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Date : 20000526


Dossier : T-1509-99



ENTRE :


     SOCIETY PROMOTING ENVIRONMENTAL

     CONSERVATION, en son propre nom

     et au nom de ses membres

     demanderesse

     et

     SA MAJESTÉ LA REINE

     DU CHEF DU CANADA

     défenderesse




     MOTIFS DE DÉCISION EN VERTU DU PARAGRAPHE 318(4) DES RÈGLES

LE JUGE REED


[1]      Ces motifs portent sur la requête de la demanderesse, présentée en vertu de l'article 317 des Règles de la Cour fédérale, visant la production par la défenderesse de documents pertinents dans le cadre de sa demande de contrôle judiciaire. La demande de contrôle judiciaire porte sur une décision du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux confirmant, en vertu du sous-alinéa 11(1)a)(ii) de la Loi sur l'expropriation, L.R.C. (1985), ch. E-21, une intention d'exproprier certains terrains se situant à Nanoose Bay, en Colombie-Britannique.

[2]      La requête pour production de documents présentée par la demanderesse porte sur les deux catégories suivantes :

a.      Une transcription intégrale des audiences tenues par M. Michael Goldie entre le 19 juillet et le 17 août 1999, en vertu de la compétence qui lui a été conférée par l'article 10 de la Loi sur l'expropriation, L.R.C. (1985), ch. E-21; et
b.      Toute la documentation et la preuve qui était soumise au ministre lorsqu'il a décidé, conformément à l'article 14 de la Loi, de confirmer l'intention d'exproprier qui a fait l'objet des audiences susmentionnées.

[3]      La production de la transcription n'est plus en litige, puisque ni le ministre ni la défenderesse n'ont en leur possession la transcription des audiences publiques, puisqu'elle n'a jamais été préparée. La défenderesse a un enregistrement des audiences, qui a été remis à la demanderesse. De plus, la défenderesse a accepté d'assurer la transcription de certaines parties de cet enregistrement, à condition que les exigences de la demanderesse soient raisonnables. La demanderesse n'a pas encore pu identifier toutes les parties de l'enregistrement qu'elle voudrait faire transcrire et elle cherche à obtenir que cet aspect de sa demande soit laissé à une décision ultérieure de la Cour, au besoin.

[4]      Je ne délivrerai aucune ordonnance portant sur la première catégorie susmentionnée, tout en notant que la défenderesse s'est engagée tout à fait volontairement à assurer la transcription d'une partie de l'enregistrement. Cet engagement constitue une contribution positive au processus judiciaire et la Cour l'apprécie. En effet, bien que la défenderesse avait l'obligation de transmettre l'enregistrement des audiences à la demanderesse, elle n'avait aucune obligation juridique d'en assurer la transcription.

[5]      Au sujet de la deuxième catégorie de documents demandés, la défenderesse a produit toute la documentation requise sauf deux documents et une partie d'un troisième. La défenderesse soutient que ces documents font l'objet d'un privilège de non-divulgation en vertu de l'article 39 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5.

[6]      La demanderesse soutient que le certificat déposé par le greffier du Conseil privé en vertu de l'article 39 est insuffisant, puisqu'il ne contient pas assez de renseignements au sujet des documents, notamment leur date, leurs auteurs, les expéditeurs et les destinataires, non plus qu'une description de leur nature. La demanderesse soutient que ce genre de renseignement ne peut être un renseignement confidentiel du cabinet et qu'il aurait dû être dévoilé.

[7]      Je suis convaincu que la date des documents, leurs auteurs, les expéditeurs et les destinataires tombent tous sous le coup du privilège en cause. De toute façon, le certificat déposé en l'instance correspond à celui qui a reçu l'approbation de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Central Cartage Co., [1990] 2 C.F. 641 (C.A.F.).

[8]      Bien que la demanderesse s'appuie sur la décision dans Nation et bande des Indiens Samson c. Canada, [1996] 2 C.F. 483, pour dire que les détails susmentionnés doivent être dévoilés dans un certificat, cet aspect de la décision n'a pas été confirmé par la Cour d'appel fédérale : voir Buffalo et autres c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) (1997), 220 N.R. 35, aux pages 44 à 46.

[9]      Dans l'arrêt Buffalo, la Cour d'appel fédérale a cité la décision Central Cartage. Dans les deux cas, on trouve la déclaration qu'il est acceptable qu'un certificat délivré en vertu de l'article 39 suive le libellé de cet article. En fait, c'est en suivant le libellé de cet article que l'on trouve les renseignements voulus au sujet de la nature des documents en cause.

