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                                                                                                                    Date : 20040721

                                                                                                              Dossier : T-1720-03

                                                                                                    Référence : 2004 CF 1018

Ottawa (Ontario), le 21 juillet 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

ENTRE :

                                MOHAMMAD HASSAN MODIR SHANECHI

                                                                                                                              demandeur

                                                                      et

               LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                      intimé

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LA JUGE SNIDER

[1]                M. Mohammad Hassan Modir Shanechi, l'appelant, désire devenir citoyen canadien. Il est arrivé avec sa famille au Canada à titre de résident permanent le 19 juillet 1999 et a présenté sa demande de citoyenneté le 20 septembre 2002. Depuis son arrivée au Canada, l'appelant s'est absenté du pays durant les périodes suivantes :


       DE

J      M       A

        À

J     M      A

      DESTINATION

MOTIF DE L'ABSENCE

No de JOURS TOTAL

01    10    1999

10 10    1999

Iran

Vente de biens

9

05    12    2000

10    07 2001

Iran, Émirats arabes unis, É.-U.

Vente de biens, travail

217

30    07    2001

03    08 2001

É.-U.

Travail

4

14    08    2001

20    09 2002

É.-U.

Travail

402

[2]         Ainsi, il manquait à l'appelant 569 jours de résidence par rapport à la condition de 1 095 jours stipulée à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C-29 (la Loi).

[3]         Par voie de décision rendue le 21 juillet 2003, un juge de la citoyenneté a rejeté sa demande de citoyenneté. Le juge de la citoyenneté a conclu que l'appelant n'a pas établi ni maintenu sa présence au Canada. Il a également refusé d'exercer son droit discrétionnaire en vertu des paragraphes 5(3) et (4) de la Loi. Il s'agit d'un appel de cette décision.

Questions

[4]         L'appelant soulève un certain nombre de questions. Toutefois, la question juridique est la suivante :


1.          Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur lorsqu'il a conclu que le demandeur n'avait pas respecté la condition prescrite par la Loi en matière de résidence?

Analyse

[5]         Il est bien établi dans la jurisprudence de la Cour que le bien-fondé est la norme d'examen applicable visant la question de résidence soulevée en l'espèce (Lam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 410 (1re inst.) (QL) au paragraphe 15, appliquée dans la décision Sharma c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 1763 (C.F.) (QL) au paragraphe 31 et Linde c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration),[2001] A.C.F. no 1085 (1re inst.) (QL)). En outre, « lorsqu'un juge de la citoyenneté, dans des motifs clairs qui dénotent une compréhension de la jurisprudence, décide à bon droit que les faits satisfont sa conception du critère législatif prévu à l'alinéa 5(1)c), le juge siégeant en révision ne devrait pas remplacer arbitrairement cette conception par une conception différente de la condition en matière de résidence. » (Lam, précitée, paragraphe 15).

[6]         En déterminant si l'appelant avait satisfait à la condition en matière de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi, le juge de la citoyenneté est censé avoir appliqué le critère établi par le juge Reed dans la décision Re Koo, [1993] 1 C.F. 286.


[7]         Pour les motifs qui suivent j'ai conclu que le juge de la citoyenneté a commis quatre erreurs importantes qui démontrent, dans ce cas en particulier, qu'il n'a pas bien compris le critère établi dans la décision Re Koo.

1.         Nature de l'emploi aux États-Unis

[8]         La cinquième question de l'analyse de l'affaire Re Koo et la conclusion du juge de la citoyenneté s'énoncent comme suit :

5.              L'absence physique est-elle imputable à une situation manifestement temporaire (par exemple, avoir quitté le Canada pour travailler comme missionnaire, suivre des études, exécuter un emploi temporaire ou accompagner son conjoint, qui a accepté un emploi temporaire à l'étranger)?

[traduction]

Vous avez un poste permanent de professeur au New Mexico Institute of Technology.


[9]         L'appelant a travaillé aux États-Unis. Toutefois, la preuve indique que le poste que l'appelant a commencé à occuper en août 2001 est simplement temporaire et non permanent. L'emploi a consisté en deux contrats successifs au New Mexico Institute of Mining and Technology. La copie du contrat d'emploi indique clairement que son poste de professeur agrégé n'est que pour une période de neuf mois. Par conséquent, la conclusion du juge selon laquelle son emploi aux États-Unis est permanent est erronée. Il ne s'agit pas d'un cas où j'aurais pu arriver à une conclusion différente au terme de l'examen de la preuve; les faits indiquent clairement que l'appelant n'occupait pas un poste permanent au New Mexico Institute.

