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Date : 19990331


Dossier : IMM-4931-97

ENTRE :


KYUNG OH,


demanderesse,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision, datée du 20 octobre 1997, de Susan Dragan, agente des visas, Ambassade du Canada à Séoul (Corée du Sud), qui a refusé la demande de résidence permanente au Canada à titre de travailleur autonome présentée par la demanderesse.

LES FAITS

[2]      En mars 1996, la demanderesse a présenté une demande de résidence permanente au Canada à titre de travailleur autonome. Elle a subi une entrevue menée par l'agente des visas, Susan Dragan, le 20 octobre 1997, à Séoul (Corée).

[3]      La demanderesse a indiqué dans sa demande que depuis 1990 elle travaillait à son propre compte comme artiste en Corée et qu'elle avait l'intention d'établir une entreprise au Canada pour la vente de ses tableaux.

[4]      La lettre du 29 février 1996 accompagnant la demande précise que la demanderesse avait vendu plus de 200 tableaux depuis 1990, ce qui avait généré des revenus moyens annuels d'environ 25 000 $CAN.

LA DÉCISION DE L'AGENTE DES VISAS

[5]      Dans sa lettre du 20 octobre 1997, l'agente des visas a écrit :

                 [TRADUCTION] Après examen de votre demande, je regrette de vous informer que vous ne répondez pas aux critères applicables à l'établissement au Canada comme travailleur autonome.                 
                 Votre formulaire de demande indique que vous êtes artiste à votre propre compte depuis 1990. Toutefois, vous avez admis lors de l'entrevue que, mis à part la vente de trois oeuvres d'art représentant des recettes totales de 1,5 million de wons (environ 2 269 $CAN) au cours des deux dernières années, vous n'avez pas de preuve de revenus ou de la capacité de subvenir à vos besoins à partir de vos activités d'artiste autonome. Vous n'avez donc pas réussi à établir que vous seriez en mesure, en tant que travailleur autonome, de contribuer de manière significative à la vie économique, culturelle ou artistique au Canada.                 
                 Votre demande n'indique aucune autre profession pour laquelle vous possédez des qualifications ou de l'expérience et qui vous permettrait d'obtenir une réponse favorable à votre demande.                 

THÈSE DE LA DEMANDERESSE

[6]      L'avocate de la demanderesse a soulevé cinq questions litigieuses.

A.      L'agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu'elle ne s'est pas conformée aux paragraphes 2.03(1) et (2) du fait qu'elle n'a pas apprécié à nouveau la demanderesse suivant les facteurs applicables prévus à l'annexe I dans sa version du 1er mai 1997?

[7]      Les paragraphes 2.03(1) et (2) sont libellés ainsi :

2.03(1) For the purpose of an assessment by a visa officer under section 8, in respect of an application for a visa that was made under section 9 of the Act before May 1, 1997 and was still pending on that date, the applicable factors set out in Schedule I, as that Schedule read immediately before May 1, 1997, shall apply.

2.03(2)

(2) If an application for a visa referred to in subsection (1) is refused, the visa officer shall reassess the application in accordance with the applicable factors set out in Schedule I, as that Schedule read on May 1, 1997. SOR/97-242, s.2.

2.03 (1) L'appréciation par l'agent des visas aux termes de l'article 8, dans le cadre d'une demande de visa pendante au 1er mai 1997 qui a été présentée avant cette date en vertu de l'article 9 de la Loi, se fait suivant les facteurs applicables prévus à l'annexe I dans sa version antérieure au 1er mai 1997.

2.03(2)

(2) Lorsque la demande visée au paragraphe (1) est refusée, l'agent des visas apprécie à nouveau le demandeur suivant les facteurs applicables prévus à l'annexe I dans sa version du 1er mai 1997.

DORS/97-242, art. 2.                 

[8]      La demanderesse soutient qu'elle a été appréciée suivant le code CCDP et le paragraphe 2.03(1) et que sa demande a été refusée.

