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Date : 20191025


Dossier : T-1498-16

Référence : 2019 CF 1341

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 25 octobre 2019

En présence de madame la juge Roussel

ENTRE :

BOWDY’S TREE SERVICE LTD.

demanderesse

 

et

THERIAULT INTERNATIONAL LTD.

défenderesse

 

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une requête déposée par la demanderesse, Bowdy’s Tree Service Ltd, en vue d’obtenir une ordonnance afin de déclarer Theriault International Ltd (la défenderesse), Craig Theriault, Theriault International Marine et TI Marine 2018 Ltd, coupables d’outrage au tribunal pour ne pas avoir respecté l’ordonnance prononcée par le juge Barnes le 11 janvier 2019.

[2]  Aux termes de cette ordonnance (l’ordonnance de production), M. Thériault, au nom de la défenderesse, Theriault International Marine et TI Marine 2018 Ltd (collectivement, les entités Thériault), de présenter aux fins d’inspection, lors d’un interrogatoire pour appuyer une exécution, certains documents liés à dix-sept (17) catégories de renseignements. La demanderesse cherche à faire exécuter un jugement rendu par défaut contre la défenderesse le 28 juin 2017.

[3]  L’ordonnance de production portait en outre que, dans l’éventualité où la défenderesse ou M. Thériault (qui était la personne soumise à un interrogatoire au nom de la défenderesse) souhaite demander une dispense de l’obligation de produire les documents demandés, ils pouvaient introduire une requête en vue d’obtenir cette dispense dans les quatorze (14) jours suivant la signification de l’ordonnance de production.

[4]  L’ordonnance de production permettait également la signification indirecte par courrier et par courriel de l’ordonnance de production et d’une assignation à comparaître à l’endroit de M. Thériault, qui est l’administrateur, dirigeant et mandataire de chacune des entités Thériault.

[5]  Conformément aux dispositions de l’ordonnance de production, la demanderesse a envoyé, le 20 janvier 2019, les documents originaux suivants ou des copies de ceux-ci, à M. Thériault et aux entités Thériault, par courriel, par courrier ou sous pli recommandé :

  • (i) une assignation à comparaître à un interrogatoire pour appuyer une exécution le 18 février 2019;

  • (ii) l’ordonnance de production;

  • (iii) un chèque pour les frais de déplacement.

[6]  Aucune demande de dispense de production n’a été déposée ni par M. Thériault ni par la défenderesse.

[7]  Le 18 février 2019, M. Thériault a comparu à l’interrogatoire pour appuyer une exécution. Il a produit trois (3) documents comprenant quatre (4) pages au total. M. Thériault a également montré au mandataire de la demanderesse un formulaire de ce qu’il a déclaré être des documents publics relatifs à la constitution en société de TI Marine 2018 Ltd, mais il a refusé d’en laisser une copie au mandataire de la demanderesse.

[8]  Le 29 mars 2019, par suite d’une requête ex parte déposée par écrit, la juge chargée de la gestion de l’instance, Kathleen M. Ring, a conclu que la demanderesse avait établi une preuve prima facie d’outrage. Elle a rendu une ordonnance (ordonnance de justification) disposant que M. Thériault, au nom des entités Thériault, comparaisse devant un juge lors d’une séance spéciale de la Cour à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, le 6 mai 2019, et soit prêt : a) à entendre la preuve relative aux actes d’outrage dont il est accusé; b) à présenter toute défense qu’il pourrait avoir eu égard à cette accusation; et c) à parler des observations de la demanderesse à l’égard d’une sentence appropriée, s’il est déclaré coupable d’outrage.

[9]  La juge Ring, chargée de la gestion de l’instance, a défini les actes d’outrage présumé comme suit :

[traduction]
M. Thériault, au nom des [entités Thériault], est accusé, par sa conduite décrite ci-dessous, d’avoir violé l’ordonnance de l’honorable juge Barnes datée du 11 janvier 2019 (l’ordonnance de production) :

a)  Aux termes de l’ordonnance de production, M. Thériault a reçu l’ordre de présenter aux fins d’inspection, au nom des [entités Thériault], les documents définis dans l’ordonnance de production lors de l’interrogatoire pour appuyer une exécution;

b)  M. Thériault n’a pas présenté les documents tels qu’ils ont été définis et requis dans l’ordonnance de production lors de l’interrogatoire pour appuyer une exécution.

