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Date : 20200724


Dossier : IMM-6293-19

Référence : 2020 CF 785

[traduction française certifiée, non révisée]

Montréal (Québec), le 24 juillet 2020

En présence de madame la juge St-Louis

ENTRE :

KIRPAL SINGH BOPARAI

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Monsieur Kirpal Singh Boparai sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel de l’immigration (la SAI), datée du 3 octobre 2019, par laquelle cette dernière a rejeté l’appel interjeté à l’égard de la décision rendue par la Section de l’immigration (la SI) du Haut-commissariat du Canada en Inde le 14 janvier 2019.

[2]  La SI n’était pas convaincue que Mme Radwinder Kaur n’était pas interdite de territoire et qu’elle remplissait les critères de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC  2001, c 27 [la Loi sur l’immigration] et, par conséquent, a rejeté sa demande de visa de résident permanent dans la catégorie du regroupement familial, en tant qu’épouse de M. Boparai. La SI a invoqué des dispositions législatives et réglementaires, notamment le paragraphe 4(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002–227 [le Règlement sur l’immigration]. En dernière analyse, elle n’était pas convaincue que le mariage de Mme Kaur avec M. Boparai était authentique ou qu’il ne visait pas principalement l’acquisition de la résidence permanente au Canada et, par conséquent, elle n’a pas considéré Mme Kaur comme appartenant à la catégorie du regroupement familial.

[3]  En appel, la SAI a conclu que M. Boparai ne s’était pas acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que son mariage avec Mme Kaur était authentique et, par conséquent, a conclu que cette dernière était exclue de la catégorie du regroupement familial.

[4]  Pour les motifs énoncés ci-après, la demande de contrôle judiciaire de la décision de la SAI sera rejetée.

II.  Contexte

[5]  Au cours de l’année 2016, M. Boparai, un citoyen canadien, a été présenté à Mme Kaur, une citoyenne indienne, par un ami commun. M. Boparai était alors encore avec la femme qu’il avait épousée 26 ans plus tôt, bien que leur divorce ait été prononcé en juillet 2017. M. Boparai et sa première épouse ont eu trois enfants ensemble.

[6]  M. Boparai est arrivé en Inde le 21 septembre 2017, où il a rencontré Mme Kaur en personne, et ils se sont mariés le 22 septembre 2017. M. Boparai a présenté une demande en vue de parrainer Mme Kaur le 8 février 2018, tandis que ses deux enfants et elle ont présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie du regroupement familial.

[7]  La SI a demandé une entrevue, étant donné que leur demande suscitait des doutes, et Mme Kaur a été interrogée par un agent des visas de la SI le 8 janvier 2019. Les notes de l’agent figurent aux pages 99 à 110 du dossier certifié du tribunal (DCT). Le 14 janvier 2019, la demande de résidence permanente au Canada de Mme Kaur a été rejetée.

[8]  Conformément au paragraphe 63(1) de la Loi sur l’immigration, M. Boparai a fait appel de la décision de la SI devant la SAI.

III.  La décision de la SAI

[9]  Le 13 septembre 2019, la SAI a tenu une audience à laquelle M. Boparai et Mme Kaur ont tous deux témoigné en pendjabi en recourant aux services d’un interprète. M. Boparai et Mme Kaur ont été interrogés par leur conseil, qui connaissait bien l’anglais et le pendjabi (dossier du demandeur à la page 30), et contre-interrogés par le conseil du ministre, tandis que le président de l’audience est intervenu et a posé des questions.

[10]  La SAI a rejeté l’appel. Elle a soulevé des préoccupations quant à la genèse de la relation, quant à la connaissance que M. Boparai et Mme Kaur avaient l’un de l’autre, et quant aux enfants de Mme Kaur en Inde.

[11]  En ce qui concerne la genèse de la relation, la SAI a soulevé des préoccupations relativement à la discussion relative au mariage, à la demande en mariage ou aux pourparlers s’y rapportant et aux contacts qu’avait eus M. Boparai avec la famille et les anciens beaux‑parents de Mme Kaur. De plus, le mariage a été caché à certains membres de la famille. En dernière analyse, la SAI a conclu que les incohérences généralisées et l’absence de témoignage crédible quant à des éléments clés relatifs à la genèse de la relation n’étaient pas révélateurs d’un mariage prévu pour durer.

