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Date : 20001102


Dossier : IMM-1112-99



CALGARY (ALBERTA), LE JEUDI 2 NOVEMBRE 2000


EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE TEITELBAUM


ENTRE :


     MIZANUR RAHAMAN


     demandeur


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION


     défendeur



     ORDONNANCE

     Pour les motifs énoncés dans mes motifs d'ordonnance, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     La question suivante est certifiée :


         Une simple conclusion qu'un revendicateur du statut de réfugié n'est pas un témoin crédible suffit-elle à entraîner l'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi sur l'immigration?



Max M. Teitelbaum

J.C.F.C.



Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.







Date : 20001102


Dossier : IMM-1112-99



ENTRE :


     MIZANUR RAHAMAN


     demandeur


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION


     défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TEITELBAUM

[1]      La présente demande de contrôle judiciaire, introduite en vertu de l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (la Loi), porte sur une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié en date du 18 février 1999, par laquelle elle a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention. Le demandeur sollicite une ordonnance annulant cette décision et renvoyant l'affaire devant un nouveau tribunal de la Commission pour réexamen.

LES FAITS

[2]      Le demandeur a 26 ans et il est citoyen du Bangladesh. Il revendique le statut de réfugié au motif qu'il craint avec raison d'être persécuté du fait de ses opinions politiques.

[3]      En février 1989, le demandeur a rejoint les rangs de la section jeunesse du Parti nationaliste du Bangladesh (PNB), le Jatiyatabadi Dal (JJD).

[4]      Le demandeur soutient qu'en mars 1990, il a été attaqué par des voyous affiliés à la Ligue Awami (LA) et qu'il s'est plaint à la police sans succès.

[5]      Le demandeur soutient qu'en juillet et septembre il a été battu par des partisans de la LA et du Parti Jatiya (PJ). Encore une fois, ses plaintes à la police n'ont pas produit de résultat.

[6]      Le demandeur soutient qu'en octobre 1990, des policiers l'ont battu à l'occasion d'une manifestation anti-gouvernementale.

[7]      Le demandeur soutient que lors des élections parlementaires de 1991, des hommes de main de la LA l'ont battu avec des bâtons de hockey. Cette agression n'a été suivie d'aucune arrestation.

[8]      Le demandeur soutient qu'en août 1992, il a de nouveau été agressé par des hommes de main de la LA et que les policiers n'ont pu les arrêter. Toutefois, les policiers sont intervenus rapidement lors d'un incident semblable en février 1993.

[9]      En avril et mai 1994, des hommes de main auraient attaqué le demandeur ainsi que d'autres partisans du JJD. Suite à ces incidents, les policiers ont donné suite aux plaintes.

[10]      En septembre 1995, après l'appel à une grève de 72 heures, les hommes de main de la LA ont fait exploser une bombe près des bureaux de la section locale du JJD située dans le district électoral du demandeur. Le demandeur n'a pas été blessé lors de cet incident.

[11]      En février 1996, des hommes de main de la LA ont attaqué le camp électoral où le demandeur travaillait le jour des élections.

[12]      Le demandeur soutient qu'au cours de la campagne électorale de 1996, le kiosque où il avait espéré vendre des montres a été saccagé par des hommes de main de la LA. Le demandeur soutient que les policiers ont réclamé des pots-de-vin pour intervenir.

[13]      Le demandeur déclare qu'il a été inscrit sur une liste de personnes soupçonnées par la police d'activités terroristes. Craignant pour sa vie, le demandeur a fui le Bangladesh pour se rendre au Canada.

LA DÉCISION DE LA COMMISSION

[14]      L'essentiel de la décision de la Commission se trouve dans les paragraphes suivants, qui commencent à la page 2 de ses motifs :

