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Date : 20060131

 

Dossier : IMM‑1817‑05

 

Référence : 2006 CF 103

 

 

Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2006

 

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

 

ENTRE :

 

                                                               FANYOU MENG

 

                                                                                                                                          demandeur

 

                                                                             et

 

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                                                                                           défendeur

 

 

                                MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               M. Meng est un citoyen de la République populaire de Chine qui prétend pratiquer le Falun Gong. La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (SPR) a décidé qu’il n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger. M. Meng demande l’annulation de la décision de la SPR.

 

[2]               Malgré les arguments bien structurés de l’avocat de M. Meng, je ne suis pas convaincue que l’existence d’une erreur susceptible d’être contrôlée ait été établie.


 

[3]               M. Meng prétend avoir commencé à pratiquer le Falun Gong en Chine en mai 1997, parce qu’il n’avait pas réussi à découvrir un remède pour son asthme. Après l’interdiction du Falun Gong prononcée par le gouvernement en juillet 1999, il a continué à s’adonner à cette pratique à la maison, ainsi que chez d’autres membres le dimanche.

 

[4]               Il est arrivé au Canada le 2 novembre 2003, prétendument pour affaires. Il affirme que lorsqu’il a parlé à sa femme le 10 novembre 2003, celle‑ci l’a averti de ne pas revenir en Chine parce que des policiers étaient venus chez eux à sa recherche le 7 novembre. Il semble que les policiers aient déclaré à l’épouse de M. Meng que l’ami qui avait fait connaître le Falun Gong à M. Meng avait été arrêté au cours d’une réunion du Falun Gong et qu’il avait dénoncé M. Meng. Craignant d’être emprisonné s’il retournait en Chine, M. Meng a présenté une demande d’asile le 1er décembre.

 

[5]               Le témoignage de M. Meng contenait de nombreuses incohérences et omissions. La SPR a conclu de la façon suivante :

La gravité des incohérences, l’omission d’incidents, le caractère peu plausible des événements relatés, en plus du retard de la demande d’asile présentée au Canada, amènent le tribunal à conclure que ce manque de crédibilité du demandeur s’étend à tous les éléments de preuve pertinents présentés par ce dernier et rend tout son témoignage invraisemblable.

 

Le manque de crédibilité du demandeur contredit sa crainte subjective et a fait échouer sa demande puisque, en l’absence d’une crainte subjective, le demandeur doit être débouté dans sa tentative d’être considéré comme réfugié au sens de la Convention en vertu de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR).

 


J’ai également tenté de déterminer si le demandeur serait en danger aux termes du paragraphe 97(1) de la LIPR. Bien qu’il soit généralement nécessaire d’analyser l’article 96 et l’article 97 séparément, une analyse de l’article 96 s’applique également, en l’espèce, à l’article 97.

 

Ayant instruit la demande, je suis d’avis que le demandeur n’est pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger et que je n’ai pas été saisi d’un nombre suffisant d’éléments de preuve crédibles pour rendre une décision favorable.

 

 

[6]               M. Meng concède que, si la SPR était justifiée de tirer des conclusions défavorables en matière de crédibilité et de les étendre à la demande présentée aux termes de l’article 96, il ne peut reprocher à celle‑ci de ne pas avoir effectué une analyse distincte pour l’article 97. L’essentiel de l’argument de M. Meng est que les conclusions défavorables relatives à sa crédibilité tirées par la SPR ne sont pas reliées à sa demande. Elles sont en fait fondées sur des considérations non pertinentes.

 


[7]               Je ne peux souscrire à cet argument. Le récit qu’a fait M. Meng des menaces qu’avaient proférées les autorités contre lui n’était pas cohérent. Lorsqu’il a été interrogé au sujet des motifs qui auraient poussé les autorités à se rendre chez lui après lui avoir accordé un visa de sortie, il a déclaré que le Bureau de la sécurité publique (BSP) et la police ne travaillaient pas en étroite coopération. Il a plus tard déclaré que les deux groupes avaient collaboré à une enquête le concernant. Selon le dossier de l’interrogatoire, il a également omis de mentionner qu’il faisait l’objet d’une enquête de la part de la police, même s’il a bien mentionné que son unité de travail faisait une enquête sur lui. Interrogé sur le point de savoir pourquoi il n’avait pas parlé de l’enquête de la police, il prétend avoir pensé que c’était la même chose. La véracité de la déclaration au sujet de l’unité de travail est en outre compromise par le contenu du formulaire de l’annexe 1 qui indique qu’il n’était pas employé à l’époque pendant laquelle il prétend avoir fait l’objet d’une enquête de la part de son unité de travail.

 

[8]               L’appel téléphonique fait à sa femme a constitué un facteur très important. Arrivé au Canada le 2 novembre 2003, il prétend n’avoir pu contacter sa femme avant le 10 novembre 2003, parce qu’il ne savait pas parler anglais. Un ami chinois l’a alors aidé à effectuer cet appel. M. Meng a cependant rempli, sans l’aide de qui que ce soit, le formulaire de l’annexe 1 en anglais. Par la suite, lorsqu’il a parlé du retard mis à présenter sa demande, il a déclaré qu’il n’y avait personne d’origine chinoise à Bradford et que ce n’était que le 1er décembre qu’il avait été en mesure d’obtenir de l’aide.

 

[9]               Le témoignage de M. Meng au sujet de l’achat de machinerie au Canada (le prétendu objet de son voyage d’affaires) contenait de nombreuses incohérences et omissions. Il ne serait guère utile d’expliquer ces aspects en détail ici. Cependant, une bonne partie de ces incohérences et omissions concernent la présente affaire parce qu’elles touchent directement la raison pour laquelle M. Meng est venu au Canada. Les incohérences sont tellement nombreuses que la SPR a conclu que M. Meng avait essayé d’immigrer au Canada en utilisant le processus destiné aux réfugiés. D’après les preuves, la SPR pouvait clairement en arriver à cette conclusion.

 


[10]           L’effet cumulatif des incohérences et des omissions était tel que la SPR a conclu que la crédibilité de M. Meng était si gravement compromise que, combinée au retard mis à présenter sa demande, elle entraînait une conclusion générale d’absence de crédibilité. Il est impossible, dans les circonstances de la présente affaire, de critiquer cette conclusion. Voir Sheikh c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 C.F. 238 (C.A.), et Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 3 C.F. 537 (C.A.).

 

[11]           Comme cela a été mentionné plus tôt, M. Meng concède que, si la SPR était justifiée d’étendre la conclusion défavorable en matière de crédibilité à la demande fondée sur l’article 96, il n’était pas essentiel qu’elle effectue une analyse distincte aux termes de l’article 97.

 

[12]           Les avocats n’ont pas proposé la certification d’une question et aucune question semblable ne découle de ces faits.

 

 

                                                                ORDONNANCE

 

 

LA COUR ORDONNE QUE la demande soit rejetée.

 

 

 

                                                                                                             « Carolyn Layden‑Stevenson »                    

                                                                                                                                                     Juge                                          

 

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


                                                             COUR FÉDÉRALE

 

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑1817‑05

 

 

INTITULÉ :                                                   FANYOU MENG

c.

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 26 JANVIER 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 31 JANVIER 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ali Amini                                                          POUR LE DEMANDEUR

 

Sharon Stewart Guthrie                                     POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Amini Carlson                                                   POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Toronto (Ontario)

 

 

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