[12]  Plus particulièrement, la SAI a relevé, entre autres éléments, que : 1) en dépit du fait que la demande de parrainage mentionnait qu’il s’agissait d’un mariage d’amour, il ressortait des témoignages que c’était un mariage arrangé; 2) M. Boparai n’avait pu expliquer clairement d’où l’intermédiaire connaissait Mme Kaur; 3) M. Boparai n’avait pas parlé à la famille de Mme Kaur avant d’arriver en Inde pour le mariage; 4) Mme Kaur était évasive et s’était contredite sur le moment où ses parents avaient parlé pour la première fois à M. Boparai et sur le fait que celui-ci était divorcé; 5) ni l’un ni l’autre n’avait pu dire quand avait eu lieu la demande en mariage ou quand avait été prise la décision de se marier, et l’information figurant dans l’affidavit des parents de Mme Kaur contredisait ces deux versions; 6) il y avait des contradictions quant au moment où M. Boparai avait rencontré Mme Kaur, quant à l’endroit où ils s’étaient rencontrés en Inde et quant aux personnes qui avaient assisté à leur mariage; 7) Mme Kaur habitait chez ses anciens beaux-parents, mais avait caché le mariage à son beau-père.

[13]  Pour ce qui est de l’absence de connaissance l’un de l’autre, la SAI a soulevé des préoccupations quant au fait que M. Boparai avait divorcé bien après que s’amorcèrent les pourparlers avec Mme Kaur, quant à la connaissance de leur âge respectif, quant au fait que Mme Kaur ne savait pas quand et comment M. Boparai était venu au Canada, et quant à leur manque de communication. Ni l’un ni l’autre n’a pu définir ce qui lui plaisait chez l’autre ni ce qui avait contribué à le convaincre qu’il s’agissait d’un bon mariage. La SAI a conclu que le manque de communication et l’absence de version commune des événements entre M. Boparai et Mme Kaur ne portaient pas à croire que le mariage était authentique.

[14]  Au sujet des enfants de Mme Kaur en Inde, la SAI s’est dite préoccupée quant au fait que ceux-ci n’avaient pas été informés du mariage à l’avance, quant à l’incidence de la demande sur ceux-ci étant donné qu’ils sont très attachés à leurs grands-parents et quant aux contacts limités que M. Boparai avait eus avec eux. Cet élément est particulièrement déconcertant étant donné que M. Boparai voulait assurer une présence paternelle positive dans la vie des enfants de Mme Kaur. La SAI a conclu que la situation n’était pas révélatrice d’un mariage authentique.

[15]  La SAI a souligné qu’il y avait des facteurs étayant l’authenticité du mariage, notamment le fait que M. Boparai était retourné en Inde depuis le mariage, des preuves de l’existence d’une communication continue et d’un soutien financier, et des lettres de soutien de parents et d’amis attestant l’authenticité du mariage. Toutefois, compte tenu des incohérences importantes et irréconciliables et des lacunes dans la preuve, la SAI a conclu que les autres éléments de preuve relatifs à l’authenticité n’étaient pas convaincants. La SAI a établi que le mariage n’était pas authentique, et que Mme Kaur n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial.

IV.  Questions en litige

[16]  M. Boparai a présenté à la Cour un affidavit de M. Sarb Sandhu, interprète accrédité, dans lequel celui-ci donnait son avis d’expert sur la qualité de la traduction devant la SAI et qu’il avait rédigé à partir de l’enregistrement audio sur CD de l’audience, avant que la transcription officielle ne soit transmise. M. Sandhu se prononce sur les erreurs et les fautes de traduction qui auraient été commises pendant l’audience devant la SAI et sur le fait que ces erreurs alléguées correspondent à un manquement à l’équité procédurale et à la justice naturelle. M. Boparai a aussi produit l’affidavit de Mme Avneet Sandhar, présentant entre autres un affidavit conjoint exécuté par les parents de Mme Kaur, dont disposait la SAI. Ni M. Boparai ni Mme Kaur n’ont produit d’affidavit devant la Cour.

