Date : 20001025
Dossier : IMM-4073-99
Ottawa (Ontario), le mercredi 25 octobre 2000
EN PRÉSENCE DE : Madame le juge Dawson
ENTRE :
DANG GAM
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
JUGEMENT
LA COUR ORDONNE QUE :
La demande de contrôle judiciaire soit rejetée.
« Eleanor R. Dawson »
Juge
Traduction certifiée conforme
Martine Brunet, LL.B.
Date : 20001025
Dossier : IMM-4073-99
ENTRE :
DANG GAM
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
[1] Dang Gam, la demanderesse en l'espèce, est une citoyenne du Vietnam âgée de 27 ans. Elle demande le contrôle judiciaire d'une décision rendue le 14 juillet 1999 par Gillian Wan, agente des visas au Haut-commissariat du Canada à Singapour. Mme Wan a jugé qu'un visa d'immigrant ne devrait pas être délivré à Mme Gam parce que celle-ci a été déclarée inéligible à faire partie d'une demande de résidence permanente parrainée au Canada à titre de fille à charge.
LES FAITS
[2] Aucun affidavit de l'agente des visas n'a été déposé en opposition à la demande de Mme Gam. Les notes du STIDI, probablement entrées par Mme Wan, figurent dans le dossier du tribunal. Je reconnais que bien que ces notes fassent partie du dossier comme étant les motifs de la décision qui fait l'objet du présent contrôle, les notes n'ont aucun statut comme preuve de la véracité de ce qu'elles contiennent. Voir, par exemple, Chou c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 3 Imm. L.R. (3d) 212 (C.F. 1re inst.).
[3] Le dossier du tribunal contient une lettre, datée du 26 juin 1999, qui aurait apparemment été envoyée par le père de Mme Gam au Haut-commissariat du Canada à Singapour en réponse à une lettre demandant davantage de renseignements. La lettre du Haut-commissariat du Canada qui demande davantage de renseignements ne figure pas dans le dossier du tribunal, n'y figure pas non plus une copie de cette lettre que le père de Mme Gam a affirmé avoir jointe avec sa lettre du 26 juin 1999 au Haut-commissariat du Canada. La lettre envoyée par le père de Mme Gam en réponse à la demande fournissait un résumé des études antérieures de Mme Gam et renfermait des licences, des diplômes et des dossiers d'étude relativement à Mme Gam.
[4] Les parties pertinentes de la lettre de refus de l'agente des visas énonçaient :
[TRADUCTION] Compte tenu des renseignements que vous avez fournis, j'ai décidé que la personne suivante n'a pas le droit de faire partie de votre demande, parce qu'elle ne correspond pas à la définition de « fille à charge » au sens où l'entend le Règlement canadien sur l'immigration de 1978 :
...
Votre fille, Dang Gam est née le 07 septembre 1973 et a actuellement presque 26 ans. Elle a eu 19 ans en 1992. Selon son formulaire de demande, elle a obtenu un diplôme d'études post-secondaires au cours de la période 1994-1998. Selon les documents qu'elle a fournis, elle a obtenu un baccalauréat en sciences de l'anglais pédagogique en 1997. Étonnamment, son dossier scolaire secondaire ne fait état que d'une onzième année d'études terminée en 1991; elle a été inscrite pour la première fois à cette école en 1989.
De ce que nous comprenons des règlements sur l'éducation au Vietnam, afin d'être admis à l'université, les étudiants doivent terminer 12 années d'études et réussir des examens d'admission à l'université. Votre fille, sans avoir terminé ses études secondaires, a réussi à fournir un certificat disant qu'elle a réussi ses examens généraux de base de l'école (élémentaire) en 1989 et ses examens généraux de l'école secondaire en 1992. Après sa onzième année, elle n'a pas entrepris d'études universitaires avant 1993. Après l'obtention de son baccalauréat en 1997, elle a suivi des cours spécialisés de courte durée comme « Informatique appliquée » . Votre fille n'était pas une étudiante à temps plein au cours de la période 1991-1993 et depuis qu'elle a terminé son programme de baccalauréat, elle a suivi des cours spécialisés à l'université, qui ne correspondent pas à nos exigences législatives en matière d'études à temps plein.
