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                                                                                                                                 Date : 19980313

                                                                                                                                    IMM-4785-96

OTTAWA (ONTARIO), LE 13 MARS 1998

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE NADON

ENTRE :

                                                    BINTA MAMBOH NGALLA,

                                                                                                                                       Requérante,

                                                                           ET :

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                          ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA,

                                                                                                                                                Intimé.

            Demande de contrôle judiciaire d'une décision prononcée le 1er novembre 1996 par Jeffrey Barr, agent d'immigration désigné dans le dossier B-0342-62900, en vertu du paragraphe 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale.

                                                                ORDONNANCE

            La demande est rejetée.

                                                                                                                                  « MARC NADON »          

                                                                                                                        Juge

Traduction certifiée conforme :

Laurier Parenteau, LL.L.


                                                                                                                                 Date : 19980313

                                                                                                                                    IMM-4785-96

ENTRE :

                                                    BINTA MAMBOH NGALLA,

                                                                                                                                       Requérante,

                                                                           ET :

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                          ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA,

                                                                                                                                                Intimé.

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]         La requérante demande l'annulation de la décision rendue par Jeffrey Barr, agent d'immigration désigné autorisé par le Ministre à délivrer des visas.    (l'agent des visas).

[2]         L'agent des visas a informé la requérante, dans une lettre datée du 1er novembre 1996, que sa demande de résidence permanente au Canada était rejetée parce qu'elle était inadmissible par application de l'alinéa 19(2)a) de la Loi.

[3]         La requérante a été jugée inadmissible parce qu'elle avait été déclarée coupable de vol sous le régime du sous-alinéa 334b)(ii) du Code criminel : vol « si la valeur de ce qui est volé ne dépasse pas mille dollars » [1]. La requérante a fait l'objet d'une condamnation avec sursis et elle a été assujettie à une période de probation de 180 jours. Il est important de souligner que, par application de l'article 334 du Code criminel, lorsque la valeur de ce qui est volé ne dépasse pas 1 000 $, l'accusé peut être poursuivi soit par mise en accusation, soit par procédure sommaire. La requérante a été poursuivie et déclarée coupable par voie de procédure sommaire. Le choix de la procédure relève du pouvoir discrétionnaire du procureur de la Couronne. Si une déclaration de culpabilité est prononcée, ces différentes procédures entraînent des peines qui peuvent être différentes.

[4]         Par conséquent, dans les circonstances, l'agent des visas n'avait pas d'autre choix que de déclarer la requérante inadmissible au Canada par application de l'alinéa 19(2)a) de la Loi, qui se lit comme suit :

(2) Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui :

a) ont été déclarés coupables au Canada d'un acte criminel ou d'une infraction dont l'auteur peut être poursuivi par mise en accusation ou par procédure sommaire et qui peut être punissable, aux termes d'une loi fédérale, par mise en accusation, d'un emprisonnement maximal de moins de dix ans, à l'exception d'une infraction désignée à titre de contravention sous le régime de la Loi sur les contraventions; [non souligné dans l'original]

[5]         Dans sa plaidoirie écrite, l'avocat de la requérante a soulevé plusieurs questions qui, selon moi, peuvent être regroupées sous les trois questions qui suivent :

i)L'alinéa 19(2)a) de la Loi est-il contraire à l'alinéa 34(1)c) de la Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21?

ii)L'alinéa 19(2)a) est-il contraire à l'alinéa 11h) de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte » )?

iii)L'alinéa 19(2)a) est-il contraire à l'article 15 de la Charte?

[6]         Je vais commencer par la première question soulevée par la requérante qui est celle de savoir si l'alinéa 19(2)a) est contraire à l'alinéa 34(1)c) de la Loi d'interprétation qui se lit comme suit :

34. (1) Les règles suivantes s'appliquent à l'interprétation d'un texte créant une infraction :

                                                                                                       ...

c) s'il est prévu que l'infraction est punissable sur déclaration de culpabilité soit par mise en accusation, soit par procédure sommaire, la personne déclarée coupable de l'infraction par procédure sommaire n'est pas censée avoir été condamnée pour un acte criminel.