[10]       L'intimé soulève que cette cour et la Cour d'appel fédérale ont conclu à plusieurs reprises que la décision de travailler à l'extérieur du Canada, peu importe le motif, demeure un choix personnel qui ne peut l'emporter sur les conditions en matière de résidence pour obtenir la citoyenneté canadienne (Chehade (Re), [1994] A.C.F. no 1461 (1re inst.) (QL); Linde, précitée, paragraphe 24). L'intimé soutient que l'appelant avait choisi de chercher et trouver un emploi à l'extérieur du Canada. Bien que la décision d'accepter un poste soit toujours, d'une certaine manière, un choix personnel, je suis convaincue que l'appelant dans le cas en l'espèce n'aurait pas choisi la situation précaire de professeur contractuel sans aucune garantie quant à la période d'occupation du poste s'il avait réussi à obtenir un poste dans son domaine d'expertise dans une université canadienne. De plus, la preuve - convaincante, selon moi - présentée devant le juge de la citoyenneté indiquait que l'appelant espérait acquérir, en acceptant ce poste, de l'expérience nord-américaine qui lui permettrait d'obtenir un poste au Canada.

[11]       La preuve indique également que l'appelant a continué à chercher de l'emploi au Canada. Ces actions ne concordent pas avec l'occupation d'un poste permanent au Nouveau-Mexique.


[12]       Enfin, je remarque que l'emploi n'était ni dans son pays d'origine (Iran) ni un poste que l'appelant occupait avant son arrivée au Canada. Chacun de ces facteurs étaye la conclusion que l'emploi aux États-Unis était temporaire et n'était pas prévu à long terme. Il me semble que l'appelant a cherché et obtenu un emploi à l'étranger avec hésitation seulement et, dans une certaine mesure, comme solution temporaire.

[13]       Les décisions mentionnées par l'intimé se distinguent de la situation qui m'est présentée. Contrairement à la décision Re Chehade, précitée, l'appelant en l'espèce a déployé des efforts considérables pour obtenir un emploi au Canada. Dans la décision Linde, précitée, l'appelante a décidé de suivre son mari parti travailler en Roumanie plutôt que chercher du travail au Canada. Il n'y a aucune preuve à cet égard dans le présent cas.

[14]       L'intimé m'a également reporté à la décision du juge O'Keefe relativement à Sharma, précitée. Encore une fois, le cas est très différent. Dans ce cas, l'appelant, n'ayant initialement passé que treize jours au Canada et renouvelé son contrat d'emploi à l'étranger « à plusieurs reprises » , ne s'est pas établi au Canada. Ce cas est différent par les faits qui lui sont propres.

[15]       Donc, en ce qui concerne ce facteur du critère de la décision Re Koo, le juge de la citoyenneté a commis une erreur.


2.          Forme de la présence physique au Canada

[16]       La troisième question du critère de la décision Re Koo et la réponse du juge de la citoyenneté s'énoncent comme suit :

3.              La forme de présence physique de la personne au Canada dénote-t-elle que cette dernière revient dans son pays ou, alors, qu'elle n'est qu'en visite?

[traduction]

La forme consiste en des visites occasionnelles (non souligné dans le texte) au Canada comme vous avez répondu à la question 13b du Questionnaire sur la résidence.

[17]       La réponse de l'appelant à la question 13(b) du Questionnaire sur la résidence s'énonçait comme suit :

[traduction]

Durant les premiers mois, je suis retourné occasionnellement au Canada. Mais après le 11 septembre 2001, étant donné les mesures de sécurité, chaque fois que j'aurais voulu quitter les États-Unis, j'aurais eu à redemander un nouveau visa pour rentrer. Pour me délivrer un visa, le consulat américain à Toronto devait effectuer une vérification de sécurité en passant par Washington, ce qui prend habituellement entre deux et trois mois. J'aurais perdu mon emploi si j'étais venu. J'ai donc été en quelque sorte emprisonné aux États-Unis.

[18]       Dans son analyse du troisième facteur, le juge de la citoyenneté ne tient pas compte de l'explication de l'appelant relativement à son absence physique du Canada après le 11 septembre 2001. Plus tard dans la décision, le juge rejette l'explication lorsqu'il déclare :


[traduction]

Je comprends les commentaires sur votre situation aux États-Unis après le 11 septembre 2001, toutefois vos absences ont commencé bien avant ça.

