T‑739‑20

LA COUR STATUE que :

1.  La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.  La décision de destituer le demandeur de son poste de conseiller de la Première Nation de Little Grand Rapids est annulée.

3.  Les dépens, d’une somme globale de 5 000 $, taxes et débours compris, sont adjugés au demandeur.

« Sébastien Grammond »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DoSSIER :

T‑739‑20

 

INTITULÉ :

LE CONSEILLER BLAIR OWEN c LA PREMIÈRE NATION DE LITTLE GRAND RAPIDS, REPRÉSENTÉE PAR LE CHEF RAYMOND KEEPER, LA CONSEILLÈRE DIANE KEEPER, LE CONSEILLER CLINTON KEEPER, LE CONSEILLER ROY DUSNFORD, LA CONSEILLÈRE HILDA CROW ET LA CONSEILLÈRE WENDY LEVEQUE

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE OTTAWA (ONTARIO) ET Winnipeg (Manitoba)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 NOVEMBRE 2020

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GRAMMOND

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 26 NOVEMBRE 2020

COMPARUTIONS :

Jared Wheeler

POUR LE DEMANDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jerch Law

Avocats

Winnipeg (Manitoba)

POUR LE DEMANDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.