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Date : 20041206

Dossiers : T-66-86A et T-66-86B

Référence : 2004 CF 1705

Ottawa (Ontario), le 6 décembre 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JAMES RUSSELL

ENTRE :

                                                BANDE INDIENNE DE SAWRIDGE

                                                                                                                                        défenderesse

                                                                             et

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                       demanderesse

                                                                             et

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA (ALBERTA)

NON-STATUS INDIAN ASSOCIATION OF ALBERTA

ASSOCIATION DES FEMMES AUTOCHTONES DU CANADA

                                                                                                                                          intervenants

                                                                             et

                                                 PREMIÈRE NATION TSUU T'INA

                                                                                                                                        défenderesse

                                                                             et

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                       demanderesse

                                                                             et

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA (ALBERTA)

NON-STATUS INDIAN ASSOCIATION OF ALBERTA

ASSOCIATION DES FEMMES AUTOCHTONES DU CANADA

                                                                                                                                          intervenants


                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE RÔLE DES INTERVENANTS

La requête

[1]                La deuxième requête dont j'ai été saisi à Edmonton, les 18 et 19 novembre 2004, a été déposée par les intervenants qui demandaient à la Cour de préciser jusqu'à quel point ils pourraient interroger les témoins des autres parties et participer au procès.


[2]                Il s'agit d'une importante source de friction entre les intervenants et les demanderesses. Les intervenants estiment que leurs statut et rôle dans la présente affaire ont déjà été en grande partie décidés dans les diverses ordonnances que la Cour a rendues et qu'il ne reste à trancher que la question de la latitude qui doit leur être accordée pour ce qui concerne l'interrogatoire des témoins pendant le procès. Par contre, les demanderesses sont d'avis qu'il appartient au juge du procès de prendre une décision globale sur le statut et le rôle des intervenants. En fait, les demanderesses vont jusqu'à prétendre que la Cour d'appel fédérale a demandé que le juge du procès examine la question de la participation des intervenants au procès et qu'il prenne une décision à cet égard et que, ce faisant, la Cour a [traduction] « avalisé une approche qui atténuerait le rôle des intervenants [...] » . Comme d'habitude dans ce type de poursuite, les positions des parties sont diamétralement opposées et aucune d'elles ne semble disposée à en arriver à une quelconque entente. Dans le cadre de leurs points de vue respectifs, les intervenants voudraient participer activement au procès en aidant la Cour au sujet de toutes les questions qui ont été soulevées dans les plaidoiries; les demanderesses, elles, sont d'avis que les intervenants devraient jouer un rôle très limité et elles affirment qu'il serait préférable que ces derniers n'aient pas le droit de contre-interroger les témoins. Les demanderesses ont dit très clairement que les intervenants étaient mal intentionnés et qu'ils tentaient délibérément d'induire la Cour en erreur et d'empêcher les demanderesses de faire valoir leurs droits et demandes légitimes. Les demanderesses demandent maintenant à la Cour d'intervenir et de protéger leurs droits en tant que parties, en écartant les intervenants.

[3]                Toutefois, les deux parties s'entendent sur un point. Dans une ordonnance rendue le 26 mai 2000, le juge Hugessen a accordé qualité d'intervenante à l'Association des femmes autochtones du Canada. Cette décision a été rendue bien après que le juge McNair eut permis aux trois autres intervenants d'entrer en lice, dans une ordonnance rendue le 14 septembre 1989. Malgré cela, les parties conviennent que tous les intervenants doivent bénéficier du même statut et jouer le même rôle, de sorte que toute ordonnance rendue par la Cour relativement à la présente requête devrait s'appliquer également aux quatre intervenants. J'accepte et j'approuve l'approche consensuelle proposée qui me remplit d'aise puisqu'il y a déjà pas moins de quatre mois que je participe à la présente action.


Le contexte

[4]                Quand le juge Hugessen a établi le guide qui devait aider les parties à se rendre à procès dans l'ordonnance préalable au procès du 26 mars 2004, il avait ceci à dire au sujet de la participation des intervenants au procès :

[traduction]

14. La participation des intervenants au procès a fait l'objet d'ordonnances rendues par le juge McNair, le 14 septembre 1989 et par le juge Hugessen, le 26 mai 2000.

[5]                Pour revenir à l'ordonnance du 14 septembre 1989 du juge McNair, les paragraphes suivants semblent viser la situation :

[traduction]

3. Que les demandeurs, le Conseil national des autochtones du Canada, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta) et la Non-Status Indian Association of Alberta soient ajoutés à titre d'intervenants dans la présente action avec le droit de présenter une preuve à l'appui de leurs positions respectives au sujet de questions relatives au statut de membre de la bande et au droit à ce statut;

4. Que les intervenants puissent être représentés par des avocats et qu'ils puissent :

a)              présenter des éléments de preuve au procès;

b)              assigner des témoins-experts au procès en conformité avec les Règles de la Cour fédérale;

c)              présenter des observations écrites ou orales au procès.

5. Que le droit des intervenants de contre-interroger les témoins des autres parties pendant le procès soit décidé par le juge du procès.

[6]                Les demanderesses ont interjeté appel de l'ordonnance du juge McNair, mais en fin de compte, l'appel a été rejeté pour défaut de poursuite.


