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Date : 20060119

Dossier : IMM-3229-05

Référence : 2006 CF 49

ENTRE :

UBAID IFTIKHAR

NADIA IFTIKHAR

NIDA IFTIKHAR

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

CONTEXTE

[1]                La seule question qui reste à trancher dans le présent contrôle judiciaire est de savoir si les demandeurs ont droit à des dépens et, si oui, de quel montant. Le défendeur a accepté, après qu'a été accordée l'autorisation, que soit accueilli le contrôle judiciaire sur le fond. Le contrôle judiciaire en cause portait sur la décision d'un agent d'immigration refusant d'accorder aux demandeurs le statut de résident permanent.   

[2]                Les demandeurs, Ubaid et Nadia Iftikhar Jalil, sont les enfants d'Iftikhar Shoaq Jalil et de Shahida Jalil (M. et Mme Jalil respectivement). Les parents sont entrés au Canada en 1996 et ont obtenu le statut de réfugié.

[3]                En 1997, chaque parent a déposé une demande de résidence permanente. À cause de longs retards dans le traitement des demandes, les parents ont entrepris une procédure de mandamus en 2004. Le défendeur a consenti à l'ordonnance de mandamus et a accepté de payer 1500 $ à titre de dépens. Les dépens n'ont pas été payés en raison d'un litige à propos des modalités du règlement.

[4]                Cependant, malgré ce litige, le défendeur a traité les demandes de résidence permanente. La demande de M. Jalil a été refusée pour des raisons de sécurité. La demande de Mme Jalil a été approuvée subséquemment.

[5]                Les enfants demandeurs se sont vu refuser le statut de résident permanent pour le motif que le « chef de famille » (M. Jalil) s'était vu refuser ce même statut. L'agent d'immigration a mentionné un alinéa de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) qui apparemment n'était pas pertinent dans l'affaire - l'alinéa suivant peut sans doute être pertinent, mais il n'est pas applicable. Les dispositions applicables sont les alinéas 42a) et b) :

42. Emportent, sauf pour le résident permanent ou une personne protégée, interdiction de territoire pour inadmissibilité familiale les faits suivants :

42. A foreign national, other than a protected person, is inadmissible on grounds of an inadmissible family member if

a) l'interdiction de territoire frappant tout membre de sa famille qui l'accompagne ou qui, dans les cas réglementaires, ne l'accompagne pas;

(a) their accompanying family member or, in prescribed circumstances, their non-accompanying family member is inadmissible; or

b) accompagner, pour un membre de sa famille, un interdit de territoire.

(b) they are an accompanying family member of an inadmissible person.

[6]                Il semble que l'agent d'immigration a oublié que Mme Jalil a vu sa propre demande de résidence permanente accueillie et que les demandes des enfants auraient pu être parrainées par elle.

[7]                Après que les enfants demandeurs eurent demandé une autorisation de contrôle judiciaire, le défendeur a indiqué qu'il ne contesterait pas la demande d'autorisation, mais qu'il se réservait le droit de déposer un dossier si l'autorisation était accordée.

[8]                Quand l'autorisation a été accordée, le défendeur a fait savoir qu'il ne contesterait pas le contrôle judiciaire. Les parties sont entrées en correspondance afin de régler l'affaire et ont tout résolu sauf la question de savoir si des dépens devaient être payés aux demandeurs.

[9]                Les demandeurs font les observations suivantes :

·                     l'ensemble du dossier du présent litige et des litiges qui y sont rattachés démontre que les retards constituaient une stratégie;

·                     la décision de l'agent d'immigration était si manifestement erronée que de contester le contrôle judiciaire équivalait à de la mauvaise foi;

·                     la manière dont a été mené le présent litige, principalement le temps pris pour reconnaître le bien-fondé des prétentions des demandeurs, était déraisonnable.

ANALYSE

[10]            Les demandeurs conviennent que l'article 22 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration et de protection des réfugiés ne permet pas l'adjudication de dépens, sauf si la Cour conclut à l'existence de raisons spéciales.

[11]            Les demandeurs reconnaissent qu'il n'y avait rien de fâcheux dans la façon dont a été menée le présent contrôle judiciaire. Il n'y a pas eu de procédure inutile, ni d' « exagération » du nombre d'affidavits et de documents, ni de contre-interrogatoires non pertinents. En fait, la manière dont a été mené le présent litige ne comportait rien d'inhabituel, sinon peut-être que le défendeur ne s'est pas opposé à la demande d'autorisation.   

[12]            Je ne vois rien dans la façon dont le défendeur a mené le présent litige qui permette de motiver l'adjudication de dépens.

[13]            Il n'existe aucune preuve que l'agent d'immigration a agi de mauvaise foi dans sa décision. L'agent a peut-être commis une erreur, mais ce n'est pas suffisant pour écarter le principe de base selon lequel les contrôles judiciaires en immigration « ne donnent pas lieu à des dépens » .

[14]            La Cour a examiné l'ensemble du dossier du litige concernant tous les membres de la famille, ce qui ne représente qu'un contrôle judiciaire accueilli et un contrôle judiciaire en instance. Rien là ne justifie une ordonnance de dépens puisqu'il n'existe aucune véritable preuve que l'avocate du défendeur ait adopté une stratégie de retards, même si une telle stratégie constituait un motif pour adjuger des dépens.

[15]            Les demandeurs prétendent que la décision de l'agent d'immigration était manifestement erronée et s'appuient sur la décision Qin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 1154, dans laquelle des dépens ont été adjugés. Même si l'erreur manifeste constituait un motif pour obtenir une ordonnance spéciale de dépens, les circonstances en l'espèce ne révèlent pas l'existence d'une telle erreur. L'erreur de l'agent d'immigration a été de mentionner une disposition législative sans doute incorrecte et/ou d'appliquer la mauvaise disposition à des faits qui n'étaient pas vraiment clairs. Si une erreur de droit manifeste constituait un motif pour adjuger des dépens, l'article 22 deviendrait inopérant.

[16]            Finalement, le fait que le défendeur ait attendu un mois après l'autorisation pour s'entendre avec les demandeurs sur le fond de l'affaire ne constitue guère une preuve de mauvaise foi dans la façon dont a été mené le présent litige.

[17]            Il y a une politique à l'origine de la règle suivant laquelle les contrôle judiciaires en immgration « ne donnent pas lieu à des dépens » . Les dépens ne doivent pas constituer un facteur de dissuasion pour les personnes engagées dans des litiges en immigration. La règle doit s'appliquer tant aux demandeurs qu'aux défendeurs. Si les prétentions des demandeurs étaient correctes, l'objectif même de la règle serait compromis.

[18]            Le seul fait que les demandeurs se soient opposés dans la présente question des dépens aurait permis, n'eût été de l'article 22, au défendeur de recevoir des dépens, puisque la position des demandeurs n'est pas fondée.   

[19]            En conséquence, la demande de contrôle judiciaire, vu le consentement, est accueillie sans frais pour les demandeurs. Les parties n'ont pas demandé qu'une ordonnance inclue les modalités du règlement (dans sa forme actuelle). Aucune telle ordonnance ne sera rendue.

[20]            Aucune question ne sera certifiée.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-3229-05

INTITULÉ :                                                    UBAID IFTIKHAR

                                                                        NADIA IFTIKHAR

                                                                        NIDA IFTIKHAR

                                                                        c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 17 JANVIER 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 19 JANVIER 2006

COMPARUTIONS :

Silvia Valdman

POUR LES DEMANDEURS

Tatiana Sandler

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Silvia Valdman

Avocate

Ottawa (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

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