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Date : 20000615


Dossier : IMM-2669-00

Entre :


VALERIY ROTAR

     Partie Demanderesse

Et:


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     Partie Défenderesse


     Dossier: IMM-2672-00

Entre :


ANATOLY YURYNYUK

     Partie Demanderesse

Et:


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     Partie Défenderesse

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]      Samedi, le 3 juin 2000, j"ai rejeté les requêtes des deux demandeurs visant à obtenir un sursis de l"exécution des mesures d"exclusion rendues contre eux le 18 mai 2000. Voici les motifs de ces décisions.

[2]      J"ai rejeté les requêtes des demandeurs parce que j"étais d"avis que les demandes de contrôle judiciaire qu"ils avaient déposées à l"encontre des mesures d"exclusion ne soulevaient aucune question sérieuse. J"étais aussi d"avis que, de toute façon, les demandeurs ne subiraient pas de préjudice irréparable s"ils devaient retourner dans leur pays, l"Ukraine.

[3]      En premier lieu, les demandeurs soumettent que l"agent principal d"immigration a erré en émettant les mesures d"exclusion au motif qu"ils étaient des visiteurs sans visa lorsqu"ils se sont présentés au point d"entrée. L"article 9 de la Loi sur l"immigration (la "Loi") exige que " ... les immigrants et visiteurs doivent demander et obtenir un visa avant de se présenter à un point d"entrée". Toutefois, le Règlement sur l"immigration de 1978 (le "Règlement") prévoit certaines exceptions à cette règle; par exemple, l"article 13(1) stipule qu"un "visiteur visé à l"annexe II ... n"est pas tenu de présenter une demande de visa ou d"obtenir un visa avant de se présenter à un point d"entrée". Les demandeurs soumettent qu"ils sont des visiteurs visés à l"article 6 de l"annexe II, soit des "personnes qui sollicitent une autorisation de séjour au Canada pour devenir membre du personnel d"un véhicule qui est au Canada et les membres du personnel qui sollicitent une autorisation de séjour au Canada ... "

[4]      Lorsque les demandeurs sont arrivés au point d"entrée, à savoir l"aéroport de Dorval, ils avaient en main des passeports de marin, un contrat d"emploi avec les propriétaires du navire Canmar Victory , soit Antares Chartering & Shipping Inc. et une lettre de l"Atlantis International Ltd., à l"effet que les demandeurs étaient des marins Ukrainiens et qu"ils venaient au Canada pour se joindre à l"équipage du Canmar Victory à St. John, Canada, le 19 mai 2000. L"agent d"immigration a conclu que les demandeurs n"étaient pas des personnes visées par l"exception à l"annexe II " c"est à dire, des membres du personnel d"un véhicule au Canada " puisque, selon ses vérifications, ce navire n"était ni au port de St. John, Nouveau Brunswick, ni au port de St. John"s, Terre-Neuve, et qu"aucun navire de ce nom était attendu à ces ports. Par conséquent, il a émis des mesures d"exclusion conformément à l"alinéa 23(4)(a) de la Loi:

     Sous réserve de l"article 28, l"agent principal prend une mesure d"exclusion à l"encontre de la personne qui fait l"objet du rapport ou l"autorise à quitter le Canada sans délai s"il est convaincu
         (a) qu"elle appartient aux catégories non admissibles suivantes ou à l"une d"entre elles:
             (ii) la catégorie non admissible aux termes de l"alinéa 19(2)(d) parce qu"elle ne détient pas....un visa...

[5]      L"alinéa 19(2)(d) rend non admissible toute personne qui ne se conforme pas à la Loi, et en l"espèce, l"article 9 exige qu"un visiteur ait obtenu un visa avant de se présenter à un point d"entrée.

[6]      Puisque l"agent a déterminé que les demandeurs se devaient d"avoir un visa et puisqu" ils n"étaient pas des membres du personnel d"un véhicule au Canada, il a émis les mesures d"exclusion. Avant de recommander leur exclusion, l"agent leur a demandé s"ils anticipaient des problèmes dans leur pays, mais ces derniers ont déclaré "n"avoir aucun problème". L"agent a donc émis les mesures d"exclusion et les demandeurs ont été détenus.

