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Date : 20040316

Dossier : IMM-1844-03

                                                                                                                 Référence : 2004 CF 399

Halifax (Nouvelle-Écosse), le 16 mars 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

ENTRE :

                                                       BRIDGET MCDIARMED

                                                (alias Bridget Kenyatt McDiarmed)

                                            BRANDIE MCDIARMED-CHARMON

                                                    (alias Brandie Britne Charmon)

                                                       MARTINA MCDIARMED

                                                                                                                                  demanderesses

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LA JUGE LAYDEN-STEVENSON (à l'audience)


1.          Les demanderesses, des femmes appartenant à une même famille, sont originaires de Castries (Sainte-Lucie) et appartiennent à trois générations différentes. Martina (née en 1961) est la mère de Bridget (née en 1983) qui, à son tour, est la mère de Brandie (née en 2000). Elles ont revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention ou de personnes à protéger en raison du sexe et, plus particulièrement, par crainte d'être maltraitées par Julius Francis, le copain de Martina. La Section de la protection des réfugiés la (SPR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté leurs revendications.

2.          Les revendicatrices ont prétendu que, en septembre 1998, M. Francis a emménagé avec Martina et Bridget, dans l'appartement de Martina. Après avoir perdu son emploi en novembre, il a commencé à boire beaucoup et à abuser physiquement de Martina. À une occasion, elle a perdu deux dents après avoir été frappée sur la bouche. En novembre 1999, Martina et Bridget ont déménagé à Gros Inlet (situé à environ trente minutes d'autobus) et M. Francis est demeuré dans l'appartement. On a éventuellement pris la décision de permettre à Bridget de vivre avec M. Francis de telle sorte qu'elle puisse terminer ses études à la maison. Bridget passait habituellement les fins de semaine chez des amis ou avec son copain. En mars 2000, Bridget est demeurée à l'appartement au cours d'une fin de semaine et prétend que M. Francis est arrivé ivre à la maison et qu'il l'a agressée sexuellement. Il a tenu Bridget responsable de l'agression et a menacé de la tuer si elle en parlait à quiconque. Bridget est retournée à la maison de sa mère et n'a parlé de l'agression que lorsqu'elle a appris qu'elle était enceinte.


3.          Deux semaines après la naissance de Brandie, M. Francis s'est rendu à Gross Inlet et a demandé à voir le bébé. Il a enfoncé la porte afin d'entrer dans la maison et a agressé Martina et Bridget. Deux semaines plus tard, Martina et Brandie sont arrivées au Canada avec un visa de visiteur d'une durée de six mois (lequel a éventuellement été renouvelé) pour demeurer avec la soeur de Martina. Bridget est demeurée à Sainte-Lucie et a résidé chez des parents à environ vingt minutes de Castries. Elle n'a revu M. Francis qu'en novembre 2001 alors qu'il l'a abordée sur la rue et voulait savoir où se trouvaient sa mère et sa soeur. Croyant que Brandie était son enfant, M. Francis a menacé de les tuer toutes si elles ne retournaient pas avec lui. Bridget a signalé cet incident à sa mère, laquelle s'est arrangée pour la faire venir au Canada deux semaines plus tard. Elles ont revendiqué peu après le statut de réfugié.

4.          La SPR a conclu que les récits des revendicatrices étaient en partie crédibles, mais elle a également conclu qu'il y avait des exagérations et que certaines parties de leurs témoignages n'étaient pas crédibles. Les demanderesses prétendent que la Commission a commis une erreur dans l'appréciation de la crédibilité et a appliqué le mauvais critère quant à la crainte fondée de persécution. Elles ont également affirmé que la Commission a commis une erreur dans les conclusions qu'elle a tirées quant à la protection de l'État. À l'audience, l'avocat a reconnu que, à moins que la Commission n'ait commis une erreur dans sa conclusion quant à la protection de l'État, laquelle conclusion ne portait pas sur la crédibilité, les demanderesses ne pourraient pas avoir gain de cause.

5.          Malgré l'argumentation claire et habile de l'avocat des demanderesses, je ne suis pas convaincue que la SPR a commis une erreur en concluant que les demanderesses n'avaient pas réfuté la présomption relative à la protection de l'État.


6.          La question en litige est une question mixte de droit et de fait et la norme de contrôle applicable est celle du caractère raisonnable. Un revendicateur doit présenter une preuve claire et convaincante de l'incapacité de l'État à assurer la protection de ses citoyens. Il n'est pas facile de s'acquitter de ce fardeau et c'est au revendicateur qu'il incombe de démontrer qu'il lui est physiquement impossible de demander de la protection ou que l'État ne peut d'une façon quelconque la lui accorder. La protection n'a pas à être parfaite.

7.          En l'espèce, la SPR a examiné la preuve documentaire selon laquelle la protection de l'État, bien qu'imparfaite, serait accordée. La Commission a conclu que Martina a appelé en vain la police en novembre 1999. Elle s'est adressée à la police à une autre occasion en décembre 2000. La Commission n'a pas conclu que sa preuve concernant la deuxième plainte était crédible, mais a conclu que, si elle acceptait la preuve telle quelle, Martina n'avait rien dit à la police quant aux agressions ou quant aux menaces. L'agression sexuelle concernant Bridget n'a jamais été rapportée. Bien qu'elles fussent au courant de l'existence du Women's Crisis Centre, ni Martina, ni Bridget ne l'ont contacté. La preuve documentaire indiquait également que l'accès à la protection était difficile en raison d'une déficience sur le plan de l'assistance juridique, mais Martina et Bridget occupaient toutes les deux un emploi et n'ont pas donné à penser qu'elles avaient besoin d'assistance juridique.


8.          Après avoir examiné attentivement le dossier et la décision de la Commission, je ne puis conclure que la décision de la SPR était déraisonnable. Malgré que, à une occasion, à un endroit, la police n'ait pas répondu, on ne peut affirmer que les demanderesses ont demandé la protection de l'État. La conclusion qu'elles pouvaient obtenir la protection de l'État n'était pas incompatible avec l'ensemble de la preuve. Comme cette conclusion dispose de la question, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

9.          Aucune question n'est soulevée aux fins de la certification. La présente affaire ne soulève aucune question grave de portée générale.                                                

LA COUR ORDONNE :

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

Aucune question n'est certifiée.

           « Carolyn Layden-Stevenson »                                                                                                                      Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                        IMM-1844-03

INTITULÉ :                                                       BRIDGET MCDIARMED ET AL

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE)

DATE DE L'AUDIENCE :                               LE 16 MARS 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE:                                      LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

DATE DES MOTIFS :                                      LE 16 MARS 2004

COMPARUTIONS :

                                                                          

Kelvin Gilpin                                                         POUR LES DEMANDERESSES

Melissa Cameron                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSRITS AU DOSSIER :

Kelvin Gilpin                                                         POUR LES DEMANDERESSES

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                       POUR LE DÉFENDEUR


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