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Date : 20040811

Dossier : T-968-04

Référence : 2004 CF 1103

Ottawa (Ontario), le 11 août 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

ENTRE :

  LE MINISTRE DU TRAVAIL

   demandeur

  et

  GEORGE SMITH TRUCKING LIMITED, FLORENCE SMITH,

GEORGE SMITH et NICK TALAGA

  défendeurs

  MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O’KEEFE

[1]  Il s’agit d’une requête présentée par George Smith visant à obtenir une ordonnance permettant à George Smith, qui n’est pas avocat, de représenter la défenderesse, George Smith Trucking Limited.

[2]  La Cour doit se prononcer sur une audience de justification au sens de l’article 467 des Règles des Cours fédérales (1998).

[3]  La requête explique que le motif pour lequel il est demandé que George Smith représente la société est que George Smith et George Smith Trucking Limited sont une seule et même personne.

[4]  L’affidavit de George Smith indique que George Smith est autorisé à représenter George Smith Trucking Limited.

[5]  Question en litige

La Cour devrait-elle rendre une ordonnance autorisant George Smith à représenter George Smith Trucking Company ou à agir pour le compte de celle-ci?

[6]  L’article 120 des Règles des Cours fédérales (1998) se lit comme suit :

120. Une personne morale, une société de personnes ou une association sans personnalité morale se fait représenter par un avocat dans toute instance, à moins que la Cour, à cause de circonstances particulières, ne l’autorise à se faire représenter par un de ses dirigeants, associés ou membres, selon le cas.

120. A corporation, partnership or unincorporated association shall be represented by a solicitor in all proceedings, unless the Court in special circumstances grants leave to it to be represented by an officer, partner or member, as the case may be.

[7]  Dans la décision Source Seville Corp. c. Source Personnel Inc. [1995] A.C.F. no 1658 (Q.L.) (CFPI), le juge Rouleau a abordé l’ancien paragraphe 300(2) des Règles des Cours fédérales aux paragraphes 4, 5, 6, 7 et 8 :

_ 4  Premièrement, l’obligation de prouver des “circonstances spéciales” qui est imposée par le paragraphe 300(2) des Règles de la Cour fédérale constitue une lourde charge et exige que la Cour soit saisie d’éléments de preuve clairs et non équivoques avant de pouvoir exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est accordé de faire une exception à la règle générale voulant qu’une personne morale soit représentée par un avocat. La preuve produite par la défenderesse ne satisfaisait pas à ce critère élevé.

_ 5  Deuxièmement, on entend par “circonstances spéciales” des circonstances qui sont inhabituelles, peu communes et exceptionnelles, et qui sont attribuables à des forces extérieures par opposition à des actes volontaires de la défenderesse. Aucune preuve de “circonstances spéciales” n’avait été produite par la défenderesse.

_ 6  Troisièmement, la preuve produite par la défenderesse ne remplissait pas les deux conditions essentielles, à savoir (1) que la personne morale avait autorisé M. Kichuk à la représenter et (2) que la personne morale était impécunieuse. 

[...]

_ 8  En dernier lieu, pour établir son “impécuniosité”, la défenderesse était tenue de prouver non seulement qu’elle ne possédait pas elle-même suffisamment d’éléments d’actif, mais aussi qu’elle était incapable de se procurer les fonds nécessaires auprès de ses actionnaires. La Cour n’a pas été saisie d’éléments de preuve concernant l’impécuniosité des actionnaires de la défenderesse.

L’article 120 actuel exige aussi des circonstances particulières.

[8]  Dans l’arrêt S.A.R. Gump Relocation Inc. et al. c. Canada (Procureur général) (2002), 289 N.R. 163 (C.A.F.), le juge Strayer a examiné une demande ayant trait à une société défenderesse qui souhaitait que son président la représente au lieu d’un avocat. Le juge Strayer a mentionné à la page 164 :

Les demanderesses souhaitent obtenir une telle ordonnance parce qu’elles n’ont plus les moyens de retenir les services d’un avocat pour les représenter.


Avant de rendre une telle ordonnance dans les présentes circonstances, la Cour doit être convaincue que les personnes morales n’ont réellement pas les moyens de retenir les services d’un avocat et qu’elles ont effectivement autorisé la personne visée par la demande d’autorisation à les représenter. (Source Services Corp. c. Source Personal Inc. (1995), 96 F.T.R. 161 (T.D.)). En l’espèce, aucune preuve manifeste n’a été produite relativement à l’un ou l’autre de ces points. Il convient en outre de se demander si le représentant proposé devra également témoigner puisque les avocats ne peuvent comparaître dans les affaires où ils agissent aussi comme témoins. (Voir la décision Kobetek Systems Ltd. c. R., [1998] F.T.R. Uned. 9; [1998]1 C.T.C. 308). Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, Susan A. Ryan a déposé un affidavit supposé (non encore signé), ce qui laisse penser qu’elle s’attend à agir à la fois comme principal témoin et comme représentante des demanderesses. Voilà une autre circonstance qui incite la Cour à ne pas rendre une ordonnance en application de l’article 120 des règles.

La requête sera donc rejetée sans dépens.

[9]  La jurisprudence de notre Cour établit que le demandeur doit présenter des éléments de preuve clairs afin de persuader la Cour d’utiliser sa discrétion et d’accorder une exemption afin de permettre à George Smith de représenter la société défenderesse, George Smith Trucking Limited. La preuve par affidavit indique seulement que George Smith est autorisé à représenter George Smith Trucking Limited. Je suis convaincu que la société défenderesse a autorisé George Smith à la représenter.

[10]  Le demandeur n’a cependant pas démontré l’existence de circonstances spéciales. Il n’existe aucun élément de preuve me permettant d’accueillir la requête d’ordonnance autorisant George Smith à représenter la société défenderesse.

[11]  La requête est par conséquent rejetée.

[12]  Aucuns dépens ne seront adjugés dans la requête.


  ORDONNANCE

[13]  LA COUR ORDONNE que la requête sollicitant une ordonnance permettant à George Smith de représenter la société défenderesse soit rejetée.

   « John A. O’Keefe » 

Juge de la Cour fédérale

Ottawa (Ontario)

Le 11 août 2004


  COUR FÉDÉRALE DU CANADA

  PREMIÈRE INSTANCE

  AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER : T-968-04

INTITULÉ : LE MINISTRE DU TRAVAIL

- et -

GEORGE SMITH TRUCKING LIMITED,

FLORENCE SMITH, GEORGE SMITH et

NICK TALAGA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :    Winnipeg (Manitoba)

DATE DE L’AUDIENCE :    Le 12 juillet 2004

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE : LE JUGE O’KEEFE

DATE DES MOTIFS :  Le 11 août 2004

COMPARUTIONS :

Duncan Fraser

Jessica Cogan

POUR LE DEMANDEUR

George Smith

Pour son propre compte

POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DEMANDEUR

George Smith

Winnipeg (Manitoba)

POUR LES DÉFENDEURS


 

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