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Date : 20000824


Dossier : IMM-3615-99


Ottawa (Ontario), le 24 août 2000

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PINARD


ENTRE



Yuri Nicolas UGAZ FERIA

MARTIN Augusto UGAZ FERIA

demandeurs


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION


défendeur



ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire de la décision, datée du 21 mai 1999, dans laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a conclu que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, est rejetée.

                                 « Yvon Pinard »

                                         JUGE

Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.




Date : 20000824


Dossier : IMM-3615-99


ENTRE



Yuri Nicolas UGAZ FERIA

MARTIN Augusto UGAZ FERIA

demandeurs


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION


défendeur



MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD

[1]      Les demandeurs cherchent à obtenir le contrôle judiciaire de la décision, datée du 21 mai 1999, dans laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu qu'ils n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.

[2]      Martin Augusto et son frère Yuri Nicolas, des citoyens du Pérou, sont arrivés au Canada le 23 décembre 1994. Ils soutiennent qu'ils ont une crainte fondée d'être persécutés en raison d'opinions politiques qui leur sont imputées, soit parce qu'on les soupçonne d'être des partisans du Sentier lumineux.

[3]      La Commission a conclu que les demandeurs n'étaient pas crédibles en raison des contradictions et omissions suivantes de leurs témoignages et des éléments de preuve documentaire qu'ils ont produits :

-      La Commission n'a pas cru leur prétention selon laquelle ils auraient perdu leurs passeports, étant donné que lorsqu'il a été interrogé au sujet des circonstances dans lesquelles cette perte s'était produite, Martin Augusto a dit qu'il avait un passeport, mais qu'il n'était plus valide.
-      Yuri Nicolas n'a pas mentionné dans son formulaire de renseignements personnels (FRP) que la police avait confisqué ses pièces d'identité lors de leur interrogatoire.
-      Les demandeurs n'ont, pour établir leur identité, que pris les dispositions nécessaires en vue de faire en sorte que leur famille leur envoie des copies de certains documents tels des certificats médicaux et certificats de naissance. Selon la Commission, [TRADUCTION] « il est relativement facile de fabriquer de faux certificats de naissance » . La Commission a également renvoyé à la pièce A-14, qui mentionne que les nationaux péruviens à l'étranger ont le droit d'obtenir un passeport même s'ils ont des antécédents criminels ou s'ils sont recherchés par les institutions péruviennes chargées de l'application de la loi. La Commission a accordé un faible, voire aucun poids aux pièces d'identité que les demandeurs ont obtenues du gouvernement du Québec, vraisemblablement sans devoir établir leur identité.
-      La Commission n'a pas accordé de poids aux certificats médicaux et rapports de police, car ils semblaient avoir été fabriqués par des amateurs. Les certificats médicaux sont également identiques, sauf sur la question des blessures subies. La Commission a conclu qu'il n'était pas probable que les frères auraient reçu leur congé la même journée.
-      Les demandeurs ont dit que le numéro du livret d'élection de leur père était le 4128745. Cependant, sur la copie du certificat de naissance de leur frère, dont la revendication du statut de réfugié est traitée séparément, le numéro du livret est le 1095747, et la déclaration que les autorités policières de San Borja ont produite mentionne que ce numéro est le 25646138.
-      Lorsque la Commission a demandé à Martin Augusto d'expliquer pourquoi les frères étaient susceptibles d'être persécutés par les autorités policières, sa réponse, soit que « les autorités policières agissent comme des sauvages et traitent leurs victimes comme des animaux, sans aucune compassion, et qu'il n'était pas nécessaire de commettre un crime pour qu'elles vous fassent disparaître » , ne répondait pas vraiment à la question.
-      La formation a conclu que la prétention des demandeurs qu'ils auraient reçu des menaces de mort n'était pas plausible vu que leurs agresseurs auraient pu les assassiner à n'importe quel moment au cours de leur enlèvement.
-      La Commission a conclu qu'il n'était pas probable que les demandeurs seraient persécutés tant par les autorités policières que par des terroristes.
-      La Commission a conclu que pour rendre son témoignage conséquent, Martin Augusto formulait ses réponses en fonction des questions qui lui étaient posées.

