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Date : 20000921


Dossier : IMM-134-00

Ottawa (Ontario), le mardi 21 septembre 2000

EN PRÉSENCE de Monsieur le juge McKeown


ENTRE :


DUSANKA GRBIC


demanderesse


- et -


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION


défendeur



     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                 « W.P. McKeown »
                                 ________________
                                     JUGE

Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.





Date : 20000921


Dossier : IMM-134-00


ENTRE :


DUSANKA GRBIC


demanderesse



- et -



LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION


défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE McKEOWN


[1]          La demanderesse demande le contrôle judiciaire de la décision de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) datée du 20 décembre 1999 qui refusait à la demanderesse le statut de réfugié au sens de la Convention.

[2]          Les deux principales questions en litige ici portent sur le fait de savoir si la Commission a violé ses obligations en matière d'équité procédurale envers la demanderesse. Tout d'abord, la Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire lorsqu'elle a laissé un de ses membres s'endormir pendant l'audience? Deuxièmement, la Commission a-t-elle commis une erreur en refusant d'entendre le témoignage du frère de la demanderesse?

[3]          La demanderesse soutient que la Commission n'a pas respecté son droit à une audience équitable en laissant un de ses membres s'endormir au cours de l'audience. La demanderesse énonce ce qui suit aux pages 2 et 3 de son affidavit :

     [TRADUCTION]
16.      L'audience commence à 8 h 30. Tout d'abord, la Commission demande à mon frère de quitter la salle. Nous cherchons ensuite des documents manquants. Après cela, M. Popatia commence à poser des questions. Après 20 minutes environ, M. Tahiri s'endort.
17.      M. Tahiri dort pour ainsi dire jusqu'à la première pause qui a lieu vers 10 heures.
18.      Après la reprise de l'audience, M. Popatia continue à me poser des questions. Au milieu de cet interrogatoire, M. Tahiri s'endort jusqu'à ce que lui et l'autre membre de la Commission quittent la salle pour rendre leur décision ou presque.

[4]          Pour ce qui est de la première et de la seconde question en litige, la demanderesse soutient que le fait qu'elle n'ait pas bénéficié des conseils d'un avocat a compromis l'exercice de son droit à un procès équitable. La Commission a toutefois indiqué au cours de l'audience à la demanderesse qu'elle avait droit à un avocat. Juste avant que la séance ne soit levée pour une pause, M. Popatia, membre de la Commission, a noté à la page 19 de la transcription :

     [TRADUCTION]

... Je tenais simplement à vous rappeler que vous avez le droit aux conseils d'un avocat pour cette audience. Vous avez le droit d'être représenté par un avocat dans cette instance. Comprenez-vous bien que vous avez ce droit?
LA REVENDICATRICE      Oui
POPATIA      Très bien. Malgré cela, vous avez l'intention de continuer seule?
LA REVENDICATRICE      Oui

[5]          Pour ce qui est de la première question en litige, M. Tahiri est peu intervenu au cours de l'audience, mais cela n'est pas inhabituel. À l'exception d'un passage de trente pages, la transcription indique qu'il a participé à l'audience. Il n'est pas inhabituel qu'un des membres de la formation se charge de poser la plupart des questions, ce qui ne veut pas dire que l'autre membre de la formation dorme.

[6]          En outre, au lieu de soulever cet aspect avec les membres de la Commission à la fin de l'audience, la demanderesse a félicité le tribunal de l'attention accordée à sa cause et du soin mis à la préparer. Elle déclare à la page 51 de la transcription :

     [TRADUCTION]

[...] toutes les personnes présentes dans la salle voulaient m'aider à bien répondre aux questions et tout le monde s'était bien préparé en lisant tous les documents et en examinant les problèmes soulevés.

[7]          Comme l'a déclaré le juge Heald dans Lopez c. Canada (M.C.I.), [1997] A.C.F. no 979 (1re inst.), au paragraphe 11, « [...] je trouve révélateur le fait que l'avocat des requérants n'a pas formulé d'objection en temps utile relativement à cette situation » .

[8]          Je note également que le juge Pratte a déclaré dans Caplan c. Canada (D.R.H.), [1997] A.C.F. no 1371 (C.A.) au paragraphe 4 ce qui suit :

La seconde attaque de la requérante mériterait un examen sérieux si la preuve établissait que l'un des membres de la Commission s'était, en fait, endormi au cours de l'audition. Toutefois, la seule preuve à cet égard est l'affidavit de la requérante selon laquelle un membre de la Commission « semblait » , selon elle, endormi. Cela ne suffit pas. Un membre d'un tribunal ou un juge qui est bien éveillé, peut sembler pour certains endormi.

