Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

        



Date : 20000329


Dossier : T-1423-98

Entre :

     ALI GAHAM

     Demandeur

     ET

     SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

     Défendeur


     MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE NADON:


[1]      La défenderesse interjette appel de la décision du protonotaire Richard Morneau datée le 19 janvier 2000.

[2]      La décision du protonotaire est intitulée "Ordonnance relative à la conférence préparatoire et à la conduite de l"action". Le pouvoir du protonotaire de rendre une telle ordonnance découle de la règle 265(b) des Règles de cette Cour qui prévoit ce qui suit:

         265. Lors de la conférence préparatoire:
         a)....
         b) le protonotaire peut rendre une ordonnance à l"égard de la conduite de l"action, autre qu"une ordonnance relative à une requête visée à l"un des alinéas 50(1)a ) à i)     

[3]      Spécifiquement, la défenderesse s"objecte au paragraphe 2 de l"ordonnance du 19 janvier 2000 où le protonotaire énonce ce qui suit:

"suivant la Cour à ce stade-ci, de part la décision de cette Cour en date du 14 septembre 1998, il y a maintenant chose jugée définitive et finale sur la question de la juridiction rationae materiae de cette Cour d"entendre la présente action du demandeur et la défenderesse est forclose dans le futur de soulever à nouveau cette question."

[4]      La décision du 14 septembre 1998 à laquelle réfère le protonotaire au paragraphe 2 de sa décision en est une du juge Denault. Au paragraphe 1 de sa décision, le juge Denault résume la requête devant lui comme suit:

"Les défendeurs contestent la compétence de cette Cour et demandent le rejet de l"action dommages-intérêts intentée par le demandeur résultant du non renouvellement de son emploi pour une période déterminée au sein de la fonction publique fédérale au ministère du Développement des ressources humaines du Canada à Montréal."

[5]      Après étude de la question soulevée par la requête de la défenderesse, le juge Denault en arrive à la conclusion que le demandeur n"était pas un fonctionnaire au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique L.R.C. 1985 c. P-35 et, par conséquent, que la Cour fédérale a juridiction pour entendre son action.

[6]      La défenderesse n"a déposé aucun avis d"appel à l"encontre de la décision du juge Denault. Pour une meilleure compréhension du dossier, je reproduis les paragraphes 7 et 8 de la décision du juge Denault:

"[7] Par ailleurs, pour être soumis ou avoir droit à la procédure de grief énoncée à la partie IV de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (article 9 et suivants), encore faut-il être un fonctionnaire. Le paragraphe 2(1) de la Loi définit le terme:
"fonctionnaire" Personne employée dans la fonction publique, ... mais à l"exclusion des personnes:
     h)      employées pour une durée déterminée de moins de trois mois ou ayant travaillé à ce titre pendant moins de trois mois.

Le dossier dans son état actuel ne révèle pas que le demandeur est un fonctionnaire au sens de cette loi.

[8] Vu la conclusion à laquelle j"en viens relativement à la compétence de cette Cour d"entendre et de juger cette affaire, il n"est pas nécessaire de traiter de l"argument de l"avocat des défendeurs, et de la volumineuse jurisprudence à l"appui, portant sur l"exclusivité du recours à la procédure de grief auquel est soumis un fonctionnaire."

[7]      Suite au rejet de sa requête, la défenderesse a déposé une défense de 96 paragraphes. Au paragraphe 31 et suivants, la défenderesse allègue que le demandeur était un fonctionnaire aux termes de la Loi sur l"emploi de la fonction publique 1985 c. P-33 ainsi qu"aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Au paragraphe 87 de sa défense, la défenderesse allègue ce qui suit:

"La défenderesse allègue à nouveau que cette Cour n"a aucune compétence pour entendre au mérite l"action du demandeur puisque des mécanismes exclusifs de redressement pour obtenir réparation étaient, en vertu des dispositions législatives pertinentes, ouverts au demandeur en tant que fonctionnaire au sens de la L.R.T.F.P., [Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ] lequel a décidé de ne pas s"en prévaloir;"

[8]      Le demandeur a déposé une réponse à la défense de la défenderesse. Aux paragraphes 32 et 33 de sa réponse le demandeur allègue ce qui suit:

"[32] Contrairement à la prétention des défendeurs, le demandeur n"a pas travaillé à titre de fonctionnaire mais comme employé à titre occasionnel, de sorte qu"il était exclu de l"application de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique .

