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                                                                                                                                  Date: 20000707

                                                                                                                     Dossier: IMM-3740-99

ENTRE :

ANDREI TCHERNOV

LARISSA TCHERNOVA

YAKOV TCHERNOV

ALEXEY TCHERNOV

                                                                                                                                        demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE CAMPBELL

[1]         En l'espèce, le mari demandeur, sa conjointe et ses enfants ont revendiqué le statut de réfugié en se fondant sur le fait que si le demandeur était renvoyé en Russie, il serait raisonnablement possible de s'attendre à ce qu'il soit persécuté en sa qualité de juif.

[2]         Il n'est pas contesté que la SSR disposait d'une ample preuve documentaire établissant que les juifs sont persécutés en Russie. Toutefois, la SSR a fondé sa décision sur la conclusion primordiale selon laquelle, si le demandeur était renvoyé en Russie, il ne serait probablement pas considéré comme un juif.


[3]         Un fait important dont il faut tenir compte à l'égard de la conclusion primordiale tirée par la SSR est que cette dernière a fait une inférence défavorable par suite des actions du demandeur, qui avait détruit les billets d'avion et les passeports et qui n'avait pas pu fournir une documentation valide en vue d'établir que sa famille et lui étaient de fait venus au Canada depuis la Russie. La SSR a le droit de faire cette inférence, mais à mon avis cela ne met pas pour autant fin à l'exigence selon laquelle elle doit analyser d'une façon appropriée la preuve fournie par le demandeur au sujet de la crainte qu'il a d'être persécuté.

[4]         Il n'est pas contesté que le demandeur est juif, comme en fait clairement foi son enregistrement de naissance. Dans sa décision, la SSR a accordé beaucoup d'importance au fait que le demandeur est non-pratiquant et qu'en fait, il sait peu de choses au sujet de la religion juive. De fait, le demandeur a admis dans son témoignage que les gens, en Russie, ne le considéreraient pas comme un juif à moins qu'il ne leur dise qu'il est juif. Cependant, ces faits ne constituent pas le fondement de la revendication du demandeur.

[5]         Dans son témoignage, le demandeur a déclaré que le fait qu'il est juif avait été enregistré à l'école et que c'était la principale source de renseignements au sujet de son origine ethnique qui avait été communiquée au fil des ans et qui avait causé la persécution dont il avait été victime tant lorsqu'il était enfant qu'une fois devenu adulte. Devant la SSR, le témoignage que le demandeur a présenté au sujet des persécutions dont il avait été victime et de son origine ethnique a été corroboré par une lettre de son père.


[6]         Toutefois, en réponse à la preuve relative à la persécution et à l'origine ethnique que le demandeur a fournie, la SSR a conclu que le demandeur n'avait pas établi son origine ethnique d'une façon satisfaisante et qu'il n'était pas crédible sur ce point. Quant à la lettre du père, la SSR a conclu qu'étant donné les liens qui existent entre le père et les demandeurs, et compte tenu du fait que la lettre a été rédigée en prévision de l'audience qui devait avoir lieu devant elle et du fait que le demandeur n'était pas crédible, il ne faudrait pas lui accorder beaucoup d'importance.

[7]         Je conclus que l'inférence défavorable que la SSR a faite a influé d'une façon illégitime et inéquitable sur la conclusion que celle-ci a tirée au sujet de l'allégation selon laquelle le demandeur craignait subjectivement d'être persécuté. À mon avis, le témoignage du demandeur, s'il est considéré avec la lettre de son père, prouve amplement l'allégation selon laquelle le demandeur craint d'être persécuté. Je conclus qu'il ne suffit pas que la SSR rejette le témoignage du demandeur et la lettre du père pour les motifs qu'elle a donnés. Par conséquent, à mon avis, la SSR a rendu sa décision sans analyser d'une façon appropriée la preuve fournie par le demandeur au sujet de la crainte qu'il a d'être persécuté et elle a donc rendu cette décision sans tenir compte de la preuve dont elle disposait.


[8]         Par conséquent, j'infirme la décision de la SSR et je renvois l'affaire à une formation différente pour réexamen.

           « Douglas R. Campbell »              

                       Juge

Edmonton (Alberta)

le 7 juillet 2000.

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :                              IMM-3740-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                Andrei Tchernov et autres c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                     Edmonton (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 6 juillet 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge Campbell en date du 7 juillet 2000

ONT COMPARU :

Simon Yu                                                          POUR LES DEMANDEURS

Brad Hardstaff                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McCuaig Desrochers                                         POUR LES DEMANDEURS

Edmonton (Alberta)

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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