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     T-2479-96

OTTAWA (ONTARIO), LE 29 AOÛT 1997

EN PRÉSENCE DU JUGE ROULEAU

ENTRE :

     PAIGE INNOVATIONS INC.,

     demanderesse

     et défenderesse reconventionnelle,

     et

     NOMA INC.,

     défenderesse

     et demanderesse reconventionnelle.

     ORDONNANCE

     La demande de la défenderesse en vue d'obtenir un jugement sommaire rejetant l'action de la demanderesse est accueillie. La défenderesse a droit aux frais qu'elle a engagés tant dans l'action principale que dans la présente requête.

                             P. ROULEAU

                                     Juge

Traduction certifiée conforme             

                                 C. Bélanger, LL.L.

     T-2479-96

ENTRE :

     PAIGE INNOVATIONS INC.,

     demanderesse

     et défenderesse reconventionnelle,

     et

     NOMA INC.,

     défenderesse

     et demanderesse reconventionnelle.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

     Il s'agit d'une demande de la défenderesse en vue d'obtenir un jugement sommaire rejetant l'action en contrefaçon de brevet de la demanderesse.

     La demanderesse est propriétaire du brevet canadien no 1,238,958, qui concerne une fiche de branchement isolante plate, laquelle permet de poser à plat un cordon électrique contre un mur ou un plancher où se trouve une prise de courant. La fiche permet de disposer des meubles ou d'autres objets très près du mur ou du plancher grâce à sa forme plate, ce qui occasionne une obstruction minime au moment de placer ou de déplacer des meubles.

     La défenderesse fabrique et offre en vente une rallonge électrique appelée Noma THIN PLUG (fiche mince de Noma).

     Dans la déclaration qu'elle a déposée au soutien de son action, la demanderesse allègue que la fiche mince de Noma va à l'encontre de son brevet. La défenderesse demande maintenant un jugement sommaire rejetant l'action de la demanderesse au motif que sa fiche mince n'est pas visée par la portée du brevet de celle-ci, plus précisément de la revendication 1 ou des autres revendications dudit brevet.

     Après avoir examiné attentivement la preuve et les arguments des parties, je suis d'avis d'accueillir la demande de jugement sommaire.

     Voici le texte des Règles 432.1, 432.2 et 432.3 des Règles de la Cour fédérale :

     432.1 (1) Le demandeur peut, après le dépôt par le défendeur de sa défense ou avant ce dépôt si la Cour le lui permet, et à tout moment avant que l'heure et la date de l'instruction soient fixées, présenter au juge une requête, appuyée d'un affidavit ou d'un autre élément de preuve, en vue d'obtenir un jugement sommaire sur tout ou partie de la réclamation contenue dans la déclaration comportant allégués.         
     (2) Le défendeur peut, après avoir déposé et signifié une défense, et à tout moment avant que l'heure et la date de l'instruction soient fixées, présenter au juge une requête, appuyée d'un affidavit ou d'un autre élément de preuve, en vue d'obtenir un jugement sommaire rejetant tout ou partie de la réclamation contenue dans la déclaration comportant allégués.         
     432.2 (1) En réponse à un affidavit ou à un autre élément de preuve présenté à l'appui d'une requête en vue d'obtenir un jugement sommaire, la partie intimée ne peut s'appuyer sur les seules allégations ou dénégations contenues dans ses plaidoiries écrites; elle doit énoncer, dans un affidavit ou à l'aide d'un autre élément de preuve, des faits précis démontrant l'existence d'une question sérieuse à instruire.         
     (2) La partie qui entend utiliser un affidavit dans le cadre d'une requête en vue d'obtenir un jugement sommaire peut se fonder sur des renseignements ou une croyance, tel qu'il est prévu au paragraphe 332(1), mais, à l'audition de la requête, son omission d'offrir le témoignage de personnes ayant une connaissance personnelle des faits pertinents peut, s'il y a lieu, entraîner une conclusion défavorable.         
     432.3 (1) Lorsque le juge est convaincu qu'il n'existe aucune question sérieuse à instruire à l'égard d'une réclamation ou d'une défense, il rend un jugement sommaire en conséquence.         
     (2) Lorsque le juge est convaincu que la seule question sérieuse est le montant auquel la partie requérante a droit, il peut ordonner l'instruction de cette question ou rendre un jugement sommaire assorti d'un renvoi pour détermination du montant.         
     (3) Lorsque le juge est convaincu que la seule question sérieuse en est une de droit, il peut statuer sur celle-ci et rendre un jugement sommaire en conséquence.         
     (4) Lorsque le juge décide qu'il existe une question sérieuse à l'égard de la réclamation ou de la défense, il peut néanmoins rendre un jugement sommaire en faveur d'une partie, soit sur une question ou en général, sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants :         
     a) l'ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires pour qu'il puisse trancher les questions de fait ou de droit;         
     b) il estime injuste de trancher les questions dans le cadre de la requête en vue d'obtenir un jugement sommaire.         
     (5) Lorsqu'une requête en vue d'obtenir un jugement sommaire est rejetée en tout ou en partie, le juge peut ordonner que l'action ou les questions qui y sont soulevées et qui ne sont pas tranchées par le jugement sommaire soient instruites de la manière courante, mais, à la demande d'une partie, le juge peut ordonner une instruction avancée en vertu de la règle 327.1.         