         Le revendicateur prétend qu'il est impossible d'obtenir une protection au Bangladesh parce que la police défend le gouvernement au pouvoir, et il y a aussi le problème de la corruption. Et pourtant, lorsqu'on lui a demandé pourquoi il n'avait pas obtenu une aide entre 1991 et 1996 lorsque son parti PNB était au pouvoir, il a répondu qu'il ne savait pas pourquoi, puis il a dit que les hommes de main s'étaient cachés et que la police n'avait pas pu les trouver. À cet égard, le tribunal aimerait se référer à la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Villafranca, où il est question du caractère adéquat de la protection. La Cour mentionne ce qui suit :
             Aucun gouvernement qui professe des valeurs démocratiques ou affirme son respect des droits de la personne ne peut garantir la protection de chacun de ses citoyens en tout temps. Ainsi donc, il ne suffit pas que le demandeur démontre que son gouvernement n'a pas toujours réussi à protéger des personnes dans sa situation.
         En outre, lorsque les agresseurs ne peuvent être identifiés, la tâche des autorités, qui devraient offrir la protection, devient beaucoup plus difficile.
         Le tribunal a alors demandé au revendicateur sur quoi il se fondait pour affirmer que la police était à sa recherche parce qu'elle le soupçonnait de s'adonner à des activités terroristes. Le revendicateur a répondu que c'est sa mère qui l'avait mis au courant. Lorsqu'on lui a demandé des détails sur la façon dont il avait obtenu cette liste d' « inquisition » , il n'a pu fournir de réponse raisonnable. De plus, lorsqu'on lui a demandé si d'autres membres avaient aussi été inscrits sur cette liste, il a répondu par l'affirmative et a dit que tous les membres du comité exécutif de sa section locale se cachaient pour cette raison. Et pourtant, dans la pièce P-3, qui est une lettre de la section locale du JJD à Mirpur, où le revendicateur était membre du comité exécutif, il n'est nullement fait mention du problème connexe avec la police, que ce soit dans le cas du revendicateur ou des membres du comité exécutif. Lorsqu'on lui a demandé pourquoi cela n'était pas mentionné, le revendicateur n'a pas fourni d'explication.
         Dans son témoignage, le revendicateur a aussi dit qu'à Mirpur, il n'y avait pas de problèmes de violence entre son parti politique et d'autres partis. Et pourtant, la preuve documentaire contredit cette allégation. De fréquents affrontements et de violentes attaques par les partisans locaux d'un groupe contre un autre sont chose courante. En ce qui concerne cette question, c'est seulement après l'avoir mis devant ces faits que le revendicateur a effectivement affirmé qu'il n'était pas là au début de septembre 1995 lorsqu'il y a eu une grève générale à Mirpur, et c'est seulement après qu'on eut beaucoup insisté et qu'on l'eut mis devant la preuve documentaire que le revendicateur a reconnu qu'il avait entendu parler des affrontements entre le JJD et la LA qui avaient abouti à l'assassinat de trois des partisans de la LA. Le tribunal juge qu'il s'agit là d'un élément qui compromet la crédibilité du revendicateur. Cette façon d'agir démontre le caractère sélectif de ses réponses aux questions posées par la Commission, et c'est seulement lorsque des preuves contradictoires lui sont présentées que le revendicateur décide de dire la vérité.
         Une autre question pour laquelle le tribunal n'a pas reçu d'explication raisonnable a trait à la pièce P-4. Dans sa lettre, l'avocat mentionne des renseignements obtenus auprès de la mère du revendicateur que le revendicateur lui-même n'avait pas vérifiés. L'avocat agit essentiellement comme rapporteur de ce que la mère du revendicateur a affirmé. En nous fondant sur notre spécialisation, ainsi que sur les autres lettres de l'avocat que nous avons vues, nous accordons très peu de valeur probante à ce document étant donné que l'avocat lui-même n'ajoute rien qui pourrait améliorer le contenu du FRP. En outre, l'avocat ne décrit aucunement les problèmes qu'a eus le revendicateur en 1994, et pour lesquels ses services personnels ont été retenus et reçus par le revendicateur relativement à des problèmes politiques semblables.
         Une autre question sur laquelle le tribunal aimerait se pencher concerne la pièce P-8 qui est une montre avec la photographie du chef du PNB. Le revendicateur a affirmé que mille montres avaient été commandées par l'entreprise que possèdent sa mère et son oncle maternel et pour laquelle il travaillait. On lui a aussi demandé si d'autres types de montres étaient fabriquées. Il a répondu par l'affirmative. Lorsqu'on lui a demandé si les montres étaient toutes fabriquées avec les mêmes matériaux, il a répondu que celles qui étaient fabriquées avec des matériaux japonais étaient de meilleure qualité que celles qui étaient fabriquées avec des matériaux provenant de Hong Kong. À la question de savoir s'ils fabriquaient des reproductions ou des montres contrefaites, le revendicateur a répondu que les montres fabriquées avec des matériaux du Japon étaient plus dispendieuses, et que les reproductions fabriquées avec des matériaux en provenance de Hong Kong l'étaient moins. Lorsqu'on lui a demandé si, à son avis, cela était contraire au droit des brevets, il a répondu que non parce que les reproductions ne se vendaient pas au même prix. Même cette question n'est pas en soi reliée à la revendication du statut de réfugié, elle donne une idée de l'interprétation sélective des faits de la part du revendicateur. Il y a un autre aspect à cette revendication qui est incompréhensible et pour lequel le revendicateur n'a fourni aucune explication. Le revendicateur aurait apparemment été harcelé et battu à maintes reprises entre 1990 et 1996, surtout lorsque son parti était au pouvoir. Pourtant, il n'a jamais songé à quitter le pays. Au cours de cette période, il aurait été, semble-t-il, disposé à demeurer dans son pays et à être battu par l'opposition, tant que son parti était au pouvoir. Dès que son parti a perdu le pouvoir, les attaques ont été interprétées comme de la persécution. Il soutient que lorsque son parti a été défait aux élections, la police s'est mise à sa recherche. Cette version n'est pas confirmée par les faits, et même les pièces présentées par le revendicateur soulèvent des doutes quant à la situation personnelle réelle du revendicateur au Bangladesh.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

La Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2

"Convention refugee" means any person who

(a) by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

(i) is outside the country of the person's nationality and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to avail himself of the protection of that country, or

(ii) not having a country of nationality, is outside the country of the person's former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, is unwilling to return to that country, and

(b) has not ceased to be a Convention refugee by virtue of subsection (2),

but does not include any person to whom the Convention does not apply pursuant to section E or F of Article 1 thereof, which sections are set out in the schedule to this Act;

« réfugié au sens de la Convention » Toute personne :

a) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

(i) soit se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de cette crainte, ne veut y retourner;

b) qui n'a pas perdu son statut de réfugié au sens de la Convention en application du paragraphe (2).

Sont exclues de la présente définition les personnes soustraites à l'application de la Convention par les sections E ou F de l'article premier de celle-ci dont le texte est reproduit à l'annexe de la présente loi.

(3) A person does not cease to be a Convention refugee by virtue of paragraph (2)(e) if the person establishes that there are compelling reasons arising out of any previous persecution for refusing to avail himself of the protection of the country that the person left, or outside of which the person remained, by reason of fear of persecution.

(3) Une personne ne perd pas le statut de réfugié pour le motif visé à l'alinéa (2)e) si elle établit qu'il existe des raisons impérieuses tenant à des persécutions antérieures de refuser de se réclamer de la protection du pays qu'elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d'être persécutée.

La Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7

18.1 (4) The Trial Division may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

(f) acted in any other way that was contrary to law.

18.1 (4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises par la Section de première instance si elle est convaincue que l'office fédéral, selon le cas :

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l'exercer;

b) n'a pas observé un principe de justice naturelle ou d'équité procédurale ou toute autre procédure qu'il était légalement tenu de respecter;

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d'une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

e) a agi ou omis d'agir en raison d'une fraude ou de faux témoignages; f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[15]      La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

1)      La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant de façon arbitraire et non motivée que le demandeur n'était pas crédible?
2)      La Commission a-t-elle refusé de tenir compte de la preuve ou l'a-t-elle mal interprétée, notamment le fait que le traitement infligé au demandeur au Bangladesh constituait de la persécution?
3)      La Commission a-t-elle commis une erreur de droit ou de fait ouvrant droit au contrôle en décidant que le demandeur n'avait pas démontré l'existence d'une crainte fondée d'être persécuté, comme l'exige le paragraphe 2(2) de la Loi?

LE POINT DE VUE DES PARTIES

Le point de vue du demandeur

[16]      Le demandeur soutient que l'immense majorité des conclusions négatives tirées par la Commission dans la présente affaire l'ont été sans tenir compte de la preuve. Le demandeur soutient tout particulièrement que les motifs de la Commission font ressortir qu'elle n'a pas tenu compte d'une partie importante de la preuve, savoir le témoignage du demandeur qui porte que les policiers ont arrêté quelques-unes des personnes qui l'avaient attaqué alors que son parti était au pouvoir.

[17]      Par conséquent, le demandeur soutient que la Commission a agi de façon arbitraire en arrivant à la conclusion que sa crédibilité était compromise par suite de son allégation que les membres de l'opposition n'avaient pas droit à la protection policière, alors qu'il admettait n'avoir pas reçu une protection policière adéquate alors que son parti était au pouvoir.

[18]      De plus, le demandeur soutient que l'explication qu'il a donnée du fait que les policiers ne pouvaient pas toujours arrêter ses agresseurs ne peut pas raisonnablement être considérée compromettre la crédibilité de sa déclaration que les policiers sont disposés à protéger les membres du parti au pouvoir, mais non ceux de l'opposition.

[19]      Deuxièmement, le demandeur réfute l'assertion de la Commission qu'il a été incapable de présenter une explication raisonnable justifiant que son nom aurait été inscrit sur une liste de terroristes après que la Ligue Awami eut pris le pouvoir aux élections générales de 1996.

