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     Date : 19980609

     Dossier : IMM-3418-97

OTTAWA (ONTARIO), LE 9 JUIN 1998

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE SUPPLÉANT HEALD

ENTRE

     DOUDOU NYEMBO KANDOLO,

     demandeur,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

         défendeur.

     ORDONNANCE

         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                 Darrel V. Heald

                                     Juge suppléant

Traduction certifiée conforme

Tan, Trinh-viet

     Date : 19980609

     Dossier : IMM-3418-97

ENTRE

     DOUDOU NYEMBO KANDOLO,

     demandeur,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

         défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE SUPPLÉANT HEALD

[1]          Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 14 juillet 1997 rendue par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Par cette décision, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

LES FAITS

[2]          Le demandeur est citoyen zaïrois (nouvelle République du Congo). Il a vécu à Lubumbashi (province de Shaba) pendant toute sa vie bien que son groupe ethnique y ait été persécuté depuis 1993. En raison de cette persécution, sa famille s'est installée dans une autre province en 1994. Toutefois, le demandeur est resté à Lubumbashi.

[3]          En septembre 1994, le demandeur s'est joint à l'U.D.P.S. (Union pour la démocratie et le progrès social). Il a été affecté à l'[TRADUCTION] "équipe musicale"1. Le demandeur a participé à un certain nombre de rassemblements. En août 1995, il a été nommé chef de l'équipe musicale. Vers la fin de 1995 ou au début de 1996, il a été arrêté par l'armée. Toutefois, il n'a pas été sérieusement malmené, et il a été libéré dans les vingt-quatre heures.

[4]          Au cours d'une manifestation tenue le 16 avril 1996, le demandeur a été arrêté pour la seconde fois avec vingt autres manifestants. Il a été détenu et battu par l'armée pendant trois jours. Il croyait que l'armée le considérait comme un chef de l'U.D.P.S. Le 5 juillet 1996, il a été arrêté encore une fois au cours d'une manifestation avec d'autres membres de l'U.D.P.S. Il a été détenu, battu de nouveau et emmené à un camp de travail forcé.

[5]          Le 14 juillet, lui et vingt-cinq de ses compagnons de prison se sont évadés alors qu'ils coupaient l'herbe pour ceux qui les avaient capturés. Le demandeur s'est caché dans les buissons et s'est échappé. Il s'est rendu à Lubumbashi où il est demeuré chez un ami jusqu'en octobre 1996. En juillet 1996, il a appris qu'on avait trouvé mort, près d'une rivière, un cousin qui avait été arrêté par l'armée. En conséquence, il a commencé à craindre pour sa vie s'il devait être arrêté de nouveau. En octobre 1996, l'U.D.P.S. a pris des dispositions pour qu'il quitte le Zaïre en vue de se rendre au Canada. Le demandeur est arrivé au Canada le 6 novembre 1996, et il a revendiqué le statut de réfugié au point d'entrée.

LA DÉCISION DE LA COMMISSION

[6]          La Commission a tiré des conclusions favorables relativement à la crédibilité du demandeur. La Commission a examiné le changement de circonstances au Zaïre dans le contexte de la question de savoir si la crainte de persécution du demandeur était déraisonnable, compte tenu de la preuve documentaire produite qui établissait qu'un changement [TRADUCTION] "réel", "important" et "durable" s'était produit au sein du gouvernement et dans la politique du Zaïre. La Commission a conclu qu'étant donné l'attitude politique discrète du demandeur, il ne risquait vraisemblablement pas d'être persécuté dans l'éventualité de son retour au Zaïre.

LES POINTS LITIGIEUX

     1.      La Commission a-t-elle eu tort de conclure qu'il y avait eu une changement "réel", "important" et "durable" dans la situation politique du Zaïre qui empêchait de déterminer que le demandeur était réfugié au sens de la Convention?
     2.      La Commission a-t-elle méconnu la preuve concernant la participation du demandeur aux manifestations et sa position de chef au sein de l'U.D.P.S.?

ANALYSE

1. Le changement de circonstances

[7]          La décision de la Cour d'appel fédérale Yusuf c. M.E.I.2

a établi que la question du changement de circonstances était une question de fait. Les motifs de la Commission devraient exposer en termes clairs et précis le motif de sa conclusion selon laquelle le demandeur n'a plus de crainte de persécution qui est objectivement fondée. La Commission devrait également étayer sa conclusion en se référant à la preuve documentaire dont elle dispose3.

[8]          Compte tenu du dossier de l'espèce, je ne saurais conclure que les conclusions de la Commission constituaient une erreur susceptible de contrôle. Certes, une autre personne aurait pu tirer une conclusion différente à l'égard de la durabilité et de l'efficacité des changements politiques au Zaïre; mais le dossier contenait des éléments de preuve étayant le point de vue de la Commission selon lequel les changements dans l'environnement politique du Zaïre étaient de nature importante et réelle et, en conséquence, la crainte du demandeur de vivre dans son pays natal n'était plus fondée. La Commission a pris en considération : le départ de Mobutu, le mécontentement de l'armée, le défaut de la preuve que le nouveau régime Kabila persécuterait des adversaires politiques, ainsi que l'appui public au nouveau régime.

2. Méconnaissance de la preuve quant au rôle de chef joué par le demandeur au sein de l'U.D.P.S.

[9]          Je ne saurais souscrire à cet argument. La Commission a souligné qu'il n'existait pas de preuve de châtiment contre les membres de l'U.D.P.S. À mon avis, il était loisible à la Commission d'adopter ce point de vue compte tenu du dossier de l'espèce. En outre, la Commission a fait remarquer généralement que faisait défaut la preuve étayant le point de vue selon lequel le nouveau gouvernement avait l'intention de persécuter n'importe lequel de ses adversaires politiques.

CONCLUSION

[10]          Par ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

CERTIFICATION

[11]          Aucun des avocats n'a proposé que soit certifiée une question grave de portée générale en application de l'article 83 de la Loi sur l'immigration. J'en conviens. En conséquence, il n'y a pas lieu à certification.

                             Darrel V. Heald

                                 Juge suppléant

OTTAWA (ONTARIO)

Le 9 juin 1998

Traduction certifiée conforme

Tan, Trinh-viet


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                      IMM-3418-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :              Doudou Nyembo Kandolo c. M.C.I.
LIEU DE L'AUDIENCE :              Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :              Le 5 juin 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :          le juge suppléant Heald

EN DATE DU                      9 juin 1998

ONT COMPARU :

    Michael Crane                      pour le demandeur
    Neeta Logsetty                      pour le défendeur
                        

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

    Michael Crane                      pour le demandeur
    Toronto (Ontario)
    George Thomson
    Sous-procureur général du Canada
                                 pour le défendeur

__________________

     1      L'"équipe musicale" avait pour rôle d'inciter la foule dans des rassemblements par des chants et des danses.

     2      (1995), 179 N.R. 11 (C.A.F.).

     3      Comparer Cuadra c. Canada (1993), 157 N.R. 390.

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