[10]  La juge Ring, chargée de la gestion de l’instance, a autorisé la signification indirecte de trois (3) documents à l’appui de la requête ex parte à l’endroit de M. Thériault et de chacune des entités Thériault : l’ordonnance de production; l’affidavit de Robert Jette, c.r., assermenté le 20 février 2019 (celui-ci étant le mandataire de la demanderesse qui a assisté à l’interrogatoire pour appuyer une exécution le 18 février 2019); et l’affidavit de l’avocat de la demanderesse, assermenté le 12 mars 2019. En outre, elle a autorisé la demanderesse à présenter la preuve par affidavit de M. Jette à l’audience pour outrage, à condition que M. Jette assiste à l’audience du contre-interrogatoire si l’une des personnes visées par l’ordonnance de justification le lui demande par écrit au moins dix (10) jours avant l’audience. Aux termes de l’article 82 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), elle a également autorisé la demanderesse à déposer l’affidavit sous serment de son avocat le 12 mars 2019 et à présenter à la Cour des arguments fondés en partie sur ledit affidavit sous serment. Les dépens liés à la requête ex parte ont été réservés au juge qui préside l’audience pour outrage.

[11]  Le 3 avril 2019, l’avocat de la demanderesse a déposé un affidavit dans lequel il déclare avoir envoyé l’ordonnance de justification et les deux (2) affidavits à M. Thériault et aux entités Thériault par courrier et par courriel le 30 mars 2019.

[12]  Ni M. Thériault ni les entités Thériault n’ont demandé la présence de M. Jette à l’audience pour un contre-interrogatoire.

[13]  M. Thériault ne s’est pas présenté à l’audience pour répondre à l’allégation d’outrage au tribunal énoncée dans l’ordonnance de justification. Lors de l’audience pour outrage, j’ai interrogé l’avocat de la demanderesse pour savoir s’il y avait des raisons de craindre que M. Thériault n’ait pas reçu l’avis de l’ordonnance de justification l’informant que sa conduite serait examinée lors de cette audience. L’avocat de la demanderesse a fait valoir que M. Thériault savait que l’audience pour outrage était prévue le 6 mai 2019. Pour appuyer sa déclaration, l’avocat la demanderesse a soumis un affidavit assermenté la veille, auquel il a joint une série de courriels envoyés par M. Thériault entre avril 2019 et le 2 mai 2019, à partir de l’une des adresses électroniques désignées pour la signification indirecte dans les ordonnances de production et de justification. Parmi ces courriels, plusieurs comportent une référence à une [traduction] « Audience pour outrage du 6 mai 2019 » dans la ligne de mention objet. Par conséquent, je conclus que M. Thériault savait que l’audience pour outrage était prévue le 6 mai 2019.

[14]  Dans un esprit de franchise, l’avocat la demanderesse a renvoyé la Cour à un courriel que M. Thériault a envoyé le 1er mai 2019, qui indiquait qu’il aurait pu être à l’extérieur du pays. Même si j’ai examiné cette possibilité, j’ai néanmoins décidé d’aller de l’avant en l’absence de M. Thériault. Si M. Thériault n’était pas disponible pour comparaître à la date prévue, il lui incombait de demander un ajournement à la Cour. M. Thériault n’a pas demandé un tel ajournement et n’a pas non plus informé la Cour qu’il ne pouvait être présent. En outre, je note que si M. Thériault avait été présent, il aurait eu le droit de garder le silence et il n’aurait pas été tenu de déposer d’éléments de preuve pour sa défense. Selon le paragraphe 470(2) des Règles, une personne accusée d’outrage ne peut être contrainte de témoigner. C’est à la partie qui allègue la violation qu’il incombe de démontrer l’outrage. En l’espèce, ce fardeau incombe à la demanderesse.

