Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040123

Dossier : IMM-727-03

Référence : 2004 CF 110

Ottawa (Ontario), le 23 janvier 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY              

ENTRE :

                                                  IMAM SARMIS, BETUL SARMIS

                                                                                                                                          demandeurs

                                                                             et

                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Se fondant sur l'article 72 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), les demandeurs demandent l'autorisation d'introduire une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 30 décembre 2002 dans laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu qu'ils n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention ou des personnes à protéger.


CONTEXTE

[2]                Les demandeurs sont des citoyens de la Turquie. Ils sont tous deux Kurdes. Ils demandent l'asile pour des motifs de race, de religion, d'opinions politiques et d'appartenance à un groupe social en application de l'article 96 de la LIPR. Ils demandent également la protection conformément à l'article 97 de la LIPR, alléguant avoir des motifs sérieux de croire qu'ils seront, par leur renvoi en Turquie, exposés au risque d'être soumis à la torture au sens de l'article premier de la Convention contre la torture et à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités.


[3]                Le demandeur a refusé de faire son service militaire parce qu'il ne voulait pas contribuer à une armée qui terrorisait les Kurdes. Le demandeur a pris l'identité d'un ami en utilisant une copie de sa carte d'identité et il a déménagé dans un autre village, Mersin, où il a évité les quartiers kurdes ainsi que les contrôles d'identité. Il s'est séparé de sa première femme et il a épousé la demanderesse en 1997. Le demandeur a dû détruire sa fausse carte d'identité lors du décès de son ami le 22 avril 2001. Le 29 décembre 2001, il est retourné dans son village et il a été arrêté à un poste de contrôle lorsque les agents de service se sont rendu compte qu'il n'avait pas fait son service militaire. Il a été détenu trois jours et battu férocement. Il a échappé à la vigilance des soldats qui l'accompagnaient en autobus à Ankara et il s'est adressé à un agent pour pouvoir fuir du pays. La police est allée voir son épouse, la demanderesse, au début de janvier 2002. Elle était alors enceinte de 2 mois et demi et la police l'a battue jusqu'à ce qu'elle perde son enfant. Les demandeurs ont quitté la Turquie le 27 février 2002 et sont arrivés au Canada le 1er mars 2002. Les demandeurs ne veulent pas retourner dans leur pays principalement parce que le demandeur ne veut pas se présenter pour faire son service militaire, ce qui constitue un crime en Turquie. En raison de son identité, il craint d'être arrêté, détenu, torturé et peut-être même tué. La demanderesse a les mêmes craintes.

[4]                La Commission a rejeté la demande des demandeurs le 30 décembre 2002 au motif qu'ils n'avaient pas le profil de Kurdes ayant qualité de personnes à protéger et que la preuve documentaire démontrait que la violence en Turquie du Sud-Est avait pratiquement cessé. En outre, le témoignage de la demanderesse a été jugé non crédible.

DÉCISION DE LA COMMISSION

[5]                La Commission a insisté sur trois points principaux lorsqu'elle a tiré sa conclusion défavorable. Premièrement, les événements qui, selon le demandeur, seraient survenus lors de son arrestation par les agents de police ne constituaient pas de la persécution suivant la définition donnée dans l'arrêt Rajudeen c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1984), 55 N.R. 129 (C.A.F.), [1984] A.C.F. no 601 (C.A.) (QL), savoir une succession de mesures prises systématiquement pour punir ceux qui professent des opinions ou des croyances religieuses particulières.


[6]                Deuxièmement, la Commission a examiné des éléments de preuve documentaire indiquant que les opérations militaires en Turquie du Sud-Est avaient pratiquement cessé et, par conséquent, que la crainte du demandeur d'avoir à porter les armes contre ses concitoyens kurdes n'était pas fondée. Troisièmement, la Commission a conclu que la crainte du demandeur d'être arrêté, torturé ou tué en cas de renvoi en Turquie n'était pas raisonnable à la lumière des éléments de preuve documentaire récents indiquant qu'il n'y avait pas de discrimination systématique contre les conscrits turcs durant le service militaire et que les demandeurs d'asile déboutés qui retournaient en Turquie ne risquaient pas d'être persécutés s'ils étaient munis de documents de voyage valables (voir pièce A-3 - Turkey Assessment - Immigration and Nationality Directorate (IND), Home Office, R.-U. (Londres : IND, avril 2002), paragraphe 5.74). Enfin, les paragraphes 167 et 171 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié publié par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés sont rédigés comme suit :

Dans les pays où le service militaire est obligatoire, le fait de se soustraire à cette obligation ou insoumission est souvent une infraction punie par la loi.[...] Les peines varient selon les pays et normalement leur imposition n'est pas considérée comme une forme de persécution. La crainte des poursuites et du châtiment pour désertion ou insoumission ne constitue pas pour autant une crainte justifiée d'être victime de persécutions au sens de la définition [...]

