Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision




Date : 20000223


Dossier : T-146-00


ENTRE :


     ETHICAL FUNDS INC.



demanderesse



et



MACKENZIE FINANCIAL CORPORATION



défenderesse


     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

Introduction

[1]      Ces motifs découlent d"une demande que la demanderesse (Ethical Funds) a présentée en vue d"obtenir :

a)      une injonction provisoire visant à empêcher la défenderesse, Mackenzie Financial Corporation elle-même ainsi que ses préposés, mandataires ou représentants :
     (i)      d"employer et d"annoncer les marques de commerce ETHICAL, ETHICAL FUNDS et ETHICAL GROWTH FUND ou l"une de ces marques ou encore toute autre marque de commerce, tout autre nom commercial ou toute autre dénomination sociale, y compris la marque ETHICAL en tant qu"élément, ou tout autre mot, dessin, nom ou marque similaire susceptible de créer de la confusion avec ses marques de commerce;
     (ii)      de faire passer ses marchandises, ses services ou son entreprise pour ceux de la demanderesse, ou d"attirer par ailleurs l"attention du public sur ses marchandises, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion avec ceux de la demanderesse;
     tant que la demande que la demanderesse a présentée en vue d"obtenir une injonction interlocutoire libellée de la façon ci-dessus énoncée n"aura pas été entendue ou tant que cette cour n"aura pas rendu une autre ordonnance;
b)      subsidiairement, des directives concernant la demande que la demanderesse a présentée en vue d"obtenir une injonction interlocutoire en attendant l"instruction de cette affaire;
c)      toute autre ordonnance que les avocats peuvent juger bon de demander et que cette cour peut juger bon d"accorder.

[2]      Ethical Funds et la défenderesse (Mackenzie) fournissent des services financiers et des services d"investissement en exploitant et gérant des fonds mutuels qui sont offerts en vente aux membres du public. La demande qui a donné lieu aux présents motifs a été présentée à Vancouver le 9 février 2000, au cours de ce qui a toujours été une période fort active pour la vente de fonds mutuels, qu"Ethical Funds a décrite dans sa requête comme étant [TRADUCTION] " [...] l"une des périodes de vente les plus importantes pour les produits de la demanderesse ".

[3]      À la suite du dépôt de la demande, le juge en chef adjoint a donné des directives officieuses en vue de fixer un calendrier accéléré aux fins du dépôt des documents de Mackenzie; il a fixé la date d"audition de la demande au 21 février 2000, à Toronto.

[4]      Le 22 février 2000, j"ai rejeté la demande d"Ethical Funds et j"ai fait savoir que je ferais ensuite connaître mes motifs.

Les parties

[5]      Ethical Funds est une société dûment constituée conformément aux lois du Canada qui fait connaître et gère une famille de 12 fonds mutuels [TRADUCTION] " socialement responsables " connus sous le nom : " Ethical Funds ". Le mot " Ethical " est le premier mot figurant dans le nom de chaque " famille " de fonds d"Ethical Funds.

[6]      Ethical Funds est propriétaire des marques de commerce déposées ETHICAL GROWTH FUND, ETHICAL et ETHICAL FUNDS. Chaque marque est enregistrée en vue d"être employée au Canada en liaison avec des services financiers et des services d"investissement, soit l"exploitation et la gestion de fonds mutuels.

[7]      Mackenzie est la troisième plus grosse société de fonds mutuel au Canada. Elle est la plus grosse société qui vend ses fonds mutuels par l"entremise de courtiers indépendants.

[8]      Mackenzie offre cinq familles de fonds mutuels, y compris la famille de fonds Universal qui est composée de 33 fonds mutuels. La famille de fonds Universal, offerte par Mackenzie depuis 1993, est, selon la preuve dont la Cour dispose, la famille de fonds qui prend le plus vite de l"essor au Canada. Selon la preuve fournie par Mackenzie, le nom Universal est reconnu comme appartenant à Mackenzie par les conseillers financiers indépendants et par les consommateurs qui effectuent des placements.

Les faits

[9]      Le 30 novembre 1999, Mackenzie a déposé un prospectus préliminaire à l"égard d"un nouveau fonds de la famille de fonds Universal , l"Universal Ethical Opportunities Fund (l"Universal Ethical Fund). Au début du mois de janvier 2000, Mackenzie a lancé le fonds Universal Ethical Fund. Elle a déposé le prospectus définitif le 10 janvier 2000 en vue de mettre le fonds à la disposition du public. Les commandes relatives au fonds Universal Ethical Fund ont commencé à parvenir à Mackenzie par l"entremise des courtiers et, vers le 19 janvier 2000, cette dernière a officiellement commencé à traiter les commandes relatives au fonds Universal Ethical Fund .