[19]       À mon avis, le juge de la citoyenneté, contrairement à sa déclaration, n'a pas compris dans quelle situation était placé l'appelant, pour des motifs hors de son contrôle, après le 11 septembre. Il y a eu absences avant le 11 septembre, mais elles étaient toutes explicables et n'avaient aucun rapport avec la période suivant cette date. Le juge de la citoyenneté n'a pas tenu compte de l'incidence des nouvelles conditions en matière de visa sur la capacité de l'appelant à poursuivre son contrat d'emploi s'il était retourné au Canada. Cette omission constitue une erreur.

[20]       L'objet du critère dans la décision Re Koo consiste à autoriser les juges de la citoyenneté à tenir compte de circonstances spéciales qui s'appliquent aux demandeurs de la citoyenneté. En ne tenant pas compte de l'explication de l'appelant relativement à l'absence de visites après le 11 septembre 2001, le juge de la citoyenneté n'a pas utilisé adéquatement cet aspect du critère de la décision Re Koo.

3.          Qualité des attaches avec le Canada

[21]       Le dernier facteur de l'analyse de la décision Re Koo concerne la question de la « qualité » des attaches du demandeur avec le Canada. La question d'analyse de ce sixième facteur et la conclusion du juge s'énoncent comme suit :


6.              Quelle est la qualité des attaches du requérant avec le Canada : sont-elles plus importantes que celles qui existent avec un autre pays?

[traduction]

La qualité de vos attaches avec le Canada repose sur le fait que votre femme et vos enfants sont au Canada. Toutefois, en raison de votre absence pratiquement continue du Canada depuis le 5 décembre 2000, en raison de votre emploi aux États-Unis, vous avez centralisé votre mode de vie aux États-Unis. La qualité des attaches avec les États-Unis est très substantielle et votre relation avec le Canada est très précaire et ambivalente.

[22]       La question demande au juge de la citoyenneté d'établir une comparaison afin de déterminer si les attaches avec le Canada sont plus substantielles que celles avec les États-Unis. Le juge, dans son analyse, a tenu compte uniquement de l'emploi de l'appelant aux États-Unis. Outre le fait que la famille de l'appelant soit au Canada, le juge ne se reporte à aucun élément de preuve qui lui aurait permis de faire la comparaison.

[23]       J'ai examiné le dossier et, outre l'emploi temporaire aux États-Unis et un appartement loué au Nouveau-Mexique, l'appelant n'a aucune attache avec les États-Unis. Par ailleurs, l'appelant demeure près de sa femme et de ses enfants au Canada, malgré cette relation à distance. Il présente tous les indices de résidence. De plus, il paie ses impôts au Canada. Enfin, il a continué à chercher de l'emploi au Canada. Aucun de ces éléments n'a été utilisé dans la comparaison nécessaire pour évaluer adéquatement ce facteur.


[24]       L'omission de se reporter à la preuve pertinente pour évaluer la qualité des attaches de l'appelant avec le Canada constitue, à mon avis, une autre erreur commise par le juge de la citoyenneté.

4.          Motivation

[25]       Au terme de l'analyse des facteurs de la décision Re Koo, le juge de la citoyenneté a ajouté un certain nombre de commentaires divers à sa décision. Dans un des paragraphes, il fait référence à un commentaire formulé par l'appelant dans son questionnaire.

[traduction]

Votre réponse à la question 13 du Questionnaire sur la résidence et dans la lettre jointe à celui-ci, les « commentaires » de conclusion indiquent qu'actuellement vous demandez la citoyenneté principalement pour la commodité d'avoir un passeport canadien qui vous permettrait de visiter occasionnellement (non souligné dans l'original) votre famille au Canada sans avoir l'inconvénient de faire une demande de visa pour retourner aux États-Unis chaque fois. Notre passeport est une conséquence de la citoyenneté canadienne, pas une raison pour l'obtenir. La citoyenneté canadienne n'est pas accordée comme « pavillon de complaisance » . Votre emploi contractuel aux États-Unis dépend de votre propre décision, sachant bien que vous devrez être absent longtemps et pratiquement en permanence du Canada. Les absences pour des motifs purement personnels et de nature volontaire ne peuvent être considérées comme des périodes de résidence en vertu de la Loi.

