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Date: 19990618


Dossier: IMM-4255-98

ENTRE


DARYL ALEX FERNANDEZ,


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

A.      INTRODUCTION

[1]      Voici les motifs écrits que j"ai promis de prononcer lorsque j"ai rejeté la présente demande de contrôle judiciaire à la fin de l"argumentation orale le 26 mai 1999.

[2]      Le demandeur Daryl Alex Fernandez a présenté une demande de contrôle judiciaire conformément à l"article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale , L.R.C. (1985), ch. F-7, dans sa forme modifiée, en vue de faire infirmer la décision par laquelle Michel Dupuis, agent du service extérieur (l"ASE) au haut-commissariat du Canada, à Islamabad, au Pakistan, avait refusé, le 17 juin 1998, la demande de résidence permanente qu"il avait présentée à titre de membre de la catégorie des demandeurs indépendants envisageant d"exercer la profession de secrétaire de direction.

B.      LES FAITS

[3]      Le demandeur est citoyen pakistanais. Le 30 avril 1997, par l"entremise d"un représentant, il a présenté une demande en vue de résider en permanence au Canada (la DRP). Dans la DRP, il déclarait occuper un poste de cadre et il désignait la profession de secrétaire de direction à titre de profession envisagée.

[4]      En ce qui concerne l"expérience professionnelle, la DRP du demandeur indique ce qui suit :

     a)      du mois de décembre 1990 jusqu"à ce jour, le demandeur a travaillé pour le consul général d"Italie, à Karachi, à titre de cadre;
     b)      du mois de janvier 1991 au mois de décembre 1994, le demandeur avait travaillé comme analyste-programmeur chez Bliss & Company, à Karachi;
     c)      du mois de février 1987 au mois de novembre 1990, le demandeur avait travaillé comme analyste-programmeur chez Creative Computer Services, à Karachi.

[5]      En ce qui concerne les études postsecondaires, la DRP indique ce qui suit :

     a)      en 1988, le demandeur a obtenu un baccalauréat ès sciences de l"université de Karachi;
     b)      en 1988, le demandeur a obtenu un diplôme de français de l"Alliance française de Karachi;
     c)      de 1987 à 1993, le demandeur a suivi une série de cours d"une durée de quatre mois à l"Institut d"administration des affaires, à Karachi, en vue de l"obtention de certificats dans les domaines suivants : principes de gestion, statistiques et mathématiques de gestion, analyse et conception de systèmes et communications d"entreprise;
     d)      en 1992, le demandeur a obtenu un certificat d"allemand de l"Institut Goethe, à Karachi.

[6]      À l"appui de son expérience professionnelle, le demandeur a joint à sa DRP :

     a)      une lettre datée du 20 juillet 1993 du consul général d"Italie à Karachi, laquelle se lit comme suit :
         [TRADUCTION]                 
             Nous attestons par la présente que M. Daryl Alex FERNANDES, qui est un employé local au consulat général, travaille comme cadre depuis le 1er décembre 1990.                 
             M. Fernandes a reçu une formation officielle en italien dans nos locaux; dans ce bureau, tous les membres du personnel doivent être en mesure de travailler dans tous les services du consulat général; M. Fernandes a travaillé à la section des visas ainsi qu"à la section des activités commerciales et des affaires culturelles.                 
     b)      une copie d"un contrat rédigé en italien (non traduit) daté du 27 décembre 1994, que le demandeur avait conclu avec le consulat général d"Italie;
     c)      une lettre datée du 11 novembre 1990 de Creative Computer Services, dont la partie pertinente se lit comme suit :
         [TRADUCTION]
             Lorsqu"il a joint l"entreprise, il a effectué avec succès un stage de formation à titre de " programmeur " du mois de février au mois d"août 1987 et il a ensuite travaillé au sein de l"entreprise à titre de " programmeur " et par la suite à titre d"" analyste-programmeur ".                 
[7]      Le demandeur a déjà sollicité à deux reprises la résidence permanente au Canada; la section des visas, à Islamabad, a rejeté la demande. Le premier refus date de l"année 1993; la profession envisagée était alors celle de programmeur, logiciel de base (définition no 2183-116 de la CCDP), d"analyste de l"information et de procédés administratifs (définition no 2183-110 de la CCDP), de programmeur en informatique commerciale et d"analyste en information (bureau) (définition no 4143-112 de la CCDP). Le second refus date de l"année 1994; le demandeur a alors été apprécié à l"égard des professions suivantes : programmeur d"ordinateur, secrétaire de direction, interprète et opérateur sur ordinateur (traitement de l"information).
[8]      Le 17 juin 1998, l"ASE a envoyé au demandeur une lettre de refus dont la partie pertinente se lit comme suit :
         [TRADUCTION]                 
         Vous avez été apprécié compte tenu des exigences relatives aux professions suivantes : secrétaire de direction (définition no 4111-111 de la CCDP).                 
             Le paragraphe 11(1) du Règlement sur l"immigration ne permet pas la délivrance d"un visa d"immigrant à l"immigrant qui n"obtient aucun point d"appréciation pour le facteur " expérience acquise dans une profession pour laquelle il possède les compétences voulues et qu"il est prêt à exercer au Canada ", à moins que l"immigrant n"ait un emploi réservé au Canada et ne possède une attestation écrite de l"employeur éventuel confirmant qu"il est disposé à engager une personne inexpérimentée pour occuper ce poste, et que l"agent des visas ne soit convaincu que l"intéressé accomplira le travail voulu sans avoir nécessairement de l"expérience. Selon votre demande, vous n"avez aucune formation officielle à titre de secrétaire de direction. Selon la CCDP, vous devez obtenir 7 points à l"égard de la préparation professionnelle, ce dont je ne puis constater l"existence dans vos documents. Le secrétaire de direction doit être en mesure d"exercer les fonctions de secrétaire de bureau ainsi que d"organiser des conférences et des réunions, de faire des recherches et de rassembler des renseignements et d"agir dans les affaires courantes se rapportant aux activités quotidiennes de l"organisation en l"absence de l"employeur.                 
[9]      Les notes inscrites dans le CAIPS de l"ASE renferment une inscription datée du 17 juin 1998, qui se lit comme suit :
         [TRADUCTION]                 
         J"ai examiné les notes susmentionnées et le dossier. Le demandeur n"a aucune formation officielle (professionnelle ou scolaire) à titre de secrétaire, il a déjà fait l"objet d"un refus à titre de programmeur, d"analyste de systèmes, d"opérateur sur ordinateur, de secrétaire de direction, d"interprète. Le demandeur a fait l"objet d"un refus.                 
C.      LES AFFIDAVITS DÉPOSÉS DANS LE CADRE DU CONTRÔLE JUDICIAIRE
     a)      L "affidavit du demandeur