LES QUESTIONS EN LITIGE
[5] Mme Gam a soulevé trois questions relativement à la décision de l'agente des visas :
(i) L'agente des visas a-t-elle commis une erreur de droit et de fait en concluant que Mme Gam n'était pas une étudiante à temps plein de 1991 à 1993?
(ii) L'agente des visas a-t-elle outrepassé sa compétence en concluant que Mme Gam s'est inscrite à des cours « spécialisés » après 1997 et en concluant par la suite que cette inscription ne correspondait pas à des études à temps plein au sens où l'entend le Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, et ses modifications (le Règlement)?
(iii) L'agente des visas a-t-elle manqué à l'équité procédurale en ne fournissant pas à la demanderesse la possibilité de dissiper ses préoccupations relatives au statut d'étudiant de la demanderesse?
ANALYSE
[6] Pour se qualifier comme fille à charge au sens où l'entend le Règlement, Mme Gam était tenue de satisfaire aux exigences des paragraphes 2(1), 2(7) et 6(6) du Règlement.
[7] En résumé, ces dispositions exigent que Mme Gam démontre qu'elle a été une étudiante à temps plein à l'université, au collège ou à un autre établissement d'enseignement depuis septembre 1992 (quand elle a eu 19 ans) et qu'elle n'a pas interrompu ses études pour une période totale d'au plus un an.
[8] En ce qui concerne la première affirmation de Mme Gam, que l'agente des visas a commis une erreur en concluant qu'elle n'était pas une étudiante à temps plein entre 1991 et 1993, il a été admis pour le compte du ministre à l'audience que l'agente des visas avait commis une erreur en concluant que Mme Gam n'était pas une étudiante à temps plein au cours de la période 1991-1992 et que l'agente des visas avait commis une autre erreur en concluant que le dossier scolaire secondaire de Mme Gam ne faisait état que d'une onzième année. Il est évident que le dossier du tribunal contient des documents, que l'agente des visas a par ailleurs jugé fiable, qui ont démontré que Mme Gam a terminé sa douzième année et a obtenu son diplôme d'études secondaires générales en 1992.
[9] En ce qui concerne la période 1992-1993, la lettre du père datée du 26 juin 1999 disait que : [TRADUCTION] « De 1992 à 1993 : Elle a suivi des cours pré-universitaires de langue anglaise (de première année) au centre d'éducation permanente de la province de Kien giang » . L'agente des visas n'a pas dit pourquoi elle rejetait cette preuve dans sa lettre de refus ni dans les notes du STIDI. La lettre de refus de l'agente des visas disait simplement que Mme Gam « n'était pas inscrite à l'université avant 1993 » . L'agente des visas devait fournir un motif expliquant pourquoi elle rejetait ce qui paraît être une preuve non contredite.
[10] Toutefois, comme Mme Gam était tenue de démontrer qu'elle avait été inscrite sans interruption comme étudiante à temps plein depuis 1992, ces erreurs portant sur la période 1991-1993 ne sont pas suffisantes pour annuler la décision de l'agente des visas si celle-ci a conclu sans commettre d'erreur susceptible de contrôle que les études post-universitaires n'étaient pas des études à temps plein.
[11] En ce qui concerne l'affirmation de Mme Gam selon laquelle l'agente des visas a outrepassé sa compétence en concluant que l'inscription à des cours spécialisés après 1997 ne constituaient pas des études à temps plein, l'agente des visas a apparemment admis que Mme Gam a suivi un cours d' « Informatique appliquée » , mais n'a pas tenu compte de l'impact de ce cours disant qu'il s'agissait d'un cours « spécialisé » qui ne satisfaisait pas aux exigences législatives en matière d'études à temps plein. Le dossier ne contient rien qui indique sur quoi l'agente des visas s'est fondée pour tirer cette conclusion, il ne contient pas non plus de preuve étayant ou contredisant cette conclusion.