[10]      Vers le 11 janvier 2000, Ethical Funds a été mise au courant du lancement du fonds Universal Ethical Fund. Par des lettres datées des 12 et 18 janvier 2000, Ethical Funds a demandé à Mackenzie de cesser d"employer ses marques de commerce déposées. Mackenzie a refusé de se conformer à ces demandes. Par conséquent, Ethical Funds a déposé une déclaration devant cette cour le 27 janvier 2000. Ethical Funds sollicite : un jugement déclaratoire portant que Mackenzie a adopté et employé ses marques de commerce déposées et a fait passer ses marchandises, ses services et son entreprise pour ceux d"Ethical Funds; une injonction interlocutoire provisoire et une injonction permanente libellée de la même façon que l"injonction qui est ici sollicitée sur une base provisoire; la remise à la demanderesse de tous les documents sur lesquels les marques de commerce déposées sont apposées; des dommages-intérêts ou une reddition de compte de la part de Mackenzie, selon le choix qu"Ethical Funds fera; les dépens

[11]      Le 15 février 2000, Mackenzie a déposé sa défense ainsi qu"une demande reconventionnelle. Dans sa demande reconventionnelle, Mackenzie sollicite une ordonnance conformément à l"article 57 de la Loi sur les marques de commerce1 en vue de faire radier les marques de commerce déposées d"Ethical Funds ici en cause.

La question en litige

La question dont la Cour est ici saisie est énoncée simplement : il s"agit de savoir si la demanderesse a droit à une injonction provisoire renfermant les dispositions demandées ou des dispositions modifiées.

Le critère relatif à la délivrance d"une injonction provisoire

[13]      Dans l"arrêt RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général)2, la Cour suprême du Canada a énoncé les lignes directrices que les tribunaux d"instance inférieure doivent suivre dans les demandes d"injonctions interlocutoires. Je suis convaincu que ces lignes directrices s"appliquent également aux demandes d"injonctions provisoires telles que celle qui est ici en cause.

[14]      À la page 334, les juges Sopinka et Cory, au nom de la Cour, ont fait les remarques suivantes :

L"arrêt Metropolitan Stores établit une analyse en trois étapes que les tribunaux doivent appliquer quand ils examinent une demande de suspension d"instance ou d"injonction interlocutoire. Premièrement, une étude préliminaire du fond du litige doit établir qu"il y a une question sérieuse à juger. Deuxièmement, il faut déterminer si le requérant subirait un préjudice irréparable si sa demande était rejetée. Enfin, il faut déterminer laquelle des deux parties subira le plus grand préjudice selon que l"on accorde ou refuse le redressement en attendant une décision sur le fond.

[15]      Aux pages 337 et 338, la Cour a dit ce qui suit :

Quels sont les indicateurs d"une " question sérieuse à juger "? Il n"existe pas d"exigences particulières à remplir pour satisfaire à ce critère. Les exigences minimales ne sont pas élevées . Le juge saisi de la requête doit faire un examen préliminaire du fond de l"affaire [...]
Une fois convaincu qu"une réclamation n"est ni futile ni vexatoire, le juge de la requête devrait examiner les deuxième et troisième critères, même s"il est d"avis que le demandeur sera probablement débouté au procès. Il n"est en général ni nécessaire ni souhaitable de faire un examen prolongé du fond de l"affaire. [Je souligne.]

[16]      Deux exceptions sont énoncées à l"égard des principes généraux précités, mais je suis convaincu que ni l"une ni l"autre ne s"applique aux faits de l"affaire.

[17]      Aux pages 340 et 341, la Cour a examiné le deuxième critère, à savoir le " préjudice irréparable ". Voici ce qu"elle a dit :

Le juge Beetz a affirmé dans l"arrêt Metropolitan Stores (à la p. 128) que " [l]e deuxième critère consiste à décider si la partie qui cherche à obtenir l"injonction interlocutoire subirait, si elle n"était pas accordée, un préjudice irréparable " Certains tribunaux ont examiné, à cette étape, le préjudice que l"intimé risque de subir si le redressement demandé est accordé. Nous sommes d"avis qu"il est plus approprié de le faire à la troisième étape de l"analyse. Le préjudice allégué à l"intérêt public devrait également être examiné à cette étape.
À la présente étape, la seule question est de savoir si le refus du redressement pourrait être si défavorable à l"intérêt du requérant que le préjudice ne pourrait pas faire l"objet d"une réparation, en cas de divergence entre la décision sur le fond et l"issue de la demande interlocutoire.
Le terme " irréparable " a trait à la nature du préjudice subi plutôt qu"à son étendue. C"est un préjudice qui ne peut être quantifié du point de vue monétaire ou un préjudice auquel il ne peut être remédié, en général parce qu"une partie ne peut être dédommagée par l"autre [...]
[Je souligne.]