[17]  À l’audience, j’ai invoqué l’alinéa 10(2)d) des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22 [les Règles des cours fédérales en matière d’immigration], selon lequel une demande d’autorisation comporte notamment un ou plusieurs affidavits établissant les faits invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande. Par conséquent, j’ai contesté la recevabilité de l’affidavit de M. Sandhu étant donné que le document représente son avis d’expert et ne se limite pas aux faits (Conka c Canada (Citoyenneté et Immigration Canada), 2018 CF 532 par. 13; Bakery c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1111 au par.  5). M. Boparai a reconnu que l’opinion et l’argumentation de M. Sandhu n’étaient pas recevables.

[18]  Dans son mémoire écrit, M. Boparai a soulevé quatre arguments qui peuvent être regroupés en deux questions. La Cour doit par conséquent établir si la SAI a manqué à l’équité procédurale et si la décision que celle-ci a rendue était raisonnable.

[19]  M. Boparai a soulevé de nouveaux arguments supplémentaires à l’audience, mais la Cour a fait savoir qu’elle ne les aborderait pas.

V.  La SAI a-t-elle manqué à l’équité procédurale?

[20]  M. Boparai n’a pas expressément énoncé la norme de contrôle qui se rapporte à l’équité procédurale. Il soutient devant la Cour que la SAI a commis une erreur en lui refusant le droit à une audience équitable conformément aux principes de la justice naturelle en le privant du droit à un interprète compétent. Dans son mémoire, M. Boparai soutient que son conseil a soulevé des objections à l’audience relativement à des lacunes dans l’interprétation. À l’audience, il confirme que l’objection que son conseil a soulevée devant la SAI se rapportait à l’incident décrit au paragraphe 12 de son mémoire.

[21]  Citant Xie c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1990), 10 Imm LR (2d) 284 (CAF), M. Boparai affirme que l’arbitre d’une audience a l’obligation de s’assurer de la compétence de l’interprète.

[22]  Le ministre affirme que la norme de contrôle qui s’applique quant au caractère adéquat de l’interprétation linguistique, qui relève de l’équité procédurale, est celle de la décision correcte (Sun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 477 aux par. 26 et 27; Nekoie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 363 au par. 19).

[23]  Le ministre souligne que, pendant l’audience, il a été demandé à M. Boparai et Mme Kaur s’ils comprenaient l’interprète, et que les deux avaient répondu qu’ils le comprenaient (DCT aux pages 457 et 460). Au sujet de l’objection quant à l’interprétation soulevée par le conseil de M. Boparai devant la SAI, le ministre rétorque que la question et la réponse ont été clarifiées par la suite, et que le conseil de M. Boparai avait plus tard fait savoir que la traduction de cette partie n’était plus une préoccupation pour lui.

[24]  Le ministre soutient qu’il n’y a pas de preuve objective démontrant que l’interprétation présentait des lacunes et que M. Boparai se fonde sur l’affidavit d’un interprète qui n’était pas présent à l’audience. De plus, les erreurs alléguées par M. Boparai, selon le ministre, ne sont pas importantes, et n’abordaient pas ou ne contestaient pas la conclusion de contradictions entre les éléments de preuve documentaire et le témoignage de vive voix rendue par la SAI. Il soutient également qu’aucune erreur concrète ou préoccupation quant à la qualité de l’interprétation n’ont été signalées, contrairement au critère énoncé dans Mohammadian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2001 CAF 191 au par. 19 [Mohammadian] (voir Sohal c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2011 CF 1175 aux par. 17 à 24; Shi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1059 au par. 28).

[25]  La Cour d’appel fédérale a statué que « [l]a cour qui apprécie un argument relatif à l’équité procédurale doit se demander si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances » et que « [t]enter de caser la question de l’équité procédurale dans une analyse relative à la norme de contrôle applicable est […] un exercice non rentable » (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au par. 55; Demitor c Westcoast Energy Inc. (Spectra Energy Transmission), 2019 CAF 114 au par. 26; Lessard-Gauvin c Canada (Procureur général), 2019 CAF 233).

