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Date : 20041203

Dossier : IMM-4252-03

Référence : 2004 CF 1695

Toronto (Ontario), le 3 décembre 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEKE

ENTRE :

                                                               PENG CHENG LI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire qui vise une décision, datée du 8 avril 2003, par laquelle la demande d'établissement parrainée que le demandeur a présentée a été refusée parce qu'il était non admissible en tant que membre de la catégorie du regroupement familial et parce qu'il n'y avait pas suffisamment de motifs justifiant qu'une mesure soit accordée sur le fondement de circonstances d'ordre humanitaire.

[2]                Le demandeur demande que soit rendue une ordonnance annulant la décision de l'agent chargé d'examiner les circonstances d'ordre humanitaire (agent CH) selon laquelle une mesure ne devrait pas être accordée sur le fondement de circonstances d'ordre humanitaire. Le demandeur demande en outre que soit rendue une ordonnance enjoignant au défendeur de traiter sa demande de résidence permanente dans les 90 jours et lui accordant les dépens.

Le contexte

[3]                Le demandeur, Peng Cheng Li (le demandeur), est un citoyen de la République populaire de Chine qui est né le 12 décembre 1987.

[4]                En 1993, les parents du demandeur ont divorcé et le père a obtenu la garde du demandeur. Sa mère, Li-Ying Guo, s'est remariée en 1994 et, bien qu'elle ait déménagé à Beijing avec son nouvel époux, elle affirme qu'elle et son fils ont maintenu des liens étroits.

[5]                En 1998, la mère du demandeur et son beau-père ont immigré au Canada. La mère du demandeur a obtenu le statut de résidente permanente le 23 juin 1998. Le demandeur n'était pas inclus dans la demande de résidence permanente présentée par sa mère. Dans son affidavit, signé le 6 juillet 2003, la mère du demandeur a déclaré que le conseiller en immigration qu'elle a engagé à Beijing l'a informée, et c'est ce qu'elle croyait, qu'elle n'avait pas à inclure son fils dans la demande parce que c'est son ex-époux et non elle qui en avait la garde à ce moment.

[6]                Au cours des quelques années suivantes, la mère du demandeur est retournée en Chine à deux reprises afin de rendre visite au demandeur et elle a demandé au père du demandeur de consentir au changement de la garde de l'enfant. Au cours d'une visite en septembre 2001, le père du demandeur a consenti à ce que la mère du demandeur ait la garde de ce dernier.

[7]                La mère du demandeur, qui est devenue citoyenne canadienne le 4 avril 2001, a obtenu la garde du demandeur en août 2002.

[8]                Dans une demande datée du 23 septembre 2002, la mère du demandeur a présenté une demande de parrainage de l'établissement du demandeur en tant que résident permanent.

[9]                Dans une demande présentée à l'ambassade du Canada à Beijing, datée du 29 septembre 2002, le demandeur a demandé le statut de résident permanent dans la catégorie du regroupement familial.

[10]            Le 2 janvier 2003, une agente des visas a envoyé au demandeur une lettre qui énonçait ce qui suit :

[TRADUCTION]

Un examen préliminaire de votre demande a montré que votre existence avait été déclarée, mais que vous n'avez pas fait l'objet d'un contrôle lors de l'établissement de votre répondante. Par conséquent, vous pourriez être exclu de la catégorie du regroupement familial suivant l'alinéa 117(9)d) du Règlement sur l'immigration. S'il existe des circonstances d'ordre humanitaire pour lesquelles votre demande ne devrait pas être refusée, veuillez les présenter par écrit dans les trente prochains jours en y joignant des documents qui appuient les prétentions à cet égard.

[11]            Le 10 février 2003, des observations exposant les circonstances d'ordre humanitaire suivantes ont été présentées pour l'approbation de la demande de résidence permanente :

[TRADUCTION]

1.          Les études du demandeur seraient perturbées s'il n'obtenait pas le statut de résident permanent compte tenu de ses conditions de vie actuelles;

2.          la mère et le beau-père du demandeur qui vivent au Canada étaient disposés à soutenir le demandeur quant à ses besoins émotifs et financiers et étaient capables de le faire;

3.          la séparation d'avec son enfant avait causé à la mère du demandeur des difficultés émotionnelles indues;

4.          le demandeur a une forte dépendance émotive à l'égard de sa mère.

[12]            La mère du demandeur a présenté de nombreux documents au soutien de ces prétentions, y compris des déclarations par elle-même, par le père et le beau-père du demandeur, des photographies, des photocopies d'itinéraires de voyages en Chine et des comptes de téléphone montrant des appels entre le demandeur et sa mère.