[7]         Les prétentions de l'avocat de la requérante à cet égard sont ainsi énoncées dans son mémoire :

[Traduction]

1.Dans le cas d'une infraction mixte, l'alinéa 19(2)a) de la Loi sur l'immigration assimile une condamnation par procédure sommaire à un acte criminel.

2.Cette assimilation est ultra vires, illégale et contraire à l'alinéa 34(1)c) de la Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, qui énonce clairement que, dans le cas d'une infraction mixte, une déclaration de culpabilité par procédure sommaire n'est pas censée être considérée comme un acte criminel.

3.Le paragraphe 19(2) de la Loi sur l'immigration usurpe la prérogative discrétionnaire du procureur de la Couronne de déterminer le type d'infraction dont une personne est accusée.

4.Cette disposition usurpe en outre la compétence des juges et des tribunaux qui ont prononcé la sentence et décidé du type d'infraction dont une personne est déclarée coupable. [L'original contient des erreurs]

[8]         J'estime que l'avocat de la requérante a mal compris l'objet de la Loi d'interprétation et, en particulier, son alinéa 34(1)c). Cet alinéa prévoit tout simplement que, dans les cas où le Code criminel donne au poursuivant le pouvoir discrétionnaire de déterminer la procédure qui convient le mieux pour poursuivre un accusé et où l'accusé est déclaré coupable d'une infraction par procédure sommaire, cette personne n'est pas censée avoir été déclarée coupable d'un acte criminel. En conséquence, la requérante qui a été déclarée coupable de vol par procédure sommaire n'est pas censée avoir été déclarée coupable d'un acte criminel. C'est le seul objet de l'alinéa 34(1)c) de la Loi d'interprétation.

[9]         Au cours de l'audition, j'ai indiqué à l'avocat que je ne comprenais pas en quoi l'alinéa 34(1)c) de la Loi d'interprétation pouvait être pertinent à l'égard de l'alinéa 19(2)a) de la Loi. Étant donné que la requérante a été déclarée coupable sous le régime du sous-alinéa 334b)(ii) du Code criminel, l'agent des visas n'avait d'autre choix que de la déclarer inadmissible, comme je l'ai déjà mentionné. Par souci de clarté, je reproduis ci-dessous les sous-alinéas 334b(i) et (ii) du Code criminel :

334. Sauf disposition contraire des lois, quiconque commet un vol :

                                                                                                       ...

b) est coupable

(i) soit d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de deux ans,

(ii) soit d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire,

si la valeur de ce qui est volée ne dépasse pas cinq milles dollars.

[10]       L'infraction créée par l'alinéa 334b) constitue ce qu'on appelle couramment une infraction mixte. Il s'agit d'une infraction qui, selon le montant volé, peut être considérée d'une gravité aussi grande que celle des autres actes criminels ou d'une gravité qui ne dépasse pas celle d'une infraction punissable par procédure sommaire. Par conséquent, le poursuivant a le pouvoir discrétionnaire de déterminer, en partie, la gravité d'une infraction particulière au cas par cas. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une infraction « dont l'auteur peut être poursuivi par mise en accusation » . Même si la Couronne n'a pas choisi de procéder contre la requérante par voie de mise en accusation, celle-ci n'échappe pas au fait que le procureur de la Couronne aurait pu procéder ainsi.

[11]       La requérante soutient que l'alinéa 19(2)a) de la Loi porte atteinte à la prérogative du procureur de la Couronne de poursuivre une infraction de la façon qui lui paraît convenable. La requérante soutient en outre que l'alinéa 19(2)a) « usurpe » la compétence des tribunaux en ce qui a trait à la déclaration de culpabilité et à la peine qui doit être imposée. Je ne saurais souscrire à cette hypothèse. L'alinéa 19(2)a) de la Loi n'a aucune conséquence quant à la décision du procureur général de poursuivre une personne accusée d'une infraction. Il est inutile de préciser que l'alinéa 19(2)a) de la Loi n'a aucune incidence non plus sur la décision d'un tribunal criminel et la sentence qu'il prononce.

