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Date : 20000531


Dossier : T-896-98


Ottawa (Ontario), le 31 mai 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O"KEEFE


ENTRE :


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION



demandeur


et



CHEUK WAH LEE


défenderesse


MOTIFS D"ORDONNANCE ET ORDONNANCE


LE JUGE O"KEEFE


[1]      Il s"agit d"un appel que le ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration (le ministre) a formé contre la décision, datée du 1er avril 1998, dans laquelle le juge de la citoyenneté J. Hong a approuvé la demande que Cheuk Wah Lee (la défenderesse) avait présentée en vue d"obtenir la citoyenneté canadienne. Le ministre soutient que la défenderesse ne satisfaisait pas aux exigences en matière de résidence prévues à l"alinéa 5(1)c ) de la Loi sur la citoyenneté, 1974-75-76, ch. 108 (la Loi). L"appel a été formé en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi et de l"article 21 de la Loi sur la Cour fédérale , L.R.C. (1985), ch. F-7.

[2]      La défenderesse, une ancienne résidente de Hong Kong, est arrivée au Canada le 9 mai 1992. Ses parents, quant à eux, sont arrivés au pays le 12 avril 1992. La défenderesse a quitté le Canada le 25 mai 1992 pour faire sa dernière année d"études secondaires. Elle est demeurée à l"étranger jusqu"au 7 août 1992.

[3]      La défenderesse est revenue au Canada en août 1992. Elle y a séjourné pendant environ deux semaines avant de se rendre aux É.-U. A. pour fréquenter l"Université Cornell, où elle a obtenu un baccalauréat en économie et mathématiques en mai 1996. Elle s"est ensuite inscrite à un programme de doctorat en économie à l"Université Columbia, à New York.

[4]      Voici les périodes au cours desquelles la défenderesse s"est absentée du Canada :

du

jour/mois/an

au

jour/mois/an


Destination


Raison

Nombre de jours d"absence

25/05/92

07/08/92

Hong Kong

Pour faire sa dernière année d"études secondaires; Pour rassembler ses effets personnels

74

20/08/92

09/10/92

É.-U. A.

50

13/10/92

25/11/92

É.-U. A.

43

29/11/92

19/12/92

É.-U. A.

20

24/01/93

19/03/93

É.-U. A.

54

28/03/93

22/05/93

É.-U. A.

55

26/05/93

31/05/93

É.-U. A.

Pour assister à la collation des diplômes de ses amis

5

23/08/93

08/10/93

É.-U. A.

46

12/10/93

24/11/93

É.-U. A.

43

28/11/93

18/12/93

É.-U. A.

20

19/01/94

18/03/94

É.-U. A.

58

29/03/94

21/05/94

É.-U. A.

53

01/07/94

05/07/94

É.-U. A.

Vacances

4

22/08/94

07/10/94

É.-U. A.

46

11/10/94

22/10/94

É.-U. A.

11

24/10/94

01/11/94

Hong Kong

Pour assister aux funérailles de son grand-père

8

02/11/94

23/11/94

É.-U. A.

21

27/11/94

17/12/94

É.-U. A.

20

18/01/95

02/02/95

É.-U. A.

15

04/02/95

18/03/95

É.-U. A.

42

26/03/95

29/05/95

É.-U. A.

64

29/06/95

08/07/95

É.-U. A.

9

27/08/95

05/10/95

É.-U. A.

39

08/10/95

17/12/95

É.-U. A.

70

20/01/96

17/03/96

É.-U. A.

56

24/03/96

27/05/96

É.-U. A.

64

26/07/96

29/07/96

É.-U. A.

Vacances

3

21/08/96

18/09/96

É.-U. A.

28

26/09/96

21/12/96

É.-U. A.

86

19/01/97

14/02/97

É.-U. A.

26

Total

1,133

[5]      La défenderesse revenait au Canada pour y faire des séjours d"une à deux semaines. Elle a également eu des emplois d"été au Canada.

[6]      La défenderesse a présenté une demande de citoyenneté canadienne le 14 février 1997.

[7]      Le juge de la citoyenneté a dit que la défenderesse avait été absente du pays pendant 1 133 jours (en se fondant sur les données qu"elle avait fournies), mais selon le mémoire du ministre, elle a été absente du Canada pendant 889 jours au cours de la période de quatre ans pertinente.

[8]      La défenderesse a fait des études universitaires aux États-Unis, où elle a résidé à cette fin depuis le mois d"août 1992 (sauf lorsqu"elle faisait des visites ou prenait des vacances à l"extérieur de ce pays).

