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     Date : 19990428

     Dossier : T-2786-97

Ottawa (Ontario), le 28 avril 1999

En présence du juge Pinard

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29,

     ET un appel de la

     décision d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     appelant,

     - et -

     SHYI CHING STEVE LEE,

     intimé.

     JUGEMENT

     L'appel est accueilli. La décision que le juge de la citoyenneté Gordana Caricevic Rakovich a rendue en date du 17 novembre 1997 est annulée parce qu'au moment où il a présenté sa demande de citoyenneté, l'intimé ne satisfaisait pas aux exigences de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29.

                                 YVON PINARD
                            
                                 JUGE

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

     Date : 19990428

     Dossier : T-2786-97

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), ch. C-29,

     ET un appel de la

     décision d'un juge de la citoyenneté,

     ET

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     appelant,

     - et -

     SHYI CHING STEVE LEE,

     intimé.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PINARD

[1]      Il s'agit de l'appel interjeté par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration en application du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29, (la Loi), contre la décision du juge de la citoyenneté, Gordana Caricevic Rakovich, rendue le 17 novembre 1997 et communiquée par lettre à l'intimé à la même date. L'appelant soutient

que l'intimé n'a pas accumulé le nombre de jours de résidence prescrit par l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[2]      Vu que l'intimé, qui n'était pas présent à l'audience, a dûment reçu la signification d'un avis à cette fin, j'ai autorisé la poursuite de l'appel en son absence.

[3]      L'intimé est né le 6 février 1933 et est citoyen de Taïwan. Il est arrivé au Canada accompagné de son fils le 17 janvier 1990 (son épouse était arrivée au pays le 4 septembre 1989). L'intimé a présenté une demande de citoyenneté le 16 octobre 1996. Tel qu'il ressort du dossier, il a indiqué qu'en tant qu'homme d'affaires, il était appelé à voyager entre le Canada et Taïwan, ce qui explique ses absences. Il mentionne également qu'il a 63 ans et que ses amis et sa famille lui manquent. Il craignait qu'il ne leur reste plus beaucoup de temps ensemble, ce qui l'a incité à consacrer plus de temps à leur rendre visite.

[4]      La preuve montre également que durant les quatre ans qui ont précédé sa demande de citoyenneté canadienne, l'intimé s'est absenté du Canada pendant 1 282 jours. Il manquait donc à l'intimé 917 jours pour atteindre le minimum requis de 1 095 jours (soit trois ans de résidence sur quatre).


[5]      Les exigences de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sont les suivantes :

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

[...]

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

    
     (i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and
     (ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

[...]

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante:

     (i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent;
    
     (ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent.

[6]      Dans Re Pourghasemi (1993), 19 Imm.L.R. (2d) 259, à la page 260, mon collègue le juge Muldoon expose les objectifs sous-jacents à cette disposition :

         [...] vise à garantir que quiconque aspire au don précieux de la citoyenneté canadienne ait acquis, ou se soit vu obligé d'acquérir, au préalable la possibilité quotidienne de " se canadianiser ". Il le fait en côtoyant les Canadiens au centre commercial, au magasin d'alimentation du coin, à la bibliothèque, à la salle de concert, au garage de réparation d'automobiles, dans les buvettes, les cabarets, dans l'ascenseur, à l'église, à la synagogue, à la mosquée ou au temple - en un mot là où l'on peut rencontrer des Canadiens et parler avec eux - durant les trois années requises. Pendant cette période, le candidat à la citoyenneté peut observer la société canadienne telle qu'elle est, avec ses vertus, ses défauts, ses valeurs, ses dangers et ses libertés. Si le candidat ne passe pas par cet apprentissage, cela signifiera que la citoyenneté peut être accordée à quelqu'un qui est encore un étranger pour ce qui est de son vécu, de son degré d'adaptation sociale, et souvent de sa pensée et de sa conception des choses. Si donc le critère s'applique à l'égard de certains candidats à la citoyenneté, il doit s'appliquer à l'égard de tous. Et c'est ainsi qu'il a été appliqué par Mme le juge Reed dans Re Koo , T-20-92, 3 décembre 1992 [publié à (1992), 59 F.T.R. 27, 19 Imm. L.R. (2d) 1], encore que les faits de la cause ne fussent pas les mêmes.                 

(Voir aussi Re Afandi (6 novembre 1998), T-2476-97 (C.F. 1re inst.) et M.C.I. c. Kam Biu Ho (24 novembre 1998), T-19-98 (C.F. 1re inst.).)

[7]      Comme je l'ai mentionné à de nombreuses reprises, une absence prolongée du Canada, bien que temporaire, au cours de la période minimale de temps de trois ans ou de 1 095 jours, comme c'est le cas en l'espèce, va à l'encontre de l'esprit de la Loi qui permet déjà à une personne qui a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent de ne pas résider au Canada pendant une des quatre années qui précèdent la date de sa demande de citoyenneté.

[8]      Par conséquent, vu les absences prolongées de l'intimé du Canada, j'estime que la conclusion du juge de la citoyenneté selon laquelle l'intimé satisfaisait aux exigences de résidence prévues par la Loi est tout à fait déraisonnable et qu'elle résulte d'une application erronée de l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[9]      L'appel est donc accueilli et la décision que le juge de la citoyenneté a rendue en date du 17 novembre 1997 est annulée parce qu'au moment où il a présenté sa demande de citoyenneté canadienne, l'intimé ne satisfaisait pas aux exigences de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

                                 YVON PINARD

                                                              JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 28 avril 1999

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-2786-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :      Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
                     c. ShyiChing Steve Lee
LIEU DE L'AUDIENCE :          Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE :          Le 25 mars 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :          Le 28 avril 1999

ONT COMPARU :

Me Lise Maziade      POUR L'APPELANT

Montréal (Québec)

Me Jean Caumartin      AMICUS CURIAE

Montréal (Québec)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ministère de la Justice      POUR L'APPELANT

Montréal (Québec)

M. Rich Chang      POUR L'INTIMÉ

Montréal (Québec)

Me Jean Caumartin      AMICUS CURIAE

Montréal (Québec)

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