[15]  Avant d’examiner les principes de l’outrage, je note que la demanderesse demande à la Cour de déclarer plusieurs entités coupables d’outrage, à savoir les entités Theriault et M. Theriault lui-même. Toutefois, après examen du dossier, je ne suis pas convaincue que la Cour puisse déclarer l’une des entités Thériault coupable d’outrage. L’une des entités Thériault, Theriault International Marine, est le nom commercial enregistré de la défenderesse en Nouvelle-Écosse et de TI Marine 2018 Ltd au Nouveau-Brunswick. Étant donné que les noms commerciaux n’ont pas de personnalité juridique distincte, je ne vois pas comment Theriault International Marine peut être condamnée pour outrage. En outre, conformément au paragraphe 467(1)b) des Règles, les ordonnances de justification doivent décrire les actes d’outrage allégués de façon « suffisamment détaillée [...] pour [...] permettre [à la personne] de connaître la nature des accusations portées contre elle ». En l’espèce, dans l’ordonnance de justification M. Thériault est accusé de ne pas avoir produit les documents requis dans l’ordonnance de production. Les entités Thériault ne sont pas accusées assez clairement. Je ne suis pas convaincue que la Cour puisse aller au-delà des limites de l’accusation énoncée dans l’ordonnance de justification pour déclarer les autres entités coupables d’outrage.

[16]  Pour ces motifs, je suis d’avis que la seule question à trancher est celle de savoir si M. Thériault est coupable d’outrage au tribunal pour violation de l’ordonnance de production datée du 11 janvier 2019.

[17]  Conformément à l’alinéa 466b) des Règles, une personne qui désobéit à un moyen de contrainte ou à une ordonnance de la Cour est coupable d’outrage au tribunal.

[18]  Il est bien établi que les procédures d’outrage au tribunal sont une question très sérieuse. L’objectif général du pouvoir de sanction pour outrage au tribunal de la Cour est de veiller au bon déroulement du processus judiciaire et de maintenir la dignité et la procédure de la Cour : (arrêt Carey c Laiken, 2015 CSC 17, au paragraphe 30 [Carey]; décision Canada (Revenu national) c Chi, 2018 CF 897, au paragraphe 12 [Chi]; décision Joly c Gadwa, 2018 CF 746, au paragraphe 31 [Joly]; décision Louis Vuitton Malletier, S.A. c Bags O’Fun Inc., 2003 CF 1335, au paragraphe 8).

[19]  Le fardeau de la preuve dans les procédures civiles d’outrage incombe à la partie qui allègue la violation d’une ordonnance judiciaire. Conformément à l’article 469 du règlement, une conclusion d’outrage doit être fondée sur des éléments de preuve hors de tout doute raisonnable (Carey, au paragraphe 32; arrêt Bhatnager c Canada (Ministre de l’emploi et de l’immigration, [1990] 2 RCS 217, à la page 224 [Bhatnager]; Chi, au paragraphe 14; Joly, au paragraphe 32; Canada (Revenu national) c Gray, 2018 CF 549, au paragraphe 28).

[20]  Pour établir l’existence d’un outrage civil, la partie qui allègue la violation d’une ordonnance judiciaire doit répondre au critère en trois parties, établi par la Cour suprême du Canada dans Carey, aux paragraphes 32 à 35 :

  • a) l’ordonnance dont on allègue la violation « formule de manière claire et non équivoque ce qui doit et ne doit pas être fait »;

  • b) la partie à qui on reproche d’avoir violé l’ordonnance doit avoir été réellement au courant de son existence;

  • c) la personne qui aurait commis la violation doit avoir intentionnellement commis un acte interdit par l’ordonnance ou intentionnellement omis de commettre un acte comme elle l’exige.

A.  L’ordonnance de production énonce-t-elle clairement et sans équivoque ce qui doit être fait?

[21]  L’exigence de clarté garantit qu’une personne ne sera pas reconnue coupable d’outrage lorsqu’une ordonnance n’est pas claire (Carey, au paragraphe 33). Il peut être établi qu’une ordonnance n’est pas claire si, par exemple, il manque un détail essentiel sur l’endroit, le moment ou l’individu visé par l’ordonnance, ou si elle est formulée en des termes trop larges (Carey, au paragraphe 33).

