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Date : 20040402

Dossier : IMM-496-03

Référence : 2004 CF 495

Ottawa (Ontario), le 2 avril 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MICHAEL L. PHELAN

ENTRE :

                                      FERNANDO ENRIQUE RIVERA DELGADILLO

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                La question principale du présent contrôle judiciaire est de savoir si la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a commis une erreur en concluant que le demandeur, un homosexuel, avait une possibilité de refuge intérieur (PRI) à Mexico.

Les faits

[2]                Le demandeur fonde sa demande du statut de réfugié et de personne à protéger sur son orientation sexuelle homosexuelle.


[3]                Avant 1995, le demandeur a eu à deux reprises des démêlés avec la police dans sa ville par suite de ses contacts avec d'autres homosexuels. Il a alors décidé de quitter son travail et de déménager à Puerto Vallarta où il trouva un emploi au ministère de la Sécurité publique, dont faisait partie la police locale.

[4]                Le demandeur affirme que, à partir de 1999, ses collègues ont commencé à penser qu'il était homosexuel. Il a aussi affirmé que l'atmosphère de travail était défavorable aux homosexuels et aux lesbiennes comme en avait fait foi le congédiement d'une agente de police lesbienne.

[5]                Cette même année, d'abord, à la suite d'une confrontation, deux agents de police l'ont menacé qu'ils révéleraient son orientation sexuelle à son patron s'il ne les payait pas pour se taire. Ensuite, deux hommes, dont l'un d'eux était l'un des deux policiers de l'incident précédent, l'ont forcé physiquement à leur remettre 100 $.

[6]                Peu de temps après, il est entré au Canada et, trois mois plus tard, il demandait le statut de réfugié.

[7]                Le demandeur est comptable. Il est à l'aise en anglais et il travaille actuellement pour la Banque de Montréal à titre de représentant du service à la clientèle.


[8]                La Commission a accepté l'allégation du demandeur selon laquelle il craignait d'être persécuté par les deux agents de police à Puerto Vallarta, mais lui a refusé le statut de réfugié au motif qu'il disposait d'une PRI à Mexico.

[9]                La Commission a conclu que la preuve documentaire établissait qu'il n'y avait pas de PRI à Mexico pour trois groupes :

-            les hommes efféminés;

-            les hommes infectés par le VIH

-            les activistes politiques et les dénonciateurs de méfaits au sein de l'État.

Le demandeur ne faisait manifestement pas partie des deux derniers groupes.

[10]            La Commission a rejeté l'assertion de l'avocat du demandeur selon laquelle le demandeur était vulnérable parce qu'il était efféminé, non seulement au vu de ses manières, mais aussi parce qu'il avait réussi à obtenir et à garder un emploi au sein d'une organisation très machiste, soit le ministère de la Sécurité publique, et que cela était incompatible avec un comportement manifestement efféminé.


[11]            La Commission a considéré d'autres points, comme l'absence de coordination entre la police locale de Puerto Vallarta et la police fédérale qui était aussi responsable de la sécurité à Mexico et la vulnérabilité des personnes pauvres (ce que n'était pas le demandeur), avant de conclure que sa crainte n'avait pas de fondement objectif et qu'il ne courait pas de risque.

[12]            Plus particulièrement, la Commission a examiné la preuve substantielle sur les questions homosexuelles à Mexico. Cette preuve portait sur des politiciens homosexuels, sur les dix-sept années du défilé de la fierté des homosexuels, sur des modifications législatives qui favorisent les homosexuels et sur la grande attention qu'ont reçue les quatre cents mariages de couples homosexuels en 2002.

[13]            La Commission a aussi examiné la preuve présentée quant à son état psychologique, à sa capacité de trouver du travail et quant à savoir si un retour à Mexico lui causerait un préjudice démesuré ou lui ferait courir un risque pour sa sécurité. La Commission a précisé dans ses motifs les raisons pour lesquelles elle rejetait ces éléments de preuve, tant individuellement que collectivement.

Analyse

[14]            La norme de contrôle d'une décision de la Commission portant sur une PRI est la décision manifestement déraisonnable (voir Mohammed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 2003 CF 954).

[15]            La Commission n'a pas mal interprété la nature de la crainte du demandeur en ce qui concerne la police mexicaine en général. Elle a accepté que cette crainte avait un fondement tant subjectif qu'objectif à Puerto Vallarta. Toutefois, elle a conclu que cette crainte n'avait pas de fondement objectif à Mexico. Ses motifs étaient convaincants, clairs et équilibrés.

[16]            La Commission a rejeté l'argument selon lequel le demandeur avait raison de craindre personnellement la police fédérale. Il était loisible à la Commission de tirer cette conclusion à partir des faits présentés en preuve. Elle a conclu que la possibilité que la police de Puerto Vallarta demande l'aide de la police fédérale à Mexico dans le but de harceler individuellement un homosexuel était extrêmement faible.

[17]            Après examen de toute la preuve présentée à la Commission, je conclus que ses conclusions étaient raisonnables. Aucun élément de preuve important n'a été omis.

[18]            Le demandeur conteste la façon dont la Commission a soupesé la preuve et il demande à la Cour de refaire elle-même cette appréciation de la preuve et de substituer ses conclusions à celles qu'a tirées la Commission. C'est là une chose que la Cour ne devrait pas faire et qu'elle ne fera pas.

[19]            La décision de la Commission n'est pas déraisonnable, et encore moins manifestement déraisonnable.


[20]            Comme en ont convenu les avocats, il n'y a aucune question à certifier.

                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

La demande est rejetée.

               « Michael L. Phelan »            

Juge

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-496-03

INTITULÉ :                                        FERNANDO ENRIQUE RIVERA DELGADILLO

c.

MCI

                                                                             

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 23 MARS 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                       LE 2 AVRIL 2004

COMPARUTIONS :

Robert I. Blanshay

POUR LE DEMANDEUR

Marcel Larouche

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Robert I. Blanshay        

Avocat

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR       

Ministère de la Justice

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR


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