Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040818

Dossier : T-2121-02

Référence : 2004 CF 1143

Calgary (Alberta), le 18 août 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DANIÈLE TREMBLAY-LAMER

ENTRE :

                                                           BRUCE D. DOWNEY

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'égard d'une décision du ministre du Revenu national (le ministre) qui rejetait la demande présentée par le demandeur aux termes des dispositions en matière d'équité, le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1 (la LIR), en vue d'obtenir l'annulation des intérêts et pénalités accumulés.


[2]                Le demandeur a déclaré un revenu imposable pour les années d'imposition 1985 à 1989 ainsi que pour les années d'imposition antérieures à 1985 mais a omis de verser l'impôt sur le revenu dû à l'égard de ces années. Voici les montants d'impôt sur le revenu que doit le demandeur :


Année d'imposition

Avant 1985

1985

1986

1987

1988

1989

Impôt sur le revenu dû

6 029,56 $

10 416,53 $

2 471,61 $

769,85 $

1 076,93 $

432,77 $


[3]                Étant donné que le demandeur n'a pas payé l'impôt sur le revenu qu'il devait, les intérêts se sont accumulés sur ces sommes. Le demandeur s'est également vu imposer une pénalité de déclaration tardive pour l'année d'imposition 1989.


[4]                Le 12 février 2001, le demandeur a présenté à l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) une demande d'allégement fiscal pour raison d'équité dans laquelle il sollicitait l'annulation des pénalités et des intérêts pour le motif que le solde d'impôt impayé du demandeur provenait d'une erreur commise par l'ADRC. L'ADRC avait refusé à l'employeur du demandeur, Dicore Ltd. (Dicore), des crédits d'impôt à l'investissement et des crédits d'impôt en investissement remboursables pour la recherche et le développement à l'égard des années d'imposition 1982 et 1987. Le demandeur a mentionné que Dicore n'avait pu, pour cette raison, attirer des investisseurs et obtenir les fonds nécessaires à la réalisation de ses projets. Cette société n'avait pas non plus été en mesure de rémunérer ses employés. Le demandeur soutenait qu'il n'avait pas pu s'acquitter du solde impayé de son impôt sur le revenu parce qu'il n'avait pas été payé intégralement par Dicore. Le demandeur mentionnait qu'il paierait le solde impayé si l'ADRC renonçait aux intérêts.

[5]                Le 2 juillet 2002, le ministre a informé le demandeur qu'il ne remplissait pas les conditions exigées pour accorder le redressement demandé.

[6]                Le 15 août 2002, le demandeur a transmis une autre demande d'allégement fiscal pour raison d'équité à l'ADRC. Le 14 novembre 2002, le ministre a informé le demandeur de sa décision de refuser la demande d'allégement fiscal.


[7]                Le demandeur soutient que c'est à cause d'une erreur de l'ADRC que Dicore n'a pu lui payer intégralement son salaire, ce qui l'a empêché de payer son impôt sur le revenu. Il soutient que l'erreur commise par l'ADRC a eu un résultat catastrophique pour Dicore et pour lui-même. En outre, d'après le demandeur, les lignes directrices exposées dans la brochure intitulée « Lignes directrices concernant l'annulation des intérêts et des pénalités » , la circulaire d'information 92-2 (les lignes directrices), et plus précisément les alinéas 10a), b) et d), ne sauraient justifier le rejet de sa demande, étant donné que les mesures prises par l'ADRC dans ce dossier ont compromis sa capacité de payer les sommes dues.

[8]                Le paragraphe 220(3.1) de la LIR est rédigé comme suit :


(3.1) Le ministre peut, à tout moment, renoncer à tout ou partie de quelque pénalité ou intérêt payable par ailleurs par un contribuable ou une société de personnes en application de la présente loi, ou l'annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

220(3.1) The Minister may at any time waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by a taxpayer or partnership and, notwithstanding subsections 152(4) to 152(5), such assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made as is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.


[9]                L'article 10 des Lignes directrices énonce :


10.Le Ministère tiendra compte des points suivants dans l'étude des demandes d'annulation des intérêts ou des pénalités ou de renonciation à ceux-ci :

10. The following factors will be considered when determining whether or not the Department will cancel or waive interest or penalties:

a) si le contribuable ou l'employeur a respecté, par le passé, ses obligations fiscales;

a) whether or not the taxpayer or employer has a history of compliance with tax obligations;

b) si le contribuable ou l'employeur a, en connaissance de cause, laissé subsister un solde en souffrance qui a engendré des intérêts sur arriérés;

b) whether or not the taxpayer or employer has knowingly allowed a balance to exist upon which arrears interest has accrued;

c) si le contribuable ou l'employeur a fait des efforts raisonnables et s'il n'a pas fait preuve de négligence ni d'imprudence dans la conduite de ses affaires en vertu du régime d'autocotisation;

c) whether or not the taxpayer or employer has exercised a reasonable amount of care and has not yet been negligent or careless in conducting their affairs under the self-assessment system;

d) si le contribuable ou l'employeur a agi avec diligence pour remédier à tout retard ou à toute omission.

d) whether or not the taxpayer or employer has acted quickly to remedy any delay or omission.


[10]            Comme je l'ai déclaré dans Salomon c. Canada (Sous-procureur général), [2002] A.C.F. n ° 1531, lorsqu'il s'agit d'examiner une décision discrétionnaire prise par le ministre en vertu du paragraphe 220(3.1) de la LIR, les tribunaux doivent faire preuve d'un très grand degré de retenue et la norme de révision applicable est celle du caractère manifestement déraisonnable de la décision. Le tribunal chargé de l'examen ne peut intervenir et annuler la décision discrétionnaire du ministre que si elle a été prise de mauvaise foi, si le décideur a manifestement écarté des faits pertinents ou tenu compte de faits non pertinents ou si la décision est contraire au droit.

[11]            Après avoir examiné les documents, j'estime que la décision du ministre doit être maintenue. Dans sa décision, le ministre cite un certain nombre de facteurs dont il a tenu compte et qui étaient défavorables au demandeur. Le demandeur avait un solde impayé avant 1985, solde qu'il n'a jamais essayé de régler. Le demandeur a déclaré un revenu d'entreprise pendant les années 1986 à 1989 mais n'a jamais effectué de déductions d'impôt. Le demandeur avait un revenu d'emploi pour 1985 qui n'avait fait l'objet d'aucune déduction d'impôt. Le ministre a également tenu compte du fait que le demandeur avait quitté le Canada avec un solde d'impôt impayé et qu'il n'avait pas fourni d'adresse à laquelle faire suivre son courrier.

[12]            Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que le ministre a exercé de façon équitable le pouvoir discrétionnaire que lui accorde le paragraphe 220(3.1) de la LIR et que la décision n'est pas manifestement déraisonnable.


[13]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

                                                                                                                _ Danièle Tremblay-Lamer _            

                                                                                                                                                     Juge                              

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                        T-2121-02

INTITULÉ :                                       Bruce D. Downey c. Le Procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                CALGARY (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 17 AOÛT 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LA JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :                     LE 18 AOÛT 2004

COMPARUTIONS :

Bruce D. Downey                                                                      POUR LUI-MÊME

(DEMANDEUR)

Carla Lamash                                                                            POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bruce D. Downey                                                                      POUR LUI-MÊME

Calgary (Alberta)                                                                       (DEMANDEUR)

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                            POUR LE DÉFENDEUR


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.