N'importe quelle conviction, aussi sincère soit-elle, ne peut justifier une demande de reconnaissance du statut de réfugié après désertion ou après insoumission. Il ne suffit pas qu'une personne soit en désaccord avec son gouvernement quant à la justification politique d'une action militaire particulière. Toutefois, lorsque le type d'action militaire auquel l'individu en question ne veut pas s'associer est condamné par la communauté internationale comme étant contraire aux règles de conduite les plus élémentaires, la peine prévue pour la désertion ou l'insoumission peut, compte tenu de toutes les autres exigences de la définition, être considérée en soi comme une persécution.

[7]                À la lumière de la preuve documentaire susmentionnée, la Commission a conclu qu'il n'y avait aucun risque de persécution pour les demandeurs en cas de renvoi dans leur pays, et que les demandeurs n'avaient pas le profil des personnes recherchées par les autorités. Enfin, la Commission a conclu que le témoignage de la demanderesse n'était pas crédible. Lorsque la Commission a interrogé la demanderesse sur sa fausse couche et sur la question de savoir si elle était due à des raisons purement gynécologiques, la demanderesse a renvoyé la Commission au rapport médical de janvier 2002 où l'on parle de torture. La Commission a jugé peu plausible qu'un rapport médical parle de torture sans faire état des effets physiques manifestes de la torture. En conséquence, la Commission n'a pas jugé crédible le témoignage de la demanderesse.

QUESTIONS EN LITIGE          

[8]                Les questions en litige sont les suivantes :

1.         La Commission a-t-elle commis une erreur en n'ajoutant pas foi au témoignage de la demanderesse relativement à sa fausse couche?

2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en ne traitant pas de la question des actes cumulatifs de harcèlement?


ANALYSE

[9]                Je vais tout d'abord examiner une objection préliminaire soulevée par le défendeur fondée sur le fait que les demandeurs n'ont pas déposé, à l'appui de leur demande d'autorisation, leurs propres affidavits fondés sur leur connaissance personnelle des événements et qu'ils ont déposé uniquement l'affidavit de Rizni Faruk, technicien juridique. L'absence d'affidavit personnel à l'appui de leur demande d'autorisation constitue, selon le défendeur, un vice fatal auquel ne peut remédier l'affidavit d'un tiers (Jia Cheng Ye c. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), le 12 janvier 2000, IMM-4877-99 (C.F. 1re inst.)).

[10]            Sur ce point, je renvoie à la décision Turcinovica c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 164, [2002] A.C.F. no 216 (C.F. 1re inst.) (QL), où la juge Dawson a dit aux paragraphes 11, 12 et 13 :

Au début des plaidoiries, l'avocat du ministre a déclaré que la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée parce qu'elle n'était pas appuyée par un affidavit adéquat. Mme Turcinovica n'avait déposé aucun affidavit et la demande était appuyée par l'affidavit de l'assistant de l'avocat de Mme Turcinovica. Selon l'avocat du ministre, l'obligation de la demanderesse de produire un affidavit fondé sur ses connaissances personnelles n'était pas remplie. En conséquence, il estimait que la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée parce qu'elle n'était pas appuyée par un affidavit adéquat.

Selon la jurisprudence, lorsqu'une demande de contrôle judiciaire n'est pas appuyée par des affidavits fondés sur la connaissance personnelle du demandeur, il n'en résulte pas automatiquement un rejet de la demande : voir les décisions suivantes : Huang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 788 (C.F. 1re inst.); Moldeveanu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 235 N.R 192 (C.A.F.); [...]

En l'espèce, je suis convaincue que l'affidavit présenté à la Cour suffit à établir l'existence de la demande de résidence permanente ainsi que son rejet. Je ne suis donc pas disposée à rejeter sur ce fondement la demande de contrôle judiciaire.


Il est bien établi que l'utilisation d'affidavits de tiers n'est pas fatale à une demande de contrôle judiciaire. Bien que je n'approuve pas l'utilisation d'affidavits de tiers, je ne suis pas prêt à rejeter la demande de contrôle judiciaire pour ce motif. Comme l'affidavit de Rizni Faruk repose sur une connaissance personnelle du témoignage des demandeurs à l'audience, il est suffisant pour étayer la présente demande.