[7]      Suite à l"émission des mesures d"exclusion, malgré leur déclaration qu"ils ne prévoyaient encourir aucun problème dans leur pays, les demandeurs ont voulu revendiquer le statut de réfugié. Or, selon le paragraphe 44(1) de la Loi, lorsqu"une mesure d"exclusion valide existe, il est impossible de revendiquer le statut de réfugié:

     Toute personne se trouvant au Canada peut revendiquer le statut de réfugié au sens de la Convention en avisant en ce sens un agent d"immigration, à condition de ne pas être frappée d"une mesure de renvoi qui n"a pas été exécutée, à moins que la mesure n"ait été annulée en appel (je souligne).

[8]      Vu cette disposition de la Loi, une personne ne peut revendiquer le statut de réfugié dans de telles circonstances à moins d"attaquer et de faire annuler la validité de la mesure d"exclusion. C"est pourquoi, en l"espèce, les demandeurs attaquent les mesures d"exclusion prononcée contre eux. Malheureusement pour eux, ils ne m"ont pas convaincu que leurs demandes de contrôle judiciaire soulevaient une question sérieuse. Ils soumettent que l"agent a erré en ignorant leurs passeports de marin, mais comme je l"ai indiqué précédemment, la Loi n"exempte pas les marins de l"obligation d"obtenir un visa avant de se présenter à un point d"entrée. Plutôt, la Loi prévoit qu"un marin qui vient au Canada pour devenir membre de l"équipage d"un navire qui est au Canada, est exempté de l"obligation d"avoir en main un visa. Puisque l"agent a conclu que les demandeurs n"étaient pas des personnes visées par l"exception, ils avaient nécessairement besoin d"un visa pour entrer au Canada.

[9]      Je désire noter que les demandeurs n"ont nullement indiqué dans leurs affidavits respectifs qu"ils étaient effectivement des marins. De toute façon, à la lecture du dossier, il m"apparaît évident que les demandeurs sont venus au Canada non pas pour joindre l"équipage d"un navire, mais plutôt, semble-t-il, pour revendiquer le statut de réfugié. Cela appert clairement de leurs affidavits.

[10]      Tel qu"indiqué précédemment, lorsque l"agent d"immigration leur a demandé s"ils prévoyaient encourir des problèmes en Ukraine, ils ont répondu à cette question par un non. Leur explication se trouve aux paragraphes 24 et 25 de leurs affidavits:

     24.      Il est vrai que je n"ai pas dit tout de suite que j"étais un réfugié, mais comment le faire lorsque je crains qu"on ne m"admette pas, puisqu"on me nie un droit d"admission même temporaire que mon passeport de marin m"octroi;
     25.      En Ukraine j"ai été désinformé [sic], mal conseillé, on m"avait dit de présenter une lettre confirmant mon embraquement [sic] dans un bateau, que sinon on me renvoi immédiatement, j"avais peur que ce soit vrai;

[11]      Je suis aussi d"avis que les demandeurs n"ont pas démontré qu"ils subiraient un préjudice irréparable si les mesures d"exclusion étaient exécutées et qu"ils devaient donc retourner en Ukraine. Les demandeurs allèguent que si ce sursis n"est pas accordé, ils subiront un préjudice irréparable. En particulier, ils prétendent que "[l]es dangers appréhendés [sic ] en Ukraine, seront réalisés, et le[s] demandeur[s] risque[nt] [leur] vie et [leur[ sécurité s"il[s] retourne[nt] en Ukraine". Dans leurs affidavits, les demandeurs indiquent ce qui suit: "J"avais peur qu"on me renvoi pas le prochain vol vers le pays; l"Ukraine que je crains et que je fuis pour sauver ma vie car j"y suis en danger." Cependant, nulle part dans leurs affidavits les demandeurs ont-ils fourni de raison ou d"explication pour laquelle ils seraient persécutés au sens de la Convention " c"est à dire, du fait de leur race, religion, nationalité, appartenance à un groupe social ou de leurs opinions politiques. Vu l"absence de fondement minimal de leurs allégations, je ne suis pas convaincu que les demandeurs subiront un préjudice irréparable.

[12]      Pour ces motifs, ces requêtes ont été rejetées.


     Marc Nadon

     Juge

O T T A W A (Ontario)

le 15 juin 2000

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