[4]      Selon les demandeurs, la Commission a fait des inférences déraisonnables sur la base de la preuve lorsqu'elle a déterminé qu'ils n'étaient pas crédibles. À mon avis, les arguments des demandeurs sur ce point ne sont pas convaincants. En particulier, le fait que [TRADUCTION] « la Commission aurait pu faire des inférences favorables sur la base des documents et du témoignage, mais qu'elle a décidé de faire des inférences défavorables » ne constitue pas, comme l'ont soutenu les demandeurs, une erreur de droit. La Commission a fondé sa conclusion selon laquelle les demandeurs n'étaient pas crédibles sur des incohérences des éléments de preuve qu'ils ont produits et des contradictions entre leurs FRP et leurs témoignages. En général, j'estime que les inférences qu'a faites la Commission, un tribunal spécialisé, étaient raisonnables et suffisantes pour lui permettre de tirer la conclusion à laquelle elle est parvenue (voir Aguebor c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1993), 160 N.R. 315, à la p. 316 (C.A.F.)).

[5]      En ce qui concerne l'allégation des demandeurs selon laquelle la Commission a négligé de tenir compte de certains éléments de preuve dont elle disposait, il est bien établi qu'à moins que l'on prouve le contraire, on doit présumer que la Commission a considéré l'ensemble de la preuve qui lui a été soumise. En général, le fait que certains éléments de preuve documentaire ne soient pas mentionnés dans les motifs n'invalide pas la décision de la Commission (voir Hassan c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1992), 147 N.R. 317, à la p. 318 (C.A.F.)). En l'espèce, les demandeurs ne m'ont pas convaincu que la Commission a négligé de tenir compte d'éléments de preuve. On ne peut certainement pas accusé la Commission d'avoir négligé de tenir compte de la lettre du consulat du Pérou, qui est datée du 2 août 1999, soit plus de deux mois après la date de la décision.

[6]      Enfin, en ce qui concerne l'allégation des demandeurs selon laquelle les membres de la formation ont fait preuve de partialité, je n'estime pas que les passages auxquels les demandeurs ont renvoyé établissent cela. J'estime plutôt que les passages tirés de la transcription de l'audition démontrent que la Commission a rempli de façon diligente son obligation de faire part aux demandeurs de ses réserves concernant leur crédibilité. La Commission avait le droit d'interroger les demandeurs sur le fait qu'ils n'avaient pas de pièce d'identité à photo de même que sur leur identité. Contrairement à ce que les demandeurs ont soutenu, un tel type d'interrogatoire n'est ni dénué de pertinence, ni inhabituel. Le fait que la Commission n'a pas cru les demandeurs ne veut pas nécessairement dire qu'elle a fait preuve de partialité contre eux. À mon avis, les demandeurs n'ont pas produit d'éléments de preuve qui auraient amené une personne informée, qui aurait examiné l'affaire de façon réaliste et pratique, à conclure, après y avoir longuement réfléchi, que la Commission a pris une décision inéquitable (voir Committee for Justice and Liberty c. Office national de l'énergie, [1978] 1 R.C.S 369, à la p. 394). En outre, je dois tirer une inférence défavorable du fait que ni l'un ni l'autre des demandeurs, ni leurs avocats, n'ont soulevé la question de la partialité à l'audition devant la Commission (voir, par exemple, Affaire intéressant le Tribunal des droits de la personne et Énergie atomique du Canada Limitée, [1986] 1 C.F. 103, à la p. 113, et Yassine c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1994), 172 N.R. 308, à la p. 311 (C.A.F.)).

[7]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                 « Yvon Pinard »

                                     JUGE


OTTAWA (ONTARIO)

Le 24 août 2000


Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU GREFFE :              IMM-3615-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :          YURI NICOLAS UGAZ FERIA et autre c. MCI


LIEU DE L'AUDIENCE :          MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :          LE 6 JUILLET 2000

MOTIFS DE JUGEMENT EXPOSÉS PAR M. LE JUGE PINARD

EN DATE DU :              24 AOÛT 2000


ONT COMPARU :         

M. MICHAEL GOLDSTEIN

                             POUR LE DEMANDEUR

Mme MARIE NICOLE MOREAU

                             POUR LE DÉFENDEUR


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     

M. MICHAEL GOLDSTEIN

                             POUR LE DEMANDEUR

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

                             POUR LE DÉFENDEUR

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