[20]      Le demandeur soutient qu'il a donné une explication, savoir que ses ennemis politiques maintenant au pouvoir avaient persuadé les policiers de mettre son nom sur la liste afin de se venger de lui. Il soutient que cette explication est parfaitement plausible dans le contexte du Bangladesh.

[21]      Troisièmement, l'affirmation de la Commission que le demandeur donnait une « interprétation sélective des faits » en répondant aux questions est totalement injuste et fausse. Par exemple, la question de savoir si le parti politique du demandeur s'était livré à des violences lorsqu'il était au pouvoir a amené la Commission, à tort, à conclure que ce n'est que confronté à la preuve documentaire que le demandeur avait admis que les membres de son parti avaient eu une conduite violente.

[22]      En faisant état auprès de la Cour de la transcription de l'audience, le demandeur soutient qu'il a volontairement donné des renseignements portant qu'il savait que certains membres de son parti étaient violents. Il soutient que c'est de façon arbitraire que la Commission a conclu que sa crédibilité était mise en cause par suite de son refus d'admettre que les membres de son parti étaient violents.

[23]      Au sujet du commerce de montres de sa famille, il soutient que la Commission l'a injustement accusé d' « interprétation sélective » en s'inquiétant de savoir s'il violait les lois sur les brevets en vendant des reproductions de montres de marque.

[24]      Le demandeur soutient que la Commission a agi de façon déraisonnable en qualifiant d' « interprétation sélective » sa déclaration que la vente de reproductions de montres de marque à des prix moins élevés ne violait pas les lois sur les brevets. Cette réponse ne correspondait pas nécessairement à son point de vue, mais le demandeur soutient qu'il ne s'agissait pas d'une réponse évasive.

[25]      Au sujet de la lettre de l'avocat du demandeur au Bangladesh, on soutient que la Commission n'a pas tenu compte de la preuve du fait que cette lettre ne mentionnait pas que le demandeur avait consulté son avocat au sujet d'une agression en 1994 alors que son parti était au pouvoir.

[26]      Le demandeur soutient que la consultation de 1994 au sujet de l'agression n'était pas pertinente et que la Commission n'aurait pas dû l'utiliser pour compromettre sa crédibilité. Il s'appuie à ce sujet sur la décision de la Cour d'appel fédérale dans Owusu-Ansah c. M.E.I. (1989) 8 Imm. L.R. (2d) 106 (C.A.F.), qui a conclu que si un demandeur ne présentait pas volontairement des renseignements non pertinents, sa crédibilité ne pouvait être écartée.

[27]      Finalement, au sujet de l'affirmation de la Commission qu'il était incompréhensible que le demandeur soit demeuré au Bangladesh de 1990 à 1996 alors qu'il était continuellement harcelé et battu, ce dernier soutient qu'on ne lui a jamais donné l'occasion de traiter de cette question. Par conséquent, elle ne saurait former la base d'une conclusion de la Commission à son encontre.

L'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi

[28]      La deuxième question soulevée dans cette demande porte sur le fait que la Commission aurait appliqué incorrectement le paragraphe 69.1(9.1) en concluant à l'absence d'un minimum de fondement à sa revendication. Le point de vue du demandeur porte que les faits en l'instance ne peuvent justifier une conclusion d'absence de minimum de fondement à sa revendication de statut de réfugié et que, par conséquent, la Commission ne pouvait invoquer ce paragraphe.

[29]      Le demandeur soutient que le paragraphe 69.1(9.1) doit être interprété de façon qui cadre avec le régime général de la Loi. À cette fin, l'expression « absence de minimum de fondement » doit être interprétée comme voulant dire « manifestement non fondée » .

[30]      Le demandeur soutient qu'il y a une distinction importante entre une réclamation qui est clairement abusive ou manifestement non fondée et une réclamation pour laquelle la Commission est arrivée à la conclusion qu'un demandeur n'était pas crédible. Du point de vue du demandeur, le fait de suggérer qu'il s'agit de la même chose revient à dire que les conclusions négatives de la Commission quant à la crédibilité ne seraient pas sujettes au contrôle judiciaire.

[31]      Subsidiairement, le demandeur soutient qu'à tout le moins le paragraphe 69.1(9.1) prescrit que la Commission doit fournir des motifs écrits de sa décision à son encontre. Le fait que la Commission ait considéré que le demandeur n'était pas crédible ne vient pas mettre en cause les autres preuves présentées à la Commission lors de l'audience.

