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Date : 19990407


Dossier : IMM-3324-98

OTTAWA (ONTARIO) LE 7 AVRIL 1999             

EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE MARC NADON

ENTRE :

     SABIRUDDIN SYED,

     demandeur,

     et

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

     Demande de contrôle judiciaire visant la décision de refus rendue, le 3 juillet 1998, par une agente des visas, au consulat général du Canada à Détroit (Michigan), États-Unis, dans le dossier no B035804646.

(Paragraphe 82.1(2) de la Loi sur l'immigration et l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale)


ORDONNANCE

     La demande de contrôle judiciaire est rejetée


" MARC NADON "

JUGE

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes


Date : 19990407


Dossier : IMM-3324-98

ENTRE :

     SABIRUDDIN SYED,

     demandeur,

     et

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

    

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON :


[1]      Le demandeur sollicite l'annulation de la décision d'une agente des visas, en l'occurrence Susan Mary Lopez, du consulat général du Canada à Détroit, dans l'État du Michigan (États-Unis d'Amérique). L'agente des visas a, par la décision en cause, rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur.


[2]      Le demandeur, citoyen de l'Inde, a vu son dossier examiné par l'agente des visas au titre de la profession de photographe, en général, telle que prévue sous le no 3315-110 de la Classification canadienne descriptive des professions (CCDP). Le demandeur a été interviewé par l'agente des visas le 3 juin 1998 et, à la fin de cette entrevue, l'agente des visas lui a dit que sa demande serait refusée. Le 14 juillet 1998, l'agente des visas envoyait au demandeur la lettre suivante :

                      [traduction] Il s'agit de votre demande de résidence permanente au Canada.                 
                      Après étude de votre demande de résidence permanente au Canada, j'ai le regret de vous informer que vous ne répondez pas aux conditions requises pour l'immigration au Canada.                 
                                 
                      Aux termes du paragraphe 8(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, les demandes indépendantes, c'est-à-dire relevant de la catégorie dans le cadre de laquelle vous avez déposé votre dossier, sont évaluées en fonction des études, de la préparation professionnelle spécifique, de l'expérience, de la demande dans la profession, de l'emploi protégé ou de la profession désignée, ainsi que de facteurs démographiques canadiens, de l'âge, de la connaissance de l'anglais et du français et aussi de votre personnalité. Votre dossier a été examiné en fonction des aptitudes requises pour la profession de photographe, en général 3315110 et de commis vendeur 5137114.                 
                      Il ne m'a pas été possible de vous qualifier pour d'autres professions étant donné que vous ne possédez aucune autre expérience professionnelle dans une des professions pour lesquelles il y a des débouchés au Canada.                 
                      Dans la catégorie photographe, en général 3315110, vous avez obtenu, au total, le nombre de points suivant :                 
                      ÂGE(46)      06                 
                      DEMANDE DANS LA PROFESSION      01                 
                      P.P.S      15                 
                      EXPÉRIENCE      6                 
                      PROFESSION DÉSIGNÉE      00                 
                      FACTEUR DÉMOGRAPHIQUE      8                 
                      ÉTUDES      13                 
                      ANGLAIS      8                 
                      FRANÇAIS      0                 
                      POINTS SUPPLÉMENTAIRES      00                 
                      PERSONNALITÉ      04                 
                      TOTAL      61                 
                      Je vous ai accordé le maximum de points pour l'expérience dont vous avez fait état dans la profession que vous entendez exercer. Cette expérience, acquise en Inde, ne vous a pas permis de vous installer aux États-Unis. Je ne suis pas convaincue que vous pourriez trouver du travail dans votre domaine au Canada étant donné que vous n'y êtes pas parvenu ici. Vous n'avez, en ce qui concerne le Canada, fait preuve d'aucune connaissance autre que celles que vous avez pu glaner auprès de vos amis. Je n'ai pu vous accorder que 13 point pour vos études étant donné que vous êtes titulaire d'une licence qui vous a été décernée après deux ans et non après trois ans d'études à plein temps. Votre anglais parlé était tout à fait approximatif, surtout pour quelqu'un qui se trouve aux États-Unis depuis plus de deux ans, mais je vous ai accordé 8 points pour vos connaissances de l'anglais car j'ai pris pour acquis que vous étiez nerveux lors de l'entrevue.                 
                      Vous n'avez pas obtenu suffisamment de points pour être accepté en tant qu'immigrant au Canada. Pour cela, il vous fallait un total de 70 points. Vous faites donc partie de la catégorie de personnes non admissibles telle que définie à l'alinéa 19(2)(d de la Loi sur l'immigration et j'ai dû rejeter votre demande.                 
                      J'ai également évalué votre demande au regard des critères de la CNP, au cas où cela aurait permis de vous accorder davantage de points, mais au regard du code 5221:0 de la CNP, c'est-à-dire la catégorie des photographes, vous n'obtenez pas plus de points.                 