[33] De plus, la Cour ayant rejeté la requête des défendeurs qui visait le rejet de l"action du demandeur pour défaut de compétence, il y a désormais chose jugée et, par conséquent, en application du principe de l"autorité de la chose jugée, les défendeurs ne peuvent plus remettre en question la compétence de la Cour à l"égard de l"action du demandeur;"

[9]      Le demandeur a donc lié contestation sur la question de juridiction soulevée par la défenderesse. Le demandeur n"a pas déposé de requête pour radier les paragraphes de la défense où la défenderesse soulève la question de juridiction.

[10]      Subséquemment, les parties ont déposé leurs mémoires relativement à la tenue d"une conférence préparatoire devant avoir lieu devant le protonotaire Richard Morneau. La conférence préparatoire a été fixée pour le 18 janvier 2000 à 9h30 à Montréal.

[11]      Le 19 janvier 2000, le protonotaire signait l"ordonnance à laquelle s"objecte la défenderesse.

[12]      Avec égard, je ne peux que conclure que le protonotaire a excédé ses pouvoirs lorsqu"il a, à toutes fins pratiques, rayé les paragraphes de la défense relatifs à la juridiction de la Cour d"entendre l"action du demandeur.

[13]      Comme je l"ai déjà indiqué, le demandeur a lié contestation sur la question de juridiction et n"a déposé aucune requête demandant la radiation des paragraphes pertinents de la défense. Par conséquent, le protonotaire, à mon avis, ne pouvait lors de la conférence préparatoire décider l"une des questions qu"aura à trancher le juge du procès, à savoir si la décision du juge Denault a mis fin au débat concernant la juridiction.

[14]      Il est important de noter que lorsque les procureurs des parties se sont présentés pour la conférence préparatoire, ils n"avaient reçu aucune indication ni avis qu"ils auraient à débattre devant le protonotaire la question soulevée par les procédures à savoir s"il y avait chose jugée relativement à la question de juridiction.

[15]      Il appert que le protonotaire a soulevé cette question d"office et qu"il a tranché comme il l"a fait parce qu"il était d"avis que la décision du juge Denault en date du 14 septembre 1998 avait mis fin au débat. Encore une fois, avec respect, je suis d"avis que le protonotaire a outrepassé ses pouvoirs.

[16]      Si le demandeur désirait débattre cette question avant le procès, il avait entière liberté de déposer une requête demandant la radiation des paragraphes pertinents de la défense ou de demander à la Cour de décider cette question de droit.

[17]      Dans les circonstances, je ne peux qu"accueillir l"appel de la défenderesse et infirmer la décision du protonotaire. Le paragraphe 2 de l"ordonnance du protonotaire sera donc rayé et la question relative à la juridiction de cette Cour d"entendre l"action du demandeur s"ajoutera aux questions qui devront être décidées par le juge du procès.

[18]      Les frais seront à suivre.



Montréal, Québec,      Marc Nadon

ce 29e jour de mars 2000      Juge

    

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE



Date : 20000329


Dossier : T-1423-98

Entre :

     ALI GAHAM

     Demandeur

     ET

     SA MAJESTÉ LA REINE

     DU CHEF DU CANADA

     Défendeur








    



     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

    

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     NOMS DES AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :      T-1423-98

INTITULÉ :      ALI GAHAM

     Demandeur

     ET

     SA MAJESTÉ LA REINE

     DU CHEF DU CANADA

     Défendeur


LIEU DE L'AUDIENCE :      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :      le 27 mars 2000

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DE L"HONORABLE JUGE NADON

EN DATE DU :      29 mars 2000



COMPARUTIONS :

Me Grégoire M. Bijimine          pour le demandeur

Me Suzon Létourneau          pour le défendeur


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Grégoire M. Bijimine

Montréal (Québec)          pour le demandeur


Morris Rosenberg

Sous-procureur général

du Canada

Ottawa (Ontario)          pour le défendeur

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.