[9]      L'agente des visas avait, selon le paragraphe 2.03(2), l'obligation d'apprécier à nouveau la demanderesse suivant la CNP, mais elle ne l'a pas fait.

B.      L'agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu'elle a apprécié la demanderesse selon la définition de " travailleur autonome ", alors que le Règlement sur l'immigration dicte à l'agente des visas de passer outre à la définition de travailleur autonome une fois que l'intention de devenir travailleur autonome a été établie?

[10]      La demanderesse soutient que les critères de sélection énoncés dans le Règlement dictent à l'agente des visas de passer outre à la définition de travailleur autonome pour déterminer uniquement l'intention de devenir travailleur autonome, et que l'étape suivante est l'appréciation selon les paragraphes 8(1) et 8(4).

[11]      La demanderesse fait valoir que le paragraphe 8(4) prévoit une appréciation obligatoire de toute personne qui compte devenir un travailleur autonome au Canada.

[12]      L'agente des visas n'a pas, en l'espèce, mis en doute la bonne foi de la demanderesse quant à son intention de devenir un travailleur autonome.

[13]      Il est soutenu que l'agente des visas a commis une erreur en se fondant uniquement sur la définition figurant au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration.     

C.      L'auto-création est-elle un motif justifiant le rejet de la liste d'oeuvres de la demanderesse, un tel document ayant été auto-créé?

[14]      La demanderesse a produit des justificatifs de ses ventes et ces documents ainsi que la liste n'auraient pas dû être exclus de la preuve. L'agente des visas recherchait une preuve hors de tout doute raisonnable. Or, il n'existe dans la Loi sur l'immigration et le Règlement sur l'immigration aucune règle de droit qui exige une preuve vérifiable sur laquelle l'agente des visas peut former sa conviction.

[15]      La demanderesse soutient que l'agente des visas aurait dû prendre en considération ces éléments de preuve et accepter la liste d'oeuvres et tout document de ce genre comme étant auto-créés.

D.      L'agente des visas a-t-elle manqué à son obligation d'équité lorsqu'elle a déterminé que la demanderesse n'était pas en mesure de travailler à son compte, en se fondant uniquement sur le passé et non sur l'avenir?

[16]      L'agente des visas a beaucoup insisté sur le manque de documents et n'était donc pas convaincue des antécédents de la demanderesse comme travailleur autonome dans le domaine de la création artistique ou de l'enseignement en art.

[17]      Selon la jurisprudence dans les affaires Ho et Li Yang, l'analyse du Règlement exige que l'on se pose les questions suivantes :

     1)      La demanderesse est-elle une artiste accomplie?
     2)      Peut-elle enseigner?
     3)      Peut-elle travailler à son compte en tant que professeur?
     Ho c. M.E.I. (1989), 8 Imm.L.R. (2d) 38
     Li Yang c. M.E.I. (1989), 8 Imm.L.R. (2d) 48

E. L'attribution de trois points d'appréciation à la personnalité est-elle une décision abusive de la part de l'agente des visas?

[18]      Il est soutenu que l'impression de l'agente des visas que la demanderesse n'avait pas de faculté d'adaptation [TRADUCTION] " faute de preuve d'une carrière ou de déménagements importants " est de nature abusive.

[19]      Il est soutenu que l'agente des visas n'a pas donné à la demanderesse la possibilité de lui démontrer qu'elle avait tort de croire à un manque d'adaptabilité, d'esprit d'initiative, d'ingéniosité et de motivation de la part de la demanderesse, comme s'il s'était agi d'une question purement théorique.

[20]      Il est soutenu qu'il ne s'agissait pas d'une question purement théorique puisque l'impression défavorable de l'agente des visas a influencé le déroulement de toute l'entrevue.

[21]      Il est soutenu que la demanderesse n'a pas eu une appréciation équitable, parce qu'elle ne savait pas à l'avance quels documents l'agente des visas voulait et que cette dernière a fondé son opinion sur le manque de documents.

