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Date : 19980923


Dossier : T-610-98

OTTAWA (ONTARIO), LE MERCREDI 23 SEPTEMBRE 1998.

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE ROTHSTEIN

ENTRE :

     SALVATORE GRAMAGLIA,

     demandeur,

     et

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

     O R D O N N A N C E

        

     PAR LES PRÉSENTES, IL EST ORDONNÉ CE QUI SUIT :

     1.      Le contrôle judiciaire est rejeté.

     2.      Il n'y a pas adjudication des dépens.

                             " Marshall Rothstein "

                        

                                 Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


Date : 19980923


Dossier : T-610-98

ENTRE :

     SALVATORE GRAMAGLIA,

     demandeur,

     et

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROTHSTEIN

[1]      La présente demande de contrôle judiciaire vise la décision par laquelle le juge Rutherford, vice-président de la Commission d'appel des pensions, en date du 6 mai 1997, aux termes du paragraphe 83(1)1 du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8, a rejeté la demande de permission d'interjeter appel devant la Commission d'appel des pensions d'une décision du tribunal de révision. Conformément à l'article 821 du Régime de pensions du Canada, le tribunal de révision a conclu que le demandeur n'était pas invalide au sens où l'entend le paragraphe 42(2)1 de la Loi et n'avait donc pas droit à une prestation d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

[2]      La décision du juge Rutherford est concise :

                 [TRADUCTION] J'ai pris connaissance des éléments de preuve dans la présente demande de même que dans l'affidavit de 26 pages s'y rapportant et dans les documents qui y sont joints (l'affidavit a été fait sous serment en octobre 1986) et, quant à l'objet actuel de la preuve médicale relativement au degré d'invalidité dont le demandeur souffre, il s'agit essentiellement de la preuve dont disposait le tribunal de révision. Les rapports du Dr Cole et du Dr Penney reconnaissent une invalidité importante, mais ils reconnaissent également la capacité résiduelle d'effectuer un travail plus léger ou sédentaire, d'où la conclusion du tribunal de révision. L'ajout d'un grand nombre d'éléments de preuve dans la demande ne permet pas néanmoins de prévoir qu'on parviendrait en appel à un résultat différent de celui du tribunal de révision. Par conséquent, je refuse d'accorder la permission d'interjeter appel devant la présente Commission.                 

[3]      Le demandeur soulève plusieurs arguments. D'abord, il prétend que le juge Rutherford ne disposait des éléments de preuve pertinents quand il a rendu sa décision. Il affirme que le dossier certifié ne précise pas quand les éléments de preuve envoyés à la Cour ont été déposés devant le juge Rutherford. En se fondant sur ce motif, il demande à la Cour de conclure que le juge Rutherford ne disposait pas des éléments de preuve.

[4]      Il n'existe absolument aucune preuve au soutien de la prétention du demandeur. Au contraire, la décision du juge Rutherford fait référence à des parties importantes du dossier. Puisqu'il n'y a aucune raison de croire que le juge Rutherford ne disposait pas du dossier envoyé à la Cour, cet argument est rejeté.

[5]      Le demandeur affirme alors que le juge Rutherford n'a pas tenu compte des éléments de preuve dont il disposait. Le demandeur souffre d'une grave sténose du canal rachidien et d'une hernie discale. Il fait valoir que la preuve médicale atteste que son invalidité est permanente, que son état s'aggravera, que les traitements (physiothérapie et AINS) sont très peu efficaces, qu'aucun autre traitement n'est recommandé et qu'il ne peut rien faire pour diminuer la gravité de l'état diagnostiqué. Dans sa décision, le juge Rutherford mentionne que les rapports médicaux font état d'une invalidité importante.

[6]      Toutefois, le juge Rutherford signale également que les rapports médicaux reconnaissent que le demandeur peut s'adonner à des fonctions réduites ou sédentaires. Le tribunal de révision a rejeté l'appel du demandeur parce que les rapports médicaux mentionnent que ce dernier peut s'adonner à de telles activités. Le juge Rutherford ne disposait d'aucune preuve médicale nouvelle lui permettant de conclure que la Commission d'appel des pensions pourrait rendre une décision différente de celle du tribunal de révision et il a donc rejeté la demande de permission d'interjeter appel du demandeur. Il est manifeste que le juge Rutherford a tenu compte des éléments de preuve dont il disposait. Il n'y a aucune raison de conclure le contraire.