[22]  En l’espèce, je conclus hors de tout doute raisonnable qu’aux termes de l’ordonnance de production, M. Thériault était contraint clairement et sans équivoque à accomplir un acte précis au nom des entités Thériault. L’ordonnance de production lui imposait de présenter aux fins d’inspection, lors d’un interrogatoire pour appuyer une exécution, certains documents entrant dans dix-sept (17) catégories de renseignements. Les documents requis sont énumérés comme suit dans l’ordonnance de production :

a)  tous les dépôts de noms de sociétés, de sociétés de personnes ou d’entreprises du 1er janvier 2015 à ce jour;

b)  des registres indiquant le nom de chaque actionnaire/partenaire et des administrateurs/dirigeants du 1er janvier 2015 à ce jour, ainsi que des précisions sur les actions détenues dans les sociétés ou les participations dans des sociétés de personnes;

c)  les états financiers annuels de chaque société ou nom commercial du 1er janvier 2015 à ce jour;

d)  des documents indiquant l’endettement de chacun ainsi que les montants et les copies des accords de garantie, le cas échéant;

e)  des documents fournissant les détails des prêts aux actionnaires ou aux sociétés de personnes, le cas échéant;

f)  des documents indiquant le nombre de personnes/administrateurs/dirigeants/associés employés ou engagés de toute autre manière du 1er janvier 2015 à ce jour;

g)  les documents bancaires ou autres documents financiers du 1er janvier 2015 à ce jour (y compris les détails des comptes liés à chacun);

h)  toutes les transactions financières ou visant d’autres intérêts entre les entreprises/sociétés de personnes et/ou les actionnaires/sociétés de personnes/entreprises du 1er janvier 2015 à ce jour;

i)  des documents indiquant les noms de chaque [traduction] « représentant autorisé » de chaque société, sa date de nomination et, le cas échéant, la date à laquelle ce mandat a pris fin;

j)  les documents relatifs aux biens immobiliers détenus ou loués par chacun d’entre eux et tout accord de garantie les concernant;

k)  les documents relatifs à tout autre bien dans lequel chacun détient un intérêt en droit ou en equity;

l)  les documents relatifs aux investissements financiers de chacun;

m)  les documents concernant toutes les dispositions de biens meubles ou immeubles de chacun, que ce soit par vente, transfert ou cession, à partir du 1er janvier 2015;

n)  les documents liés aux comptes clients pour chaque société de mai 2017 à la date de production;

o)  les déclarations de revenus de chaque société et de M. Thériault du 1er janvier 2015 à la date de production;

p)  des documents indiquant tous les paiements effectués aux actionnaires/administrateurs/dirigeants/associés du 1er janvier 2015 à ce jour par chacun d’eux et la raison de ces paiements;

q)  des documents où sont indiquées toutes les révisions de sites Web par les sites se rapportant à chacune des entités à partir du 1er janvier 2015, à l’exception des modifications apportées aux marchandises offertes en vente à des tiers.

[23]  Bien que l’ensemble des documents requis puisse sembler considérable à première vue, je n’estime pas que le langage soit trop général ou peu clair. De plus, l’ordonnance de production a permis à M. Thériault de demander une dispense de l’obligation de produire les documents énoncés. S’il avait voulu contester l’obligation de produire certains documents, il était précisé dans l’ordonnance de production qu’il pouvait le faire en déposant une requête dans les quatorze (14) jours suivant la signification. Aucune requête de ce type n’a été déposée.

B.  Connaissance de l’ordonnance de production

[24]  Selon le deuxième élément, la partie à qui on reproche d’avoir violé l’ordonnance doive avoir été réellement au courant de son existence : (Carey, au paragraphe 34; Bhatnager, aux pages 224 à 226).

[25]  Le 14 février 2019, l’avocat de la demanderesse a déposé un affidavit de signification assermenté le même jour. Dans l’affidavit, l’avocat de la demanderesse indique que, le 20 janvier 2019, il a envoyé à M. Thériault et aux entités Thériault, par courrier électronique, courrier ordinaire et sous pli recommandé, l’assignation à comparaître, l’ordonnance de production et l’original ou la copie d’un chèque pour les frais de déplacement. Il indique également qu’il n’a reçu aucune indication selon laquelle les courriers électroniques n’avaient pas été acheminés, et il joint une copie des avis de suivi, ainsi qu’une signature confirmant la réception, pour chacune des lettres recommandées.

