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     Date : 19990115

     Dossier : T-1202-98

Ottawa (Ontario), le 15 janvier 1999

En présence de Monsieur le juge Pinard

Entre :

     UNITEL INTERNATIONAL INC.,

     demanderesse,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     défendeur.

     ORDONNANCE

     L"appel est rejeté et l"ordonnance de mandamus qui était sollicitée pour enjoindre au registraire de publier la demande n 660367 dans le Journal des marques de commerce est refusée.

                            

                                     JUGE

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL. L.

     Date : 19990115

     Dossier : T-1202-98

Entre :

     UNITEL INTERNATIONAL INC.,

     demanderesse,

     - et -

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     défendeur.

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]      Il s"agit d"un appel, interjeté en vertu de l"article 56 de la Loi sur les marques de commerce , L.R.C. (1985), ch. T-10 (la Loi), d"une décision du registraire des marques de commerce datée du 22 mai 1998, rejetant en vertu de l"alinéa 37(1)c ) de la Loi la demande d"enregistrement n 660367 portant sur la marque de commerce UNITEL. La demanderesse demande l"annulation de la décision du registraire ainsi qu"une ordonnance enjoignant au registraire de publier la demande dans le Journal des marques de commerce en vue de la procédure d"opposition.

Les faits

[2]      Le 14 juin 1990, la demanderesse a produit la demande n 660367 au Bureau des marques de commerce du Canada en vue de l"enregistrement de la marque de commerce UNITEL en liaison avec l"équipement de radio/télécommunication, à savoir des installations radio mobiles, et fondait sa demande sur un emploi remontant au moins au 8 juillet 1985.

[3]      Le 25 février 1991, la demande a été examinée et l"examinateur du Bureau des marques de commerce a signalé notamment que la requérante ne semblait pas être la personne qui avait droit à l"enregistrement de la marque de commerce UNITEL puisque la date de premier emploi revendiquée, le 8 juillet 1985, était postérieure à la date de premier emploi revendiquée dans la demande n 648456 produite par Télécommunications Canadien Pacifique Inc., le prédécesseur d"AT & T Canada services interurbains (la marque d"AT & T), dont l"emploi remontait au moins jusqu"au 19 septembre 1977.

[4]      La demande d"enregistrement est restée dans un état de suspension pendant sept ans. Comme l"indique la Division des examens de l"Office de la propriété intellectuelle du Canada (marques de commerce) dans une lettre du 14 novembre 1997, adressée à l"avocat de la demanderesse, [TRADUCTION] " la plus grande partie du temps de traitement de la demande consiste en plusieurs prorogations de délai demandées par la requérante ". Dans l"intervalle, la marque de commerce d"AT & T a été publiée dans le Journal des marques de commerce le 14 octobre 1992 et la demanderesse a produit une opposition à cette marque, fondée sur de nombreux moyens, dont le fait que la date de septembre 1977 donnée comme date de premier emploi était inexacte et ne pouvait être établie.

[5]      La demande n 648456 en est toujours à la procédure d"opposition. Les deux parties ont produit leur preuve et de nouveaux contre-interrogatoires doivent avoir lieu.

La décision attaquée

[6]      La décision du registraire porte notamment :

         [TRADUCTION] En ce qui concerne les dispositions de l"article 6 de la Loi, particulièrement les critères pour apprécier la confusion exposés au paragraphe (5) de l"article 6 de la Loi, je suis convaincue que la marque qui fait l"objet de la présente demande UNITEL crée de la confusion avec la marque qui fait l"objet de la demande n 648456 UNITEL. . . .                 
         Puisque la date de premier emploi revendiquée dans la présente demande, le 8 juillet 1985, est postérieure à septembre 1977, date de premier emploi revendiquée dans la demande n 648456, déposée antérieurement, la requérante n"a pas droit à l"enregistrement vu les dispositions de l"alinéa 16(1)a) de la Loi. J"ai noté vos commentaires au sujet de la date de premier emploi revendiquée dans la demande n 648456. Toutefois, au cours de la procédure d"examen, la pratique est de traiter une date de premier emploi revendiquée comme exacte. On considère que l"endroit indiqué pour l"examen de contestations de dates revendiquées, c"est la procédure d"opposition ou une procédure judiciaire, qui comportent le cadre procédural et les mécanismes de preuve adaptés à des questions contestées de cette nature. Donc, la marque est refusée en vertu de l"alinéa 37(1)c) de la Loi.                 