[12]       En l'espèce, on reprochait à l'accusé une infraction punissable par procédure sommaire, dont elle a été déclarée coupable et pour laquelle une peine lui a été imposée. Ce dossier est maintenant clos. Le véritable argument de l'avocat porte, selon moi, que sa cliente ne devait pas être déclarée inadmissible en vertu de l'alinéa 19(2)a) parce qu'elle a été déclarée coupable d'une infraction punissable par procédure sommaire, mais plutôt en vertu du sous-alinéa 19(2)b)(i).

(2) Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui :

                                                                                                       ...

b) sont des personnes :

(i) soit qui ont été déclarées coupables au Canada d'au moins deux infractions qui sont punissables, aux termes d'une loi fédérale, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et qui ne découlent pas des mêmes faits, à l'exception d'une infraction désignée à titre de contravention sous le régime de la Loi sur les contraventions,

                                                                                                       ...

[13]       Je suis toutefois d'avis qu'une infraction ne peut être catégorisée comme une infraction punissable par procédure sommaire uniquement parce que la poursuite a choisi de procéder par voie de procédure sommaire. Une infraction punissable par procédure sommaire, comparativement à une infraction mixte, doit être poursuivie par procédure sommaire et la Couronne n'a aucun pouvoir discrétionnaire à son égard.

[14]       J'examinerai maintenant les prétentions de la requérante concernant la Charte. Premièrement, la requérante fait valoir que l'alinéa 19(2)a) est contraire à l'alinéa 11h) de la Charte qui prévoit :

11. Tout inculpé a le droit :

                                                                                                       ...

h) d'une part de ne pas être jugé de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement acquitté, d'autre part de ne pas être jugé ni puni de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement déclaré coupable et puni; ...

[15]       Si l'on en croit l'avocat de la requérante, sa cliente sera punie deux fois pour la même infraction si elle est déclarée inadmissible au Canada. Je ne saurais retenir cet argument non plus. La requérante a été déclarée coupable et elle a purgé sa peine et, à ce qu'il ressort de son dossier, elle n'est pas jugée ni punie une deuxième fois. Le fait qu'une déclaration de culpabilité d'une infraction criminelle entraîne l'inadmissibilité en qualité de résidente permanente est une conséquence de la perpétration de l'infraction et ne constitue pas un deuxième châtiment.

[16]       Dans l'arrêt Hurd c. M.E.I., [1989] 2 C.F. 594, la Cour d'appel fédérale a statué que l'expulsion d'un résident permanent du Canada déclaré coupable d'une infraction[2] visée par l'alinéa 27(1)d) de la Loi ne constitue pas une punition au sens de l'alinéa 11h) de la Charte. Le juge MacGuigan, qui a rédigé l'opinion de la Cour, était d'avis que le but d'une ordonnance d'expulsion n'était pas de punir la personne en cause mais de protéger le Canada contre la présence de personnes indésirables. À la page 607, le juge MacGuigan s'est exprimé en ces termes :

                Selon la Cour suprême à cette époque-là, l'expulsion [Traduction] « n'a rien à voir avec les conséquences pénales des actes des particuliers » , mais elle vise plutôt à protéger le pays des personnes indésirables.

[17]       En l'espèce, la requérante ne sera pas expulsée puisqu'elle se trouve déjà à l'extérieur du pays. Étant donné qu'elle a été déclarée inadmissible par l'agent des visas, elle ne pourra revenir au Canada à moins d'obtenir un permis du ministre. J'estime que l'argument de la requérante à cet égard n'est pas défendable et doit être rejeté. L'alinéa 19(2)a) de la Loi n'est pas contraire à l'alinéa 11h) de la Charte.

[18]       La dernière prétention de la requérante porte que l'alinéa 19(2)a) est contraire à l'article 15 de la Charte qui se lit comme suit :

15. 1) La Loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la Loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentale ou physique.

(2) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet d'interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer la situation d'individus ou de groupes défavorisés, notamment du fait de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur, de leur religion, de leur sexe, de leur âge ou de leurs déficiences mentales ou physiques.