[18]      Enfin, aux pages 342 et 343, la Cour a dit ce qui suit :

Dans l"arrêt Metropolitan Stores , le juge Beetz décrit, à la p. 129, le troisième critère applicable à une demande de redressement interlocutoire comme un critère qui consiste " à déterminer laquelle des deux parties subira le plus grand préjudice selon que l"on accorde ou refuse une injonction interlocutoire en attendant une décision sur le fond ". Compte tenu des exigences minimales relativement peu élevées du premier critère et des difficultés d"application du critère du préjudice irréparable dans des cas relevant de la Charte , c"est à ce stade que seront décidées de nombreuses procédures interlocutoires.
Il y a de nombreux facteurs à examiner dans l"appréciation de la " prépondérance des inconvénients " et ils varient d"un cas à l"autre. Dans l"arrêt American Cyanamid , lord Diplock fait la mise en garde suivante (à la p. 408) :
[TRADUCTION] [i]l serait peu sage de tenter ne serait-ce que d"énumérer tous les éléments variés qui pourraient demander à être pris en considération au moment du choix de la décision la plus convenable, encore moins de proposer le poids relatif à accorder à chacun de ces éléments. En la matière, chaque cas est un cas d"espèce.
Il ajoute, à la p. 409 : [TRADUCTION] " Il peut y avoir beaucoup d"autres éléments particuliers dont il faut tenir compte dans les circonstances particulières d"un cas déterminé. "
L"arrêt Metropolitan Stores , établit clairement que, dans tous les litiges de nature constitutionnelle, l"intérêt public est un " élément particulier " à considérer dans l"appréciation de la prépondérance des inconvénients, et qui doit recevoir " l"importance qu"il mérite " (à la p. 149)3.

[19]      Étant donné qu"il ne s"agit pas ici d"un litige de nature constitutionnelle, l"intérêt public n"entre pas en ligne de compte.

Analyse

Dans la décision Fournier Pharma Inc. c. Apotex Inc.4, Madame le juge Tremblay-Lamer, en examinant une demande d"injonction provisoire, a fait les remarques suivantes, à la page 346 :

Il est de jurisprudence constante que les injonctions provisoires constituent une réparation rare et exceptionnelle. Ainsi que la Cour l'a déclaré dans le jugement The Kun Shoulder Rest :
La Règle 469(2) des Règles [maintenant la règle 374] prévoit l'octroi d'injonctions provisoires. Cette disposition s'écarte des règles procédurales qui s'appliquent aux demandes ordinaires d'injonction interlocutoire. Tant les Règles que la nature particulière d'une demande d'injonction provisoire exigent que le requérant fasse la preuve d'une urgence d'une importance telle qu'il n'existe aucune autre façon de procéder pour empêcher le préjudice qui est en train de se produire ou qui risque d'arriver.
                                 [renvoi omis]

     Je suis convaincu que l"urgence est ici établie. Selon la preuve mise à ma disposition, la période des REER, qui cette année va du 1er janvier au 29 février, fournit chaque année une possibilité unique en son genre pour les personnes qui commercialisent des fonds mutuels comme Ethical Funds et Mackenzie.

[21]      L"exigence minimale, lorsqu"il s"agit d"établir l"existence d"une question sérieuse à trancher, est peu élevée, mais l"exigence minimale relative au préjudice irréparable est beaucoup plus rigoureuse. Madame le juge Tremblay-Lamer a adopté le passage suivant des motifs que notre collègue, Monsieur le juge Dubé, avait énoncés dans la décision Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé)5 :

À ce stade-ci des procédures et d"autant plus que la demanderesse cherche seulement à obtenir une injonction de dix jours, il n"appartient pas au juge des requêtes de s"engager très avant dans la question du bien-fondé de la cause. Ainsi, le seuil de conformité au critère de la question sérieuse étant très bas, le juge des requêtes doit simplement décider si la demande est tant soit peu fondée, en ce sens qu"elle n"est pas frivole. Le seuil de conformité en matière de préjudice irréparable est toutefois très élevé. Une injonction est une mesure de réparation extraordinaire et elle est discrétionnaire. La Cour ne devrait pas l"accorder rien que pour favoriser une partie au détriment d"une autre dans ce qui est évidemment une bataille [...]