[7]      Puis, le demandeur soutient que la décision du juge Rutherford n'a pas été rendue avant le 23 mai 1997 et que, le 15 mai 1997, il a présenté un nouveau rapport médical au soutien de sa demande de permission d'interjeter appel. Il affirme avoir communiqué avec la Commission d'appel des pensions et avoir été avisé que la décision avait été rendue le 23 mai 1997. Or, le registraire de la Commission a fait parvenir une lettre datée du 23 mai 1997 au demandeur, qui était rédigée comme suit :

         [TRADUCTION] J'accuse réception de votre lettre datée du 15 mai 1997, ainsi que du rapport médical du Dr Coppola, daté du 6 mai 1997, et des rapports de radiologie, datés du 5 mai 1997 et du 25 juillet 1996. J'ai le regret de vous informer que le processus d'appel prend fin dès que le président ou le vice-président de la présente Commission refuse d'accorder la permission d'interjeter appel. Je suis désolé, mais je ne peux rien faire d'autre pour vous aider. Si votre état s'est aggravé depuis votre demande, vous devriez présenter une nouvelle demande de prestations.         

La décision du juge Rutherford est datée du 6 mai 1997. Elle a été envoyée au demandeur par courrier recommandé le 9 mai 1997. La lettre du 23 mai 1997 fait état de ces dates. Je ne peux que conclure que le demandeur n'a pas bien compris ce qui lui a été dit quand il a communiqué avec la Commission. Cet argument est dénué de tout fondement.

[8]      Le demandeur prétend alors que dans une procédure qu'il a intentée devant la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta relativement à une demande de prestations prévues en vertu des lois albertaines, le juge Prowse a conclu qu'il n'était pas prouvé qu'il pouvait accomplir un travail léger et qu'il n'y avait qu'une simple conjecture qu'il soit en mesure de le faire. Voir la décision Gramaglia v. Porisky et al., Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, action no 9701-02287, 16 septembre 1997, paragraphe 12. Le demandeur affirme que la décision du tribunal de révision et celle du juge Rutherford sont incompatibles avec celle du juge Prowse.

[9]      Le demandeur a admis que les rapports médicaux dont disposaient le tribunal de révision et le juge Rutherford n'avaient pas été présentés au juge Prowse. Faute de rapports médicaux, je conviendrais qu'il serait conjectural de conclure que le demandeur pourrait éventuellement faire un travail sédentaire ou léger. Cependant, une preuve médicale qui donne un pronostic motivé ne peut pas être qualifiée de conjecturale. Les rapports médicaux sont fondés sur des tests et des examens cliniques et doivent servir à déterminer si une personne est invalide au point de ne pas pouvoir accomplir de façon régulière une occupation rémunératrice importante pendant une période prolongée et indéterminée et, le cas échéant, dans quelle mesure elle l'est. Contrairement à l'affaire dont était saisi le juge Prowse, le tribunal de révision et le juge Rutherford disposaient d'une telle preuve. Leurs décisions n'étaient pas fondées sur des conjectures.

[10]      De plus, le demandeur soutient que les membres du tribunal de révision n'ont pas signé la décision à l'égard de laquelle le juge Rutherford a refusé la permission d'interjeter appel. Le commissaire des tribunaux de révision a avisé le demandeur de la décision du tribunal de révision conformément au paragraphe 82(11). La formalité relative à la divulgation des décisions a dûment été respectée en l'espèce.

[11]      Le demandeur a mis en doute l'honnêteté de tout un chacun ayant pris part à la présente affaire. Il a même tenté de contester la preuve de ses propres médecins dont les rapports affirment qu'il pouvait s'adonner à un travail léger ou sédentaire. Les allégations de malhonnêteté ou de fraude sont des questions graves. Dans l'affaire dont je suis saisi, il n'y a absolument aucun fondement à de telles allégations. D'ailleurs, je pense que si le demandeur avait été représenté par un avocat, il n'aurait pas fait d'allégations de malhonnêteté non fondées. Si le demandeur devait prendre part à d'autres instances judiciaires, il devrait prendre garde de faire de telles allégations sans justification.