[32]      En résumé, le demandeur soutient que la Commission aurait dû énoncer clairement dans sa décision qu'elle avait tenu compte de toute la preuve avant de tirer sa conclusion quant à l'absence d'un minimum de fondement à sa revendication. Comme la Commission ne l'a pas fait, le demandeur soutient qu'elle a commis une erreur de droit ouvrant droit au contrôle en appliquant le paragraphe 69.1(9.1).

Le point de vue du défendeur

[33]      Le défendeur soutient que la Commission avait tout à fait la compétence de conclure que le demandeur n'était pas crédible au vu de la preuve documentaire et de son témoignage.

[34]      De plus, la Commission a fait état de plusieurs incohérences et contradictions dans le témoignage du demandeur qui l'ont amenée à conclure qu'il n'était pas crédible. Plus particulièrement, la Commission a conclu qu'au vu de la preuve documentaire, les éléments essentiels du témoignage du demandeur étaient soit non plausibles, soit contradictoires.

[35]      Le demandeur fait état de trois documents annexés à son mémoire supplémentaire pour appuyer son argument que la Commission était saisie d'une preuve documentaire qui contredisait le témoignage de l'appelant et que, par conséquent, elle ne pouvait conclure autrement qu'à l'absence de crédibilité du demandeur.

[36]      Le défendeur souligne que l'absence de crédibilité du demandeur est au coeur de la décision de la Commission portant qu'il n'a pas établi une crainte fondée de persécution du fait de ses opinions politiques.

[37]      Quant à la question portant sur l'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi, le défendeur soutient que la Commission a bien appliqué cette disposition et qu'elle a motivé adéquatement, dans sa décision, la conclusion qu'il n'y avait pas un minimum de fondement à la revendication du demandeur. Par conséquent, il n'y a pas lieu que la Cour intervienne en l'instance.

ANALYSE

La question de la crédibilité

[38]      Il est clair en droit que la Commission a le pouvoir discrétionnaire pour évaluer la crédibilité d'un demandeur et qu'elle est la mieux placée pour le faire : Dan-Ash c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (1988), 93 N.R. 33 (C.A.F.).

[39]      Dans l'arrêt Giron c. M.E.I. (1992), 143 N.R. 238 (C.A.F.), la Cour d'appel fait la déclaration suivante au sujet des conclusions portant sur le manque de crédibilité :

...[la SSR] a choisi de fonder en grande partie sa conclusion en l'espèce à l'égard du manque de crédibilité, non pas sur des contradictions internes, des incohérences et des subterfuges, qui constituent l'essentiel du pouvoir discrétionnaire des juges des faits, mais plutôt sur l'invraisemblance des critères extrinsèques, tels que le raisonnement, le sens commun et la connaissance d'office, qui nécessitent tous de tirer des conclusions que les juges des faits ne sont pas mieux placés que les autres pour tirer.


[40]      Cette question a été réexaminée dans Rajaratam c. M.E.I. (1991), 135 N.R. 300 (C.A.F.) et dans l'arrêt Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315, où la Cour déclare ceci :

Il est exact, comme la Cour l'a dit dans Giron, qu'il peut être plus facile de faire réviser une conclusion d'implausibilité qui résulte d'inférences que de faire réviser une conclusion d'incrédibilité qui résulte du comportement du témoin et de contradictions dans le témoignage. La Cour n'a pas, ce disant, exclu le domaine de la plausibilité d'un récit du champ d'expertise du tribunal, pas plus qu'elle n'a établi un critère d'intervention différent selon qu'il s'agit de « plausibilité » ou de « crédibilité » .

.

Il ne fait pas de doute que le tribunal spécialisé qu'est la section du statut de réfugié a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage. Qui, en effet, mieux que lui, est en mesure de jauger la crédibilité d'un récit et de tirer les inférences qui s'imposent. Dans la mesure où les inférences que le tribunal tire ne sont pas déraisonnables au pont d'attirer notre intervention, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire. Dans Giron, la Cour n'a fait que constater que dans le domaine de la plausibilité, le caractère déraisonnable d'une décision peut être davantage palpable, donc plus facilement identifiable, puisque le récit apparaît à la face même du dossier. Giron, à notre avis, ne diminue en rien le fardeau d'un appelant de démontrer que les inférences tirées par le tribunal ne pouvaient pas raisonnablement l'être.


[41]      Notre Cour s'est toujours rangée aux conclusions de la Commission en matière de crédibilité, sauf lorsqu'elles avaient été clairement tirées en dépit de la preuve : Rajaratnam c. Canada (M.E.I.) (1991), 135 N.R. 300 (C.A.F.).