[26]  Le ministre a résumé en ces termes le droit relatif au caractère adéquat des services d’interprétation : a) L’interprétation doit être continue, fidèle, compétente, impartiale et concomitante ; b) Il n’est pas nécessaire de prouver l’existence d’un préjudice réel pour obtenir une réparation; c) L’interprétation doit être adéquate, mais n’a pas à être parfaite. Le principe le plus important est la compréhension linguistique; d) Il y a renonciation au droit lorsque la qualité de l’interprétation n’est pas contestée par le demandeur à la première occasion; e) La question de savoir s’il est raisonnable de s’attendre à ce qu’une plainte soit présentée à l’égard de la mauvaise qualité de l’interprétation est une question de fait; f) Si l’interprète a de la difficulté à parler la langue du demandeur, la question doit être soulevée à la première occasion (Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1161 au par. 3; Mowloughi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 662 au par. 18; Mohammadian au par. 19).

[27]  M. Boparai affirme que le conseil a soulevé des objections quant à la qualité de l’interprétation devant la SAI et souligne un passage à l’appui de son affirmation. Ce passage se rapporte à l’affirmation de la SAI selon laquelle [traduction« il m’est difficile de savoir si l’interprétation est correcte ou ne l’est pas, et je ne peux pas me fier à ce que vous dites » figurant à la page 514 du DCT.

[28]  Il ressort toutefois d’une lecture plus approfondie qu’en fait la SAI a invité le conseil de M. Boparai à demander à l’interprète de répéter lorsque ce dernier fournissait une interprétation qu’il mettait en doute, que le conseil de M. Boparai avait affirmé que ce n’était pas un problème, qu’il avait répété la question, expliqué le problème et confirmé, finalement, que cela ne changeait rien, que c’était correct et qu’il n’avait pas de préoccupation à ce sujet (DCT aux pages 514 et 515).

[29]  Le demandeur a droit à une traduction adéquate, et non pas parfaite, et le principe le plus important est la compréhension linguistique, et il y a renonciation au droit lorsque la qualité de l’interprétation n’est pas contestée à la première occasion. Il n’y a pas d’élément de preuve que le conseil qui représentait M. Boparai devant la SAI, qui connaissait bien le pendjabi et l’anglais, avait soulevé la moindre question concernant la qualité de l’interprétation. Par conséquent, M. Boparai a renoncé à son droit (Mohammadian aux par. 12 et 19 ; Mah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 853 par. 11, 13 et 14, 19 et 20).

[30]  M. Boparai n’a pas démontré que la SAI avait manqué à l’équité procédurale.

[31]   M. Boparai soutient également que la SAI a commis une erreur de droit en reproduisant incorrectement les témoignages et que l’enregistrement du CD du SEA avait été vérifié par un interprète accrédité pour relever des exemples d’erreurs d’interprétation.

[32]  Même si j’acceptais l’affidavit de l’interprète comme étant recevable, M. Boparai n’a pas démontré que les préoccupations qu’il avait soulevées à cet égard étaient importantes et avaient une incidence sur la décision.

VI.  La décision est-elle raisonnable?

[33]  M. Boparai soutient que la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision raisonnable, citant Roncarelli c Duplessis, [1959] RCS 121 et Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, et prétend que la décision n’est pas raisonnable.

[34]  M. Boparai affirme que la SAI a commis une erreur en reproduisant incorrectement son témoignage quand elle a souligné qu’il avait affirmé avoir rencontré les parents de Mme Kaur le 30 septembre 2017 à une occasion, le 22 septembre 2017 à une autre et, à d’autres, le 21 septembre 2017. Il soutient qu’il a fait savoir à trois occasions pendant l’audience qu’il avait donné la date exacte du 21 septembre 2017. De plus, il prétend que la SAI a également commis une erreur en concluant que Mme Kaur était évasive et n’était pas crédible quant à la question de savoir si ses parents savaient qu’il était divorcé parce qu’elle avait répondu qu’elle avait dit à ses parents [traduction« il n’est pas encore divorcé, mais il n’est pas heureux dans sa vie ».