[12]      Je ne doute pas que le demandeur souffre d'une invalidité importante et qu'il estime avoir droit aux prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada. L'avocat du défendeur a fait remarquer à la Cour que si le demandeur pouvait établir qu'il avait une invalidité lui ouvrant droit à des prestations avant le 31 décembre 1997, il aurait le droit de recevoir de telles prestations. Il a également mentionné que les prestations pouvaient être rétroactives, et ce jusqu'à 15 mois à compter d'une nouvelle demande de prestations. Le demandeur détient un rapport médical, en date du 6 mai 1997, indiquant qu'il [TRADUCTION] " est incapable d'effectuer un travail convenable " et qu'[TRADUCTION] " il est visiblement restreint par de la douleur et par des limitations fonctionnelles qui l'empêchent d'occuper un emploi rémunérateur ". Le demandeur devrait présenter une nouvelle demande de prestations d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada dès que possible. Évidemment, il appartiendra aux fonctionnaires agissant sous la gouverne du Régime de pensions du Canada et, en dernier lieu, au tribunal de révision et à la Commission d'appel des pensions de décider s'il a, en fait, une invalidité lui donnant droit aux prestations en vertu du Régime de pensions du Canada. D'ailleurs, s'il le fait, la demande déposée immédiatement maximisera les prestations qu'il pourrait recevoir.

[13]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n'y aura pas adjudication des dépens.

                             " Marshall Rothstein "

                        

                                 Juge

OTTAWA (ONTARIO)

LE 23 SEPTEMBRE 1998.

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                  T-610-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :          SALVATORE GRAMAGLIA c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :          Calgary (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 17 septembre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR LE JUGE ROTHSTEIN

EN DATE DU :                  23 septembre 1998

ONT COMPARU :

Salvatore Gramaglia                          POUR LE DEMANDEUR

(en son nom)

Me Daniel Roussy                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général

du Canada                                  POUR LE DÉFENDEUR

__________________

1      83. (1) Un requérant ou bénéficiaire, un conjoint, un ancien conjoint, un ayant droit ou, sous réserve des règlements, quiconque de leur part, de même que le ministre, peuvent, dans les cas où ils ne sont pas satisfaits d'une décision du tribunal de révision rendue en application de l'article 82 " autre qu'une décision portant sur l'appel prévu au paragraphe 28(1) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse " ou du paragraphe 84(2), présenter, soit dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour où la décision du tribunal de révision leur est transmise, soit dans tel délai plus long qu'autorise le président ou le vice-président de la Commission d'appel des pensions avant ou après l'expiration de ces quatre-vingt-dix jours, une demande écrite au président ou au vice-président de la Commission d'appel des pensions, afin d'obtenir la permission d'interjeter un appel de la décision du tribunal de révision auprès de la Commission.

2      82. (1) La personne " requérant ou bénéficiaire, conjoint, ancien conjoint ou ayant droit " qui se croit lésée par une décision du ministre rendue en application de l'article 81 ou du paragraphe 84(2) ou par une décision du ministre rendue en application du paragraphe 27.1(2) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse ou, sous réserve des règlements, quiconque de leur part, peuvent interjeter appel par écrit auprès d'un tribunal de révision de la décision du ministre soit dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour où la première personne est, de la manière prescrite, avisée de cette décision, ou, selon le cas, suivant le jour où le ministre notifie la deuxième personne de sa décision et de ses motifs, soit dans le délai plus long autorisé par le commissaire des tribunaux de révision avant ou après l'expiration des quatre-vingt-dix jours.
(11) Un tribunal de révision peut confirmer ou modifier une décision du ministre prise en vertu de l'article 81 ou du paragraphe 84(2) ou en vertu du paragraphe 27.1(2) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et il peut, à cet égard, prendre toute mesure que le ministre aurait pu prendre en application de ces dispositions; le commissaire des tribunaux de révision doit aussitôt donner un avis écrit de la décision du tribunal et des motifs la justifiant au ministre ainsi qu'aux parties à l'appel.

3      42.(2) Pour l'application de la présente loi :
     a) une personne n'est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d'une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l'application du présent alinéa :          (i) une invalidité n'est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice,          (ii) une invalidité n'est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès;      b) une personne est réputée être devenue ou avoir cessé d'être invalide à la date qui est déterminée, de la manière prescrite, être celle où elle est devenue ou a cessé d'être, selon le cas, invalide, mais en aucun cas une personne n'est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de quinze mois à la date de la présentation d'une demande à l'égard de laquelle la détermination a été établie.

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