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Date : 19981008


Dossier : IMM-1462-97

Entre :

     Lev GUNIN

     Marta GUNIN

     Ina GUNIN

     Alla GUNIN

     Elizabeta GUNIN

     Partie requérante

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Partie intimée

     MOTIFS D'ORDONNANCE

LE JUGE DUBÉ:

[1]      Il s"agit ici d"une demande de contrôle judiciaire à l"encontre de la décision de la section du statut de réfugié ("la section du statut") rendue le 17 mars 1997, selon laquelle les requérants, citoyens d"Israël, ne sont pas réfugiés au sens de la Convention.

1- Les faits

[2]      Le requérant principal, Lev Gunin, son épouse Alla Gunin, leurs enfants mineurs Marta et Ina Gunin, ainsi que la mère du requérant principal, Élizabeth Gunin, revendiquent le statut de réfugié en raison de leur religion et de leur appartenance à un groupe social.

[3]      Le requérant principal et sa mère sont de nationalité juive mais sont athées. Par contre, l"épouse et les enfants sont de nationalité russe et de religion chrétienne. Ils ont tous immigré en Israël en avril 1991.

[4]      La prétention des requérants est que, dès leur arrivée en Israël, leurs voisins ont tenté de les convertir au judaïsme. Les enfants étaient régulièrement battus et insultés par les autres enfants à une garderie non religieuse. Au travail, le requérant principal était battu par ses collègues, maltraité par ses supérieurs au motif qu"il était ni juif ni circoncis. L"épouse a éprouvé de la difficulté à se trouver un emploi et lorsqu"elle en a finalement trouvé un, elle s'est fait insulter, battre et harceler sexuellement. Quant à la mère du requérant principal, elle fut agressée en maintes occasions. Ni la police, ni Amnistie Internationale n'a tenu compte des plaintes des requérants.

2. La décision de la section du statut

[5]      La section du statut n'a accordé "aucune crédibilité à leurs récits dans lesquels ils prétendent avoir été persécutés en Israël à cause de leur nationalité, de leur religion, de leur appartenance à un groupe social et, particulièrement en ce qui concerne le demandeur, à cause de ses opinions politiques". La section du statut a ajouté que "de plus, la documentation dont nous disposons indique que, la population en Israël s'est bien prêtée à l'accueil des nouveaux immigrants de l'ancienne Union soviétique en leur apportant de l'aide matérielle et en leur fournissant de l'assistance dans l'accomplissement des multiples formalités qu'ils doivent remplir afin de s'établir dans leur nouveau milieu de vie". La section du statut a trouvé "que les demandeurs versent carrément dans l'exagération quand ils projettent de leur pays la sombre image d'une société où se pratiquerait une certaine forme d'esclavage...". Finalement, la section du statut a souligné que "il existe aussi en Israël de nombreuses organisations non gouvernementales qui aident les gens en provenance de l'ancienne Union soviétique non seulement pour leur intégration, mais aussi pour la défense de leurs droits".

3. Les arguments des requérants

[6]      Le procureur des requérants a attaqué la décision de la section du statut en alléguant certaines erreurs qu'elle aurait commises. La section du statut a préféré la preuve documentaire à celle fournie par les requérants, sans motiver son choix; elle n'a fourni aucune analyse de la qualité intrinsèque du témoignage du requérant principal avant de conclure à son manque de crédibilité; elle n'a pas considéré la preuve documentaire fournie par les requérants; elle a affirmé qu'aucune preuve de persécution n'existe contre les immigrants d'origine russe en Israël alors qu'un grand nombre de ces immigrants témoignent du contraire; elle a cité des passages à partir de certains documents tout en excluant d'autres qui sont favorables aux requérants: la décision de la section du statut était donc manifestement déraisonnable.

4. Les conclusions

[7]      Il s'agit ici fondamentalement d'une question de crédibilité et la section du statut n'a tout simplement pas cru les requérants. Elle a trouvé que leurs témoignages étaient invraisemblables et exagérés face à la volumineuse preuve documentaire émise par des sources fiables. Il était entièrement loisible à la section du statut de trier la preuve et d'appuyer sa décision celle qui, de son point de vue, se mariait le mieux à la réalité1.

[8]      En ce qui a trait à la protection de l'État, la preuve documentaire établit que les requérants peuvent se prévaloir de l'assistance des autorités israéliennes. À la rigueur s'il surgit un conflit ou un manque de coopération de la part de la police locale, une multitude d'autres organismes existent auprès desquels les requérants peuvent porter plainte.

[9]      Quant à la question de crédibilité, il n'appartient pas à la Cour de substituer son appréciation à celle de la section du statut attendu que c'est la section du statut qui a vu, entendu et jaugé la valeur testimoniale des requérants. À moins d'une erreur manifestement déraisonnable et déterminante dans les conclusions de la section du statut, la Cour ne peut intervenir.

[10]      En conséquence, cette demande de contrôle judiciaire ne peut être accueillie.

OTTAWA, Ontario

le 8 octobre 1998

    

     Juge

__________________

     1      Voir le juge Noël dans l'affaire Victorov et al. c. M.C.I. , IMM-5170-94, 14 juin 1995.

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