[35]  De plus, M. Boparai prétend que la SAI a commis une erreur en rejetant l’affidavit de ses parents, lequel portait directement sur l’authenticité de sa relation. Puisqu’il s’agissait d’un mariage arrangé, le demandeur estime que le point de vue de ses parents revêtait beaucoup d’importance.

[36]  Enfin, M. Boparai soutient que la SAI, dans l’ensemble, a rejeté déraisonnablement son appel parce que les erreurs d’interprétation mentionnées précédemment, la reproduction des témoignages, et l’omission de formuler des commentaires sur l’affidavit détaillé, portent un coup fatal à la décision. Soulignant les contradictions entre la connaissance de l’âge respectif du conjoint, il soutient que des éléments de preuve documentaire relatifs à l’âge avaient déjà été produits. En ce qui concerne les raisons pour lesquelles les enfants de Mme Kaur n’avaient pas assisté au mariage, il a prétendu que les parents de Mme Kaur avaient juré dans leur affidavit que leur présence aurait présenté pour eux une difficulté inutile en raison de la stigmatisation sociale.

[37]  Le ministre affirme que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable et que la décision de la SAI était raisonnable (Shakeel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 497 aux par. 17 et 18; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Mbandjock, 2020 CF 421 aux par. 2 à 5, et 22; Toor c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1562 au par. 7). Le ministre ajoute que les évaluations de la crédibilité reposent sur des faits et que la Cour doit faire preuve de déférence à leur égard (Pitamber c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 249 au par. 16).

[38]  Le ministre soutient que la SAI a appliqué le droit comme il se devait et a souligné les nombreuses contradictions et incohérences avec raison. Il ajoute que M. Boparai et Mme Kaur ont été incapables de témoigner au sujet d’éléments cruciaux, comme leur âge respectif au moment de leur mariage. L’ancien beau-père de Mme Kaur n’était pas au courant de la nouvelle union de celle‑ci, en dépit du fait qu’elle habite avec ses anciens beaux‑parents, et ses enfants n’ont pas assisté au mariage. Mme Kaur s’est contredite quant au moment où M. Boparai a rencontré ses parents.

[39]  Selon Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], la norme de contrôle applicable est présumée être celle de la décision raisonnable, et rien ne réfute cette présomption en l’espèce (au par. 10). La norme de la décision raisonnable est une norme unique qui s’adapte au contexte (au par. 89). La cour de révision s’intéresse à la légalité de la décision administrative et doit veiller à ce que la décision soit justifiée, intelligible et transparente pour l’individu qui en fait l’objet (au par. 95). Elle n’a pas pour tâche d’apprécier à nouveau la preuve (au par. 98). La décision doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et tenir compte des contraintes juridiques qui ont une incidence sur elle.

[40]  M. Boparai n’a pas établi que les contradictions et les incohérences soulevées par la SAI ne sont pas étayées par le dossier, et je suis convaincue qu’elles sont suffisantes pour soutenir la conclusion de la SAI. Plus particulièrement, la Cour souligne que, contrairement aux observations formulées par M. Boparai, la SAI a bel et bien pris en compte l’affidavit des parents de Mme Kaur et a souligné que le document contredisait ses déclarations et celles de Mme Kaur. Essentiellement, M. Boparai demande à la Cour de soupeser à nouveau les éléments de preuve, et ce n’est pas son rôle.

VII.  Conclusion

[41]  La décision de la SAI est justifiée, intelligible et transparente, et les incohérences et contradictions qui y sont soulevées figurent dans le dossier et sont suffisantes pour justifier la conclusion de la SAI selon laquelle le mariage n’est pas authentique, conformément à l’article 4 du Règlement sur l’immigration.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑6293‑19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Martine St‑Louis »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 21e jour d’août 2020.

Caroline Tardif, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DOSSIER :

IMM‑6293‑19

 

INTITULÉ :

KIRPAL SINGH BOPARAI c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (QuÉbec) (vidÉoconfÉrence)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 20 juillet 2020

JUGEMENT ET MOTIFS :

la juge ST‑LOUIS

DATE DES MOTIFS :

le 24 juillet 2020

COMPARUTIONS :

Navratan Singh Fateh

POUR LE DEMANDEUR

 

Hilla Aharon

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sanghera Sandhar Law Group

Surrey (Colombie‑Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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