Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                                                                                                                                               

Date : 20000913

Dossier : IMM-4825-99

OTTAWA (ONTARIO), le 13 septembre 2000

EN PRÉSENCE DE L'HONORABLE DOLORES M. HANSEN

                                                                       

ENTRE :                                                                                                        

                                           RATNANATHAN KANDASAMY                                                                               

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                          ORDONNANCE

VU la demande de contrôle judiciaire, datée du 2 septembre 1999, de la décision dans laquelle la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté l'appel que le demandeur avait formé contre la mesure d'expulsion dont il faisait l'objet;

ET VU les documents et les observations des parties :

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

          « Dolores M. Hansen »          

J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


                                                                                                                                               

Date : 20000913

Dossier : IMM-4825-99

                                                                       

ENTRE :                                                                                                        

                                           RATNANATHAN KANDASAMY

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                            MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HANSEN

[1]                Le 6 avril 1998, une mesure d'expulsion a été prise contre le demandeur, un résident permanent du Canada, en raison des condamnations au criminel dont il avait fait l'objet. Le 3 août 1999, la Section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SAI) a rejeté l'appel que le demandeur avait formé contre la mesure d'expulsion. La question litigieuse que soulève la présente demande de contrôle judiciaire est de savoir si la SAI a violé les principes de la justice naturelle lorsqu'elle a refusé d'accorder un ajournement au demandeur et entendu l'appel en l'absence de l'avocat de ce dernier.


[2]                Lorsqu'il a comparu à l'audience de mise au rôle en octobre 1998 pour fixer la date d'audition de son appel, le demandeur a informé la Cour que l'appel qu'il avait formé contre les condamnations au criminel serait entendu le 15 décembre 1998. En conséquence, la tenue de l'audience de mise au rôle a été repoussée au 8 janvier 1999. Lorsque le demandeur a comparu à l'audition de mise au rôle à cette date-là, l'appel au criminel n'avait toujours pas été entendu et il n'était pas clair quand il le serait. En outre, on a abordé la question de savoir si le demandeur avait retenu les services d'un avocat pour le représenter devant la SAI. On a fixé définitivement la date d'audition de l'appel au 30 avril 1999. Pour des raisons administratives, l'affaire a fait l'objet d'une nouvelle audience de mise au rôle le 15 avril 1999. Un associé de l'avocat du demandeur au criminel a comparu ce jour-là. Il a dit qu'une date d'audition de l'appel au criminel n'avait toujours pas été fixée, et, conformément aux directives de l'avocat du demandeur, il a demandé que l'affaire soit ajournée jusqu'en novembre 1999. Le président de l'audience a dit qu'un appel en instance dans une affaire criminelle ne constituait pas un motif valable pour retarder indûment l'audition d'une affaire devant la SAI. Une nouvelle date d'audition de l'appel a été définitivement fixée au 3 août 1999.


[3]                À un certain moment (on ignore exactement quand), l'avocat du demandeur au criminel a informé ce dernier qu'il n'était pas en mesure de le représenter le 3 août 1999. Il lui a dit de consulter un autre avocat, M. LeRoy, le 22 juillet 1999. Monsieur LeRoy a informé le demandeur qu'il n'était pas disponible le 3 août 1999, mais qu'il pourrait le représenter s'il obtenait une nouvelle date. Le 26 juillet 1999, M. LeRoy a fait parvenir par télécopieur une demande d'ajournement à la SAI dans laquelle il se disait incapable de représenter le demandeur le 3 août 1999 et proposait un certain nombre de dates auxquelles il serait disponible. Le 30 juillet 1999, la SAI a rejeté sa demande pour trois raisons : la date avait été définitivement fixée, l'appelant avait retenu les services d'un avocat au dernier moment, ce qui était inacceptable, et il s'agissait d'un appel datant de 1998.

[4]                Monsieur LeRoy a comparu devant la SAI le 3 août 1999 et il a encore une fois demandé un ajournement. Il a dit qu'il avait rencontré le demandeur pour la première fois le 22 juillet 1999 et qu'en raison d'engagements qu'il avait déjà pris, il lui était impossible d'assister à l'audition. Le président de l'audience a accepté de considérer les observations de M. LeRoy comme une autre demande d'ajournement, mais il a dit qu'à son avis, aucune raison ne justifiait l'ajournement, et il a exposé de nouveau les motifs de refus que contenait la lettre du 30 juillet 1999. Monsieur LeRoy s'est retiré de l'instance et l'audience a été entreprise en l'absence de l'avocat du demandeur.


[5]                Le demandeur fait valoir que bien que le président de l'audience eût accepté d'entendre la nouvelle demande en ajournement, il n'a pas, de fait, entendu celle-ci, se contentant plutôt de se fonder sur les motifs de refus qui avaient été exposés la semaine auparavant. Il a en outre soutenu qu'à tout le moins, la SAI aurait dû clarifier jusqu'à quel point il était responsable du fait qu'il n'était pas représenté. Il a avancé que son avocat « lui avait fait faux bond » . Il a cité la décision Shirwa c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) [1994] 2 C.F. 51, pour appuyer son argument que lorsque l'omission de l'avocat d'assister à l'audition n'était pas liée à une quelconque omission du demandeur, le tribunal ne pouvait pas punir le demandeur en le privant de son droit à un avocat.

