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Date : 19991026


Dossier : IMM-3412-98

OTTAWA (Ontario), le 26 octobre 1999

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PELLETIER


ENTRE :



ASMAT ALI KHAN


demandeur

                    

- et -


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION


défendeur




MOTIF DE L"ORDONNANCE et ORDONNANCE


[1]      Monsieur Khan est un citoyen du Pakistan qui est actuellement résident permanent aux États-Unis. Il souhaite immigrer au Canada. Il a fait une demande de visa sur laquelle il a indiqué la profession de directeur de l"orientation. Accompagnant les documents de sa demande, il a déposé des lettres de recommandation de son ancien employeur, le Montessori Pre/Grade School Tutoring Centre Inc.(Montessori Centre). Le centre de traitement de Buffalo (N.Y.) a tenté de se faire confirmer son emploi mais personne ne répondait au numéro du Montessori Centre. Le jour

de l"entrevue, l"agente des visas de la ville de New York a également essayé de téléphoner au Montessori Centre, mais encore une fois sans succès.

[2]      Pendant l"entrevue, M. Khan a indiqué qu"il a travaillé à titre de conseiller d"orientation au Pakistan. L"agente des visas a cependant trouvé qu"il était confus et vague quant à ses dates d"emploi, ses fonctions et aux types de services fournis aux étudiants. L"agente des visas a dit à M. Khan qu"elle ne croyait pas qu"il avait travaillé comme conseiller d"orientation au Pakistan.

[3]      Monsieur Khan et l"agente des visas ont parlé de son emploi au Montessori Centre. Elle lui a dit que le Montessori Pre/Grade School Tutoring Centre Inc. figure sous la rubrique " services de garde d"enfants " dans la base de données sur CD-ROM qu"elle a consultée et non sous la rubrique consacrée aux écoles publiques. Elle l"a avisé de ses tentatives infructueuses de rejoindre le Montessori Centre par téléphone. Monsieur Khan lui a dit qu"il avait enseigné les mathématiques à des enfants de 2e , 3e et 5e année. Il n"a fait mention d"aucun service d"orientation. Monsieur Khan a indiqué que le Montessori Centre avait trois salles de classe, mais qu"il n"était pas en mesure d"expliquer comment il fournissait des services d"enseignement et d"orientation à des étudiants de la 1re à la 6e année, dans 3 salles de classe.

[4]      L"agente des visas a dit à M Khan qu"elle ne croyait pas son récit. Elle ne lui a donné aucun point d"appréciation pour l"expérience (article 3 de l"annexe I du Règlement sur l"immigration de 1978) parce qu"elle ne croyait pas qu"il avait travaillé comme conseiller d"orientation au Pakistan ou aux États-Unis. Le paragraphe 11(1) du Règlement prévoit qu"un visa ne peut pas être délivré si la personne ne reçoit aucun point pour l"article 3. En conséquence, la demande de M. Khan a été rejetée.

[5]      L"opinion de Monsieur Khan quant à l"entrevue est quelque peu différente. Il se souvient qu"elle a été très courte et principalement axée sur la question du permis d"exercice. Selon les notes qu"il a prises à la demande de son avocat, après avoir reçu la lettre de refus, l"agente des visas l"a avisé que sa demande a été rejetée parce qu"il n"avait pas le permis d"exercice nécessaire. Il a compris que cela voulait dire qu"il ne pouvait pas obtenir de visa à moins d"être autorisé à exercer sa profession au Canada, mais qu"il ne pouvait pas l"être à moins d"être résident d"une province. Il a trouvé cela injuste. Il a également pensé que l"agente des visas aurait dû écrire au Montessori Centre après que ses appels téléphoniques étaient restés sans réponse.

[6]      Monsieur Khan estime que l"agente des visas a violé son obligation d"équité lorsqu"elle n"a pris aucune démarche supplémentaire pour confirmer son expérience professionnelle, alors qu"elle avait clairement des doutes à ce sujet. Il appuie sa proposition sur Muliadi c. M.E.I [1986] 2 C.F. 205 (C.A.F.) qui selon lui fait jurisprudence à ce sujet.

[7]      Dans Muliadi la demande de visa a été rejetée en raison d"une appréciation négative du projet d"entreprise du demandeur par un fonctionnaire du gouvernement de l"Ontario. Le demandeur n"avait pas été informé de l"appréciation défavorable et n"avait pas eu l"occasion d"y répondre. Si le demandeur en avait été informé, il aurait pu fournir d"autres renseignements à l"appui de sa demande.

" Si l"appelant avait été informé de l"appréciation négative avant que le rejet de sa demande n"ait été décidé, il aurait peut-être pu convaincre l"agent des visas de la viabilité de son entreprise. Il aurait également pu dire à l"agent des visas que les autorités ontariennes n"avaient pas formulé de demande de renseignements ou pris contact avec les personnes compétentes. Il ne pouvait connaître le résultat du processus d"appréciation avant d"en être informé par l"agent des visas et à ce moment, la décision de rejeter sa demande avait déjà été prise ".

