Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20050412

Dossier : IMM-4316-04

Référence : 2005 CF 498

Toronto (Ontario), le 12 avril 2004

En présence de Monsieur le juge Strayer                           

ENTRE :

VIKTOR KHRYSTYCH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Le demandeur demande le contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Commission), qui a conclu qu'il n'est pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne ayant besoin de protection.


[2]                Le demandeur a demandé asile à titre d'homosexuel, disant craindre d'être persécuté s'il est renvoyé en Ukraine. Il a expliqué que, durant sa jeunesse, il s'est progressivement rendu compte qu'il était homosexuel. Il lui est arrivé d'être insulté et battu par des camarades de classe qui le trouvaient efféminé. Un jour, à la suite d'une agression, il s'est plaint à la police, sans parler de son orientation sexuelle. La police n'a rien fait. Il a commencé à suivre des cours à l'université, où il avait un partenaire homosexuel. Ils ont tous deux été renvoyés à cause de leur orientation sexuelle. Il a quitté l'Ukraine à l'âge de 20 ans et il est arrivé au Canada en août 2000. Il a déclaré qu'il s'était fait une amie qui a mis fin à leur amitié lorsqu'il lui a dit qu'il était homosexuel. Il a eu un enfant avec une autre femme. À Toronto, il [traduction] « a rencontré beaucoup de gars de même nature » et a fréquenté les clubs gays.                         

[3]                Dans le très bref énoncé de ses motifs, la Commission a rejeté la demande, estimant que le demandeur n'était pas crédible. Après avoir rapidement résumé les faits, le commissaire a formulé l'avis suivant :                                 

Je ne juge pas raisonnable l'explication du demandeur. Même s'il s'exprimait bien et donnait l'impression d'être un jeune homme assez intelligent, son témoignage concernant cette période de sa vie était vague et incertain. Son témoignage sonnait faux; c'est-à-dire, il n'était pas sincère.   

Après avoir résumé certains des faits concernant la période où le demandeur a vécu à Toronto, le commissaire a poursuivi :

Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur n'a pas produit suffisamment de preuves crédibles ou dignes de foi qu'il est homosexuel. Étant donné que son homosexualité est au coeur de sa demande, je conclus que le récit qu'a donné le demandeur des expériences qu'il a connues en Ukraine et au Canada du fait de son homosexualité n'est ni crédible ni digne de foi. Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur n'a pas produit suffisamment de preuves crédibles et dignes de foi qu'il a été victime d'un préjudice pour une raison quelconque en Ukraine.

[4]                La Cour doit en principe faire preuve de retenue à l'égard des conclusions de la Commission en matière de crédibilité, mais la Commission est « dans l'obligation de justifier, en termes clairs et explicites, pourquoi elle doute de la crédibilité de l'appelant » : voir, par exemple, Hilo c. Canada [1991] A.C.F. 228 (C.A.F.). En l'espèce, la Commission n'a pas rempli cette obligation. Elle ne fournit aucune précision sur les raisons pour lesquelles elle n'a pas cru au témoignage du demandeur concernant la vie qu'il menait en Ukraine. Quant à sa vie à Toronto, la Commission ne souligne pas de contradictions dans le témoignage du demandeur, se contentant de dire que ce témoignage est « vague et incertain » et qu'il « sonne faux » . Ce ne sont pas là des raisons « claires et explicites » , comme l'exige Hilo et les causes jugées par la suite, de douter de sa bonne foi.

[5]                J'accueille donc la demande de contrôle judiciaire, j'annule la décision de la Commission et je lui renvoie l'affaire en la priant de confier son réexamen à un autre groupe de commissaires.

                                                     

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie, que la décision de la Commission soit annulée et que l'affaire soit renvoyée à la Commission et confiée pour réexamen à un autre groupe de commissaires de la Section de la protection des réfugiés.

         « B.L. Strayer »          

                                                                                                     Juge                     

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                                                     

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                             IMM-4316-04

INTITULÉ :                            VIKTOR KHRYSTYCH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :    11 AVRIL 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE                

ET ORDONNANCE :            MONSIEUR LE JUGE STRAYER

DATE DES MOTIFS :           12 AVRIL 2005

COMPARUTIONS :

David Yerzy                              POUR LE DEMANDEUR

Marcel Larouche                       POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:                                                                               

David Yerzy

Avocat

Toronto (Ontario)                      POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.                                

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.