[26]  Après avoir examiné l’ordonnance de production et l’affidavit de signification, ainsi que les pièces jointes, je conclus hors de tout doute raisonnable que l’assignation à comparaître et l’ordonnance de production ont été signifiées conformément aux conditions énoncées dans l’ordonnance de production, et que la preuve de la signification de l’ordonnance de production a été établie.

[27]  J’estime, en outre, que M. Thériault était réellement au courant de l’ordonnance de production, comme en atteste sa présence à l’interrogatoire pour appuyer une exécution, le 18 février 2019, où il a effectivement produit quatre (4) pages de documents. Bien que les documents soient partiellement expurgés, ils semblent contenir des renseignements relatifs aux coordonnées bancaires et aux activités, qui entrent dans la catégorie des [traduction« documents bancaires ou autres documents financiers du 1er janvier 2015 à ce jour », qui se trouve au paragraphe 3(g) de l’ordonnance de production. M. Thériault a également montré au mandataire de la demanderesse ce qu’il a déclaré être des documents publics relatifs à la constitution en société de TI Marine 2018 Ltd. Si M. Thériault n’avait pas reçu l’assignation à comparaître et l’ordonnance de production, il n’aurait pas assisté à l’examen ni apporté ces documents avec lui. Pour ces motifs, je conclus hors de tout doute raisonnable que M. Thériault était réellement au courant de l’existence de l’ordonnance de production.

C.  L’ordonnance de production a-t-elle été violée intentionnellement?

[28]  Le dernier des trois (3) éléments à établir pour rendre un verdict d’outrage au tribunal est que la partie qui aurait commis la violation doit avoir intentionnellement commis un acte interdit par l’ordonnance ou intentionnellement omis de commettre un acte comme elle l’exige (Carey, au paragraphe 35). En l’espèce, la question en litige est de savoir si M. Thériault a intentionnellement violé l’ordonnance de production.

[29]  J’ai déjà conclu que M. Thériault était au courant de l’assignation à comparaître et de l’ordonnance de production. Bien que l’ordonnance de production exige qu’il produise dix-sept (17) catégories de documents aux fins d’inspection, M. Thériault n’a produit que les quatre (4) pages partiellement expurgées des dossiers bancaires, en plus de documents qu’il prétend être les documents liés à la constitution en société de TI Marine 2018 Ltd – bien qu’il ait refusé de laisser ces derniers au mandataire la demanderesse. Lorsque le mandataire de la demanderesse, M. Jette, l’a informé que dix-sept (17) catégories de documents étaient exigées dans l’ordonnance de production, M. Thériault a répondu qu’il n’avait pas d’autres documents. Étant donné la nature et la portée des documents requis par l’ordonnance de production, et en l’absence d’une explication raisonnable, je trouve très improbable que M. Thériault n’ait pas eu d’autres documents conformes aux dispositions de l’ordonnance de production.

[30]  L’ordonnance de production prévoyait explicitement que si M. Thériault souhaitait obtenir une dispense de l’obligation de produire l’un des originaux ou des copies des documents énumérés, il pouvait le faire en déposant une requête en dispense dans les quatorze (14) jours suivant la signification de l’ordonnance de production. Aucune requête de ce type n’a été déposée.

[31]  De plus, malgré une lettre de l’avocat de la demanderesse datée du 20 février 2019 lui rappelant son défaut de se conformer aux dispositions de l’ordonnance de production, à la date de l’audience pour outrage, M. Thériault n’avait toujours pas mis à la disposition de l’avocat de la demanderesse les documents énumérés dans l’ordonnance de production.

[32]  Pour ces raisons, je conclus hors de tout doute raisonnable que M. Thériault a intentionnellement violé l’ordonnance de production.

[33]  Pour conclure, je conclus que la demanderesse s’est acquittée du fardeau de la preuve qu’il lui incombait en établissant hors de tout doute raisonnable que M. Thériault a violé l’ordonnance de production de la Cour datée du 11 janvier 2019.