[19]       Une fois encore, je reproduirai les arguments invoqués par l'avocat de la requérante tels qu'ils sont exprimés dans son mémoire :

[Traduction]

10.L'alinéa 19(2)a) est nettement discriminatoire contre les résidents permanents, les visiteurs et les particuliers qui désirent immigrer au Canada, du fait qu'il traite leur déclaration de culpabilité par procédure sommaire différemment de celle d'un citoyen canadien.

11.L'alinéa 19(2)a) comporte nettement un stéréotype contre les immigrants, les résidents permanents, les visiteurs et les personnes intéressées à immigrer au Canada qui, en tant que groupe, ont été historiquement défavorisés à la fois sur le plan politique et sur le plan social.

12.Cette discrimination est ultra vires, illégale et contraire au paragraphe 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, Loi constitutionnelle de 1982, L.R.C. (1985), appendice II, no 44. [L'original contient des erreurs]

[20]       Voici en outre les paragraphes 39 à 42 de la réponse de la requérante au mémoire de l'intimé :

[Traduction]

                39.            Selon l'alinéa 19(2)a), une déclaration de culpabilité par procédure sommaire est expressément censée constituer un acte criminel pour l'application de certaines lois fédérales.

                40.            Il en résulte une situation qui différencie une déclaration de culpabilité par procédure sommaire d'un résident permanent ou d'un autre étranger d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire d'un citoyen canadien.

                41.            Le fait que le législateur traite une déclaration de culpabilité par procédure sommaire différemment dans le cas d'un résident permanent ou d'un étranger outrepasse le pouvoir du législateur d'établir les limites au droit d'un résident ou d' un étranger de demeurer ou d'entrer au pays.

                41.            Pour cette raison, l'article 15 de la Charte des droits et libertés doit s'appliquer à la présente affaire.

                42.            L'alinéa 19(2)b) de la Loi sur l'immigration doit être appliqué à la présente affaire. [L'original contient les erreurs.]

[21]       Je dois avouer avoir eu de la difficulté à comprendre l'argument de la requérante à cet égard. J'ai demandé à l'avocat s'il devait démontrer que les immigrants constituent un groupe qui a été « défavorisé historiquement à la fois sur le plan politique et sur le plan social » . L'avocat a répondu que je pouvais prendre connaissance d'office de ce fait. À mon avis, je ne suis pas en mesure de le faire. Étant donné qu'aucun élément de preuve, quel qu'il soit, n'a été produit à cet égard, je ne puis tirer la conclusion que souhaite l'avocat de la requérante.

Je dois également rejeter l'argument de la requérante portant que l'alinéa 19(2)a) de la Loi établit une distinction inacceptable entre les résidents permanents et les citoyens. Selon l'article 6 de la Charte, il est clair comme de l'eau de roche que seuls les citoyens canadiens ont « le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir » . Par conséquent, la Charte permet au législateur de traiter différemment les citoyens et les non-citoyens. À mon avis, cette question a été tranchée de façon définitive par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Chiarelli c. Canada (MEI), [1992] 1 R.C.S. 711. La question dont la Cour suprême était saisie dans l'affaire Chiarelli était celle de savoir si le régime législatif qui prévoit l'expulsion d'un résident permanent déclaré coupable d'une infraction criminelle grave était constitutionnel. La Cour devait plus particulièrement décider si le sous-alinéa 27(1)d)(ii) et le paragraphe 32(2) de la Loi sur l'immigration, S.C. 1976-77, ch. 52, contrevenaient notamment à l'article 15 de la Charte. La Cour a conclu que ce n'était pas le cas. Le juge Sopinka a formulé les remarques suivantes, au nom de la Cour, aux pages 733 et 734 :

                La distinction entre citoyens et non-citoyens est reconnue dans la Charte. Bien que le par. 6(2) accorde aux résidents permanents le droit de se déplacer dans tout le pays, d'établir leur résidence et de gagner leur vie dans toute province, seuls les citoyens ont le droit « de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir » , que garantit le par. 6(1).

