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Date : 19990628


Dossier : IMM-2459-98

ENTRE:

     ARTYOM SANTROSYAN

     ARMINE HARUTYUNYAN

     Demandeurs

     - et -

     LE MINISTRE

     Défendeur

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]          Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision de la Section du statut de réfugié rendue le 28 avril 1998, dont les motifs ont été reçus par les demandeurs le 15 juin 1998, et selon laquelle les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention.

[2]      Je suis d'avis que suivant la preuve au dossier, il était raisonnable pour le tribunal d'en conclure comme il l'a fait.

[3]      En effet, la décision était basée sur les éléments de preuve tant du témoignage des deux demandeurs que de la preuve documentaire.

[4]      Les revendications sont particulièrement fondées sur le fait que le demandeur aurait été convoqué pour son service militaire.

[5]      Le tribunal n'a pas cru que le demandeur était recherché par les autorités militaires s'appuyant sur plusieurs éléments de preuve soumis au dossier.

[6]      Les demandeurs ont soulevé qu'ils avaient une objection de conscience valable en déposant une preuve documentaire relative à la condamnation internationale de l'agression arménienne et du traitement infligé par les autorités arméniennes à des prisonniers de guerre.

[7]      Je me dois de rejeter cette prétention quant à l'objection de conscience en considérant que le tribunal, après révision de la preuve devant lui, a conclu que les demandeurs avaient davantage peur de la guerre et peur pour leur vie. Il n'était donc pas déraisonnable, dans les circonstances, pour le tribunal de conclure que ce motif ne rencontrait pas les exigences prévues à la Convention et particulièrement, les dispositions des paragraphes 167 à 174 du Guide de procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié (H.C.N.U.R., Genève, 1992).

[8]      La procureure du défendeur suggère que la Cour ne doit intervenir sur une question de crédibilité que si la conclusion du tribunal est déraisonnable. Elle ajoute également que même lorsque les conclusions du tribunal sont faibles, la Cour n'a pas à intervenir à moins, encore une fois, que les conclusions auxquelles en est arrivé le tribunal, soient déraisonnables.

[9]      Quant à la question de crédibilité, dans la décision Sylla c. M.E.I.1, le juge Marceau précise:                         
     Malgré les efforts de la procureure de l'appelant, nous n'avons pas été convaincus que notre intervention pourrait ici être justifiée.         
     Il est clair, à la lecture de l'ensemble de la décision, que les membres du tribunal n'ont pas cru l'histoire sur laquelle le revendicateur basait sa revendication. Les points mis de l'avant par eux pour justifier cette incrédulité n'ont pas tous la même portée et certains paraissent même faibles, mais l'ensemble néanmoins démontre à nos yeux le caractère raisonnable de leur réaction.         
[10]      Dans la cause Salvador Garcia2 le juge Pinard précise:                                                                                
     ...étant bien reconnu que l'aversion du service militaire ou la peur du combat ne suffisent pas, en soi, pour justifier une crainte de persécution au sens de la Convention.         

[11]      Quant au critère qui guide cette Cour quant à son intervention pour renverser la décision d'un tribunal, dans l'affaire Randhawa v. M.C.I.,3 le juge Joyal précise:

Contradictions or discrepancies in the evidence of a refugee claim are an accepted basis for a finding of a lack of credibility4. The Court should not interfere in the Board's conclusion unless it is unreasonable.5

[12]      La preuve documentaire démontre que la communauté internationale a condamné l'intervention arménienne au Karabakh.

[13]      Le tribunal applique le test prévu aux paragraphes 167 à 174 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, basé sur sa conclusion que les demandeurs ont davantage peur de la guerre et peur pour leur vie plutôt qu"une réelle objection de conscience. Le tribunal évalue si le revendicateur "peut démontrer qu'il se verrait infliger pour l'infraction militaire commise une peine d'une sévérité disproportionnée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques" et décide négativement.

[14]      Le paragraphe 171 précise également que:

     Toutefois, lorsque le type d'action militaire auquel l'individu en question ne veut pas s'associer est condamné par la communauté internationale comme étant contraire aux règles de conduite les plus élémentaires, la peine prévue pour la désertion ou l'insoumission peut, compte tenu de toutes les autres exigences de la définition, être considérée en soi comme une persécution.         

[15]      À mon avis, dans son analyse de la preuve présentée devant lui, le tribunal n'en est pas arrivé à une conclusion qui puisse apparaître déraisonnable et justifier l'intervention de cette Cour.

[16]      Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

    

[17]      Le procureur des demandeurs a soumis une question pour certification, laquelle se lit comme suit:

     L"article 168 d"une part, et l"article 169, d"autre part, du Guide des Procédures et Critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, visent-t-ils des cas différents de ceux visés par les articles 170 à 172?              

[18]      Cette question n"est pas déterminante quant à la décision et en conséquence, elle ne sera pas certifiée.

                             Pierre Blais

                             Juge

OTTAWA, ONTARIO

LE 28 JUIN 1999

__________________

1      A-23-92, 16 mai 1994 (C.A.F.).

2      Salvador Garcia c. S.E.C., IMM-2521-93, 4 février 1994 (C.F.).

3      IMM-3653-97, 4 juin 1998 (C.F.).

4      Rajarathan v. Canada (1991), 135 N.R. 300 (F.C.A.).

5      Aguebor v. M.E.I., (1993), 160 N.R. 33 (F.C.A.).

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