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Dossier : IMM-6291-04

Référence : 2005 CF 1008

Ottawa (Ontario), le 20 juillet 2005

ENTRE :

TERENCE DURAISAMI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

[1]                Une demande de prolongation de permis de séjour temporaire a été refusée au demandeur au motif qu'il ne répond pas aux conditions de l'alinéa 186l) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés (RIPR). Cette disposition prévoit une dispense de permis de travail pour des personnes qui exercent certaines activités religieuses. Il s'agit du contrôle judiciaire de la décision défavorable de l'agent d'immigration.

Contexte

[2]                Le demandeur, citoyen de l'Inde, est au Canada depuis septembre 2000. Il est venu au Canada pour étudier les arts de la scène au collège Humber. Il était titulaire d'un visa de séjour temporaire valide jusqu'au 29 mai 2004.

[3]                La veille de l'expiration de ce visa, il a déposé une demande de prolongation en faisant valoir la dispense prévue pour les membres du clergé ou les travailleurs appartenant à un ordre religieux comme le prévoit l'alinéa 186l) du Règlement, qui se lit comme suit :

186. L'étranger peut travailler au Canada sans permis de travail :

l) à titre de personne chargée d'aider une communauté ou un groupe à atteindre ses objectifs spirituels et dont les fonctions consistent principalement à prêcher une doctrine, à exercer des fonctions relatives aux rencontres de cette communauté ou de ce groupe ou à donner des conseils d'ordre spirituel;

186. A foreign national may work in Canada without a work permit:

l) as a person who is responsible for assisting a congregation or group in the achievement of its spiritual goals and whose main duties are to preach doctrine, perform functions related to gatherings of the congregation or group or provide spiritual counselling;

[4]                Sa demande de prolongation de visa se fondait sur le fait que cela lui permettrait de travailler pour le compte de la « Church on the Rock » sans avoir besoin d'un permis de travail.

[5]                Un « poste de ministre à temps plein » avait été offert au demandeur à la « Church on the Rock » à titre de coordonnateur des dramatiques. Ses fonctions étaient les suivantes :

    -        élaborer une dramatique pour les enfants;

    -        coordonner avec l'aîné en charge de l'évangélisme la présentation de l'évangile au monde extérieur au moyen de dramatiques;

    -        seconder le pasteur pour présenter le message sous forme de dramatiques au cours du service du dimanche;

    -        aider aux travaux administratifs.

[6]                À l'appui de sa demande de visa, le demandeur a joint deux (2) lettres faisant référence à ses compétences dans les arts de la scène et une lettre datée de juin 1997 provenant d'une église en Inde. Cette lettre parlait de son engagement religieux, de son rôle de leader auprès des jeunes par l'enseignement de chants significatifs et la transmission de messages inspirants.

[7]                Le défendeur a reçu une lettre datée du 23 juin 2004 (la première lettre) dans laquelle la prolongation était refusée au motif que, bien que la demande eût été déposée le 28 mai 2004, le visa avait expiré le 24 mai 2004. Cette lettre était manifestement erronée, étant donné que le visa n'a expiré que le 29 mai 2004.

[8]                Grâce aux démarches de son avocat, le défendeur a reçu une autre lettre en juillet 2004 (la deuxième lettre), mais datée du 23 juin 2004, qui l'informait que la demande de visa avait été refusée. Pour ajouter encore à la confusion, il est dit ceci dans la lettre :

[TRADUCTION]

Pour parvenir à une décision, l'agent examine plusieurs facteurs, notamment :

1. Le motif du premier séjour du demandeur et la raison pour laquelle il demande la prolongation de son visa;

2. Ses liens avec son pays de résidence permanente, notamment, son emploi et ses études; ses liens et ses responsabilités de famille; son statut (citoyenneté ou statut d'immigrant);

3. Ses moyens financiers pour subvenir à ses besoins pendant la prolongation de son séjour et pour rentrer chez lui;

4. Ses documents de voyage et ses pièces d'identité;

5. La probabilité qu'il quittera le Canada à la fin de son autorisation de séjour.

Après avoir examiné l'ensemble de votre situation, je ne suis pas convaincu que vous respectez les conditions prescrites par la Loi et le Règlement.

[9]                Comme on a pu le constater quand les notes au SSOBL sont devenues disponibles, ces facteurs décrits dans la deuxième lettre n'ont qu'un lien extrêmement ténu avec les motifs véritables qui ont justifié le refus de la prolongation. Ces notes au SSOBL confirment que la première lettre datée du 23 juin avait été envoyée par erreur.