[8]      Rien dans Muliadi n"impose à l"agente des visas une obligation de vérifier les références d"emploi du demandeur lorsque celles-ci n"ont pu être jointes par téléphone. Ce sont les références du demandeur. S"il existe un problème particulier pour les joindre, c"est au demandeur qu"il appartient de faire en sorte qu"elles puissent être contactées. En conclure autrement reviendrait à retirer au demandeur la charge qu"il a de convaincre l"agente des visas de son droit. La seule obligation qui est imposée à l"agente des visas en l"espèce était d"avertir M. Khan de ses doutes quant à son emploi. C"est ce qu"elle a fait. Monsieur Khan a eu la chance de s"expliquer. Voila toute l"obligation d"équité qui est exigée. De plus, Muliadi porte sur les renseignements fournis à l"agent des visas par quelqu"un d"autre que le demandeur, et dont le demandeur ne pourrait avoir connaissance que si l"agent des visas les lui divulguait. En l"espèce, les renseignements ont été fournis par le demandeur. Muliadi ne s"applique pas aux faits en l"espèce. Voir Jurawan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), [1999] A.C.F. no 1240, Zhang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), [1999] A.C.F. no 638.

[9]      Monsieur Khan s"appuie également sur l"affaire Gill c. M.E.I. (1990) 12 Imm. L.R. (2d) 305 (C.F. 1re inst.) dans laquellle le demandeur avait rapporté dans sa demande qu"il n"avait jamais été marié. S"il l"avait déjà été, il aurait été inadmissible au programme auquel il souhaitait participer. L"agent des visas a reçu des renseignements indiquant que le demandeur avait été marié deux fois. Cela n"a pas été divulgué au demandeur au moment de l"entrevue et sa demande a été rejetée parce qu"il avait déjà été marié et parce qu"il n"avait pas dit la vérité. Le juge en chef adjoint Jerome (titre qu"il avait alors) a conclu que le demandeur aurait dû être avisé de ces renseignements et aurait dû avoir la chance de présenter sa version des faits. Encore une fois, il s"agit-là de renseignements fournis par une tierce partie dont le demandeur n"avait pas connaissance. Cela n"est pas applicable en l"espèce.

[10]      En résumé, aucune obligation ne pesait sur l"agente des visas de faire autre chose que ce qu"elle a fait, soit de porter à l"attention de M. Khan les inquiétudes qu"elle avait quant à sa situation professionnelle. Il ne lui appartenait pas de poursuivre la question plus avant. Il avait l"obligation de la convaincre de sa situation professionnelle actuelle. Il ne l"a pas fait.

[11]      Dans tous les cas, il est clair que le problème fondamental dans la demande de M. Khan était qu"il n"avait pas été en mesure de convaincre l"agente des visas qu"il avait déjà travaillé en tant que conseiller d"orientation. C"est la conclusion à laquelle elle est arrivée après avoir interrogé le demandeur et après l"avoir écouté décrire ses fonctions de conseiller d"orientation qu"il disait avoir occupées. Le refus était le résultat de l"inaptitude du demandeur à décrire ses fonctions de conseiller d"orientation de manière à convaincre l"agente des visas qu"il avait effectivement travaillé à ce titre. Il était loisible à l"agente des visas de tirer cette conclusion compte tenu de la preuve dont elle disposait. Il s"agissait d"une conclusion qui était cruciale pour sa demande puisque celle-ci lui a valu une marque de zéro pour son expérience, ce qui empêchait la délivrance d"un visa. Il n"existe aucun fondement pour modifier cette décision de l"agente des visas.

[12]      Le dernier motif de M. Khan est que l"agente des visas n"a pas pris en considération les facteurs pertinents pour apprécier sa personnalité. L"argument découle de l"absence de tout détail dans les notes informatiques relativement aux questions qui ont été posées à M. Khan, ainsi que l"inaptitude de l"agente des visas, lors de son contre-interrogatoire, à se rappeler les questions particulières qu"elle a posées à M. Khan. L"avocat a conclu de l"absence de détails que les questions pertinentes n"ont pas été posées. À mon avis, l"absence de mentions aux questions particulières dans les notes informatiques est une question de crédibilité. Elle n"établit pas, en tant que tel, un défaut de prendre en considération certains facteurs. De même, le manque de mémoire de l"agente des visas quant aux questions particulières qu"elle a pu poser au demandeur est une question de crédibilité et non la preuve en tant que tel d"un défaut de prendre en considération les facteurs appropriés. Ayant lu l"ensemble du contre-interrogatoire de l"agente des visas, je ne suis pas prêt à faire des inférences contradictoires quant à la crédibilité. En conséquence, je crois son témoignage selon lequel elle a pris en considération les facteurs appropriés en appréciant la personnalité de M. Khan.

[13]      En conséquence, il n"existe aucun motif justifiant que je modifie la décision de l"agente des visas. La demande est rejetée.



ORDONNANCE

     La demande est rejetée.


" J.D. Denis Pelletier "

_______________________

juge

Traduction certifiée conforme


Philippe Méla
















SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                  IMM-3412-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :              ASMAT ALI KHAN c. M.C.I.
LIEU DE L"AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L"AUDIENCE :              Le 4 MAI 1999
MOTIFS DE L"ORDONNANCE PAR :      MONSIEUR LE JUGE PELLETIER
EN DATE DU :                  26 octobre 1999

ONT COMPARU :                     

M. David Morris                  POUR LE DEMANDEUR

M. Duane Shippers                  POUR LE DÉFENDEUR

                            

            

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     
Bell, Unger, Morris                  POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)                             

                            

M. Morris Rosenberg         
Sous-procureur général du Canada          POUR LE DÉFENDEUR

                

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