Comme Madame le juge Tremblay-Lamer, je souscris à cette description de l"exigence préliminaire relative au préjudice irréparable, en particulier dans un cas comme celui-ci, où l"on ne demande pas simplement une injonction provisoire pour une période de dix jours.

[22]      Je remarque en outre que dans l"arrêt Centre Ice Ltd. c. Ligue nationale de hockey6, la Cour d"appel fédérale a fait savoir que la preuve du préjudice irréparable doit être " claire et ne pas tenir de la conjecture ".

[23]      La Cour a devant elle les marques de commerce déposées d"Ethical Funds en ce qui concerne les expressions ETHICAL FUNDS et ETHICAL GROWTH FUND ainsi que le mot ETHICAL, qui doivent tous être employés au Canada en liaison avec des services financiers et des services d"investissement, à savoir l"exploitation et la gestion de fonds mutuels, ainsi qu"une preuve tendant à montrer qu"Ethical Funds fait connaître et gère une famille de 12 fonds mutuels " socialement responsables " appelés " Ethical Funds ". En outre, la Cour a devant elle une preuve montrant qu"Ethical Funds a dépensé des sommes d"argent considérables en vue d"annoncer et de faire connaître les " Ethical Funds " et que ces fonds sont fortement acceptés sur le marché.

[24]      Un élément important du nom du nouveau fonds lancé par Mackenzie, à l"égard duquel une objection est soulevée, est le mot " Ethical ", et ce, même si ce mot est employé en liaison avec le mot " Universal " et même s"il est précédé par ce dernier mot, qui est étroitement lié à la famille de fonds " Universal " de Mackenzie.

[25]      D"autre part, Mackenzie a présenté en preuve devant la Cour des documents qui tendent à montrer que le mot " Ethical ", relativement aux investissements en général et aux fonds mutuels en particulier, est un terme générique ou descriptif.

[26]      Étant donné que l"exigence minimale relative à la question à trancher est peu élevée, je suis convaincu que la question de savoir si le mot " Ethical " appartient exclusivement à Ethical Funds ou s"il s"agit d"un terme générique dans le contexte du marché sur lequel Ethical Funds et Mackenzie exercent leurs activités est une question à trancher dans le cadre d"une instruction plutôt que dans le cadre d"une demande telle que celle-ci. L"enregistrement d"une marque de commerce constitue une preuve prima facie de sa validité. J"adopte la conclusion qui a été tirée dans la décision Tele-Direct (Publications) Inc. c. American Business Information Inc.7, où Monsieur le juge Dubé a fait les remarques suivantes, aux pages 12 et 13 :

Il y a indiscutablement en l'espèce une question sérieuse à trancher. L'article 7 de la Loi sur les marques de commerce prévoit que nul ne peut attirer l'attention du public sur ses services de manière à causer de la confusion ou faire passer d'autres services pour ceux qui sont demandés. L'article 19 prévoit que l'enregistrement d'une marque de commerce, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à son emploi dans tout le Canada. L'article 20 prévoit que le droit du propriétaire d'une marque de commerce déposée est réputé être violé par une personne non admise à l'employer. Et l'article 22 prévoit que nul ne peut employer une marque de commerce de manière à diminuer la valeur de l'achalandage attaché à cette marque.

[27]      J"arrive à une conclusion différente au sujet de la question du préjudice irréparable. Le préjudice subi par Ethical Funds si Mackenzie est autorisée à continuer à commercialiser son Universal Ethical Opportunities Fund résulte de la perte de ventes, de la confusion possible entre la famille de fonds d"Ethical Funds et le nouveau fonds de Mackenzie et de la diminution de valeur de l"achalandage attaché aux marques " Ethical " d"Ethical Funds. La preuve démontre qu"il serait difficile de quantifier pareil préjudice et que la preuve d"expert à ce sujet risque de donner lieu à des conclusions fort différentes, mais cela n"est pas suffisant en soi pour démontrer l"existence d"un préjudice irréparable. En outre, il est certain que Mackenzie est une grosse société et que le montant des dommages-intérêts accordés serait recouvrable. De fait, dans un affidavit qui a été déposé devant la Cour, David Feather, vice-président exécutif, Marketing, de Mackenzie Financial Services Inc., et directeur général adjoint de Mackenzie Financial Corporation, déclare que le revenu réalisé par Mackenzie au cours de la première année d"exploitation du Universal Ethical Opportunities Fund ne serait pas élevé et que Mackenzie serait parfaitement en mesure de payer le montant accordé. M. Feather s"engage en outre, pour le compte de Mackenzie, à [TRADUCTION] " [...] comptabiliser minutieusement toutes les ventes de parts de ce fonds " et fait savoir que Mackenzie [TRADUCTION] " [...] est prête à faire entendre à bref délai la présente affaire, bien avant la période applicable aux REER l"année prochaine ".

