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Date : 19990709

Dossier : T-1119-98

OTTAWA (Ontario), le 9 juillet 1999

EN PRÉSENCE de monsieur le juge Rouleau

ENTRE :

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                          requérant

ET :

                                                           OLEG KANTEMIROV

                                                                                                                                                 intimé

                                                                  JUGEMENT

I.           L'appel est rejeté.

                                                                                                                                   « P. Rouleau »                 

                                                                                                                                                                                                                        

                                                                                                                                               J U G E                     


Traduction certifiée conforme

                                    

Raymond Trempe, B.C.L.


Date : 19990709

Dossier : T-1119-98

ENTRE :

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                          requérant

ET :

                                                           OLEG KANTEMIROV

intimé

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE ROULEAU :

[1]         Le requérant, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, interjette appel d'une décision approuvant la demande de citoyenneté de l'intimé sous le régime du paragraphe 5(1) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29, au motif que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que l'intimé a satisfait aux exigences relatives à la résidence prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi.


[2]         Les éléments de preuve devant le juge de la citoyenneté établissent que l'intimé, citoyen russe ayant travaillé et voyagé avec le Cirque du Soleil, est entré au Canada à titre de visiteur le 24 février 1992, et qu'il a subséquemment obtenu un permis de travail. La femme et le fils de l'intimé sont arrivés au Canada le 28 septembre 1992.    Il a obtenu le droit d'établissement le 14 mars 1995 et a déposé une demande de citoyenneté le 18 septembre 1997.

[3]         L'intimé a été physiquement présent au Canada pendant 898,5 des 1095 jours de séjour au Canada requis dans les quatre années précédant la date de sa demande.

[4]         Avec sa femme, l'intimé a acheté au Canada un immeuble en copropriété financé par un prêt hypothécaire auprès d'une institution bancaire canadienne. Il a maintenu des comptes bancaires, un permis de conduire ontarien valide, de même qu'une assurance-maladie et payé son impôt sur le revenu canadien. Il a en outre été à l'emploi du Cirque du Soleil (Canada) et il est devenu copropriétaire de l'établissement The Wonderful Circus World School (à Toronto).

[5]         À l'exception d'une période de vacances de deux semaines et demie, toutes les absences de l'intimé du Canada étaient attribuables à ses tournées avec le Cirque du Soleil ou à ses activités de négociation de tournées d'artistes russes au Canada et d'approvisionnement en matériel pour l'établissement The Wonderful Circus World School.

[6]         En se fondant sur ces éléments de preuve, le juge de la citoyenneté a conclu comme suit :

[TRADUCTION] Bien qu'il lui manque 196,5jours de résidence, l'intéressé, au moyen d'une déclaration d'action et d'intention digne de foi et de la fourniture de documents irréfutables, a, SELON LE CRITÈRE ÉTABLI PAR LE JUGE THURLOW, prouvé qu'il avait établi et maintenu une véritable centralité de vie au Canada. Au cours de la période pertinente entre l'OBTENTION DU DROIT D'ÉTABLISSEMENT et sa PREMIÈRE ABSENCE, il a mis en place les indices habituels : domicile, NAS, assurance-maladie, compte bancaire, inscription des enfants dans des écoles canadiennes, emploi au sein d'une société canadienne (Cirque du Soleil).

Ses périodes d'absence étaient attribuables à l'accomplissement de ses tâches professionnelles à titre d'employé du Cirque du Soleil (Canada).

Pendant toutes ses périodes d'absence, l'intéressé a entièrement maintenu les liens voulus pour avoir un pied-à-terre au Canada.

Tous les avoirs étrangers ont été liquidés de la manière et au moment voulus.

[7]         Le juge de la citoyenneté a donc conclu que l'intimé a accumulé au moins trois ans de résidence au Canada dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande de citoyenneté, ainsi que l'exige l'alinéa 5(1)c) de la Loi. Toutes les autres exigences de la Loi ayant été satisfaites, le juge de la citoyenneté a approuvé la demande.   

[8]         Le requérant n'attaque pas les éléments de preuve produits devant le juge de la citoyenneté. Il prétend toutefois que le juge de la citoyenneté a erré en fait et en droit en concluant que l'intimé avait satisfait aux exigences relatives à la résidence prévues à l'alinéa 5(1)c). Il prétend essentiellement que l'alinéa 5(1)c) devrait recevoir une interprétation stricte. Puisque cet alinéa prévoit une période d'absence d'un an au cours de la période de quatre ans précédant la demande de citoyenneté, la présence au Canada durant les trois autres années doit être substantielle. Étant donné les 196,5 jours d'absence du Canada et l'absence de toute circonstance exceptionnelle, l'intimé n'est pas en mesure d'établir la durée de résidence au Canada prescrite.

[9]         L'intimé n'a déposé aucune observation, mais il était présent à l'audition du présent appel.

[10]       Un examen de la jurisprudence récente établit que le critère auquel les tribunaux ont le plus fréquemment recours pour établir si une personne a satisfait à l'exigence relative à la résidence visée à l'alinéa 5(1)c) est celui qui a été formulé par Madame le juge Reed dans la décision Koo (Re), [1993] 1 C.F. 286, à la p. 293 :

.....le critère est celui de savoir si l'on peut dire que le Canada est le lieu où le requérant « vit régulièrement, normalement ou habituellement » . Le critère peut être tourné autrement : le Canada est-il le pays où le requérant a centralisé son mode d'existence?

[11]       Le juge Reed poursuit en suggérant six questions que l'on peut poser pour décider si le Canada est le pays où la personne a centralisé son mode d'existence. Ces questions portent sur la forme et la durée de la résidence au Canada, sur la résidence de la famille proche, sur de l'étendue et la justification de toute période d'absence physique et sur la qualité des attaches avec le Canada par comparaison avec celles qui existent avec un autre pays.

[12]       En l'espèce, la preuve produite devant le juge de la citoyenneté établit clairement que l'intimé avait centralisé son mode d'existence au Canada. Son domicile, sa famille et ses comptes bancaires se trouvaient au Canada. Son employeur et son entreprise subséquente se trouvaient au Canada et il avait mis fin à tous les liens pertinents avec son pays de résidence antérieur. Les périodes d'absence physique du Canada étaient directement liées à son emploi au Canada et à sa participation subséquente à une entreprise canadienne. En fait, de par sa nature même, l'emploi de l'intimé au sein du Cirque du Soleil (Canada) l'obligeait à s'absenter du Canada.

[13]       Le requérant n'as pas établi que le juge de la citoyenneté n'a pas appliqué correctement le critère relatif à la résidence lorsqu'il a conclu que l'intimé avait rempli les exigences prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté.

[14]       L'appel est donc rejeté.

                                                                                                       « P. ROULEAU »

                                                                                                                 JUGE

OTTAWA, (Ontario)

le 9 juillet 1999

Traduction certifiée conforme

                                    

Raymond Trempe, B.C.L.


                                                COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                            SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                                             

                                AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :       T-1119-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :Le Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Oleg Kantemirov

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 9 juin 1999

                                                                                                                     

                                     MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE ROULEAU

                                                      EN DATE DU : 9 juillet 1999

                                                                                                                     

ONT COMPARU :

Me Godwin Friday    POUR LE REQUÉRANT

Toronto (Ontario)

PERSONNE N'A COMPARU                    POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Morris Rosenberg                     POUR LE REQUÉRANT

sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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