[6]                Le défendeur soutient que la SAI a l'obligation de trancher les appels de la façon la plus raisonnablement rapide dans les circonstances. Citant les règles 13 et 19 de la SAI, le défendeur fait également valoir qu'en examinant la question de savoir si elle doit accorder un ajournement, la SAI peut tenir compte de facteurs tels le temps qui a déjà été consacré à la préparation de l'audience, la question de savoir si un ajournement entraverait l'instance de façon déraisonnable, les efforts que les parties ont déployés en vue de régler rapidement le litige, la question de savoir si la demande d'ajournement a été présentée à la première occasion, et celle de savoir si la date d'audition a été fixée de façon définitive.

[7]                Comme l'a dit le juge Décary dans l'arrêt Siloch c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) 151 N.R. 76, à la page 78 :

Il est reconnu qu'en l'absence de règles précises établies par loi ou règlement, les tribunaux administratifs fixent leur propre procédure, et que l'ajournement d'une procédure relève de leur pouvoir discrétionnaire, à la condition qu'ils respectent les règles de l'équité et, dans l'exercice de fonctions judiciaires ou quasi judiciaires, à condition qu'ils respectent les règles de justice naturelle. (Prassad c. Canada (MEI), [1989] 1 R.C.S. 560 à la p. 569, juge Sopinka).


[8]                En ce qui concerne les questions qui relèvent de la Section d'appel de l'immigration, la règle 13(4) des Règles de la SAI énumère les facteurs dont la SAI peut tenir compte en exerçant son pouvoir discrétionnaire à l'égard d'une demande d'ajournement. Bien que la SAI ne soit pas tenu de considérer l'ensemble des facteurs énumérés à la règle 13(4) des Règles lorsqu'elle exerce son pouvoir discrétionnaire à l'égard d'une demande d'ajournement, il incombe au tribunal d'examiner tous les faits pertinents concernant la demande avant de rendre sa décision.

[9]                En outre, comme l'a dit le juge Cullen dans Gargano c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 85 F.T.R. 49, à la page 52, au sujet de cas comme l'espèce :

Le contenu des règles de justice naturelle n'est pas immuable et peut varier en fonction de la gravité des conséquences de la décision à prendre. Les conséquences découlant d'une décision négative dans un appel d'une ordonnance de renvoi sont très graves, notamment dans le cas qui nous occupe; en conséquence, les normes de protection maximales devraient s'appliquer.

[10]            Selon l'argument du demandeur, il incomberait au tribunal une obligation de chercher à connaître les motifs justifiant l'ajournement. Je ne suis pas d'accord. Le tribunal a l'obligation de tenir compte de tous les facteurs pertinents, mais il incombe toujours au demandeur de décrire les faits sur lesquels se fonde la demande.


[11]            En l'espèce, cependant, aucun fait n'étaye l'allégation du demandeur, qui a avancé que son avocat « lui avait fait faux bond » . Aucune observation à cet effet n'a été présentée le 3 août 1999. Le dossier ne mentionne pas quand le demandeur a été avisé par son avocat au criminel que ce dernier ne serait pas en mesure de le représenter le 3 août 1999. L'examen de la question de savoir si le rejet de la demande d'ajournement a été préjudiciable au demandeur dépend de celui de la question de savoir si, comme on l'a dit dans Yung c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) 167 N.R. 71, à la page 74, « ... la demande d'ajournement n'est pas présentée dans une intention dilatoire, ou n'est pas due à un manque de diligence ... » .

[12]            En ce qui concerne le délai qui s'est écoulé depuis la date de la première audience de mise au rôle jusqu'à celle des observations du 3 août 1999 de l'avocat, la SAI pouvait valablement conclure que le demandeur avait attendu au tout dernier moment pour retenir les services d'un avocat. Vu les circonstances de l'espèce, la SAI a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon raisonnable en rejetant la demande d'ajournement.

[13]            Le demandeur fait également valoir que comme le principal facteur du refus de lui accorder l'ajournement était le fait que la date d'audition avait été définitivement fixée, ce qui en soi est discutable, la SAI a commis une erreur lorsqu'elle a rejeté sa demande d'ajournement. À mon avis, cela ne permet pas de trancher la question. Peu importe les antécédents procéduraux de l'affaire, le tribunal doit toujours tenir compte de toutes les circonstances pertinentes concernant la demande d'ajournement à l'époque où celle-ci est présentée.


[14]            À l'audition de la demande de contrôle judiciaire, le demandeur n'a pas fait d'observations concernant le deuxième moyen qu'il a soulevé dans les documents qu'il a produits, soit la question de savoir si le tribunal a commis une erreur de droit lorsqu'il a omis d'apprécier l'ensemble de la preuve. Après avoir examiné la transcription de l'audition dans laquelle les motifs de décision ont été exposés, je ne suis pas convaincue que la SAI a commis une quelconque erreur susceptible de contrôle. Les observations du demandeur à cet égard ne sont pas convaincantes.

[15]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[16]            Ni l'une ni l'autre partie n'a proposé de question à certifier.

                                                                           « Dolores M. Hansen »           

                                                                                               J.C.F.C.                     

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL. B.


COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                  IMM-4825-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 RATNANATHAN KANDASAMY c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                     TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                   LE 14 MARS 2000

MOTIFS D'ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MADAME LE JUGE HANSEN

EN DATE DU :                                     13 SEPTEMBRE 2000

ONT COMPARU :

LORNE WALDMAN                                                    POUR LE DEMANDEUR

CHERYL D. MITCHELL                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

LORNE WALDMAN                                                    POUR LE DEMANDEUR

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                           POUR LE DÉFENDEUR

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.