[28]      Compte tenu de la preuve et du fait que l"exigence minimale relative à la détermination d"un préjudice irréparable dans une demande telle que celle-ci est à juste titre rigoureuse, je ne suis tout simplement pas convaincu qu"Ethical Funds ait satisfait à cette exigence.

[29]      Étant donné la conclusion que j"ai tirée au sujet du préjudice irréparable, il est inutile d"examiner en outre la question de la prépondérance des inconvénients. Toutefois, je dirai fort brièvement que si j"étais tenu de le faire, je conclurais qu"en l"espèce, la prépondérance des inconvénients joue en faveur d"Ethical Funds.

[30]      Mackenzie a commencé à exploiter son Universal Ethical Opportunities Funds dans des circonstances où je suis convaincu qu"elle avait parfaitement connaissance du fait qu"Ethical Funds exploitait sa famille de fonds socialement responsables. À l"instruction, il pourrait fort bien être conclu que l"élément descriptif " ethical ", relativement à la promotion et à la vente de fonds mutuels, est un terme générique décrivant la philosophie sous-tendant certains fonds mutuels en matière de placements, mais il reste à savoir si c"est le cas. Je suis convaincu que Mackenzie a assumé le risque du litige auquel elle fait maintenant face en toute connaissance de cause ou en omettant complètement de tenir compte de ce risque.

[31]      Dans ces conditions, le statu quo qui devrait exister en l"espèce est celui qui existait avant que Mackenzie mette sur le marché l"Universal Ethical Opportunities Fund et non celui qui existe à l"heure actuelle. Si je devais le faire, je conclurais que la prépondérance des inconvénients joue en faveur d"Ethical Funds.

Conclusion

[32]      Pour les motifs susmentionnés et compte tenu de l"analyse qui a été effectuée, cette demande d"injonction provisoire a été rejetée le 22 février 2000. J"ai conclu que la question des dépens devrait être laissée à l"appréciation du juge du procès.





                             Frederick E. Gibson J.C.F.C.

Toronto (Ontario)

Le 23 février 2000



Traduction certifiée conforme


Martine Guay, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU DOSSIER :              T-146-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :      ETHICAL FUNDS INC. et MACKENZIE FINANCIAL CORPORATION

LIEU DE L"AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

DATES DE L"AUDIENCE :      LES LUNDI ET MARDI, 21 ET 22 FÉVRIER 2000

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE GIBSON EN DATE DU 23 FÉVRIER 2000.


ONT COMPARU :

Jennifer Lynch              pour la demanderesse
Gordon Zimmerman              pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Blake, Cassels & Graydon          pour la demanderesse

Avocats

2600-595, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V7Z 1L3

Borden & Elliott              pour la défenderesse

Avocats

Scotia Plaza

40, rue King ouest

Toronto (Ontario)

M5H 3Y4


COUR FÉDÉRALE DU CANADA


Date : 20000223
Dossier : T-146-00

ENTRE :

     ETHICAL FUNDS INC.

demanderesse

et

MACKENZIE FINANCIAL CORPORATION

défenderesse

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE


__________________

1      L.R.C. (1985), ch. T-13.

2      [1994]1 R.C.S. 311.

3      Les décisions Metropolitan Stores et American Cyanamid mentionnées dans les passages précités de l"arrêt RJR-MacDonald sont : Metropolitan Stores (MTS) Ltd. c. Manitoba Food & Commercial Workers, section locale 832, [1987] 1 R.C.S. 110 et American Cyanamid Co. c. Ethicon Ltd., [1975] A.C. 396.

4      (1999), 1 C.P.R. (4th ) 344 (C.F. 1re inst.).

5      (1997), 74 C.P.R. (3d) 460 (C.F. 1re inst.).

6      (1994), 53 C.P.R. (3d) 34 à la p. 52 (C.A.F.).

7      (1994), 58 C.P.R. (3d) 10 (C.F. 1re inst.).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.