                Le Parlement a donc le droit d'adopter une politique en matière d'immigration et de légiférer en prescrivant les conditions à remplir par les non-citoyens pour qu'il leur soit permis d'entrer au Canada et d'y demeurer. C'est ce qu'il a fait dans la Loi sur l'immigration, dont l'article 5 dispose que seuls les citoyens canadiens, les résidents permanents, les réfugiés au sens de la Convention ou les Indiens inscrits conformément à la Loi sur les Indiens ont le droit d'entrer au Canada ou d'y demeurer. La nature limitée du droit des non-citoyens d'entrer au Canada et d'y demeurer se dégage nettement de l'art. 4 de la Loi. Suivant le par. 4(2), les résidents permanents ont le droit de demeurer au Canada, sauf s'ils relèvent d'une des catégories énumérées au par. 27(1). L'une des conditions auxquelles le législateur fédéral a assujetti le droit d'un résident permanent de demeurer au Canada est qu'il ne soit pas déclaré coupable d'une infraction punissable d'au moins cinq ans de prison. Cette condition traduit un choix légitime et non arbitraire fait par le législateur d'un cas où il n'est pas dans l'intérêt public de permettre à un non-citoyen de rester au pays. L'exigence que l'infraction donne lieu à une peine de cinq ans d'emprisonnement indique l'intention du législateur de limiter cette condition aux infractions relativement graves. Les circonstances personnelles de ceux qui manquent à cette condition peuvent certes varier énormément. La gravité des infractions visées au sous-al. 27(1)d)(ii) varie également, comme le peuvent aussi les faits entourant la perpétration d'une infraction en particulier. Toutes les personnes qui entrent dans la catégorie des résidents permanents mentionnés au sous-al. 27(1)d)(ii) ont cependant un point commun : elles ont manqué volontairement à une condition essentielle devant être respectée pour qu'il leur soit permis de demeurer au Canada. En pareil cas, mettre effectivement fin à leur droit d'y demeurer ne va nullement à l'encontre de la justice fondamentale. Dans le cas du résident permanent, seule l'expulsion permet d'atteindre ce résultat. Une ordonnance impérative n'a rien d'intrinsèquement injuste. La violation délibérée de la condition prescrite par le sous-al. 27(1)d)(ii) suffit pour justifier une ordonnance d'expulsion. Point n'est besoin, pour se conformer aux exigences de la justice fondamentale, de chercher au-delà de ce seul fait, des circonstances aggravantes ou atténuantes.

[22]       Bien que l'alinéa 19(2)a) de la Loi n'ait pas été soumis à l'examen de la Cour suprême dans l'affaire Chiarelli, je crois que les remarques formulées par le juge Sopinka s'appliquent entièrement à la question dont je suis saisi. Il ressort clairement de l'arrêt de la Cour suprême que le législateur peut faire une distinction entre les citoyens et les non-citoyens et que de telles distinctions ne sont pas, comme telles, contraires à la Charte.

[23]       Par ces motifs, la demande est rejetée.

                                                                                                                                  « MARC NADON »          

                                                                                                                        Juge

Ottawa (Ontario)

13 mars 1998

Traduction certifiée conforme :

Laurier Parenteau, LL.L.


                                                  COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :IMM-4785-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :BINTA MAMBOH NGALLA c. LE

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDITION :Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDITION :5 mars 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE NADON

DATE :13 mars 1998

ONT COMPARU :

Me Emile Jean BarakatPOUR LA REQUÉRANTE

Me Louise CourtemanchePOUR L'INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Emile Jean BarakatPOUR LA REQUÉRANTE

Montréal (Québec)

Me George ThomsonPOUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada



     [1] Actuellement, l'article 334 établit la limite de l'infraction mixte à cinq milles dollars, mais à l'époque où la requérante a été accusée, l'article 334 fixait cette limite à mille dollars.

     [2] Le résident permanent avait été déclaré coupable d'infractions liées aux stupéfiants et avait été condamné à des peines dépassant six mois d'emprisonnement.

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