[42]      En l'instance, la Commission a renvoyé à plusieurs incohérences dans le témoignage du demandeur à l'appui de sa conclusion qu'il n'était pas crédible. Par exemple, la Commission cite des contradictions précises entre la preuve documentaire présentée à l'audience et le témoignage du demandeur : son affirmation qu'à Mirpur, il n'y avait pas de violence dans son parti politique ou dans d'autres partis; son assertion que les membres du comité exécutif de la section de Mirpur du JJD étaient tous entrés dans la clandestinité parce qu'ils étaient recherchés par la police pour activités terroristes; et ses réticences à reconnaître que les conflits entre le JJD et la LA avaient mené à l'assassinat de trois partisans de la LA.

[43]      Afin de déterminer si la Commission a commis une erreur en arrivant à sa conclusion que le demandeur n'était pas crédible, qui est fondée sur les incohérences et les contradictions qu'elle allègue, j'ai examiné avec soin la preuve documentaire au dossier.

[44]      Dans le document qui s'intitule Bangladesh: Chronologie des événements, janvier 1994 - décembre 1995, on trouve une discussion portant sur les arguments principaux soulevés par les parties dans la présente demande. En premier lieu, l'auteur déclare que les événements les plus importants au cours de cette période ont été le boycottage du Parlement par l'opposition, la démission de la plupart des députés de l'opposition, et les manifestations violentes et grèves générales dont l'objectif était d'obtenir la démission du premier ministre Zia.

[45]      En second lieu, l'auteur indique qu'il y a eu un accroissement significatif du fondamentalisme religieux, illustré par l'importance de plus en plus grande des islamistes radicaux qui demandaient l'introduction d'une loi sur le blasphème et qui étaient à l'origine d'agressions visant les ONG fournissant de l'aide aux femmes et aux pauvres.

[46]      Si l'on examine les allégations spécifiques du demandeur en regard des événements documentés dans cette chronologie, on voit que le demandeur soutient que des hommes de main de la LA ont fait exploser une bombe près des bureaux de la section locale du JJD dans le district électoral du demandeur, mais que celui-ci n'a pas été blessé. La preuve documentaire porte que 50 personnes ont été blessées à l'occasion d'incidents violents dès le premier jour de la grève générale nationale que les principaux partis d'opposition avaient suscités pour obtenir la démission du premier ministre.

[47]      La preuve décrit de façon plus élaborée les incidents entourant la grève générale, précisant que le deuxième jour trois membres de la Ligue Awami ont été tués et de 10 à 18 ont été blessés lorsque les militants du JJD ont ouvert le feu sur un groupe de la LA réuni à Mirpur.

[48]      Quant à l'allégation du demandeur qu'il n'y avait pas de violence à Mirpur au sein de son parti politique ou des autres, la preuve documentaire fait ressortir qu'en juillet 1995, au moins une personne a été tuée et jusqu'à 50 autres ont été blessées lorsque les policiers ont utilisé des gaz lacrymogènes et des fusils de chasse pour disperser les militants de la LA et du PNB qui se confrontaient à Dhaka.

[49]      La preuve documentaire révèle qu'à nouveau, en septembre 1995, trois personnes ont été tuées et jusqu'à 18 blessées lorsque les militants du JJD ont ouvert le feu sur un groupe de la LA réuni à Mirpur. Ce ne sont là que quelques exemples parmi plusieurs que l'on trouve dans ce document et qui illustrent le conflit permanent entre les militants de la LA et du PNB au cours des années qui ont précédé le départ du demandeur du Bangladesh.

[50]      Le témoignage du demandeur entre effectivement en contradiction avec la preuve documentaire déposée par le défendeur et il est clair que c'est sur cette base que la Commission a conclu que le demandeur n'était pas crédible.

[51]      Suite à mon examen de la preuve documentaire déposée au tribunal et de la transcription de l'audience, je suis d'avis que la Commission n'a pas été déraisonnable en concluant que le demandeur n'était pas crédible. Par conséquent, il n'y a pas lieu que la Cour intervienne pour ce motif.

L'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi

[52]      Le paragraphe 69.1(9.1) de la Loi est rédigé comme suit :


(9.1) If each member of the Refugee Division hearing a claim is of the opinion that the person making the claim is not a Convention refugee and is of the opinion that there was no credible or trustworthy evidence on which that member could have determined that the person was a Convention refugee, the decision on the claim shall state that there was no credible basis for the claim.

(9.1) La décision doit faire état de l'absence de minimum de fondement, lorsque chacun des membres de la section du statut ayant entendu la revendication conclut que l'intéressé n'est pas un réfugié au sens de la Convention et estime qu'il n'a été présenté à l'audience aucun élément de preuve crédible ou digne de foi sur lequel il aurait pu se fonder pour reconnaître à l'intéressé ce statut.

[53]      Dans Mathiayabaranam c. M.E.I. (1995), 94 F.T.R. 262, notre Cour a conclu que, vu les circonstances graves d'une conclusion selon laquelle la revendication n'avait pas un minimum de fondement, la Commission était obligée de fournir au demandeur un avis lui indiquant que la question était examinée, et ce afin de lui donner l'occasion de faire des observations. Cette décision a par la suite été infirmée par la Cour d'appel fédérale, qui a conclu qu'il n'existait pas de droit de recevoir un avis supplémentaire au sujet de la possibilité que soit tirée une conclusion selon laquelle la revendication n'avait pas un minimum de fondement.

[54]      Bien que le demandeur n'ait pas le droit de présenter des observations à cet égard, les effets d'une conclusion de non-crédibilité sont très sérieux puisque le demandeur n'a pas droit alors à la forme de quasi-appel accordé à un demandeur non reconnu du statut de réfugié au Canada. Il n'a droit qu'à un sursis d'exécution de sept jours, ce qui fait qu'une telle conclusion est fort importante pour un demandeur.

[55]      La distinction entre la crédibilité et l'absence de minimum de fondement est au coeur de la situation de fait présentée par le demandeur. Cette question a été examinée dans Sheikh v. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1990] 3 C.F. 238, à la page 244, dans les termes suivants :

Le concept de la crédibilité des éléments de preuve et celui de la crédibilité du demandeur sont évidemment deux choses différentes, mais il est évident que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même ... la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le second palier d'audience pour faire droit à la demande.
... même sans mettre en doute chacune des paroles du demandeur, le premier palier d'audience peut douter raisonnablement de sa crédibilité au point de conclure qu'il n'existe aucun élément de preuve crédible ayant trait à la revendication sur lequel le second palier d'audience pourrait se fonder pour y faire droit. En d'autres termes, la conclusion générale du manque de crédibilité du demandeur de statut peut fort bien s'étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage.

[56]      Après avoir évalué la preuve, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas crédible et, deuxièmement, que la preuve documentaire ne venait pas appuyer les assertions sur lesquelles il fondait sa revendication. Elle a donc conclu que sa revendication n'avait pas un minimum de fondement.

[57]      Au paragraphe 46 du Mémoire des faits et du droit du demandeur, ce dernier soutient que la Commission devait expliquer pourquoi elle était arrivée à la conclusion qu'il n'y avait pas de preuve crédible ou digne de foi qui fondait sa revendication de statut de réfugié.

[58]      En toute déférence, je considère que la Commission s'est exprimée très clairement en indiquant que c'est seulement après avoir entendu le témoignage du demandeur et les observations de l'agent chargé de la revendication, ainsi qu'après avoir examiné et analysé avec soin la preuve, qu'elle a conclu à l'existence d'un problème généralisé quant à la crédibilité du demandeur.

[59]      Plus particulièrement, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas crédible lorsqu'il a cherché à démontrer qu'il était actif au sein du PNB, question qui est un facteur essentiel dans sa revendication. Tant dans sa FRP que dans son témoignage, le demandeur a cherché à démontrer qu'il avait été intimement impliqué dans les activités du PNB et que ce fait était à la racine des problèmes qu'il a connus par la suite au Bangladesh.

[60]      Je dois toutefois souligner que l'évaluation de la Commission sur la question de la protection policière indique qu'elle n'a pas évalué correctement le contexte existant au Bangladesh tel qu'il est décrit dans la preuve documentaire.

[61]      Notamment, la preuve porte qu'en juillet 1995, des policiers en civil auraient organisé des attaques du club de la presse de Dinajpur et de quatre journaux locaux, en guise de représailles suite à des articles dans les journaux portant sur [traduction] « la corruption, la répression et la commission de méfaits » par les forces policières et l'administration.

[62]      Selon moi, dans de telles circonstances il est tout à fait concevable que le demandeur ait pu obtenir la protection de la police à un moment donné et non à un autre, comme il l'a déclaré dans son témoignage. La Commission déclare que le demandeur n'a pu répondre à la question de savoir pourquoi il n'avait pu obtenir une protection alors que son parti était au pouvoir alors qu'il avait déclaré que les policiers ne protégeaient que le gouvernement.

[63]      Il me semble que le témoignage du demandeur à ce sujet est crédible, puisqu'il a déclaré qu'il avait obtenu l'aide des policiers à certains moments mais non à d'autres. Étant donné le contexte existant au Bangladesh à cette époque, ceci ne m'apparaît pas non plausible.