[34]  L’article 472 des Règles traite des sanctions, y compris les amendes et les peines d’emprisonnement, qui peuvent être imposées après un constat d’outrage. En voici le texte :

472 Lorsqu’une personne est reconnue coupable d’outrage au tribunal, le juge peut ordonner :

472 Where a person is found to be in contempt, a judge may order that

a) qu’elle soit incarcérée pour une période de moins de cinq ans ou jusqu’à ce qu’elle se conforme à l’ordonnance;

(a) the person be imprisoned for a period of less than five years or until the person complies with the order;

b) qu’elle soit incarcérée pour une période de moins de cinq ans si elle ne se conforme pas à l’ordonnance;

(b) the person be imprisoned for a period of less than five years if the person fails to comply with the order;

c) qu’elle paie une amende;

(c) the person pay a fine;

d) qu’elle accomplisse un acte ou s’abstienne de l’accomplir;

(d) the person do or refrain from doing any act;

e) que les biens de la personne soient mis sous séquestre, dans le cas visé à la règle 429;

(e) in respect of a person referred to in rule 429, the person’s property be sequestered; and

f) qu’elle soit condamnée aux dépens.

(f) the person pay costs.

[35]  Dans l’arrêt Winnicki c Canada (Commission des droits de la personne), 2007 CAF 52 [Winnicki], la Cour d’appel fédérale a donné pour directives d’accorder à une personne l’occasion de formuler des observations au sujet de la peine appropriée avant que la Cour établisse la peine (Winnicki, aux paragraphes 12 à 16). Par conséquent, j’ordonne qu’une autre audience portant sur la peine et les dépens se tienne à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, le 9 janvier 2020, à 13 h 30, heure locale.

[36]  Enfin, comme dans le cas des ordonnances de production et de justification, une copie certifiée conforme de la présente ordonnance peut être signifiée à M. Thériault et à la défenderesse par signification indirecte, comme suit :

  • a) par courrier aux adresses suivantes :

i)   Boîte postale 561, Florenceville-Bristol (N.-B.)  E2J 2C3;

ii)  337, avenue Rothesay, bureau 168, Saint John (N.-B.)  E7L 1Y8;

  • b) par courrier électronique aux adresses suivantes :

i)   captaintheriault@icloud.com;

ii)  mail@timarine.com;

iii)  craig@timarine.com


ORDONNANCE DANS LE DOSSIER T-1498-16

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. Craig Theriault est coupable d’outrage au tribunal pour inobservation de l’ordonnance de la Cour datée du 11 janvier 2019;

  2. La demanderesse doit signifier à Craig Thériault et à la défenderesse une copie certifiée conforme de la présente ordonnance au plus tard le 8 novembre 2019 par signification indirecte comme suit :

  • a) par courrier aux adresses suivantes :

i)   Boîte postale 561, Florenceville-Bristol (N.-B.)  E2J 2C3;

ii)  337, avenue Rothesay, bureau 168, Saint John (N.-B.)  E7L 1Y8;

  • b) par courrier électronique aux adresses suivantes :

i)   captaintheriault@icloud.com;

ii)  mail@timarine.com;

iii)  craig@timarine.com

  1. La demanderesse doit déposer la preuve de cette signification au greffe de la Cour au plus tard le 22 novembre 2019;

  2. L’audience de détermination de la peine se déroulera le 9 janvier 2020 par vidéoconférence, comme suit :

  • a) à 9 h 30, heure normale du Pacifique, l’avocat la demanderesse comparaîtra devant la Cour fédérale au 701, West Georgia Street, Vancouver (Colombie-Britannique);

  • b) à 13 h 30, heure normale de l’Atlantique, M. Thériault comparaîtra lors d’une audience spéciale de la Cour à Fredericton, au 82, rue Westmoreland, bureau 100, Fredericton (Nouveau-Brunswick);

  1. Les dépens de l’ordonnance de justification et de la présente ordonnance doivent être abordés lors de l’audience de détermination de la peine, ainsi que les dépens de l’audience de détermination de la peine elle-même.

« Sylvie E. Roussel »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1498-16

INTITULÉ :

BOWDY’S TREE SERVICE LTD. c THERIAULT INTERNATIONAL LTD.

LIEU DE L’AUDIENCE :

FREDERICTON (NOUVEAU-BRUNSWICK)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 MAI 2019 (en personne et par vidéoconférence)

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE ROUSSEL

DATE DES MOTIFS :

Le 25 octobre 2019

COMPARUTIONS :

J. William Perrett

Pour la DEMANDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

J. William Perrett Law Corp

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour la DEMANDERESSE

 

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