     Les frais d'examen accompagnant votre de demande d'immigration vous seront remboursés à une date ultérieure.

[3]      Comme l'agente des visas l'a clairement indiqué dans sa lettre, le demandeur doit, pour être admis à immigrer au Canada, obtenir 70 points. L'agente des visas ayant accordé au demandeur 61 points, sa demande a été rejetée.

[4]      En l'espèce, le demandeur conteste la décision de l'agente des visas en ce qui a trait aux facteurs études et personnalité. Le défendeur estime, pour sa part, que l'agente des visas n'a commis aucune erreur en accordant au demandeur 13 points au titre de ses études et 4 points au titre de sa personnalité. Le défendeur fait en outre valoir que même si le demandeur avait raison et que l'agente des visas s'était effectivement trompée quant au nombre de points qu'elle lui avait accordé pour ses études et pour sa personnalité, le demandeur n'aurait tout de même pas obtenu le minimum de points requis pour qu'on donne suite à sa demande de résidence permanente.

[5]      En ce qui concerne les études, le maximum de points pouvant être accordé au demandeur serait 15. En ce qui concerne le facteur personnalité, le maximum est de 10. Par conséquent, à supposer que l'agente des visas se soit trompée sur ces deux points, le demandeur aurait, au mieux, obtenu 8 points supplémentaires, ce qui lui aurait donné un total de 69 points.

[6]      Cela étant, force m'est de conclure que même si l'agente des visas s'était, comme l'affirme le demandeur, trompée dans son appréciation, les erreurs dont il est fait état ne sont pas de nature à fonder une intervention de la Cour étant donné qu'en tout état de cause le demandeur n'aurait pas obtenu plus de 69 points, c'est-à-dire un point de moins que le minimum requis. Je cite, à l'appui de ma conclusion, les motifs d'ordonnance exposés par le juge Evans dans l'affaire Barua c. MCI, [IMM-3152-97, 22 octobre 1998 (C.F.)]. C'est ainsi que le juge Evans affirme, aux pages 9 à 11 :