[10]            Les passages importants des notes au SSOBL sont les suivants :

[TRADUCTION]

L'alinéa 186l) s'applique aux personnes dont l'emploi consiste principalement à prêcher la doctrine, à présider à des fonctions liturgiques ou à donner des conseils d'ordre spirituel, soit à titre de ministre ordonné, de laïc, ou de membre d'un ordre religieux.

[11]            Les notes au SSOBL dressent ensuite la liste des fonctions dont le demandeur devait s'acquitter à la « Church on the Rock » et concluent finalement de la façon suivante :

[TRADUCTION]

Le client n'a présenté aucun renseignement ayant trait à ses compétences pour prêcher la doctrine, non plus qu'aucun certificat, etc. indiquant qu'il avait été ordonné ou qu'il avait été formé d'une façon quelconque pour exercer des fonctions d'ordre spirituel.

[12]            Il ne fait aucun doute que les notes au SSOBL décrivent les véritables motifs du refus de prolongation du visa.

Décision

[13]            Le demandeur fait valoir qu'il y a trois motifs de contrôle :

- l'absence de motifs appropriés

-    l'application d'un critère juridique non approprié

-    l'omission de tenir compte des documents dont était saisi l'agent

[14]            La norme de contrôle applicable aux motifs varie. Dans la mesure où la question porte sur le critère juridique approprié ou sur le déni de justice naturelle, la décision correcte est applicable; dans la mesure où la question porte sur la pondération de la preuve ou l'examen de cette preuve dans un contexte juridique approprié, c'est décision raisonnable simpliciter qui s'applique.

[15]            Il ne fait aucun doute que les actes du défendeur ont engendré de la confusion et comportaient des erreurs administratives. Toutefois, le demandeur n'a pu signaler aucun préjudice réel qui lui aurait été causé par le retard à obtenir et par la confusion qui a entouré les motifs véritables du refus.

[16]            Le demandeur soutient que la référence dans les notes au SSOBL à l'alinéa 186l) qui s'appliquerait à des personnes [traduction] « [qui président] à des fonctions liturgiques » est une erreur de droit. Il soutient que le défendeur a ajouté une fonction additionnelle à celles qui se trouvent déjà à l'alinéa 186l).

[17]            En toute déférence, je ne peux accepter cette prétention. La référence dans les notes au SSOBL mentionne « ces activités » qui respecteraient le critère de l'alinéa 186l). Cela n'a pas pour effet de créer une nouvelle condition ou un critère juridique à l'alinéa 186l). « Présider à des fonctions liturgiques » est une activité qui peut facilement tomber dans la catégorie suivante : « exercer des fonctions relatives aux rencontres de [la] communauté ou [du] groupe » . Il y a sans aucun doute d'autres activités qui peuvent être regroupées dans ce type de fonctions.

[18]            En outre, l'agent n'a pas écarté les éléments de preuve concernant la capacité du demandeur de prêcher la doctrine. La lettre provenant de l'église en Inde n'a jamais traité de cette compétence particulière - elle fait simplement référence à l'enthousiasme religieux dont faisait preuve le demandeur il y a huit ans. Aucune preuve n'a été présentée concernant sa capacité de prêcher la doctrine. La ferveur religieuse n'équivaut pas nécessairement à une compétence en matière de prédication.

[19]            À mon avis, il faut donner à l'alinéa 186l) un sens et une application qui sont conformes à son objet - qui consiste à prévoir une dispense de permis de travail pour les personnes qui ont des responsabilités dans une communauté ou un groupe pour l'aider à atteindre ses objectifs spirituels. Il y a des limites rationnelles fondées sur des faits particuliers quant à la portée de cette disposition. Ce ne sont pas toutes les personnes qui aident dans un lieu de culte (placiers, chanteurs ou personnes enseignant la religion aux enfants) en soi, qui peuvent invoquer l'alinéa 186l).

[20]            La conclusion de l'agent quant à l'application aux faits particuliers de l'espèce du critère juridique découlant de l'alinéa 186l) est raisonnable. Il y a un lien rationnel clair entre les faits et la décision. Par conséquent, il n'y a pas de raison que la Cour modifie cette décision.

[21]            Pour ces motifs, la demande sera rejetée. Aucune question ne sera certifiée.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-6291-04

INTITULÉ :                                                    TERENCE DURAISAMI c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                            le 13 juillet 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               le juge Phelan

DATE DES MOTIFS :                                   le 20 juillet 2005

COMPARUTIONS :

Daniel Kwong                                                   POUR LE DEMANDEUR

Leena Jaakkimainew                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Daniel Kwong

Toronto (Ontario)                                              POUR LE DEMANDEUR

Leena Jaakkimainew

Toronto (Ontario)                                              POUR LE DÉFENDEUR


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