THÈSE DU DÉFENDEUR

A.      L'agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu'elle ne s'est pas conformée aux paragraphes 2.03(1) et (2) du fait qu'elle n'a pas apprécié à nouveau la demanderesse suivant les facteurs applicables prévus à l'annexe I dans sa version du 1er mai 1997?

[22]      Le défendeur soutient que le fait que l'appréciation de la demanderesse n'ait pas été faite suivant la CNP n'est pas réellement pertinent, puisque celle-ci ne répondait pas à la définition de " travailleur autonome " figurant à l'article 2 du Règlement . Une appréciation suivant la CNP aurait été inutile.

B.      L'agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu'elle a apprécié la demanderesse selon la définition de " travailleur autonome ", alors que le Règlement sur l'immigration dicte à l'agente des visas de passer outre à la définition de travailleur autonome une fois que l'intention de devenir travailleur autonome a été établie?

[23]      Le défendeur soutient qu'aucun agent des visas ne peut faire abstraction des critères réglementaires pertinents énoncés dans la définition de " travailleur autonome " lorsqu'il s'agit de décider de l'attribution de 30 points d'appréciation supplémentaires aux termes du paragraphe 8(4) du Règlement .

[24]      En outre, il fait valoir que la demande d'entrée au Canada de la demanderesse à titre de travailleur autonome a donné lieu à une décision discrétionnaire de la part de l'agente des visas, décision qui devait être fondée sur les critères réglementaires énoncés dans la définition de " travailleur autonome ".

[25]      La capacité de la demanderesse était un critère obligatoire que l'agente des visas devait prendre en considération. Comme elle n'était pas convaincue que la demanderesse était en mesure d'exploiter une entreprise avec succès au Canada, elle n'a pas, avec raison, attribué les 30 points d'appréciation supplémentaires applicables à la catégorie des travailleurs autonomes.

C.      L'auto-création est-elle un motif justifiant le rejet de la liste d'oeuvres de la demanderesse, un tel document ayant été auto-créé?

[26]      Le défendeur soutient que l'importance à accorder à la liste d'oeuvres de la demanderesse était une question de fait que l'agente des visas devait déterminer.

[27]      Il fait valoir également que l'agente des visas a fourni des motifs clairs justifiant l'importance qu'elle avait accordée aux documents fournis par la demanderesse.

[28]      D'autre part, la demanderesse a eu amplement l'occasion de réagir quant aux préoccupations exprimées par l'agente des visas au sujet du manque de documents et d'améliorer sa situation en fournissant une preuve objective et vérifiable de son expérience en affaires.

D.      L'agente des visas a-t-elle manqué à son obligation d'équité lorsqu'elle a déterminé que la demanderesse n'était pas en mesure de travailler à son compte, en se fondant uniquement sur le passé et non sur l'avenir?

[29]      Le défendeur soutient que les faits dans la présente affaire ne ressemblent d'aucune façon à ceux qu'on retrouve dans Ho et Yang, mais se rapprochent étroitement des faits dans Huang Ying et Goa Bai Nian c. M.C.I. (C.F. 1re inst., 15 octobre 1997, IMM-1508-96). Comme dans le cas qui nous occupe, un des demandeurs dans cette affaire cherchait à entrer au Canada à titre d'artiste à son propre compte. Le juge en chef adjoint Jerome reformula la question qu'il avait posée dans l'affaire Yang, dont le défendeur convient qu'elle s'applique également en l'espèce :

     1)      La demanderesse est-elle une artiste accomplie?
     2)      Peut-elle s'installer au Canada et vendre ses oeuvres?
     3)      Peut-elle travailler à son compte en tant qu'artiste?