[10]      Dans son affidavit, le demandeur soulève trois points. Premièrement, il déclare qu"il travaille au consulat d"Italie à titre de secrétaire de direction et que la lettre du consulat du 20 juillet 1993 renferme une erreur. Le poste désigné aurait dû être celui de " secrétaire de direction " plutôt que de " cadre "; il y avait une erreur typographique. Deuxièmement, le demandeur déclare que dans sa lettre de refus, l"ASE ne dit pas qu"il a fait l"objet d"un refus parce qu"il n"avait pas d"expérience à titre de secrétaire de direction. Le demandeur déclare que le refus semble être fondé sur le fait que l"ASE croyait qu"il n"avait pas présenté de preuves montrant qu"il avait une formation officielle à titre de secrétaire de direction. Il affirme avoir présenté des preuves montrant qu"il avait reçu une formation en gestion, en analyse et conception de systèmes et en communications d"entreprise à l"Institut d"administration des affaires, qu"il avait une formation linguistique en français et en allemand, ainsi qu"un baccalauréat ès sciences de l"université de Karachi. Le demandeur affirme que l"ASE n"a pas expliqué pourquoi cette formation n"était pas pertinente aux fins de l"exercice de fonctions de secrétaire de direction, qu"il n"a pas dit quel genre de formation aurait été pertinente et qu"il n"a pas tenu compte du fait que la formation en cours d"emploi qu"il avait reçue aurait pu être prise en considération. Troisièmement, le demandeur déclare qu"avant de recevoir la lettre de refus, il n"avait jamais reçu de lettres de l"ASE et que celui-ci n"avait jamais communiqué avec lui au sujet des documents qu"il avait produits. Le demandeur déclare qu"il a toujours été prêt à donner au sujet de son emploi ou de sa formation les renseignements que l"agent des visas aurait exigés.

     b)      L "affidavit déposé en réponse par l"ASE

[11]      Dans l"affidavit qu"il a déposé en réponse, l"ASE soulève lui aussi trois points : premièrement, il déclare avoir demandé à un collègue de travail qui connaissait l"italien, au haut-commissariat du Canada, quelles fonctions étaient mentionnées dans le contrat non traduit du 27 décembre 1994. L"ASE déclare que, selon le contrat, le demandeur était " adjoint de direction " et que le contrat confirme que le demandeur n"était pas secrétaire de direction, mais qu"il était plutôt " secrétaire-dactylographe "; son travail y est décrit comme étant du travail général de bureau se rapprochant davantage de l"emploi d"un commis de bureau. Deuxièmement, l"ASE rejette l"opinion du demandeur lorsque celui-ci déclare avoir fait des études utiles aux fins de l"exercice des fonctions de secrétaire de direction. L"ASE déclare que le demandeur n"a aucune formation officielle (qu"elle ait été reçue dans un collège, dans une université ou dans une école technique ou encore une formation professionnelle) et que son contrat ne mentionne pas qu"il a reçu une formation en cours d"emploi. Troisièmement, sur le plan de l"expérience, l"ASE déclare que le demandeur n"a pas démontré qu"il avait de l"expérience à titre de secrétaire de direction et que le demandeur n"a pas fourni suffisamment d"éléments de preuve pour démontrer qu"il a la PPS nécessaire pour être secrétaire de direction.