[13]            Par une lettre datée du 8 avril 2003, la demande de résidence permanente présentée par le demandeur a été refusée. Dans cette lettre, le gestionnaire du programme d'immigration (l'agent CH) a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]


J'ai examiné votre demande et votre situation conformément au paragraphe 25(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et j'ai conclu que les circonstances d'ordre humanitaire ne justifient pas que le statut de résident permanent vous soit octroyé ou que vous soyez dispensé de l'application de critères et d'obligations prévus par la Loi. J'ai tenu compte de votre intérêt supérieur lorsque j'ai tiré cette conclusion.

[14]            Dans la présente instance, le demandeur conteste le refus de l'agent CH de le dispenser de l'application des critères ou d'accueillir sa demande de résidence permanente.

La décision faisant l'objet du contrôle

[15]            Dans son affidavit signé le 6 août 2003, l'agente des visas L. Coulombe (l'agente des visas) a déclaré que le raisonnement qu'elle avait employé pour conclure que le demandeur était exclu de la catégorie du regroupement familial suivant l'alinéa 117(9)d) était consigné dans le registre du système de traitement informatisé des dossiers d'immigration (les notes CAIPS).

[16]            Selon les notes CAIPS, l'agente des visas a conclu que le demandeur était exclu parce qu'il n'avait pas été inclus dans la demande de résidence permanente de sa mère en 1998. Les notes CAIPS énonçaient en outre que le formulaire exigeait clairement que toutes les personnes à charge soient énumérées, même si elles n'accompagnaient pas la personne au Canada.

[17]            Lors du contre-interrogatoire, l'agente des visas a déclaré qu'après avoir rendu une décision quant à la non-admissibilité, elle a préparé un résumé de cas à l'égard du dossier du demandeur et elle a formulé relativement aux circonstances d'ordre humanitaire une recommandation défavorable qu'elle a transmise au gestionnaire du programme d'immigration (l'agent CH).


[18]            La recommandation de l'agente des visas à l'agent CH, comme elle est consignée dans les notes CAIPS le 4 avril 2003, est rédigée comme suit :

[TRADUCTION]

La répondante a eu la possibilité d'exposer des circonstances d'ordre humanitaire malgré le fait qu'il soit exclu suivant l'alinéa 117(9)d) du Règlement.

[...]

- remarque que l'avocat de la répondante a clairement mentionné au CPC-M dans une lettre datée du 16 septembre 2002 qu'elle [TRADUCTION] « n'avait pas déclaré l'existence de son fils parce qu'elle n'avait pas la garde de l'enfant et qu'il n'était pas une personne à charge. Il l'est maintenant parce qu'il y a eu un changement de la garde de l'enfant » .

- remarque que le père du demandeur avait la garde depuis que le demandeur avait 5 ans lorsque la répondante et son ex-époux ont divorcé (1992). Le changement de la garde de l'enfant a eu lieu en août 2002 alors que le demandeur avait presque 15 ans.

- remarque que la situation financière du père du demandeur n'est peut-être pas la meilleure et que le demandeur demeure souvent chez une tante qui a un jeune enfant. Cependant, je remarque que malgré sa situation financière comparativement meilleure au Canada, la répondante n'a décidé de parrainer le demandeur qu'à l'âge de 15 ans, même si elle s'est établie en 1998.

- remarque de plus que des photographies fournies par la répondante et le demandeur montrent des intervalles entre le moment où elle a divorcé, lorsque le demandeur avait 5 ans, et ses récents voyages en Chine en 2000 et 2001 lorsque le demandeur avait 13 et 14 ans. La répondante n'a apparemment pas fait de visites en Chine pendant quelques années après son établissement en 1998.

Je ne vois aucune circonstance impérieuse d'ordre humanitaire pouvant surmonter l'exclusion du demandeur suivant l'alinéa 117(9)d) du Règlement.

DS - veuillez s'il vous plaît examiner pour une décision défavorable quant aux circonstances d'ordre humanitaire / signature de lettre.

[19]            De plus, le raisonnement de l'agent CH, raisonnement daté également du 4 avril 2003, se retrouve comme suit dans les notes CAIPS :


[TRADUCTION]

Le demandeur n'était pas inclus en tant que personne à charge dans la demande de résidence permanente au Canada présentée initialement par la répondante malgré le fait que le formulaire mentionne clairement que toutes les personnes à charge doivent être incluses qu'elles vous accompagnent ou non au Canada. Le demandeur n'est par conséquent pas un membre de la catégorie du regroupement familial suivant le paragraphe 117(9) du Règlement. Le père a maintenant consenti à un changement de la garde afin de permettre au demandeur de poursuivre ses études au Canada, mais rien n'indique que le demandeur n'a pas obtenu de son père les soins et le soutien appropriés, selon les normes de la Chine. J'ai examiné la demande fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire présentée par le demandeur suivant le paragraphe 25(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et j'ai conclu qu'il ne serait pas justifié que j'exerce mon pouvoir discrétionnaire. J'ai tenu compte, pour tirer cette conclusion, de l'intérêt supérieur du demandeur.

