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Date : 20000628

Dossier : T-1237-99

Ottawa (Ontario), le 28 juin 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

demandeur

et

MOHD HAITHAM M. HASHAM AL FARRA

défendeur

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]         Il s'agit d'un appel, fondé sur le paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, 1974-75-76, ch. 108 (la Loi), que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (le ministre) a formé contre la décision, datée du 12 mai 1999, dans laquelle le juge de la citoyenneté Roberto Roberti a approuvé la demande de citoyenneté de Mohd Haitham M. Hasham Al Farra (le défendeur).


[2]         Le juge de la citoyenneté a conclu que le défendeur avait satisfait aux exigences en matière de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi, qui prévoit que le demandeur de citoyenneté doit avoir résidé au Canada pendant au moins trois années (1 095 jours) au cours de la période de quatre ans qui a immédiatement précédé la date du dépôt de sa demande.

[3]         Le juge de la citoyenneté a conclu que le défendeur avait été physiquement présent au Canada pendant 585 jours au cours de la période pertinente et qu'en conséquence, il lui manquait 510 jours pour satisfaire à l'exigence minimale de la Loi selon laquelle il devait avoir résidé au Canada pendant au moins 1 095 jours.

[4]         Le défendeur est arrivé au Canada en tant que résident permanent le 27 janvier 1995, en compagnie de ses parents et de ses soeurs. Il fréquentait alors la American University au Caire (Égypte). Il en était à sa dernière année d'études d'un programme de cinq ans en génie mécanique. Le 11 février 1995, le défendeur a quitté le Canada pour terminer ses études en Égypte.

[5]         Le défendeur a fait valoir les indices de résidence suivants :

1.          Il a demandé et obtenu un N.A.S.

2.          Il a ouvert des comptes bancaires au Canada en janvier 1995 et les a maintenus.

3.          Il a loué une chambre dans une résidence du 22 janvier 1995 au 1er novembre 1996.    Quand il est retourné au Caire pour y terminer ses études, il a laissé des effets personnels            dans cette chambre.


[6]         Voici comment le défendeur décrit ses absences du Canada :

Date

Destination

Raison

Nombre de

jours d'absence

11/02/95 au 05/08/95

Égypte

Études

175

21/08/95 au 16/01/96

Égypte

Études

148

30/01/96 au 13/06/96

Égypte

Études

134

28/06/96 au 27/10/96

Égypte

Études

121

14/10/97 au 19/10/97

É.-U.A.

Affaires

4

10/12/97 au 30/01/98

Égypte

Affaires

51

TOTAL

633

[7]         Le juge de la citoyenneté a estimé que le défendeur avait été absent du pays pendant 639 jours.

[8]         Le défendeur est revenu au Canada après avoir terminé ses études le 27 octobre 1996. Il soutient qu'il a par la suite continué d'y maintenir une résidence de la façon suivante :

1.          Il a loué sa deuxième résidence et y a résidé du 1er novembre 1996 au 31 août 1998;

2.          Il a acheté un ordinateur, des articles de ménage et des meubles pour sa résidence.

3.          Il a obtenu une ligne téléphonique.

4.          Il a produit des déclarations de revenus en 1995, 1996, 1997 et 1998.

5.          Il a obtenu une carte de bibliothèque.


6.          Il a continué d'assister à des services religieux.

7.          Il a obtenu une carte de points de Pétro-Canada.

8.          Il a obtenu une carte Visa.

9.          Il s'est abonné à un club vidéo.

10.        Il a obtenu une carte d'appel de Bell Canada.

11.        Il s'est abonné à un centre de culture physique.

12.        Il a obtenu un permis de conduire de l'Ontario.

13.        Il a acheté une voiture le 5 juillet 1997.

[9]         Après avoir terminé ses études, le défendeur a parfait son éducation et il a fondé sa propre entreprise. En novembre 1996, le défendeur et son père ont constitué une compagnie en personne morale.

La question litigieuse

[10]       Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur en concluant que le défendeur satisfaisait aux exigences en matière de résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté?


Le droit

[11]       Voici ce que prévoit le paragraphe 5(1) de la Loi :


5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

(a) makes application for citizenship;

(b) is eighteen years of age or over;

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and

(f) is not under a deportation order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.


5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois_:

a) en fait la demande;

b) est âgée d'au moins dix-huit ans;

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante_:

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

d) a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada;

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

f) n'est pas sous le coup d'une mesure d'expulsion et n'est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l'article 20.


