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                                                                                                                              Date : 20050812

                                                                                                                Dossier : IMM-10670-04

                                                                                                            Référence : 2005 CF 1088

ENTRE :

JORGE LUIS MACHADO PRATO,

IRISMAR CHIQUIN DURAN CHACON

                                                                                                                                    demandeurs

                                                                          - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), datée du 7 décembre 2004, dans laquelle la Commission a conclu que les demandeurs ntaient pas des réfugiés au sens de la Convention ni des « personne[s] à protéger » , selon les définitions respectives des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[2]         Jorge Luis Machado Prato (le demandeur) et Irismar Chiquin Duran Chacon (lpouse du demandeur) sont des citoyens du Venezuela.


[3]         Le demandeur allègue que les cercles bolivariens le blesseraient ou le tueraient s'il devait retourner au Venezuela, puisqu'ils le perçoivent comme un opposant au régime de Chavez. Il allègue qu'il a été licencié de son emploi le 31 janvier 2003 et que des gens s'identifiant comme des membres des cercles bolivariens lui ont téléphoné et ont menacé de le blesser ou de le tuer.

[4]         Le demandeur ajoute que le 8 septembre 2003, des hommes armés l'ont enlevé et l'ont emmené dans les montagnes où ils l'ont détenu toute la nuit. Ces hommes lui ont réclamé un versement mensuel de 2 000 $US et lui ont dit qu'il devait coopérer avec les cercles bolivariens, sinon ils le blesseraient ou le tueraient, ainsi que son épouse.

[5]         Lpouse du demandeur allègue que les mêmes gens ayant menacéde blesser son mari la blesseraient ou la tueraient également du fait qu'elle est son épouse.

[6]         En se fondant sur le fait qu'elle croyait que le demandeur était victime de harcèlement de la part de fonctionnaires corrompus et non de persécution, la Commission a conclu qu'il ntait pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

[7]         Les mots « persécuter » et « persécution » ont été définis par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Rajudeen c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1984), 55 N.R. 129, comme suit :

[traduction]

Harceler ou tourmenter sans relâche par des traitements cruels ou vexatoires; tourmenter sans répit, tourmenter ou punir en raison d'opinions particulières ou de la pratique d'une croyance ou d'un culte particulier.

[...]

Succession de mesures prises systématiquement, pour punir ceux qui professent une (religion) particulière; période pendant laquelle ces mesures sont appliquées; préjudice ou ennuis constants quelle qu'en soit l'origine.


[8]         La Cour a reconnu que la ligne séparant la persécution du harcèlement était difficile à établir dans le contexte du droit des réfugiés et qu'il incombait à la Commission de tirer les conclusions dans ce contexte (voir la décision Jonas c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration), 2004 CF 1066, et l'arrêt Sagharichi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] F.C.J. no 796 (C.A.F.) (QL)). L'intervention de la Cour n'est pas justifiée, à moins que la conclusion tirée ne semble arbitraire ou déraisonnable.

[9]         En l'espèce, il ne semble pas que les incidents essentiels à la demande du demandeur principal aient été systématiques, graves ou persistants, selon ce qui a été défini dans l'arrêt Rajudeen, précité. C'est malheureux que le demandeur ait été renvoyé et visé pour ses connaissances relatives à des codes spéciaux, mais il s'agissait d'un incident isolé et il a été en mesure de travailler avec son père. De plus, la conclusion de la Commission selon laquelle le demandeur était vraiment une victime d'extorsion, ce qui n'a aucun lien avec l'un des motifs de la Convention, est appuyée par la preuve documentaire, laquelle souligne le caractère généralisé des enlèvements en vue d'obtenir de l'argent au Venezuela. La question relative au « lien » en est surtout une de fait relevant entièrement de l'expertise du tribunal (Orellana c. Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) (19 septembre 1995), IMM-3520-94).

[10]       Par conséquent, selon moi, la Commission n'a pas commis d'erreur de droit et elle n'a pas rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7).


[11]       La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

                       « Yvon Pinard »                       

         Juge

Ottawa (Ontario)

Le 12 août 2005

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                IMM-10670-04

INTITULÉ :                                                                 JORGE LUIS MACHADO PRATO, IRISMAR CHIQUIN DURAN CHACON

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                         MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                                       LE 29 JUIN 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                              LE 12 AOÛT 2005

COMPARUTIONS :

Jeffrey Platt                                                                 POUR LES DEMANDEURS

Lynne Lazaroff                                                            POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jeffrey Platt                                                                 POUR LES DEMANDEURS

Montréal (Québec)

John H. Sims, c.r.                                                       POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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