[20]            La présente instance est le contrôle judiciaire de la décision rendue par l'agent CH.

Les prétentions du demandeur

(a)        L'agent CH n'a pas correctement tenu compte de l'intérêt supérieur du demandeur

[21]            En se fondant sur l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 174 D.L.R. (4th) 193 (C.S.C.), le demandeur a prétendu que la décision de l'agent CH ne comportait pas un examen soigneux de son intérêt supérieur et qu'elle ne peut résister à un examen assez poussé, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une décision déraisonnable et qu'elle devrait être annulée.

[22]            Le demandeur a prétendu qu'aucune évaluation soigneuse de son intérêt supérieur n'a été effectuée par l'agent CH étant donné que les notes CAIPS ne révèlent pas que cet agent était réceptif, attentif et sensible à son intérêt supérieur.

[23]            Le demandeur a prétendu que l'agent CH a commis une erreur lorsqu'il a apprécié son intérêt supérieur en comparant ses conditions de vie à celles de ses [TRADUCTION] « pairs » en Chine, au lieu de les comparer à la vie qu'il aurait au Canada.

(b)        La décision de l'agent CH était autrement déraisonnable

[24]            Le demandeur a prétendu que l'agent CH ne croyait pas certains des éléments de preuve factuelle qui lui avaient été présentés (par exemple, la situation financière du père du demandeur et la question de savoir si des dispositions appropriées pouvaient être prises à l'égard du transport du demandeur à l'école sans qu'il ait à vivre chez sa tante), mais que les préoccupations à cet égard ne lui avaient pas été communiquées puisqu'il n'avait pas été reçu en entrevue. Selon le demandeur, cette situation a rendu déraisonnable la décision de l'agent CH.


[25]            Le demandeur a prétendu en outre que l'agent CH a omis de tenir compte de la preuve dont il disposait à l'égard du moment auquel la garde du demandeur a été accordée à la mère. Le demandeur a prétendu que l'agent CH jugeait de façon défavorable le fait que sa mère avait immigré au Canada en 1998 mais qu'elle [TRADUCTION] « n'avait décidé » de le parrainer que lorsqu'il a eu 15 ans, alors que la preuve démontrait que le père du demandeur avait refusé jusqu'en 2002 de consentir à tout changement à l'égard de la garde. Alors, selon le demandeur, l'agent CH a omis de tenir compte de la preuve démontrant que sa mère était [TRADUCTION] « incapable » de parrainer sa demande de résidence permanente avant 2002 et non qu'elle n'était [TRADUCTION] « pas disposée » à le faire. Le demandeur a prétendu que la décision de l'agent CH avait par conséquent été rendue sans qu'il ait tenu compte de la preuve dont il disposait et qu'elle devait être annulée.

[26]            Le demandeur a prétendu que l'agent CH a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il s'est appuyé de façon exagérée sur la recommandation défavorable formulée par l'agente des visas. Au soutien de cette prétention, le demandeur a signalé les notes CAIPS qui montrent que la décision défavorable de l'agent CH a été rendue le même jour qu'a été formulée la recommandation défavorable de l'agente des visas.

[27]            Le demandeur a prétendu que les éléments de preuve dont disposait l'agent CH à l'égard des liens affectifs qu'il entretient avec sa mère et de sa situation en Chine sont suffisants pour surmonter l'omission de sa mère d'avoir déclaré son existence lorsqu'elle a immigré au Canada. Le demandeur a prétendu qu'il ne devrait pas être puni et souffrir en raison d'un processus sur lequel il n'a aucune maîtrise et en raison d'une erreur commise de façon innocente par sa mère sans qu'elle ait eu l'intention de tromper les autorités d'immigration.


Les prétentions du défendeur

[28]            Le défendeur a prétendu que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée parce que le demandeur n'a pas établi que l'agent CH a agi de mauvaise foi, a omis de tenir compte d'éléments de preuve, a omis de prendre en compte des facteurs pertinents ou n'était pas réceptif, attentif et sensible à l'intérêt supérieur du demandeur.

[29]            Le défendeur partage l'opinion selon laquelle la norme de contrôle applicable à la décision de l'agent CH est la décision raisonnable simpliciter.