NORME DE CONTRÔLE


[11]       Les demandeurs prétendent que les questions de la persécution antérieure, des actes cumulatifs de harcèlement et de ce qui constitue de la persécution sont toutes des questions de droit et de fait, et que la norme de contrôle applicable est donc la décision raisonnable simpliciter. Le défendeur soutient que la norme de contrôle applicable à la décision de la Commission est la décision manifestement déraisonnable. Ce n'est que lorsque la preuve, examinée raisonnablement, ne peut servir de fondement à la décision du tribunal qu'une conclusion de fait sera manifestement déraisonnable. Je suis d'accord avec le défendeur pour dire que la norme de contrôle applicable pour l'appréciation de la persécution est la décision manifestement déraisonnable. La Cour suprême du Canada a reconnu dans l'arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982, que la Commission est un tribunal spécialisé dans l'appréciation du risque de persécution et que les conclusions qu'elle tire à cet égard sont des conclusions de fait. En conséquence, la norme de contrôle applicable en l'espèce est la décision manifestement déraisonnable. En ce qui concerne les questions de crédibilité, la Cour n'intervient que lorsque le demandeur peut démontrer que la décision de la Commission est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon arbitraire ou sans tenir compte de la preuve dont elle dispose : Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7, par. 18.1(4). La Commission est un tribunal spécialisé qui peut apprécier la plausibilité et la crédibilité d'un témoignage, dans la mesure où ses inférences ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)), et où ses motifs sont exprimés en termes clairs et explicites (Hilo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.)).

La Commission a-t-elle commis une erreur en n'ajoutant pas foi au témoignage de la demanderesse relativement à sa fausse couche?

[12]            Les demandeurs soutiennent que la conclusion défavorable de la Commission quant à la crédibilité du témoignage de la demanderesse est absurde. La demanderesse a déclaré dans son FRP et dans son témoignage que la police l'avait battue et lui avait fait faire une fausse couche. Ces déclarations ont été corroborées par une note médicale indiquant qu'elle était allée voir un médecin et qu'elle lui avait dit la même chose. Il n'y a aucune contradiction entre les éléments de preuve soumis par la demanderesse et le témoignage qu'elle a produit, et l'ensemble de cette preuve n'est pas invraisemblable. N'ayant remis en question la crédibilité d'aucun autre élément de preuve de l'un ou l'autre des demandeurs, la Commission n'avait aucun motif valable pour ne pas croire les demandeurs; sa conclusion est donc manifestement déraisonnable.

[13]            Le défendeur soutient qu'il n'était pas déraisonnable pour la Commission de remettre en question le rapport médical de la demanderesse. Le rapport est bref et ne fait état d'aucune preuve matérielle ou objective de torture ou de blessures infligées à la demanderesse. Selon le défendeur, la mention de la torture dans le rapport médical repose uniquement sur les déclarations de la demanderesse et il n'était pas déraisonnable pour la Commission de conclure que cette preuve était contestable et que les allégations des demandeurs n'étaient pas crédibles.


[14]            Il est vrai que la question de la crédibilité de la preuve et du poids à lui accorder relève de la compétence de la Commission (Hassan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2001] A.C.F. no 184 (1re inst.) (QL)). En l'espèce, les demandeurs ont renvoyé la Commission à la pièce P-6, soit le rapport médical. La Commission a jugé suspect qu'un rapport médical parle de torture sans faire état des effets physiques de la torture. En réponse, elle a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité du témoignage et des éléments de preuve produits par la demanderesse. Pourtant, le témoignage des deux demandeurs a été donné sous serment et est donc présumé véridique à moins qu'il n'y ait des motifs raisonnables de tirer une conclusion différente. Comme la Commission n'a pas remis en question la crédibilité de l'un ou l'autre des demandeurs dans sa décision, et je ne trouve rien dans la preuve soumise à la Commission qui donne des motifs raisonnables de ne pas croire les demandeurs, je ne puis accepter cette conclusion défavorable de la Commission quant à la crédibilité. Il n'y a aucune contradiction entre les éléments de preuve soumis par la demanderesse et le témoignage qu'elle a produit. Le rapport médical constitue du ouï-dire, mais la Commission commet une erreur susceptible de contrôle si elle tire une conclusion défavorable quant à la crédibilité à partir de ce rapport, parce que la Commission n'a jamais remis en question la crédibilité de la demanderesse ou du demandeur (Kraitman c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 81 F.T.R. 64 (C.F. 1re inst.)).

La Commission a-t-elle commis une erreur en ne traitant pas de la question des actes cumulatifs de harcèlement?