[64]      Toutefois, je ne considère pas que ce fait ait un impact majeur sur l'affaire du demandeur, non plus qu'il ait été au coeur de la conclusion de la Commission que le demandeur n'était pas crédible. La Commission a cité plusieurs facteurs dans ses motifs, qui justifiaient sa conclusion que le demandeur n'était pas crédible, et je conclus qu'elle était justifiée au vu de la preuve documentaire.

[65]      Le demandeur soutient que le fait d'invoquer le paragraphe 69.1(9.1) chaque fois que la Commission arrive à une conclusion négative quant à la crédibilité a pour résultat que l'intention du législateur en adoptant cette disposition n'est pas respectée.

[66]      Selon moi, la Commission a fondé sa conclusion quant à l'absence d'un minimum de fondement principalement sur le manque de crédibilité du demandeur suite aux multiples incohérences et implausibilités dans son témoignage, ainsi que sur sa nature imprécise, auxquelles vient s'ajouter l'absence de preuves concrètes à l'appui de sa crainte d'être persécuté.

[67]      La preuve documentaire ne vient pas appuyer la plupart des allégations faites par le demandeur et ce dernier n'a pu fournir de preuve appuyant son assertion qui veut que sa situation personnelle au Bangladesh est telle qu'il serait confronté à une possibilité sérieuse d'être persécuté s'il y retournait.

[68]      Dans ses motifs, la Commission déclare que le demandeur n'a jamais songé à quitter le pays bien qu'il prétend avoir été harcelé et battu de 1990 à 1996. À cette époque, le parti du demandeur était au pouvoir et il participait activement aux activités du PNB, notamment au sein de la section du JJD à Mirpur. Lorsque le PNB perd le pouvoir aux élections générales de 1996, le demandeur quitte immédiatement son pays en toute hâte et revendique le statut de réfugié.

[69]      Au vu de la preuve documentaire, la Commission a conclu qu'il n'était pas concevable qu'il ait été harcelé et battu pendant des années sans chercher à quitter le pays, alors que dès le moment où son parti a perdu le pouvoir il a quitté le pays précipitamment par peur que ses adversaires se vengent de lui.

[70]      Ayant conclu à l'absence de crédibilité et de preuve documentaire à l'appui des allégations au sujet de la situation personnelle du demandeur au Bangladesh, la Commission a décidé que sa réclamation n'avait pas le minimum de fondement prévu au paragraphe 69.1(9.1) de la Loi.

[71]      J'ai examiné avec soin le témoignage du demandeur ainsi que les pièces qu'il a présentées à l'appui de sa demande, de même que la preuve documentaire produite par le défendeur. Je suis convaincu que la Commission n'a pas agi de manière déraisonnable en concluant à l'absence du minimum de fondement requis à la revendication du demandeur.

[72]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[73]      Le demandeur a présenté deux questions à certifier :

Une simple conclusion qu'un revendicateur du statut de réfugié n'est pas un témoin crédible suffit-elle à entraîner l'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi sur l'immigration?
Au vu de la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Baker c. M.C.I., la Section du statut de réfugié est-elle tenue de fournir des motifs écrits justifiant son avis en vertu du paragraphe 69.1(9.1) qu'un revendicateur de statut de réfugié n'a pas apporté le minimum de fondement requis à sa revendication?

[74]      Je suis convaincu qu'il y a lieu de certifier la première de ces deux questions, puisqu'elle soulève une question grave de portée générale quant au sens et à l'application du paragraphe 69.1(9.1) de la Loi sur l'immigration. Ceci concorde avec les motifs de M. le juge Strayer dans l'arrêt Gradison c. M.C.I., A-332-00, le 25 août 2000, à la page 3, où il précise dans quel contexte il y a lieu de certifier une question.

[75]      Les faits dans l'affaire Baker c. M.C.I. n'ont absolument aucun rapport avec ceux de l'affaire dont je suis saisi. L'arrêt Baker ne peut et ne doit être appliqué que dans le cadre de demandes fondées sur des raisons d'ordre humanitaire visant des enfants nés au Canada.


                             Max M. Teitelbaum

                        

                                 J.C.F.C.

Calgary (Alberta)

Le 2 novembre 2000


Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER




No DU GREFFE :              IMM-1112-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :      MIZANUR RAHAMAN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :          MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :          LE 24 JUILLET 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE M. LE JUGE TEITELBAUM

EN DATE DU :              2 NOVEMBRE 2000



ONT COMPARU

Pia Zambelli                          POUR LE DEMANDEUR

Marie-Claude Demers                  POUR LE DÉFENDEUR


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Pia Zambelli

Montréal (Québec)                      POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)                      POUR LE DÉFENDEUR

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