[26]       Le commentaire sur lequel reposait cette partie de la décision a été inclus par l'appelant dans la section des « commentaires » finaux du Questionnaire sur la résidence et s'énonce comme suit :


[traduction]

Lorsque j'aurai la citoyenneté canadienne, je n'aurai plus besoin de demander un visa de rentrée aux États-Unis. Ainsi je pourrai visiter occasionnellement ma famille, qui vit à Toronto. Je pourrais également venir au Canada pour passer des entrevues d'emploi, si un des endroits où j'ai posé ma candidature m'en fait la demande.

[27]       Cette partie de la décision du juge présente deux problèmes. Le premier étant qu'il s'agit d'une présentation erronée des commentaires inscrits par l'appelant dans sa demande. Le juge de la citoyenneté a interprété ce commentaire final comme étant la première motivation de sa demande de citoyenneté. Placés dans le contexte de l'ensemble de la demande, ces commentaires finaux étaient totalement compréhensibles comme l'énumération, par l'appelant, des commentaires positifs liés à l'obtention de la citoyenneté. Ces commentaires ne peuvent et ne devraient pas être lus comme étant sa motivation à formuler cette demande. Si cette section du questionnaire avait été intitulée « Pourquoi demandez-vous la citoyenneté? » ou « Motif principal de la demande de citoyenneté » , le juge de la citoyenneté aurait conclu à juste titre que l'appelant demandait la citoyenneté « principalement pour la commodité d'avoir un passeport canadien » . Mais il est tout à fait clair d'après le dossier que l'appelant énonçait une conséquence de l'obtention de la citoyenneté plutôt que sa seule motivation.


[28]       Le deuxième problème est que le critère de la décision Re Koo ne mentionne aucunement la motivation comme facteur pour évaluer si le demandeur a centralisé son mode d'existence au Canada. Par conséquent, en tenant compte de cet aspect non pertinent, le juge de la citoyenneté n'a pas appliqué le droit adéquatement et a commis une erreur.

Conclusion

[29]       Pour ces motifs, l'appel sera accueilli. En ce qui concerne le recours dans un appel en matière de citoyenneté comme celui-ci, je relève les commentaires de Mme la juge Lemieux dans la décision Wu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 C.F 1re inst. 435, paragraphe 21 où elle a déclaré :

[traduction]

[21]          À titre de recours, la demanderesse demande que je rende la décision que le juge de la citoyenneté aurait dû rendre - approuver sa demande. La décision de la juge Reed dans l'affaire Ma c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 288, où elle a écrit au paragraphe 10 :

Paragraphe 10 Je ne suis pas convaincue qu'il s'agit là de la seule solution qui s'offre à moi, ni que je n'ai pas le pouvoir en pareil cas d'infirmer la décision du tribunal inférieur et de renvoyer la demande pour nouvel examen. Une procédure d'appel renferme le pouvoir inhérent de renvoyer la question pour nouvelle audition. En fait, même en vertu de l'ancienne procédure d'audition de novo, le renvoi pour nouvelle audition était ordonné lorsqu'un juge de la citoyenneté avait omis d'examiner des questions qui auraient dû être prises en compte : voir Affaire intéressant Moa-Song Chang, (T-1183-97, le 5 février 1998).

[22]          Pour les motifs précédents, le présent appel est accueilli et l'affaire est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour la tenue d'une nouvelle audience.


[30]       Le recours approprié dans le cas en l'espèce est le même que celui utilisé par la juge Lemieux. L'appel sera accueilli et l'affaire est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour la tenue d'une nouvelle audience.

                                                          ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE :

1.          L'appel soit accueilli;

2.         La décision du juge de la citoyenneté est infirmée;

3.          L'affaire est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour la tenue d'une nouvelle audience.

      « Judith A. Snider »

                                                                                                                                                                                                  

     Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         T-1720-03

INTITULÉ :                                        MOHAMMAD HASSAN MODIR SHANECHI

c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                Le 30 juin 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE   

ET ORDONNANCE :                        Le 21 juillet 2004

COMPARUTIONS :

Geraldine MacDonald                                                    POUR LE DEMANDEUR

Amina Riaz                                                                    POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Geraldine MacDonald                                                    POUR LE DEMANDEUR

Avocate et procureure

Toronto (Ontario)                                                        

Morris Rosenberg                                                          POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

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