[9]      Pour étayer sa demande, la défenderesse a soumis divers documents, dont des déclarations de revenus, des documents relatifs à l"immeuble de ses parents, des relevés bancaires et d"investissements, un permis de conduire, des cartes de bibliothèque et des cartes de crédit.

[10]      La défenderesse a sa propre chambre à coucher dans la résidence de ses parents, où elle a entreposé tous ses effets personnels.

[11]      Lorsqu"elle quittait le Canada, la défenderesse obtenait des permis de retour pour résident permanent.

La question litigieuse

[12]      La défenderesse a-t-elle satisfait aux exigences prévues à l"alinéa 5(1)c ) de la Loi, selon lequel elle doit avoir résidé au Canada pendant au moins trois années au cours de la période de quatre ans qui a précédé la date de sa demande?

Les dispositions législatives

[13]      Le paragraphe 5(1) de la Loi prévoit :


5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who


(a) makes application for citizenship;

(b) is eighteen years of age or over;

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and


(f) is not under a deportation order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois_:

a) en fait la demande;

b) est âgée d'au moins dix-huit ans;

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante_:

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,



(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;



d) a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada;

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

f) n'est pas sous le coup d'une mesure d'expulsion et n'est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l'article 20.

L"analyse et la décision
[14]      En vertu de cet article de la Loi, le demandeur de citoyenneté doit, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, avoir résidé au Canada pendant au moins trois ans (1 095 jours) en tout.
[15]      Il ressort de la jurisprudence de notre Cour que dans certaines circonstances, il peut être tenu compte de périodes au cours desquelles le demandeur s"est trouvé à l"étranger (absences) dans le calcul du nombre de jours de résidence requis, soit 1 095 jours.
[16]      Selon les données révisées du ministre, la défenderesse a été absente du Canada pendant 889 jours au cours de la période de quatre ans qui a précédé la date de sa demande.

[17]      On tient compte des absences du demandeur du Canada dans le calcul des 1 095 jours de résidence que si ce dernier y avait centralisé son mode de vie avant ses absences.

[18]      Le juge Dubé de notre Cour a dit, dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté) c. Lo (22 janvier 1999), dossier no T-1082-98, à la page 2 :

La présence physique au Canada tout au long de la période est moins essentielle lorsqu'une personne s'y est établie en pensée et en fait, ou y a conservé ou centralisé son mode vie habituel. C'était le cas de l'étudiant dans l'affaire Papadogiorgakis (précitée), qui s'était établi en Nouvelle-Écosse avant d'aller étudier aux États-Unis.

[4]      Malheureusement, ce n'est pas le cas de l'intimée en l'espèce qui, de toute évidence, ne peut s'être établie au Canada en seulement sept jours.

[5]      Par conséquent, sa demande était prématurée. Maintenant qu'elle a complété ses études et qu'elle s'est établie à Vancouver, elle pourra, au moment opportun, présenter une nouvelle demande de citoyenneté canadienne qui sera sans doute accueillie.

[6]      L'appel du ministre est accueilli.

[19]      À mon avis, comme la défenderesse en l"espèce n"a pas centralisé son mode de vie au Canada pendant son séjour de 17 jours qui a précédé sa première période d"absence du pays, je ne suis pas disposé à tenir compte des périodes au cours desquelles elle a été absente du Canada pour déterminer si elle a satisfait à l"exigence applicable en matière de résidence. En conséquence, le juge de la citoyenneté a commis une erreur lorsqu"il a conclu que la défenderesse avait satisfait à l"exigence en matière de résidence prévue à l"alinéa 5(1)c ) de la Loi et lui a accordé la citoyenneté canadienne.

[20]      En d"autres termes, la demande de citoyenneté de la défenderesse était prématurée, mais je n"ai pas de doute qu"elle deviendra un jour citoyenne canadienne.

[21]      La demande (l"appel) du ministre est accueillie.


ORDONNANCE

[22]      LA COUR ORDONNE que la demande (l"appel) du ministre soit accueillie.



" John A. O"Keefe "

                                         J.C.F.C.



OTTAWA (ONTARIO)

Le 31 mai 2000












Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :              T-896-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :          LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                      L"IMMIGRATION c. CHEUK WAH LEE

LIEU DE L"AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L"AUDIENCE :          LE 11 AVRIL 2000

MOTIFS D"ORDONNANCE ET ORDONNANCE RENDUS PAR MONSIEUR LE JUGE O"KEEFE

EN DATE DU :              31 MAI 2000


ONT COMPARU :     


M. Toby Hoffman                          POUR LE DEMANDEUR

Mme Barbara Jackman                      POUR LA DÉFENDERESSE



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     


M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)                          POUR LE DEMANDEUR

Jackman, Waldman & Associates

Toronto (Ontario)                          POUR LA DÉFENDERESSE

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