[30]            Le défendeur a prétendu que le demandeur n'avait établi aucun fondement pour que la Cour intervienne relativement à l'appréciation effectuée par l'agent CH à l'égard des éléments de preuve dont il disposait. Le défendeur a prétendu en outre que les conclusions de l'agent CH étaient rationnellement fondées sur la preuve dont il disposait et que cette preuve les appuyait. Le défendeur a prétendu que l'agent CH n'était pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve examinés et qu'il avait le pouvoir de préférer certains éléments de preuve à d'autres.

[31]            En outre, le défendeur a prétendu que le fait qu'il y ait un enfant en cause ne signifie pas que son « intérêt supérieur » doit avoir prépondérance ou doit l'emporter sur tous les autres facteurs dans tous les cas sans exception.

[32]            Le défendeur a nié l'affirmation selon laquelle l'agent CH était tenu de communiquer au demandeur ses préoccupations à l'égard des questions factuelles qui lui étaient soumises. Le défendeur a fait ressortir qu'il appartenait au demandeur de présenter suffisamment de preuve pour démontrer l'existence de circonstances impérieuses d'ordre humanitaire requérant qu'il intervienne pour le dispenser de l'application de l'alinéa 117(9)d) du Règlement. Dans la présente affaire, le demandeur n'a pas réussi à s'acquitter de son fardeau et n'a finalement pas convaincu l'agent CH quant à son affirmation selon laquelle il serait exposé à des difficultés indues avec son père en Chine si on ne lui permettait pas de venir vivre au Canada avec sa mère et son beau-père.

[33]            Le défendeur a prétendu que les motifs énoncés par l'agent CH étaient suffisants compte tenu des notes CAIPS, du témoignage sous forme d'affidavit et du témoignage lors du contre-interrogatoire. En outre, la recommandation défavorable formulée par l'agente des visas à l'égard des circonstances d'ordre humanitaire était claire, bien structurée, appuyée par des conclusions logiques et était fondée sur une bonne compréhension des faits, sur la preuve et sur les documents pertinents contenus dans le dossier du demandeur.


[34]            Le défendeur a mentionné que le demandeur prétendait que l'agente des visas n'a pas tenu compte de l'explication fournie par la répondante à l'égard du délai écoulé avant qu'elle fasse des démarches de parrainage après son établissement au Canada. Le défendeur a déclaré au contraire qu'il n'y avait pas de preuve démontrant que la mère du demandeur avait essayé d'obtenir la garde de son fils avant 2002 et qu'il était donc loisible à l'agente des visas de tirer une inférence défavorable à l'égard de ses intentions d'être réunie et de vivre avec son fils au Canada. Cette inférence était en outre appuyée par les intervalles dans le dossier de photographies présenté par la mère du demandeur et le délai écoulé avant qu'elle rende visite au demandeur en Chine. Subsidiairement, le défendeur a prétendu que l'inférence tirée par l'agente des visas à l'égard de cette question n'était pas importante parce que c'était l'agent CH qui avait rejeté la demande présentée par le demandeur en vue d'obtenir une mesure fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire.

[35]            Le défendeur a prétendu que l'appréciation de l'intérêt supérieur du demandeur effectuée par l'agent CH était raisonnable. Contrairement à l'affirmation du demandeur, les notes CAIPS de l'agent CH, son témoignage sous forme d'affidavit et son témoignage rendu lors du contre-interrogatoire ont démontré qu'il a tenu compte non seulement de la situation du demandeur en Chine par rapport à celle de ses pairs, mais de ses possibilités d'avenir avec sa mère au Canada.

[36]            Le défendeur a nié que l'appréciation de l'agent CH ait été fondée sur une hypothèse. Plutôt, la décision de l'agent CH était fondée sur sa vaste expérience et sur ses connaissances personnelles à l'égard des coutumes chinoises, des emplois en Chine et du système de transport dans la ville de Harbin et dans sa périphérie.


[37]            Selon les faits de la présente affaire, le défendeur a prétendu que l'agent CH pouvait raisonnablement conclure que la mesure fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire n'était pas appropriée étant donné que le régime à cet égard n'avait pas pour but d'éliminer les difficultés, mais qu'il offrait une mesure à l'égard des difficultés indues. Le défendeur a déclaré que le processus d'examen des circonstances d'ordre humanitaire n'était pas conçu pour créer un moyen par lequel des individus qui sont désavantagés sur les plans des finances et de l'éducation peuvent être admis au Canada.

