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Date : 20041027

 

Dossier : IMM-33-04

 

Référence : 2004 CF 1509

 

Ottawa (Ontario), le 27 octobre 2004

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

 

 

ENTRE :

 

                                                     TOZIN BILANDI MAYUMA

 

                                                                                                                                          demandeur

 

                                                                             et

 

 

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                                                                                            défendeur

 

 

                               MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 8 décembre 2003 dans laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que le demandeur n’était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger. Le demandeur sollicite l’annulation de la décision de la Commission conformément à l’article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F‑7, et le renvoi de la demande à un autre tribunal pour qu’il statue à nouveau sur celle‑ci.

 


 

QUESTION EN LITIGE

 

[2]               La Commission a‑t‑elle commis une erreur dans l’appréciation de la crédibilité du demandeur?

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, je vais répondre à cette question par la négative et rejeter la présente demande.

 

CONTEXTE

 

[4]               Selon ce qu’il prétend, le demandeur est un citoyen de la République démocratique du Congo (la RDC) qui étudiait en première année de droit à l’Université de Kinshasa (UNIKIN). Il allègue craindre d’être persécuté en raison de ses liens avec une association étudiante appelée « Mouvement des jeunes démocrates congolais » (le MJDC) et de ses opinions politiques. Il dit que sa vie est en danger et qu’un renvoi dans son pays l’expose au risque de peines ou traitements cruels et inusités.

 

DÉCISION CONTESTÉE

 

[5]               La Commission a conclu que le demandeur n’avait pas établi son identité et a conclu que son récit n’était pas crédible. En conséquence, elle a rejeté la demande du demandeur.

 

[6]               Le demandeur a soumis trois documents pour établir son identité. Il a déposé une attestation de naissance, une attestation de perte de pièces d’identité et une carte d’étudiant. La Commission a conclu que l’attestation de naissance n’était pas un document fiable puisque le timbre apposé sur celle‑ci, lequel doit figurer sur tous les documents officiels de la RDC, comportait des irrégularités.

 

[7]               La Commission a également décidé de n’accorder aucune valeur probante à l’attestation de perte de pièces d’identité et à la carte d’étudiant, puisque le récit du demandeur relativement à ces deux éléments de preuve n’était pas crédible.

 

[8]               De plus, la Commission a relevé un certain nombre d’invraisemblances dans le témoignage du demandeur ainsi qu’un certain nombre de contradictions entre le document rempli au point d’entrée et son Formulaire de renseignements personnels (le FRP). La Commission a également conclu que le demandeur n’avait pas agi comme une personne qui craignait véritablement pour sa vie. En fait, le demandeur n’a jamais présenté de demande d’asile alors qu’il était en France.

 

ANALYSE

 


[9]               La norme de contrôle applicable dans les cas d’appréciation de l’identité du demandeur est la décision manifestement déraisonnable : Gasparyan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] A.C.F. no 1103 (1re inst.) (QL), au paragraphe 6, et Umba c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] A.C.F. no 17 (1re inst.) (QL), au paragraphe 55 :

La norme de révision applicable à l’appréciation de pièces d’identité par la Section du statut est le caractère manifestement déraisonnable [...] Le tribunal avait un accès de première main aux pièces d’identité et aux témoignages des demandeurs et dispose en outre d’un niveau élevé de compétence technique dans ce domaine.

 

 

 

[10]           La norme de contrôle applicable dans les affaires mettant en cause des conclusions quant à la crédibilité, qui sont des questions de fait, est également la décision manifestement déraisonnable.

 

Identité

 

[11]           Il est bien établi en droit qu’il incombe au demandeur d’établir son identité (Harakrishna c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. no 810 (1re inst.) (QL), au paragraphe 9). La preuve documentaire établit que, depuis juin 1998, tous les documents officiels en RDC doivent être payés en « francs congolais » (FC). La confirmation d’un tel paiement se fait par l’apposition d’un timbre portant la mention « FC ». Cependant, en l’espèce, le timbre apposé sur l’attestation de naissance porte la mention « FF » (ce qui signifie francs français), ce qui est inacceptable en RDC depuis 1998. En conséquence, je crois que la Commission n’a pas commis d’erreur manifestement déraisonnable en remettant en question l’authenticité de l’attestation de naissance.

 

[12]           La Commission a conclu qu’aucune valeur probante ne devrait être accordée à la carte d’étudiant. Les motifs exposés ne sont pas non plus manifestement déraisonnables étant donné les explications insuffisantes fournies par le demandeur relativement à l’année d’obtention de ce document et au moment où il avait commencé ses études.

 

Crédibilité

 

[13]           Bien qu’elle ait conclu que demandeur ne s’était pas acquitté de son fardeau de preuve pour l’établissement de son identité, la Commission a néanmoins examiné la demande du demandeur afin de déterminer s’il était un réfugié au sens de la Convention ou une personne à protéger. Elle a toutefois conclu que le récit du demandeur n’était pas crédible en raison d’invraisemblances quant à la façon dont le demandeur avait quitté son pays.

 

[14]           Le demandeur n’a pas déposé le passeport de la RDC qu’il avait utilisé pour son voyage entre le Congo-Brazzaville et la France. Vu que le demandeur n’avait pas établi son identité de manière convaincante, la Commission a cité la décision Elazi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 212 (1re inst.) (QL). J’estime qu’il était loisible à la Commission de le faire.

 


[15]           Le demandeur n’a pas réussi à nommer les cours qu’il avait suivi à l’école de droit et ce qu’il avait appris. La Commission a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité du demandeur. Je ne suis pas convaincu que le demandeur a établi qu’une erreur susceptible de contrôle avait été commise en l’espèce.

 

[16]           Enfin, dans la présente affaire, le demandeur a résidé en France pendant quatre mois sans présenter de demande d’asile. Le fait de tarder à demander l’asile, sans motifs sérieux, nie la preuve d’une crainte subjective de persécution, et il est loisible à la Commission de mettre en doute la crédibilité du demandeur pour ce motif (Dcruze c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 987 (1re inst.) (QL), au paragraphe 6).

 

[17]           Je ne peux pas conclure que la Commission a rendu sa décision de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte de la preuve dont elle disposait.

 

[18]           Les parties ne se sont pas prévalues de la possibilité qui leur a été donnée de soumettre une question grave de portée générale à certifier. La présente affaire n’en soulève aucune.

 

                                       ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

« Michel Beaudry »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-33-04

 

INTITULÉ :                                                  TOZIN BILANDI MAYUMA

c.        

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         LE 14 OCTOBRE 2004

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                  LE JUGE BEAUDRY

 

DATE DES MOTIFS :                                 LE 27 OCTOBRE 2004

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jeffrey Platt                                                    POUR LE DEMANDEUR

 

Marie-Claude Paquette                                   POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jeffrey Platt                                                    POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

Morris A. Rosenberg                                       POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

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