D.      ANALYSE
     a)      Question préliminaire " les affidavits

[12]      Les auteurs des affidavits n"ont pas été contre-interrogés au sujet de leurs affidavits respectifs. Je n"ai pas tenu compte d"une partie du paragraphe 4 de l"affidavit du demandeur dans lequel il est mentionné que les références données par le consulat d"Italie étaient erronées. L"ASE n"était pas au courant de ce fait et je ne puis en tenir compte. Voir Lemiecha et al. c. MEI (1993), 72 F.T.R. 49. Deuxièmement, je n"ai pas tenu compte des parties de l"affidavit de l"ASE dans lesquelles ce dernier traite des renseignements reçus au sujet du contenu du contrat, et ce, parce que l"on n"a pas établi à quel moment l"ASE a obtenu ces renseignements. Il aurait pu les obtenir avant ou après avoir envoyé la lettre de refus. Il incombait au demandeur d"établir que l"ASE avait obtenu ces renseignements avant d"envoyer la lettre de refus. Il ne l"a pas fait.

     b)      Obligation de clarifier une demande défectueuse

[13]      L"agent des visas n"est pas tenu de clarifier une demande défectueuse. Voir Dhillon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), 5 mai 1998, IMM-3098-07, juge Rothstein (tel était alors son titre); Tahir c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), 22 septembre 1998, IMM-4956-97, juge Tremblay-Lamer.

[14]      La personne qui présente une demande de résidence permanente est tenue de produire tous les renseignements pertinents qui peuvent l"aider. Voir Hajariwala c. Canada (Ministre de l"Emploi et de l"Immigration), [1989] 2 C.F. 79, juge en chef adjoint Jerome, et Wai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), 24 octobre 1996, IMM-3418-95, juge suppléant Heald.

[15]      À mon avis, cette demande de résidence permanente n"était absolument pas acceptable. La profession envisagée était celle de secrétaire de direction; pourtant, dans sa demande, le demandeur déclare qu"à l"heure actuelle, il occupe un poste de cadre et qu"auparavant, il travaillait comme analyste-programmeur. Il a produit à l"appui une lettre de 1993 du consulat d"Italie qui attestait qu"il était cadre, sans énoncer ses fonctions ou le genre de formation en cours d"emploi qu"il avait reçue. La formation officielle en tant que telle n"a rien à voir avec les exigences relatives à la préparation professionnelle spécifique; aucun renseignement n"est donné à ce sujet en ce qui concerne la profession de secrétaire de direction.

     c)      La question de la préparation professionnelle spécifique (la PPS)

[16]      Le demandeur affirme que l"ASE s"est trompé dans ses calculs, en ce qui concerne l"exigence relative à la formation officielle de secrétaire de direction. Dans son affidavit, l"ASE a déclaré que, selon la CCDP, une PPS de sept points était nécessaire dans le cas d"un secrétaire de direction, ce qui représente entre deux et quatre années de formation. L"avocat du demandeur a ensuite attiré mon attention sur la mention qui est faite à l"égard du facteur " expérience " à l"annexe du Règlement :

         plus de six mois, sans dépasser douze mois, 7 points.                 
[17]      Le demandeur assimilait une PPS de 7 à sept points d"appréciation. Il se trompait. Un indicateur de préparation professionnelle spécifique est attribué à chaque profession mentionnée dans la CCDP. Dans le cas du secrétaire de direction, l"indicateur est de 7. Il faut donc se reporter à l"appendice B de la CCDP pour déterminer la mesure dans laquelle l"indicateur se rapporte à la formation professionnelle, à la formation en apprentissage, à la formation dans l"usine ou à la formation en cours d"emploi. L"appendice B de la CCDP prévoit qu"une PPS de 7 est attribuée à l"expérience d"une durée de plus de deux ans et d"au plus quatre ans.
[18]      Ce n"est qu"une fois que la durée de la formation est déterminée qu"il est possible de se reporter à l"annexe pour attribuer des points. Bref, la PPS est le facteur qui détermine la durée de la formation nécessaire permettant de calculer le nombre de points d"appréciation. Le demandeur a confondu la PPS et les points d"appréciation.
E.      CONCLUSION
[19]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
                         " François Lemieux "
                     ___________________________
                         JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
LE 18 JUIN 1999
Traduction certifiée conforme
L. Parenteau, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :      IMM-4255-98

    

INTITULÉ DE LA CAUSE :      DARYL ALEX FERNANDEZ

     ET
     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :      LE 26 MAI 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE du juge Lemieux en date du 18 juin 1999

ONT COMPARU :

Harvey Savage          POUR LE DEMANDEUR

Marissa Beata Bielski          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Harvey Savage          POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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