                 [21]      Je conclus donc que l'agent des visas a commis une erreur de droit lorsque, en évaluant la personnalité du demandeur en vue de déterminer s'il était en mesure de réussir son installation au Canada, il a tenu compte du fait que le demandeur n'avait pas de soutien familial [comme il le mentionne dans son affidavit], ou du fait qu'il n'avait pas de famille au Canada [comme il l'a inscrit dans ses propres notes]. Je dois enfin me demander si cette erreur permet d'invalider le refus, puisque l'agent des visas a également tenu compte d'autres considérations apparemment plus importantes et pertinentes en évaluant la personnalité : le fait que le demandeur n'était jamais allé au Canada, qu'il savait peu de choses au sujet du Canada, et qu'il avait fait preuve de peu d'esprit d'initiative à l'égard de son installation éventuelle au Canada.                 
                 [22]      Dans la décision B'Ghiel (supra), le juge Hugessen a dit que, puisqu'il est impossible de connaître le poids que l'agent a attribué respectivement aux considérations pertinentes et aux considérations non pertinentes dont il a été tenu compte, la Cour appelée à effectuer le contrôle judiciaire ne devrait pas faire de conjectures au sujet de la question de savoir si la décision de l'agent aurait été différente si les facteurs non pertinents avaient été exclus. Il s'agit de toute évidence d'un principe général sensé. Toutefois, en l'espèce, il importe de noter que l'agent des visas a attribué au demandeur six points d'appréciation en tout sur un nombre maximum possible de dix points à l'égard de la personnalité. Selon la preuve dont je dispose, cette évaluation est plutôt généreuse. À mon avis, on ne saurait croire que l'agent des visas aurait attribué deux points d'appréciation additionnels à l'égard de la personnalité, points dont le demandeur avait besoin pour avoir à première vue droit à un visa, s'il avait omis de tenir compte du fait que le demandeur n'avait pas de parents au Canada dans les différents facteurs dont il avait tenu compte en évaluant la personnalité.                 

[23]      Par conséquent, j'exerce mon pouvoir discrétionnaire de façon à ne pas annuler la décision de l'agent des visas pour le motif que l'erreur qu'il a commise n'était en fin de compte pas pertinente. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

[7]      Par ces motifs, la demande de contrôle judiciaire déposée par le demandeur doit être rejetée.

[8]      Le demandeur a proposé à la Cour la certification de la question suivante :

[traduction] Lorsque la Cour décide qu'un agent des visas a commis une erreur de droit dans la manière dont il a appliqué les dispositions de la Loi sur l'immigration et du Règlement concomitant, le simple fait que le demandeur n'ait pas obtenu le nombre minimum de points pour être admis interdit-il à la Cour, abstraction faite de l'erreur de droit en question, d'intervenir et d'annuler la décision en cause?

[9]      Le défendeur s'oppose à la certification de cette question, invoquant pour cela la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Liyanagamage c. M.C.I., 176 N.R. 4 où, à la page 5, le juge Décary, de la Cour d'appel, a affirmé :

Lorsqu'il certifie une question sous le régime du paragraphe 83(1), le juge des requêtes doit être d'avis que cette question transcende les intérêts des parties au litige, qu'elle aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale (voir l'excellente analyse de la notion d'"importance" qui est faite par le juge Catzman dans la décision Rankin v. McLeod, Young, Weir Ltd. et al . (1986), 57 O.R. (2d) 569 (H.C. de l'Ont.)) et qu'elle est aussi déterminante quant à l'issue de l'appel. Le processus de certification qui est visé à l'article 83 de la Loi sur l'immigration ne doit pas être assimilé au processus de renvoi prévu à l'article 18.3 de la Loi sur la Cour fédérale ni être utilisé comme un moyen d'obtenir, de la Cour d'appel, des jugements déclaratoires à l'égard de questions subtiles qu'il n'est pas nécessaire de trancher pour régler une affaire donnée. [souligné par le défendeur].     

[10]      Je suis en complet accord avec la position adoptée par le défendeur. La question avancée par le demandeur ne peut pas être déterminante quant à l'issue de l'appel éventuellement interjeté de ma décision puisque les soi-disant erreurs de l'agente des visas n'affectent en rien le résultat final. En un mot, le demandeur ne peut pas se voir accorder plus de 69 points et, par conséquent, la décision de l'agente des visas ne peut être attaquée.

[11]      Par ces motifs, la question proposée ne sera pas certifiée par la Cour.

Ottawa (Ontario)

le 7 avril 1999


" MARC NADON "

JUGE

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :      IMM-3324-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      SABIRUDDIN SYED ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE:      MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :      LE 19 MARS 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE NADON

DATE :      LE 7 AVRIL 1999

ONT COMPARU :

Me Emile J. Barakat          POUR LE DEMANDEUR

Mme Patricia Deslauriers          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     

Me Emile J. Barakat          POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

M. Morris Rosenberg          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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