[10]      En l'instance, par exemple, le deuxième document qui fait l'objet de la réclamation d'un privilège de non-divulgation est décrit de la façon suivante :

         [traduction]

         Le document no 2 est la copie d'un dossier qui contient les renseignements mentionnés dans une lettre destinée à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil, au sens de l'alinéa 39(2)a) de la Loi.
         Le document no 2 est une copie d'un dossier qui contient des renseignements mentionnés dans un avant-projet de loi, au sens de l'alinéa 39(2)f) de la Loi.

     Les alinéas 39(2)a) et f) de la Loi sur la preuve sont rédigés comme suit :

(2) Pour l'application du paragraphe (1), un « renseignement confidentiel du Conseil privé de la Reine pour le Canada » s'entend notamment d'un renseignement contenu dans :
     a) une note destinée à soumettre des propositions ou recommandations au Conseil;
     * * * *
     f) un avant-projet de loi.

[11]      Il semble donc clair que le document en cause est un mémoire au cabinet qui contient des renseignements au sujet d'un avant-projet de loi.

[12]      En l'instance, il suffit de citer les arrêts Central Cartage et Buffalo. En appliquant ces arrêts, je dois conclure que le certificat déposé en l'instance est approprié.

[13]      Dans les allégations déposées par les parties, on trouve deux autres demandes de documents présentées par la demanderesse. La demanderesse voudrait obtenir les notes que M. Goldie a faites durant les audiences publiques qu'il a présidées, ainsi que les projets de motif qu'il a préparés pour leur examen par le ministre avant de préparer et de délivrer ses motifs définitifs.

[14]      On ne m'a pas convaincu que l'un ou l'autre de ces documents soit pertinent dans le cadre de cette demande de contrôle judiciaire.

[15]      M. Goldie s'oppose à la production de ses notes pour plusieurs motifs, notamment que ce n'est pas sa décision qui fait l'objet de cette demande de contrôle judiciaire et que ses notes n'étaient pas au dossier du ministre lorsque ce dernier a pris sa décision.

[16]      Je ne suis pas disposé à accepter que dans tous les cas les notes d'une personne qui est chargée de constituer une preuve pour faciliter la tâche d'un décideur ne sont pas pertinentes dans le cadre du contrôle judiciaire de la décision. Par contre, en l'instance on dispose d'un enregistrement de l'intégralité des audiences tenues devant M. Goldie. Si le rapport de M. Goldie est biaisé, ou s'il ne résume pas de façon correcte la preuve qu'on lui a présentée, ces faits peuvent être déterminés en comparant l'enregistrement des audiences et son rapport. Ses notes ne sont absolument pas pertinentes.

[17]      Quant au projet de motifs de décision, que le ministre a pu examiner avant qu'ils soient préparés et délivrés sous leur forme finale, je ne suis pas non plus persuadé qu'ils soient pertinents. Le projet peut contenir des erreurs, des déclarations avec lesquelles le ministre n'était pas d'accord, ou des conclusions provisoires qui ne se retrouvent pas dans les motifs qu'il a approuvés. Aux fins du contrôle judiciaire, c'est la version finale qui est pertinente. La défenderesse a cité Canada (Procureur général) c. Commissaire de l'Enquête sur le système d'approvisionnement en sang (1996), 37 Admin. L.R. (2d) 241 (C.F. 1re Inst.), à la page 256, et Beno c. Canada (Commission d'enquête sur le déploiement des Forces armées canadiennes en Somalie), paragraphes 18 à 20, à l'appui de son argument qu'il n'y avait pas lieu de produire le projet de motifs.

[18]      Pour les motifs susmentionnés, il n'y a pas lieu de délivrer une ordonnance en vertu du paragraphe 318(4) des Règles.

                                 B. Reed

                                 Juge

Le 26 mai 2000

Vancouver (Colombie-Britannique)



Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER




No DU GREFFE :              T-1509-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      SOCIETY PROMOTING ENVIRONMENTAL CONSERVATION, en son propre nom et au nom de ses membres

                     c.

                     S.M.R.

    


TRAITÉ SUR PRÉTENTIONS ÉCRITES EN VERTU DE

L'ARTICLE 318 DES RÈGLES


MOTIFS DE DÉCISION EN VERTU DU PARAGRAPHE 318(4) DES RÈGLES DU JUGE REED

EN DATE DU :              26 mai 2000



PRÉTENTIONS ÉCRITES DE

M. Andrew Gage                      POUR LA DEMANDERESSE

M. Michael Stephens                      POUR LA DÉFENDERESSE

M. Jillian Calder                      POUR L'ENQUÊTEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Andrew Gage

Avocat et procureur

Victoria (C.-B.)                      POUR LA DEMANDERESSE

Davis & Co.

Vancouver (C.-B.)                      POUR LA DÉFENDERESSE

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