     Ces dispositions visent à permettre à la Cour de rejeter sommairement les affaires qui, à son avis, ne devraient pas être instruites parce que les plaidoiries écrites ne soulèvent aucune question sérieuse à trancher. Il s'agit d'une conclusion qui doit être tirée en fonction des circonstances propres à chaque cas ainsi que des faits et des règles de droit invoqués au soutien de l'action ou de la défense. D'après la jurisprudence, le critère à appliquer pour faire droit à une demande de jugement sommaire n'est pas de savoir si une partie n'a aucune chance d'avoir gain de cause à l'instruction, mais plutôt de savoir si l'affaire est douteuse au point où elle ne mérite pas d'être soumise à l'attention du juge des faits à l'instruction.

     Dans le cas qui nous occupe, il n'y a aucun désaccord entre les témoins experts en ce qui a trait à l'invention revendiquée dans le brevet de la demanderesse et le libellé des revendications est clair et dépourvu de toute ambiguïté. Voici le texte des revendications pertinentes :

     [TRADUCTION]

     1.      Un dispositif pour relier le cordon d'un appareil électrique à une prise de courant comportant une fiche isolante plate, d'une épaisseur à peu près égale à celle du cordon électrique, dans laquelle fiche sont encastrées les bases d'au moins deux lames de contact, lesdites bases étant reliées aux fils conducteurs du cordon électrique, et laquelle fiche étant munie d'une languette pivotante dont l'extrémité peut être écartée de la partie principale de la fiche, permettant de mieux saisir la fiche pour la retirer de la prise.         
     14.      Le dispositif objet de la revendication 1 ci-dessus, dans lequel les lames conductrices sont formées à même les plaquettes conductrices à l'intérieur de la fiche, mais courbées à un angle de quatre-vingt-dix degrés par rapport à ces dernières.         
     15.      Le dispositif objet de la revendication 1 ci-dessus, dans lequel les lames conductrices sont formées à même les plaquettes conductrices à l'intérieur de la fiche, mais courbées à un angle de quatre-vingt-dix degrés par rapport à ces dernières.         

     Le brevet décrit donc généralement une fiche comportant une surface inférieure plate, une surface supérieure plate et des bords latéraux périphériques. L'écart entre les surfaces supérieure et inférieure correspond à l'épaisseur de la fiche. Un cordon de la même épaisseur que la fiche pénètre dans la fiche à travers un bord latéral, de sorte que les surfaces inférieure et supérieure du cordon sont situées dans le même plan, respectivement, que les surfaces inférieure et supérieure de la fiche. L'avantage de cette fiche est que le cordon peut reposer à plat contre le mur et que le mobilier peut être placé très près du mur, soit à une distance équivalant à une épaisseur de cordon.

     À mon avis, une personne compétente dans le domaine comprendrait que les mots [TRADUCTION] "d'une épaisseur à peu près égale" de la revendication 1 du brevet signifient que l'épaisseur de la fiche sera à peu près la même que celle du cordon électrique et que toute différence d'épaisseur se limiterait à la différence imputable aux tolérances ordinaires qui caractérisent la fabrication des deux pièces.

     Cependant, la fiche mince de Noma est beaucoup plus épaisse que le cordon électrique et que la fiche décrite dans le brevet de la demanderesse. La raison pour laquelle la fiche mince de Noma n'est pas de la même épaisseur que le cordon est qu'elle a recours à l'ancrage des lames, ce qui est bien différent du brevet de la demandresse et qui rend nécessairement la fiche de la défenderesse plus épaisse que le cordon. Le cordon de la fiche de la défenderesse ne pourrait être posé à plat contre la prise dans laquelle aurait été insérée la fiche à la jonction du cordon et de la fiche, ou contre le mur adjacent, contrairement au cordon de la fiche de la demanderesse. Il ne serait pas possible non plus de placer des meubles de façon qu'ils soient séparés de la prise de courant par la simple épaisseur du cordon si la fiche de la défenderesse était utilisée.

     De plus, le raccordement des fils électriques aux lames de contact, dans la fiche mince de Noma, ne fait pas appel à des bases, des plaquettes d'ancrage ou des plaquettes conductrices du type décrit dans le brevet de la demanderesse. Les fils conducteurs de la fiche mince de Noma sont simplement pincés à l'intérieur de minuscules languettes au bout des lames.

     Pour ces raisons, j'estime que la fiche THIN PLUG de Noma n'est pas visée par la portée du brevet de la demanderesse, notamment par le libellé de la revendication 1 ou des autres revendications du brevet. Par conséquent, la demande de la défenderesse en vue d'obtenir un jugement sommaire rejetant l'action de la demanderesse est accueillie. La défenderesse a droit aux frais qu'elle a engagés tant dans l'action principale que dans la présente requête.

                             PAUL U.C. ROULEAU

                                     JUGE

OTTAWA (Ontario)

Le 29 août 1997

Traduction certifiée conforme             

                                 C. Bélanger, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-2479-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :      PAIGE INNOVATIONS INC. c. NOMA INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          3 juin 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE ROULEAU

EN DATE DU :              29 août 1997

ONT COMPARU :

Me Stephen M. Lane                  POUR LA DEMANDERESSE

Me Robert MacFarlane                  POUR LA DÉFENDERESSE

Me Andrew McIntosh

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Sim, Hughes, Ashton & Mackay              POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

Bereskin & Parr                      POUR LA DÉFENDERESSE

Toronto (Ontario)

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