[30]      La conclusion du juge en chef adjoint Jerome dans cette affaire peut également s'appliquer au présent cas. Même si la réponse à la première question était affirmative, elle ne prouverait pas que la demanderesse possède une expérience ou une formation qui permette de répondre à la deuxième question par l'affirmative.

[31]      Il est donc impossible d'évaluer la capacité de la demanderesse de travailler à son propre compte et ainsi la troisième question amène une réponse négative.

[32]      Le défendeur soutient qu'il ressort clairement du dossier devant la Cour que l'agente des visas a pris ces points en considération lors de l'examen de la demande présentée par la demanderesse et qu'elle n'a pas mal interprété la définition de " travailleur autonome ".

E. L'attribution de trois points d'appréciation à la personnalité est-elle une décision abusive de la part de l'agente des visas?

[33]      Le défendeur soutient qu'il s'agit là d'une question purement théorique, vu que l'agente des visas avait conclu que la demanderesse ne répondait pas à la définition de

" travailleur autonome " et étant donné qu'il n'y a pas actuellement au Canada de demande d'artistes et de professeurs d'art.

[34]      Il fait valoir également que l'agente des visas jouit du pouvoir discrétionnaire d'évaluer la personnalité de la demanderesse en fonction de la faculté d'adaptation, de l'esprit d'initiative, de l'ingéniosité et de la motivation dont elle a fait preuve à l'entrevue. La demanderesse voudrait essentiellement que la Cour substitue une autre appréciation à celle effectuée par l'agente des visas.

ANALYSE

[35]      En ce qui concerne la question soulevée par la demanderesse " uniquement à l'audience soit dit en passant " qui vise l'obligation de l'agente des visas, à la suite du refus de la demande aux termes du paragraphe 2.03(1), d'apprécier à nouveau la demanderesse suivant la CNP étant donné qu'elle n'a pas obtenu les points d'appréciation requis selon les facteurs prévus à l'annexe I en vertu du paragraphe 2.03(2), il semble que l'agente des visas ne se soit pas conformée au paragraphe 2.03(2). Toutefois, il est évident que cela est sans importance en l'espèce, car la décision de ne pas considérer la demanderesse comme un travailleur autonome est un empêchement absolu.

[36]      Je ne suis pas d'accord avec l'avocate de la demanderesse lorsqu'elle déclare que le Règlement sur l'immigration dicte à l'agente des visas de passer outre à la définition de

" travailleur autonome " après que l'intention de devenir travailleur autonome a été établie.

[37]      Selon mon interprétation, l'agente des visas doit se convaincre que la demanderesse répond à la définition de " travailleur autonome " avant d'entreprendre une appréciation.

[38]      En l'espèce, l'agente des visas n'était pas convaincue que la demanderesse était en mesure d'exploiter une entreprise avec succès au Canada et n'a donc pas attribué les 30 points d'appréciation supplémentaires applicables à la catégorie des travailleurs autonomes.

[39] La décision du juge Lutfy, IMM-4965-97 est rédigée en partie comme suit :

             L'avocat du demandeur reconnaît qu'il n'existe aucune différence fondamentale entre le premier critère de la définition réglementaire (l'immigrant est-il en mesure d'établir l'entreprise projetée au Canada?) et celui qui est énoncé au paragraphe 8(4). Il importe peu, me semble-t-il, que cette appréciation soit faite au début, comme l'a fait l'agente des visas en examinant le premier critère de la définition de travailleur autonome, ou à une autre étape du processus, comme l'a fait valoir le demandeur, dans le contexte du paragraphe 8(4). Le résultat sera le même.             

[40]      Le juge Lutfy précise dans la même décision :

             En résumé, les mots " compte devenir " employés à l'alinéa 8(1)b ) ne sauraient avoir le sens et l'effet préconisés par le demandeur. Avant d'obtenir le droit d'établissement, l'immigrant doit faire la preuve de son intention et de sa capacité de devenir un travailleur autonome au Canada en conformité avec le premier critère énoncé dans la définition réglementaire et au paragraphe 8(4). L'immigrant qui compte devenir un travailleur autonome au Canada est également apprécié conformément aux facteurs de l'annexe I qui sont mentionnés à l'alinéa 8(1)b). C'est une explication claire de la formulation différente des alinéas 8(1)b) et c), et cette explication n'exige pas qu'on écarte, sans aucune raison apparente, le deuxième critère de la définition réglementaire, soit la contribution significative.             

[41]      En ce qui concerne la liste d'oeuvres fournie par la demanderesse, je partage l'opinion de l'avocat du défendeur, à savoir que l'importance à accorder à la liste était une question de fait à déterminer par l'agente des visas et qu'elle ne peut être réexaminée par la Cour.

[42]      Pour ce qui est de la prétention de la demanderesse selon laquelle l'agente des visas n'a pas pris en considération les éléments de preuve produits à l'entrevue, elle est contredite par l'affidavit de l'agente des visas et le contre-interrogatoire de celle-ci.

[43]      On a donné à la demanderesse la possibilité de faire effacer l'impression négative à son endroit ainsi que l'occasion de présenter d'autres éléments de preuve au sujet de ses aptitudes artistiques ou de sa capacité de travailler à son compte comme artiste au Canada. Je me reporte, à cet égard, aux pages 55 et 72 de la transcription du contre-interrogatoire de l'agente des visas.

[44]      La demanderesse laisse entendre également que l'agente des visas aurait insisté, à un moment donné au cours de l'entrevue, sur la nécessité d'obtenir une preuve objective des revenus de la demanderesse pendant les années précédant la demande, et aurait commis une erreur en ne lui demandant pas de réunir ces renseignements avant l'entrevue.

[45]      Je rejette cette affirmation et je suis d'avis que la demanderesse savait parfaitement qu'elle devait apporter tous les éléments de preuve à l'entrevue; je me reporte à cet égard à la lettre de son avocate à l'époque.

[46]      J'attire l'attention des parties sur la décision du juge Teitelbaum :

             Dans une affaire récente, Asghar c. Canada (précitée), la Cour fédérale a examiné la question de savoir si un agent des visas avait manqué à son obligation d'agir équitablement en ne donnant pas au demandeur la possibilité de présenter des éléments de preuve à l'égard de ses compétences. Le juge Muldoon a fait un examen de la jurisprudence et a conclu qu'il appartient au demandeur de convaincre l'agent des visas qu'il a rempli les conditions prévues par la Loi et que l'agent des visas n'est pas tenu de demander la présentation d'éléments de preuve ou d'éléments de preuve additionnels : Prasad c. M.E.I., [1996] A.C.F. 453; Hajariwala c. M.E.I., [1989] 2 C.F. 79; Wai c. M.C.I., [1996] A.C.F. 1387. Le juge Muldoon a ensuite examiné l'allégation de manquement à l'obligation d'agir équitablement et l'a rejetée en ces termes :             
                     On ne sait pas encore trop dans quelles circonstances l'équité procédurale exige que l'agent des visas informe le requérant de ses préoccupations. Toutefois, il est possible de conclure, compte tenu des arrêts précités, que cette obligation ne prend pas simplement naissance du fait qu'après avoir soupesé la preuve l'agent des visas n'est toujours pas convaincu du bien-fondé de la demande. La tâche de l'agent des visas consiste précisément à soupeser les éléments de preuve présentés par le requérant. Comme la Cour l'a dit, étant donné qu'il incombe au requérant de présenter une preuve, il n'est pas évident que l'agent des visas devrait être obligé de lui faire part du " résultat intermédiaire " à chaque stade de la procédure [Covrig v. M.C.I. , (1995), 104 F.T.R. 41].                     
                                                  
                          (Non souligné dans l'original.)                     

[47]      Pour ce qui est des questions appropriées que doit poser l'agente des visas lorsqu'elle apprécie un artiste qui travaille à son compte, je partage également l'opinion de l'avocat du défendeur, à savoir que les questions reformulées dans l'affaire Huang Ying et Gao Bai Nian c. M.C.I. (C.F. 1re inst., 15 octobre 1997, IMM-1508-96) correspondent mieux à la situation de la demanderesse. Par conséquent, la conclusion défavorable de l'agente des visas quant à la deuxième question " Peut-elle s'installer au Canada et vendre ses oeuvres? " est justifiée par le manque de preuve du contraire et n'est pas déraisonnable.

[48]      Étant donné que l'appréciation de l'agente des visas est une décision discrétionnaire, la norme de contrôle exige que la Cour n'intervienne pas à moins que la décision de l'agente des visas ne soit manifestement déraisonnable, ce qui n'est pas la conclusion de la Cour.

[49]      La norme de contrôle applicable à une telle décision a été établie par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Chiu Chee To (22 mai 1996), Toronto A-172-93 (C.A.F.), dans laquelle le juge Stone a déclaré au nom de la Cour :

             En l'espèce, l'agente d'immigration n'était pas convaincue que l'appelant avait soit le sens des affaires soit les ressources pécuniaires personnelles nécessaires pour établir une entreprise au pays. Nous sommes d'accord avec le juge en chef adjoint Jerome qu'il n'est pas justifié que la Cour intervienne. Dans l'arrêt Maple Lodge Farms Limited c. Gouvernement du Canada et autre, [1982] 2 R.C.S. 2, aux pages 7 et 8, le juge McIntyre déclare ce qui suit au nom de la Cour :             
                                         
                     C'est aussi une règle bien établie que les cours ne doivent pas s'ingérer dans l'exercice qu'un organisme désigné par la loi fait d'un pouvoir discrétionnaire simplement parce que la Cour aurait exercé ce pouvoir différemment si la responsabilité lui en avait incombé. Lorsque le pouvoir discrétionnaire accordé par la loi a été exercé de bonne foi et, si nécessaire, conformément aux principes de justice naturelle, si on ne s'est pas fondé sur des considérations inappropriées ou étrangères à l'objet de la loi, les cours ne devraient pas modifier la décision.                     
            

[50]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[51]      L'avocate de la demanderesse a proposé de faire certifier la question suivante : Le demandeur qui est un travailleur autonome doit-il être apprécié selon le paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration qui définit l'expression " travailleur autonome "?

Dans l'affirmative, cela veut-il dire que le paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration représente une norme de sélection?

[52]      L'avocat du défendeur allègue que les faits et les questions litigieuses en l'espèce ne suscitent aucune question grave et, plus particulièrement, que la question proposée par la demanderesse est sans importance et sans objet.

[53] Dans l'affaire Shahram Pourkazemi c. M.C.I. (C.F. 1re inst.)

(17 novembre 1998, IMM-4965-97), le juge Lutfy avait répondu déjà à la question posée par la demanderesse.

[54]      J'estime qu'il ne s'agit pas d'une question grave de portée générale; ainsi aucune question ne sera certifiée.

" Pierre Blais "

                                         JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 31 mars 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              IMM-4931-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :      KYUNG OH
                     - c. -
                     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE
                     L'IMMIGRATION
LIEU DE L"AUDIENCE :          Toronto (Ontario)
DATE DE L"AUDIENCE :          Le 25 mars 1999

MOTIFS D"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR LE JUGE BLAIS

EN DATE DU :              31 mars 1999

ONT COMPARU :

Mme Mary Lam              POUR LA DEMANDERESSE
M. Stephen Gold              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mme Mary Lam              POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général

du Canada

                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                 Date: 19990331

                        

         Dossier: IMM-4931-97

                             Entre :

                             KYUNG OH,

     demanderesse,

                             - et -

                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ          ET DE L'IMMIGRATION,

                    

     défendeur.

                    

                            

            

                                                                                 MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                            


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