La question en litige

[7]      La seule question soulevée par l"avocat de la demanderesse à l"audience porte sur le point de savoir si le registraire est tenu d"une obligation, à l"endroit de la demanderesse, de publier sa demande en vue de la procédure d"opposition avant de conclure que la requérante " n"est pas la personne qui a droit à l"enregistrement de la marque de commerce parce que cette marque crée de la confusion avec une autre marque de commerce en vue de l"enregistrement de laquelle une demande est pendante ", comme le prévoit l"alinéa 37(1)(c ) de la Loi.

Analyse

[8]      L"article 37 de la Loi est ainsi conçu :


37. (1) The Registrar shall refuse an application for the registration of a trade-mark if he is satisfied that

     (a) the application does not conform to the requirements of section 30,
     (b) the trade-mark is not registrable, or
     (c) the applicant is not the person entitled to registration of the trade-mark because it is confusing with another trade-mark for the registration of which an application is pending,

and where the Registrar is not so satisfied, he shall cause the application to be advertised in the manner prescribed.

(2) The Registrar shall not refuse any application without first notifying the applicant of his objections thereto and his reasons for those objections, and giving the applicant adequate opportunity to answer those objections.

(3) Where the Registrar, by reason of a registered trade-mark, is in doubt whether the trade-mark claimed in the application is registrable, he shall, by registered letter, notify the owner of the registered trade-mark of the advertisement of the application.


37. (1) Le registraire rejette une demande d'enregistrement d'une marque de commerce s'il est convaincu que, selon le cas_:

     a) la demande ne satisfait pas aux exigences de l'article 30;
     b) la marque de commerce n'est pas enregistrable;
     c) le requérant n'est pas la personne qui a droit à l'enregistrement de la marque de commerce parce que cette marque crée de la confusion avec une autre marque de commerce en vue de l'enregistrement de laquelle une demande est pendante.

Lorsque le registraire n'est pas ainsi convaincu, il fait annoncer la demande de la manière prescrite.

(2) Le registraire ne peut rejeter une demande sans, au préalable, avoir fait connaître au requérant ses objections, avec les motifs pertinents, et lui avoir donné une occasion convenable d'y répondre.

(3) Lorsque, en raison d'une marque de commerce déposée, le registraire a des doutes sur la question de savoir si la marque de commerce indiquée dans la demande est enregistrable, il notifie, par courrier recommandé, l'annonce de la demande au propriétaire de la marque de commerce déposée.


[9]      La demanderesse reconnaît que la marque qui fait l"objet de la demande n 660367 crée de la confusion avec une autre marque, à savoir la marque faisant l"objet de la demande n 648456, et que cette dernière demande était pendante au moment où la demande n 660367 a été produite. Elle reconnaît également que le registraire s"est conformé aux exigences du paragraphe 37(2) de la Loi et qu"on lui a permis de répondre complètement aux objections du registraire avant la décision de celui-ci. Toutefois, malgré ces faits reconnus, l"avocat de la demanderesse soutient que la décision du registraire de rejeter la demande n 660367 devrait être annulée et que la demande devrait être publiée en vue de la procédure d"opposition, parce que cette décision de rejet interdit à la demanderesse d"avoir accès au processus quasi judiciaire de la procédure d"opposition prévue par la Loi. Je ne puis accepter cette position.

