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Date : 20040209

Dossier : T-725-00

Référence : 2004 CF 183

ENTRE :

                                      NORASIA SHIPPING SERVICES, S.A.

                                                                                                                        demanderesse

                                                                       et

                                    BALTIC MARINE AGENCIES LIMITED,

                                    MDS-BALTIC EXPRESS/MDS-CANADA,

                                        et THE BALTIC EXPRESS LIMITED

                                                                                                                        défenderesses

                                            MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE EN CHEF

[1]                Madame Virginia Rushkene, qui représente les défenderesses, est accusée d'outrage au tribunal, conformément à l'alinéa 466b) des Règles de la Cour fédérale (1998), pour avoir désobéi à l'ordonnance que le protonotaire Lafrenière a rendue le 21 novembre 2002 (l'ordonnance du protonotaire).

[2]                L'ordonnance du protonotaire est ainsi libellée pour ce qui est du fond :

[TRADUCTION] Madame Virginia Rushkene comparaîtra aux frais des défenderesses et subira un interrogatoire à l'appui d'une exécution forcée aux date, heure et lieu précisés dans l'assignation à comparaître, la signification devant être effectuée par la demanderesse, conformément à l'article 91 des Règles de la Cour fédérale (1998).


[3]                Les défenderesses ne sont pas représentées par un avocat depuis l'année 2001.

[4]                Même si la demanderesse le lui a demandé, Mme Rushkene ne s'est jamais présentée pour être interrogée à l'appui de l'exécution forcée du jugement par défaut rendu à l'encontre des défenderesses.

[5]                Madame Rushkene a reçu signification à personne de l'ordonnance rendue conformément au paragraphe 467(1) des Règles, lui enjoignant de comparaître à l'audience relative à l'outrage au tribunal. Toutefois, elle n'a pas comparu à cette audience et elle n'était pas représentée par un avocat.

[6]                En l'espèce, il s'agit principalement de savoir si la demanderesse a établi, hors de tout doute raisonnable, que Mme Rushkene avait personnellement connaissance de l'ordonnance du protonotaire à laquelle elle aurait censément désobéi.

[7]                La common law a toujours exigé la signification à personne ou la connaissance personnelle réelle de l'ordonnance d'un tribunal comme condition de la responsabilité pour outrage : Bhatnager c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] 2 R.C.S. 217, page 225.

[8]                Le 22 novembre 2002, la demanderesse a envoyé une copie de l'ordonnance du protonotaire à Mme Rushkene par courrier régulier. Rien ne montre que Mme Rushkene ait reçu la copie de l'ordonnance envoyée par la poste.

[9]                Le 29 mars 2003, Mme Rushkene ayant omis de comparaître pour être interrogée à l'appui de l'exécution forcée à plusieurs reprises, la demanderesse a signifié à celle-ci à personne le dossier de la requête visant l'obtention d'une ordonnance fondée sur le paragraphe 467(1) des Règles. L'ordonnance du protonotaire se trouvait au quatorzième onglet des dix-neuf onglets inclus dans le dossier de la requête.

[10]            La signification du dossier de la requête peut constituer une preuve montrant que Mme Rushkene a reçu une copie de l'ordonnance du protonotaire avec une liasse d'autres documents. Toutefois, rien ne montre que l'ordonnance ait été portée à l'attention de Mme Rushkene. Dans ces conditions, je ne suis pas convaincu que la signification du dossier de la requête, le 29 mars 2003, établisse que Mme Rushkene ait de fait eu connaissance de l'ordonnance du protonotaire.


[11]            Le 8 mai 2003, une stagiaire représentant la demanderesse a eu une conversation téléphonique avec Mme Rushkene pour discuter de son omission de comparaître afin d'être interrogée à l'appui de l'exécution forcée. La stagiaire a témoigné qu'elle avait [TRADUCTION] « [...] expliqué à [Mme Rushkene] l'avis de comparution antérieur, qu'elle avait reçu, et qu'une ordonnance judiciaire lui enjoignait de comparaître » . À mon avis, ce témoignage est trop général pour établir que Mme Rushkene était au courant de l'ordonnance du protonotaire, et encore moins de sa teneur précise.

[12]            L'huissier qui a procédé à la signification à plusieurs reprises dans cette instance a déclaré que Mme Rushkene avait [TRADUCTION] « une attitude belliqueuse et abusive et qu'elle cherchait tout simplement à esquiver la signification » . L'huissier n'a pas dit qu'il avait porté l'ordonnance du protonotaire à l'attention de Mme Rushkene lorsqu'il avait communiqué avec elle.

[13]            En résumé, la signification du dossier de la requête, qui comprenait l'ordonnance du protonotaire, ainsi que le témoignage de la stagiaire et de l'huissier n'établissaient pas, que ce soit séparément ou cumulativement, que Mme Rushkene avait de fait connaissance de l'ordonnance judiciaire.

[14]            Étant donné que je ne suis pas convaincu que la connaissance de l'ordonnance judiciaire ait été établie hors de tout doute raisonnable, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres éléments qui doivent exister pour prouver l'outrage au tribunal. Par conséquent, la requête en outrage au tribunal sera rejetée. Aucune ordonnance ne sera rendue au sujet des dépens.

« Allan Lutfy »

Juge en chef


Ottawa (Ontario),

le 9 février 2004.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                           T-725-00

INTITULÉ :                                                          Norasia Shipping Services, S.A.

et

Baltic Marine Agencies Limited,

MDS-Baltic Express/MDS-Canada,

et The Baltic Express Limited

LIEU DE L'AUDIENCE :                                    TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                  LE 20 OCTOBRE 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                     LE JUGE EN CHEF

DATE DES MOTIFS :                                         LE 9 FÉVRIER 2004

COMPARUTIONS :

Shane Rayman                                                         POUR LA DEMANDERESSE

Personne n'a comparu                                            POUR LES DÉFENDERESSES

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Borden Ladner Gervais LLP                                    POUR LA DEMANDERESSE

Scotia Plaza

40, rue King Ouest

Toronto (Ontario) M5H 3Y4

Virginia Rushkene                                                    POUR LES DÉFENDERESSES

1484, promenade Torrington, bureau 64

Mississauga (Ontario) L5V 1Y2

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