L'analyse et la décision

[12]       L'alinéa 5(1)c) de la Loi prévoit qu'un demandeur de la citoyenneté doit résider pendant trois années au Canada (1095 jours) dans les quatre années qui précèdent immédiatement la date de la demande de citoyenneté.

[13]       Notre Cour a conclu que dans certaines circonstances, des périodes de temps passées hors du Canada (absences) peuvent être incluses dans le calcul des 1 095 jours de résidence requis aux termes de l'alinéa 5(1)c) de la Loi. Il ne peut cependant être tenu compte de ces périodes d'absence du Canada que si le demandeur y a centralisé son mode de vie avant celles-ci.

[14]       Selon ses propres statistiques, le défendeur a été absent du Canada pendant 633 jours au cours de la période de quatre ans qui a précédé la date de sa demande de citoyenneté, alors que le juge de la citoyenneté a déterminé qu'il avait été absent pendant 639 jours..

[15]       Voici ce que le juge Dubé de notre Cour a dit dans Canada (Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration) c. Lo (22 janvier 1999), dossier no T-1082-98, à la page 2 :

La présence physique au Canada tout au long de la période est moins essentielle lorsqu'une personne s'y est établie en pensée et en fait, ou y a conservé ou centralisé son mode vie habituel. C'était le cas de l'étudiant dans l'affaire Papadogiorgakis (précitée), qui s'était établi en Nouvelle-Écosse avant d'aller étudier aux États-Unis.

Malheureusement, ce n'est pas le cas de l'intimée en l'espèce qui, de toute évidence, ne peut s'être établie au Canada en seulement sept jours.

Par conséquent, sa demande était prématurée. Maintenant qu'elle a complété ses études et qu'elle s'est établie à Vancouver, elle pourra, au moment opportun, présenter une nouvelle demande de citoyenneté canadienne qui sera sans doute accueillie.


L'appel du ministre est accueilli.

[16]       J'en suis venu à la conclusion que le défendeur n'a pas centralisé son mode de vie au Canada pendant les 16 jours qu'il a passés au pays avant de s'en absenter pour la première fois. Je ne suis donc pas disposé à tenir compte de ses périodes d'absence du Canada en déterminant s'il a satisfait à l'exigence en matière de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi. En conséquence, j'estime que le juge de la citoyenneté a commis une erreur lorsqu'il a conclu que le défendeur avait satisfait à cette exigence et qu'il lui a accordé la citoyenneté canadienne. À mon avis, le juge de la citoyenneté a commis une erreur, peu importe la norme de contrôle que l'on applique : celle de la décision raisonnable simpliciter ou la norme qui « est proche de la décision correcte » , norme énoncée par le juge Lufty (tel était alors son titre) dans la décision Lam c. Canada (1999) 164 F.T.R. (C.F. 1 re inst.).

[17]       J'ai relevé les démarches que le défendeur a entreprises après avoir terminé ses études, mais elles n'ont pas été entreprises avant qu'elle ne quitte le Canada pour la première fois.

[18]       En d'autres termes, la demande du défendeur était prématurée et je n'ai aucun doute relativement au fait qu'il deviendra un citoyen canadien lorsqu'il sera en mesure de satisfaire aux exigences relatives à la résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

[19]       L'appel du ministre est accueilli.

ORDONNANCE


[20]       LA COUR ORDONNE que l'appel du ministre soit accueilli.

          « John A. O'Keefe »          

          J.C.F.C.

Ottawa (Ontario)

Le 28 juin 2000.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                          T-2162-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :                           LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET                                                              DE L'IMMIGRATION

c.

IFFAT JALIL UR RAHMAN

LIEU DE L'AUDIENCE :                               TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                             LE MARDI 20 JUIN 2000

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE RENDUS PAR LE JUGE O'KEEFE

EN DATE DU :                                               JEUDI 29 JUIN 2000

ONT COMPARU :                                        Mme Leena Jaakkimainen

POUR L'APPELANT

M. Mendel Green

POUR L'INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     Ministère de la Justice

Pièce 3400, boîte postale 36

2, First Canadian Place

130, rue King ouest

Toronto (Ontario)

M5X 1K6

POUR L'APPELANT

Green & Spiegel

Pièce 2200

121, rue King ouest

Toronto (Ontario)

M5H 3T9

POUR L'INTIMÉE


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Date : 20000628

Dossier : T-1237-99

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

demandeur

et

MOHD HAITHAM M. HASHAM AL FARRA

défendeur

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

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