[10]      En premier lieu, le paragraphe 37(1) de la Loi ne donne que deux options au registraire : il rejette une demande s"il est convaincu que l"une des conditions prévues au paragraphe a ), b) ou c) est réalisée, ou il fait annoncer la demande de la manière prescrite s"il n"est pas ainsi convaincu. À mon avis, compte tenu de la structure de l"article et du sens ordinaire des mots, le Parlement ne peut avoir eu l"intention d"obliger le registraire à faire annoncer la demande s"il est convaincu que l"une des conditions prévues au paragraphe a ), b) ou c) est réalisée.

[11]      En deuxième lieu, je suis d"avis que l"économie d"ensemble de la Loi fournit à la personne qui se trouve dans une situation analogue à celle de la demanderesse des garanties suffisantes d"équité procédurale à compter du moment du dépôt de sa demande n 660367.

[12]      En ce qui concerne l"équité de la procédure, la Cour suprême du Canada, dans l"arrêt Procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre (1980), 115 D.L.R. (3d) 1, à la page 17, en est venue à la conclusion suivante :

             Même s"il est exact que l"obligation de respecter l"équité dans la procédure, qu"exprime la maxime audi alteram partem , n"a pas à être expresse (Alliance des Professeurs Catholiques de Montréal c. Commission des Relations Ouvrières de la Province de Québec , [1953] 4 D.L.R. 161, 107 C.C.C. 183, [1953] 2 R.C.S. 140), elle n"est pas implicite dans tous les cas. Il faut toujours considérer l"économie globale de la loi pour voir dans quelle mesure, le cas échéant, le législateur a voulu que ce principe s"applique.                 

[13]      En l"espèce, dans le contexte d"un rejet sur le fondement de l"alinéa 37(1)(c ) de la Loi, le paragraphe (2) du même article prévoit déjà que le registraire doit faire connaître ses objections au requérant, avec les motifs pertinents, et lui donner une occasion convenable d"y répondre avant de prendre sa décision.

[14]      L"économie de la loi permet également au requérant de contester la demande pendante d"une autre personne par la procédure de l"opposition et devant les tribunaux. Les articles 38 et 39 de la Loi et les articles 35 à 47 du Règlement sur les marques de commerce , DORS/96-195 contiennent un ensemble de règles permettant à une partie de s"opposer à une demande d"enregistrement une fois qu"elle a été publiée et lui donnant le droit de présenter une preuve et des arguments au registraire à cet égard. En outre, toute décision du registraire, y compris une décision d"enregistrer une marque, peut être portée en appel à notre Cour, également compétente dans toute matière touchant l"application d"une disposition de la Loi (articles 55 à 61 de la Loi).

[15]      À vrai dire, comme je l"ai indiqué, la demanderesse s"est déjà prévalue et continue de se prévaloir pleinement des possibilités que lui offrent ces dispositions, en répondant aux objections du registraire en vertu du paragraphe 37(2) et en produisant une opposition à la demande n 648456 produite par Télécommunications Canadien Pacifique Inc.

[16]      En conséquence, compte tenu de la preuve, je conclus que le registraire, après s"être conformé en tous points aux exigences du paragraphe 37(2) de la Loi et après avoir examiné les objections de l"appelante, pouvait à bon droit rejeter la demande de celle-ci au motif que les renseignements donnés dans les demandes 648456 et 660367 étaient exacts.

[17]      Pour ces motifs, l"appel est rejeté et l"ordonnance de mandamus qui était sollicitée pour ordonner au registraire de publier la demande n 660367 dans le Journal des marques de commerce est refusée.

                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 15 janvier 1999

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL. L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N DU GREFFE :                  T-1202-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :          UNITEL INTERNATIONAL INC.
                         c.
                         LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE
                         COMMERCE
LIEU DE L"AUDIENCE :          OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L"AUDIENCE :          LE 6 JANVIER 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE PINARD

EN DATE DU 15 JANVIER 1999

ONT COMPARU :

DOUGLAS R. ADAMS              POUR LA DEMANDERESSE
F.B. WOYIWADA                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Douglas R. Adams

Ottawa (Ontario)              POUR LA DEMANDERESSE UNITEL
                         INTERNATIONAL INC.

Morris Rosenberg

Sous-procureur général

du Canada                      POUR LE DÉFENDEUR
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