[38]            Le défendeur a prétendu que le pouvoir discrétionnaire de l'agent CH n'a pas été entravé par la recommandation défavorable formulée par l'agente des visas. Au contraire, l'agent CH a examiné de façon indépendante tous les faits et la preuve et il a tiré ses propres conclusions à l'égard du dossier du demandeur.

[39]            Le défendeur a demandé que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée étant donné que le demandeur n'a pas démontré que la décision contestée en l'espèce était fondamentalement déficiente, avait été rendue sur le fondement de considérations incorrectes, avait été rendue de mauvaise foi ou sans qu'il ait été tenu compte des principes de droit, ou avait été rendue en contravention de l'obligation d'agir avec équité à laquelle il avait droit dans les circonstances.

Les questions en litige

[40]            Le demandeur a soulevé les questions en litige suivantes :

1.          L'agent CH a-t-il correctement tenu compte de l'intérêt supérieur du demandeur lors de son évaluation?

2.          La décision de l'agent CH était-elle autrement déraisonnable?


Les dispositions législatives pertinentes

[41]            Le paragraphe 25(1) de la LIPR permet au ministre d'octroyer à un étranger le statut de résident permanent ou de lever des critères et obligations applicables selon la LIPR s'il estime que des circonstances d'ordre humanitaire le justifient :

25. (1) Le ministre doit, sur demande d'un étranger interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s'il estime que des circonstances d'ordre humanitaire relatives à l'étranger - compte tenu de l'intérêt supérieur de l'enfant directement touché - ou l'intérêt public le justifient.

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister's own initiative, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

Analyse et décision

[42]            La première question en litige

L'agent CH a-t-il correctement tenu compte de l'intérêt supérieur du demandeur lors de son évaluation?

La norme de contrôle appropriée applicable à la décision de l'agent CH est la décision raisonnable simpliciter (voir l'arrêt Baker, précité).

[43]            À l'égard de son analyse de la demande fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire, les notes CAIPS de l'agent CH ne contiennent que ce qui suit :


[TRADUCTION]

[...] normes de la Chine. J'ai examiné la demande fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire présentée par le demandeur suivant le paragraphe 25(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et j'ai conclu qu'il ne serait pas justifié que j'exerce mon pouvoir discrétionnaire. J'ai tenu compte, pour tirer cette conclusion, de l'intérêt supérieur du demandeur.

Il n'y a que cette affirmation générale.

[44]            Il n'y a pas d'examen à l'égard de la situation personnelle du demandeur quant à sa demande fondée sur des circonstances d'ordre humanitaire. L'agent CH, à mon avis, n'était pas réceptif, attentif et sensible à l'intérêt supérieur de l'enfant demandeur. Il n'y a pas d'analyse quant à ce que serait la situation de l'enfant demandeur en Chine comparativement à ce qu'elle serait au Canada.

[45]            Le défendeur a prétendu que lorsque les notes CAIPS de l'agent CH sont lues avec son affidavit, il est clair qu'il était réceptif à l'intérêt supérieur du demandeur. Je ne partage pas l'opinion selon laquelle l'affidavit de l'agent CH fourni après que la décision a été rendue puisse être utilisé pour appuyer cette décision. La décision devrait parler d'elle-même. L'analyse de l'agente des visas n'aide pas l'agent CH étant donné que ce dernier est tenu d'effectuer sa propre nouvelle analyse.


[46]            Je suis d'avis, pour les motifs précédemment énoncés, que la décision rendue par l'agent CH était déraisonnable et doit être annulée. La demande de contrôle judiciaire est par conséquent accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent CH afin qu'il rende une nouvelle décision.

[47]            Je n'ai pas à traiter de l'autre question soulevée par le demandeur.

[48]            Ni l'une ni l'autre des parties n'ont souhaité proposer une question grave de portée générale pour que je l'examine aux fins de la certification.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l'affaire soit renvoyée à un autre agent CH afin qu'il rende une nouvelle décision.

« John A. O'Keeke »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                IMM-4252-03

INTITULÉ :               PENG CHENG LI

                                                                                           demandeur

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE

L'IMMIGRATION

                                                                                             défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 29 JUIN 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                    LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS :                                   LE 29 NOVEMBRE 2004

COMPARUTIONS :

Cecil L. Rotenberg, c.r.

POUR LE DEMANDEUR

Robert Bafaro

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cecil L. Rotenberg, c.r.

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR


             COUR FÉDÉRALE

                                 Date : 20041129

                    Dossier : IMM-4252-03

ENTRE :

PENG CHENG LI

                                          demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                           défendeur

                                                                                   

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

             ET ORDONNANCE

                                                                                   


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