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Date : 20040805

Dossier : IMM-6602-03

Référence : 2004 CF 1070

Montréal (Québec), le 5 août 2004

Présent :          Monsieur le juge Lemieux

ENTRE :

                                                       OKSANA DOBRYANSKA

                                                                                                                         partie demanderesse

                                                                             et

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

                                                                                                                           partie défenderesse

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Cette demande de contrôle judiciaire par la demanderesse, jeune femme de 19 ans et citoyenne de l'Ukraine, recherche l'annulation de la décision du 1er août 2003 de la Section de la protection des réfugiés (le tribunal) qui lui refusa la reconnaissance de réfugiée et la nécessité de protection.

[2]                Le tribunal fonde sa décision sur la non crédibilité de la demanderesse; il rejette comme non crédibles les allégations dans son récit. Son procureur reconnaît que le tribunal a entière juridiction en matière de crédibilité et que ses conclusions dans ce domaine ne puissent être écartées à moins d'être capricieuses ou arbitraires au sens de l'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les cours fédérales, une norme de contrôle équivalente à celle de manifestement déraisonnable.

[3]                La juge L'Heureux-Dubé écrit ceci au paragraphe 85 de l'arrêt Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793 :

¶ 85 Nous devons nous souvenir que la norme quant à la révision des conclusions de fait d'un tribunal administratif exige une extrême retenue: Ross c. Conseil scolaire du district no 15 du Nouveau-Brunswick, [1996] 1 R.C.S. 825, le juge La Forest aux pp. 849 et 852. Les cours de justice ne doivent pas revoir les faits ou apprécier la preuve. Ce n'est que lorsque la preuve, examinée raisonnablement, ne peut servir de fondement aux conclusions du tribunal qu'une conclusion de fait sera manifestement déraisonnable, par exemple, en l'espèce, l'allégation suivant laquelle un élément important de la décision du tribunal ne se fondait sur aucune preuve; voir également: Conseil de l'éducation de Toronto, précité, au par. 48, le juge Cory; Lester, précité, le juge McLachlin à la p. 669. La décision peut très bien être rendue sans examen approfondi du dossier: National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 R.C.S. 1324, le juge Gonthier à la p. 1370.

[4]                La demanderesse craint la persécution si elle retournait en Ukraine parce qu'elle est lesbienne; une persécution, soit agression ou tentatives de viol, qu'elle a vécue et qui l'a fait fuir son pays natal.

[5]                Le procureur de la demanderesse a décortiqué chaque composante prise en considération par le tribunal pour conclure à la non crédibilité de la demanderesse et a soumis à cette Cour que chacune d'elle était entachée d'un ou plusieurs défauts manifestement déraisonnables.

[6]                Le tribunal a construit sa conclusion de non crédibilité sur les bases suivantes :

(a)        délai de fuir l'Ukraine et délai de revendiquer ici au Canada;

(b)        contradiction entre son témoignage (deux tentatives de viol par les amis d'André, amoureux d'elle, mais qu'elle a écarté parce qu'elle était lesbienne) et son FRP où elle n'en indique qu'une sans aucune date;

(c)        témoignage évasif;

(d)        omission de n'avoir écrit dans son FRP que son père, qui est prêtre, aurait été convoqué par l'évêque, élément déclencheur de son voyage au Canada;

(e)        aucune preuve que la demanderesse avait déposé des plaintes à la police ou aucun rapport médical de l'agression subie;

(f)         aucune preuve que son père était prêtre;

(g)        rejet arbitraire du certificat judiciaire déposé par la demanderesse qui corroborait une agression subie par elle; le tribunal selon son procureur n'a pas évalué d'une façon raisonnable son explication de l'adresse indiquée sur ce certificat.

[7]                Après étude du dossier du tribunal, je suis d'avis que cette demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. À mon avis, le tribunal pouvait, en s'appuyant sur la preuve devant lui ou en tirant des inférences de cette preuve d'une façon raisonnable, conclure sur chaque élément de crédibilité comme il l'a fait.

[8]                C'est le cas surtout des omissions, de la contradiction et la confusion au sujet de l'adresse sur le certificat judiciaire relevées par le tribunal où la preuve, examinée raisonnablement, pouvait servir de fondement aux conclusions de crédibilité du tribunal. La plaidoirie du procureur m'invite à apprécier de nouveau la preuve ce que je ne peux faire.

[9]                Aussi, selon moi, le tribunal pouvait tirer des inférences négatives du fait que la demanderesse n'avait pas quitté l'Ukraine dans un temps raisonnable après, selon ses dires, avoir subi deux tentatives de viol et une agression au début de 2002 et de n'avoir déposé une preuve documentaire que le tribunal pouvait raisonnablement exigé (voir aussi la règle 7 des Règles de la Section de la protection des réfugiés).

[10]            Finalement, il me semble que le tribunal a considéré l'explication donnée par le partie demanderesse au sujet de l'adresse sur le certificat judiciaire mais n'était pas satisfait de celle-ci. La preuve appuie la conclusion du tribunal.

[11]            Pour ces motifs, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question à certifier n'a été proposée.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                « François Lemieux »                 

                               juge


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                IMM-6602-03

INTITULÉ :               OKSANA DOBRYANSKA

                                                                         partie demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                     

                                                                           partie défenderesse

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                            le 3 août 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE :    LE JUGE LEMIEUX

DATE DES MOTIFS :                                   le 5 août 2004

COMPARUTIONS:

Me Jacques Beauchemin                                    POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Annie Van der Meerschen                           POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Jacques Beauchemin                                    POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                  POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE


Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)


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