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     Date : 19990113

     Dossier : IMM-964-98

ENTRE:

     MWANZA MUKOMA SAMPASSA

     NGONGO ERIC SAMPASSA

     MUTSHIMA SAMPASSA

     Requérants

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION

     Intimé

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE McGILLIS

[1]      Cette demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 28 janvier 1998 par la Section du statut de réfugié ("le tribunal") statuant que les requérants ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention. Les requérants sont citoyens de la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), et craignent la persécution du fait de leur appartenance à un groupe social et de leurs opinions politiques présumées.

[2]      Les requérantes Mwanza et Mutshima Sampassa ("requérantes adultes") sont soeurs, âgées respectivement de 29 ans et de 22 ans, qui habitent au Canada depuis 1991. Le père des requérantes adultes a occupé des postes importants sous le régime de Mobutu, dont ceux de président-général de la garde civile, de gouverneur du Haut-Zaïre et de ministre du cabinet fédéral. Depuis 1991, il est ambassadeur du Zaïre au Canada.

[3]      Laurent-Désiré Kabila a renversé le gouvernement Mobutu en mai 1997, et a instauré un régime dictatorial. Le nom du père des requérantes adultes a été inscrit sur la liste des dirigeants du gouvernement Mobutu, recherchés par le gouvernement Kabila. Même si leur père continue d"exercer les fonctions d"ambassadeur au Canada, les requérantes adultes craignent d"être arrêtées et persécutées dans leur pays. Le requérant Ngongo est l"enfant mineur de Mwanza et est représenté par sa mère.

[4]      Dans sa décision, le tribunal a trouvé que le témoignage des requérantes adultes était crédible. Cependant, il a conclu que leur crainte d"être persécutées n"était pas bien fondée.

[5]      La procureure des requérants prétend, entre autres, que le tribunal a erré dans son analyse de la question concernant la persécution fondée sur les liens familiaux. Le tribunal a analysé cette question de la façon suivante :

         Les revendicateurs ont aussi déclaré que plusieurs membres de la famille de leur mère et de leur père vivaient à Lubumbashi et à Likasi. La propriété et les effets personnels de la plupart d"entre eux ont été saisis par les soldats et par des représentants du gouvernement Kabila. Une de leurs tantes a été battue par des soldats pour avoir refusé de céder sa propriété, et elle a plus tard succombé à ses blessures. Des propriétés appartenant à leur père ont aussi été saisies par le gouvernement Kabila. Cette information est conforme à ce que l"on retrouve dans la pièce A-1, T-8, qui précise que le gouvernement actuel confisque la propriété de parents d"anciens cadres supérieurs du gouvernement Mobutu. Les trois revendicateurs n"ont pas de propriété eux-mêmes, et de toute manière, les saisies ne doivent pas nécessairement être considérées comme de la persécution, compte tenu de la corruption à grande échelle du régime Mobutu.                

    

[6]      À mon avis, considérant le témoignage crédible des requérantes adultes et la preuve documentaire corroborante, le tribunal a erré en droit en analysant d"une façon trop restreinte la question de la crainte de persécution des requérants lors d"un retour à la République démocratique du Congo. Plus précisément, le tribunal aurait dû considérer le dénuement total des membres de leur famille, causé par la confiscation de leurs biens du gouvernement, en analysant le risque de persécution envers les requérants, advenant leur retour à leur pays. Le fait que les requérants n"aient pas eux-même de propriété qui pourraient être saisie n"est qu"un seul facteur pertinent à l"analyse de cette question. Le tribunal a donc erré en ne tenant pas compte, dans son analyse du risque de persécution des requérants, de la persécution subie dans le passé par les membres de leur famille.

[7]      La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision du tribunal est cassée et l"affaire est renvoyée pour une nouvelle audition devant un tribunal différemment constitué.

L"affaire ne soulève aucune question grave de portée générale.

    

                                 D. McGillis
                             _____________________
                                     Juge

OTTAWA

Le 13 janvier 1999

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