[15]            Les demandeurs maintiennent enfin que la Commission a commis une erreur de droit en tirant une conclusion défavorable quant à la crédibilité uniquement en ce qui concerne la preuve relative à la fausse couche, et en n'examinant pas la question des actes cumulatifs de harcèlement. Le demandeur a déclaré dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP) qu'il avait subi au moins 15 incidents de détention et de violence par les policiers, ce qui l'avait obligé à se cacher et à se déplacer constamment. Par suite de sa dernière arrestation, il a été détenu et battu pendant trois jours puis il a été enrôlé dans l'armée, où des officiers turcs auraient vraisemblablement commis des actes graves de discrimination à son endroit. Son épouse a été battue alors qu'elle était enceinte de 2 mois, ce qui l'a fait faire une fausse couche. Comme elle est tenue d'examiner l'ensemble de la preuve, la Commission commet une erreur susceptible de contrôle lorsqu'elle ne s'acquitte pas de cette obligation (Retnem c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 132 N.R. 53 (C.A.F.)).


[16]            Le défendeur soutient que rien ne prouve que la Commission n'a pas examiné l'ensemble de la preuve pertinente pour rendre sa décision. Le fait que la Commission a rendu une décision défavorable aux demandeurs n'établit pas qu'elle n'a pas tenu compte de certains éléments de preuve.

[17]            Encore une fois, je dois conclure en faveur des demandeurs sur ce point. Il est bien établi que l'omission de connaître de la nature cumulative de la persécution subie par un demandeur constitue une erreur manifeste (Retnem, précité). La persécution pour des motifs cumulés est définie en ces termes au paragraphe 53 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié publié par le HCR :

En outre, un demandeur du statut de réfugié peut avoir fait l'objet de mesures diverses qui en elles-mêmes ne sont pas des persécutions (par exemple, différentes mesures de discrimination), auxquelles viennent s'ajouter dans certains cas d'autres circonstances adverses (par exemple une atmosphère générale d'insécurité dans le pays d'origine). En pareil cas, les divers éléments de la situation, pris conjointement, peuvent provoquer chez le demandeur un état d'esprit qui permet raisonnablement de dire qu'il craint d'être persécuté pour des « motifs cumulés » [...]

[18]            Bien que la violence subie par le demandeur lors de son arrestation ne constitue peut-être pas en soi de la persécution, la Commission n'a pas tenu compte des nombreux autres incidents de détention abusive qui, selon le demandeur, pouvaient être considérés comme une série d'événements susceptibles d'équivaloir à de la persécution (Bobrik c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1994), 85 F.T.R. 13 (C.F. 1re inst.)).


[19]            Bien qu'elle ne puisse à elle seule servir à établir une crainte de persécution à l'avenir, la persécution antérieure peut servir de fondement à la crainte actuelle, comme l'a affirmé la juge Dawson dans la décision Tolu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 334, [2002] A.C.F. no 447 (1re inst.) (QL), au paragraphe 17 :

[...] dans les cas où la preuve établit une série d'actions considérées comme discriminatoires, il faut tenir compte de la nature cumulée des actes en cause. Cette exigence indique que des événements antérieurs peuvent servir de fondement à la crainte actuelle [...]

[20]            En l'espèce, le demandeur a déclaré avoir subi au moins 15 incidents de détention abusive par la police, ce qui l'a finalement obligé à se cacher. Durant sa dernière détention, il a été sauvagement battu pendant trois jours et forcé à s'engager dans l'armée, où il aurait vraisemblablement été victime d'autres actes de discrimination. Son épouse a été battue à un point tel qu'elle a fait une fausse couche. La Commission n'a même pas envisagé la possibilité d'actes cumulatifs de harcèlement. L'omission de la Commission d'envisager la possibilité que les demandeurs aient été victimes de persécution pour des motifs cumulés, ainsi que la conclusion défavorable de la Commission quant à la crédibilité de la demanderesse, sont toutes deux des erreurs susceptibles de contrôle.

[21]            Pour ces motifs, je dois faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire. L'affaire est renvoyée à un tribunal autrement constitué pour qu'il procède à une nouvelle audition et statue à nouveau sur l'affaire.

[22]            Les parties ont refusé de soumettre une question à certifier. En l'espèce, il n'y a aucune question à certifier.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié le 30 décembre 2002 soit accueillie. L'affaire est renvoyée à un tribunal autrement constitué afin qu'il procède à une nouvelle audition et statue à nouveau sur l'affaire. Aucune question n'est certifiée.            

« Michel Beaudry »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-727-03

INTITULÉ :                                        IMAM SARMIS, BETUL SARMIS

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 7 JANVIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

DATE DES MOTIFS :                       LE 23 JANVIER 2004

COMPARUTIONS :

Lorne Waldman                                     POUR LES DEMANDEURS

Neeta Logsetty                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)                                  POUR LES DEMANDEURS

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)                                  POUR LE DÉFENDEUR


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.