[9]          À mon avis, la transcription révèle que le commissaire a effectivement participé à une bonne partie de l'audience. Les commentaires qu'a formulés la demanderesse à l'audience sont manifestement incompatibles avec l'idée qu'un des commissaires se serait endormi. J'estime que la Commission n'a commis aucune erreur sur ce point.

[10]          Pour ce qui est de la seconde question en litige, à la page 45 de la transcription, la demanderesse a informé le tribunal que son frère allait témoigner au sujet « de la situation de notre famille et de la lutte pour la démocratie » .

[11]          La Commission a donné à la demanderesse l'occasion de préciser les autres sujets sur lesquels son frère pouvait témoigner. Pour plus de clarté, je vais reprendre ici la discussion qui porte sur ce point, et qui se trouve aux pages 50 et 51 de la transcription :

POPATIA      ...
Madame, mon collègue et moi-même avons parlé des témoignages entendus jusqu'ici et vous avez indiqué à deux reprises comment allait témoigner le témoin prévu, et sur quels sujets, qui concernent le profil de votre famille, son propre profil et votre adhésion au parti.
Le tribunal a examiné cette partie de votre témoignage et nous retenons vos déclarations au sujet du profil de votre famille. Nous acceptons ce que vous avez déclaré au sujet du fait que vous avez été membre du parti jusqu'à votre départ de la Yougoslavie et de la façon dont vous et lui avez participé à ces activités, comme vous l'avez indiqué aujourd'hui dans votre témoignage.
Très bien. Y a-t-il d'autres sujets sur lesquels le témoin pourrait apporter un témoignage?
LA REVENDICATRICE      Honnêtement, honnêtement, non. Juste sur mon séjour ici et...
POPATIA      Très bien. Et vous avez témoigné sur ce point. Le tribunal ne souhaite pas entendre à nouveau les mêmes déclarations.
LA REVENDICATRICE      Absolument.
POPATIA      Très bien.
LA REVENDICATRICE      Je partage votre avis.

[12]          La demanderesse soutient que la conclusion à laquelle la Commission est arrivée au sujet de son appartenance au Parti démocratique est contraire aux déclarations du tribunal. À la page 60 de la transcription, la Commission déclare :

Nous trouvons que votre appartenance au Parti démocratique et votre profil en tant que membre de ce parti n'est pas aussi fondamental pour vous qu'il puisse nous mener à conclure que vous pouviez poser des gestions qui vous exposeraient à un préjudice grave, et par cela j'entends un préjudice répétitif et persistent [sic].

[13]          Je ne vois rien de contradictoire dans cette conclusion. En outre, le frère de la demanderesse a déclaré dans son propre affidavit qu'il n'avait pas de lien avec le Parti démocratique. De plus, je note que le frère de la demanderesse est arrivé au Canada en 1994, alors que la demanderesse n'est arrivée qu'en 1996. Par conséquent, il n'était pas en mesure de présenter un témoignage direct sur la période pertinente.

[14]          Compte tenu de ce qui précède, j'estime que la Commission n'a pas commis d'erreur en excluant le témoignage du frère de la demanderesse. Il n'est pas contraire à la justice naturelle d'exclure un témoin qui n'est pas en mesure de déposer sur des aspects pertinents de la question soumise à la Commission. En outre, aucun élément de l'affidavit du frère de la demanderesse n'indique qu'il aurait pu apporter au sujet des membres et du profil du Parti démocratique des éléments dont ne disposait pas déjà la Commission.

[15]          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                 « W. P. McKeown »
                             _________________________
                                     JUGE

Ottawa (Ontario)

Le 21 septembre 2000


Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



No DE GREFFE :              IMM-134-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :      DUSANKA GRBIC c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          le vendredi 8 septembre 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

PRONONCÉS PAR              LE JUGE McKEOWN
EN DATE DU              21 septembre 2000

ONT COMPARU :

M. Max Chaudhary                  POUR LA DEMANDERESSE
Toby Hoffmann                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Max Chaudhary                  POUR LA DEMANDERESSE
Morris Rosenberg                  POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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