[12] C'est ici qu'on a dit que l'absence au dossier du tribunal de la lettre du Haut-commissariat qui demande davantage de renseignements ou de documents était importante. On a soutenu que sans prendre connaissance de cette demande de renseignements ou de documents, il est impossible d'évaluer le caractère raisonnable de la conclusion apparente de l'agente des visas selon laquelle les renseignements fournis par Mme Gam étaient insuffisants. Mme Gam demande qu'une conclusion défavorable soit tirée du défaut du tribunal de fournir la lettre.
[13] Cet argument exige la prise en considération de l'obligation imposée au tribunal de fournir des documents quand une demande de contrôle judiciaire est présentée relativement à la décision d'un agent des visas.
[14] La règle 4 des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d'immigration, DORS/93-22, et ses modifications (les Règles en matière d'immigration) prévoit que la partie 5 des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106 (les Règles) s'applique à une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'un agent des visas.
[15] La règle 317 des Règles, figurant dans la partie 5, prévoit :
317. (1) Une partie peut demander que des documents ou éléments matériels pertinents à la demande qui sont en la possession de l'office fédéral dont l'ordonnance fait l'objet de la demande lui soient transmis en signifiant à l'office fédéral et en déposant une demande de transmission de documents qui indique de façon précise les documents ou éléments matériels demandés. (2) Un demandeur peut inclure sa demande de transmission de documents dans son avis de demande. |
317. (1) A party may request material relevant to an application that is in the possession of a tribunal whose order is the subject of the application and not in the possession of the party by serving on the tribunal and filing a written request, identifying the material requested. (2) An applicant may include a request under subsection (1) in its notice of application. |
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[16] Ce processus doit être mis en opposition avec celui prévu par la règle 17 des Règles en matière d'immigration qui exige que le tribunal fournisse notamment tous les documents pertinents à l'affaire qui sont en sa possession ou sous son contrôle. La règle 17 ne s'applique pas quand la décision contestée est celle d'un agent des visas, parce que l'autorisation n'est pas exigée pour présenter une telle demande et que la règle 17 s'applique seulement quand une ordonnance accordant une autorisation a été rendue.
[17] La lettre en question a été envoyée à la demanderesse. Il n'était donc pas nécessaire que le tribunal la produise en vertu de la règle 317 des Règles. Il n'est donc pas possible de tirer une conclusion défavorable au défendeur parce qu'il n'a pas produit la lettre.
[18] Faute d'une telle conclusion, la demanderesse n'a pas réussi à démontrer que la conclusion de l'agente des visas selon laquelle le cours ne satisfait pas aux exigences était déraisonnable.
[19] Par conséquent, indépendamment des erreurs précédentes, Mme Gam n'a pas réussi à démontrer qu'elle a satisfait aux exigences pour se qualifier à titre de fille à charge.
[20] L'argument final de Mme Gam est que l'agente des visas a manqué au devoir d'agir équitablement en ne permettant pas à la demanderesse de réagir à ses préoccupations. Vu ma conclusion quant aux conclusions de l'agente des visas en ce qui a trait à la période 1991-1993, l'affirmation que l'agente des visas aurait dû permettre à Mme Gam de fournir une preuve que le cours d'informatique était un cours à temps plein dans un autre établissement d'enseignement est particulièrement pertinente.
[21] J'admets toutefois l'argument du ministre selon lequel l'agente des visas n'avait aucune obligation de permettre à Mme Gam de clarifier la preuve présentée en son nom ou d'y ajouter des détails. Compte tenu de cette conclusion, il s'ensuit que Mme Gam n'a pas réussi à démontrer un manquement au devoir d'agir équitablement.
[22] Faute d'erreur susceptible de contrôle judiciaire relativement à la période d'études post-universitaires ou au manquement au devoir d'agir équitablement, la demande est rejetée.
[23] Les parties n'ont pas proposé de question aux fins de la certification.
« Eleanor R. Dawson »
Juge
Ottawa (Ontario)
le 25 octobre 2000
Traduction certifiée conforme
Martine Brunet, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4073-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : Dang Gam c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : le 30 août 2000
MOTIFS DU JUGEMENT PAR : MADAME LE JUGE DAWSON
EN DATE DU : 25 octobre 2000
ONT COMPARU :
Cecil Rotenberg POUR LA DEMANDERESSE
Jamie Todd POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Cecil Rotenberg POUR LA DEMANDERESSE
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada