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Date : 19990920

Dossier : T-1709-98

Ottawa (Ontario), le 20 septembre 1999

En présence de Monsieur le juge Pelletier

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

demandeur,

                                                           

- et -

GHAZARIANS YOUSEFI ARAKSIA,

défenderesse.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]         Madame Araskia est arrivée au Canada à titre d'immigrante reçue, le 8 octobre 1991. Le 6 janvier 1998, elle a présenté une demande de citoyenneté canadienne. Pendant les quatre ans qui ont immédiatement précédé sa demande - du 6 janvier 1994 au 6 janvier 1998 - elle a passé 733 jours à l'étranger et 728 jours au Canada. Il lui manquait donc 367 jours pour atteindre les 1095 jours exigés par l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29[1]. Le juge de la citoyenneté a prétendu avoir appliqué le cadre fixé par le juge Thurlow dans lequel les jours d'absence du pays peuvent être comptabilisés en tant que jours de résidence si le requérant a centralisé son mode habituel de vie au Canada et si les absences sont temporaires et ne dévoilent pas une intention d'abandonner sa résidence[2].

[2]         Les éléments principaux de l'exigence de résidence sont que la résidence soit établie, c'est-à-dire que le requérant doit centraliser son mode habituel de vie au Canada en prenant les mesures nécessaires qui prouvent cette intention, et que la résidence soit maintenue pendant les périodes d'absence du pays. La question de savoir si la résidence a été établie et si elle a été maintenue sont des questions de fait.

[3]         En l'espèce, le demandeur s'appuie sur le calcul qui figure dans le dossier de citoyenneté et qui montre qu'il manquait 522 jours à la défenderesse sur les 1 095 exigées. Le demandeur prétend que le simple fait de passer autant de temps à l'étranger est une preuve en soi d'un manque d'engagement envers le pays. Quel qu'en soit le bien-fondé, si en fait il manquait à la défenderesse 522 jours sur les jours exigés, cet argument n'a pas la même valeur quand le nombre de jours manquant est considérablement moindre. J'ai calculé les jours manquants de la manière suivante :

                        Périodes d'absence:

                        Du 6 janvier 1994 au 26 mai 1994 : 26+28+31+30+26 =141

                        Du 15 mai 1995 au 22 octobre 1995 : 16+30+31+31+30+22 =160

                        Du 5 octobre 1996 au 11 décembre 1997 : 365+27+30+11 =433

733

            Présence au Canada pendant les 4 ans précédant la demande :

                        4 x 365 = 1460 + 1 (année bisextile) = 1461

                        1461 (total de jours) - 733 (jours d'absence) =728

            Manque en nombre de jours exigés :

                        1095 ( jours exigés) - 728 (jours présents) =367

[4]         Le moyen principal du demandeur est que les absences de la défenderesse ont été volontaires et qu'elles n'ont pas été dictées par des obligations professionnelles ou éducationnelles. En fait, deux des trois périodes d'absence ont été pour aller rendre visite à sa famille alors que l'une d'entre elles a été pour prendre soin de sa fille quand cette dernière est devenue malade du coeur et a souffert d'un accident vasculaire cérébral. Selon le questionnaire relatif à la résidence de la défenderesse, cela a eu pour conséquence de prolonger sa dernière visite au-delà du temps pendant lequel elle avait l'intention de rester.

[5]         Le demandeur concède que pendant que la défenderesse était partie, elle a continué d'avoir une adresse canadienne quoiqu'à la maison de sa fille; elle a gardé ses meubles soit chez sa fille soit dans un entrepôt; elle a maintenu un compte en banque et une protection médicale canadienne; le reste de sa famille est au Canada. Dans son questionnaire relatif à la résidence, la défenderesse affirme avoir toujours eu l'intention de conserver son domicile au Canada. Le demandeur concède également que la résidence a été établie et que seule reste la question de savoir si la résidence a été maintenue.

[6]         Se fondant sur les éléments de preuve qui lui avaient été soumis, le juge de la citoyenneté a conclu que la défenderesse avait conservé un lien suffisant avec le Canada pour lui permettre de considérer les périodes d'absence du pays comme pouvant entrer dans le calcul de la période de résidence nécessaire. Comme je l'ai indiqué dans Akan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 1999 A.C.F. no 991, la divergence d'opinions au sein de la Cour quant à la bonne méthode à utiliser relativement à l'exigence de la résidence me pousse à conclure que le juge de la citoyenneté peut choisir parmi toutes des méthodes adoptées en Section de première instance, celle qu'il préfère, sans pouvoir être déclaré fautif pour ce seul motif. Puisque chaque méthode fait autorité de la même façon du point de vue du Bureau de la citoyenneté, en choisir une plutôt qu'une autre ne peut être une erreur pour un juge de la citoyenneté. Cependant, après avoir choisi une méthode, le juge de la citoyenneté est tenu de l'appliquer correctement. En l'espèce, le juge de la citoyenneté paraît avoir pris en considération les bons facteurs et, en conséquence, je ne modifierai pas sa décision.


ORDONNANCE

            En conséquence, il est ordonné que l'appel soit rejeté.

« J.D. Denis Pelletier »

_____________________

Juge             

Traduction certifiée conforme

Philippe Méla


SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :T-1709-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

                                                                        - et -

                                                                        Ghazarians Yousefi Araksia

LIEU DE L'AUDIENCE:Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE:le mardi 7 septembre 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE

PELLETIER

EN DATE DU :lundi 2 septembre 1999

ONT COMPARU :

M. Godwin Friday     POUR LE DEMANDEUR

Mme Ghazarians Yousefi AraksiaPOUR LA DÉFENDERESSE

Mme Melania Bideci

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Maurice RosenbergPOUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Ghazarians Yousefi Araksia etPOUR LA DÉFENDERESSE

Melania Bideci

Scarborough (Ontario)



     [1]Le dossier du tribunal fourni par le Bureau de la citoyenneté comprend deux calculs de résidence, l'un indiquant qu'il manque 366 jours de résidence à la défenderesse et l'autre indiquant qu'elle était à l'étranger pendant 887 jours et qu'il lui manque 522 jours sur les 1 095 jours exigés. Le dossier ne permet pas de déterminer quelle méthode de calcul a été utilisée par le juge pour prendre sa décision.

     [2]Le « cadre fixé par le juge Thurlow » a pris le nom du juge Thurlow suite à sa décision dans l'arrêt Re Papadogiorgakis [1978] 2 C.F. 208 (1re inst.) dans lequel il a compté le temps que le requérant avait passé dans une université à l'étranger comme faisant partie de la période de résidence requise en vertu de l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

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