[7]                Au fur et à mesure que l'instance progressait péniblement vers le premier procès, la tenue du procès, l'appel, la gestion de l'instance et le deuxième procès, le rôle des intervenants a été soulevé et examiné à plusieurs reprises.

[8]                Lors d'une conférence préalable au procès dirigée par le juge Allen en février 1993, en prévision du premier procès, les délais de présentation des déclarations d'intervention et des rapports d'experts officiels ont été fixés.

[9]                Lors d'une autre conférence préalable au procès dirigée par le juge Muldoon en juillet 1993, les intervenants ont obtenu le droit d'être avisés de toute la procédure interlocutoire. Le juge Muldoon a également entendu une requête déposée par le CNAC(A) concernant l'interrogatoire préalable de M. Walter Patrick Twinn, l'un des demandeurs à l'époque. Le juge Muldoon a accordé l'autorisation relativement à l'interrogatoire préalable qui aurait eu lieu en conformité avec l'ordonnance du 14 septembre 1989 rendue par le juge McNair.

[10]            Plus important, au début du premier procès, le 23 septembre 1993, les demanderesses ont présenté une requête dans laquelle elles contestaient le statut des intervenants et demandaient subsidiairement que soit précisé le rôle que devraient jouer ces derniers pendant le premier procès. Dans cette requête, les demanderesses ont présenté quelques-uns des arguments qu'elles ont présentés devant moi. Le juge Muldoon a rejeté la requête.


[11]            Le juge Muldoon a décidé que l'ordonnance rendue par le juge McNair fixait le rôle des intervenants; cependant, l'ordonnance confiait l'importante question des contre-interrogatoires pendant le procès au juge du procès. Le juge Muldoon a accordé aux intervenants un droit limité de contre-interroger les témoins des autres parties.

[12]            Il convient également de souligner que pendant le premier procès, les intervenants ont participé aux requêtes, ils ont présenté leurs observations préliminaires et conclusions finales tant oralement que par écrit et assigné des témoins, notamment experts.

[13]            Quand l'affaire a été portée en appel, les trois intervenants qui avaient participé au premier procès (CNAC, CNAC(A) et NSIAA) ont présenté une requête et ils ont obtenu qualité d'intervenants relativement à l'appel. Dans une ordonnance datée du 7 mai 1996, le juge en chef Isaac a accordé aux intervenants le droit de présenter un mémoire conjoint et des plaidoiries si celles-ci se distinguaient des observations présentées par les appelants ou les intimés.

[14]            Par la suite, il y a eu également d'autres appels au cours desquels les intervenants ont présenté leurs propres mémoires et observations.

[15]            Pendant la gestion de l'instance qui menait au deuxième procès, les demanderesses ont tenté, à plusieurs reprises, d'exclure les intervenants ou de les empêcher d'agir le plus possible. Pendant la première réunion de gestion de l'instance tenue par le juge Hugessen, le 23 septembre 1998, les demanderesses ont tenté de limiter le rôle des intervenants; toutefois, le juge chargé de la gestion de l'instance les en a empêchées en disant que ce type de contestation devait être présenté par requête. Toutefois, les intervenants ont continué de participer au processus de gestion de l'instance pendant près de deux ans avant que les demanderesses ne présentent une requête en vue de les écarter ou de limiter leur rôle. C'est également à ce moment-là que l'Association des femmes autochtones du Canada a présenté une requête incidente en vue d'obtenir, elle aussi, qualité d'intervenante.

[16]            Dans l'ordonnance du 26 mai 2000, le juge Hugessen a rejeté la requête des demanderesses contestant le rôle des intervenants et il a reconnu qualité d'intervenante à l'AFAC.

[17]            En examinant les deux requêtes dans ses motifs du 26 mai 2000, le juge Hugessen a dit plusieurs choses qui, selon moi, sont extrêmement pertinentes pour ce qui concerne la présente requête :

[...]


5. Cela m'amène à parler des requêtes. En ce qui concerne en premier lieu la requête par laquelle les demandeurs demandent à ce qu'il soit mis fin aux droits des intervenants ou à ce que ces droits soient limités, sans vouloir trop simplifier la question, je crois qu'il convient de considérer qu'au moyen de cette requête, on me demande d'une certaine façon d'infirmer l'ordonnance rendue par Monsieur le juge McNair. À mon avis, il n'est pas approprié de le faire. Cette ordonnance, qui a en fait été confirmée par la Cour d'appel, s'applique. Il y a chose jugée. À mon avis, il est de droit constant que certains types d'ordonnances procédurales interlocutoires sont susceptibles de révision, mais je ne crois pas que l'ordonnance de Monsieur le juge McNair soit une ordonnance de ce genre. Il ne s'agit pas d'une ordonnance de nature purement procédurale. De fait, il me semble qu'il s'agit d'une ordonnance qui confère la qualité pour agir aux intervenants et, partant, elle a un effet beaucoup plus étendu qu'une simple ordonnance procédurale.

6. Je ne doute aucunement que si les règles 299 et 385 étaient considérées ensemble, je serais dans certaines circonstances autorisé, en ma qualité de juge responsable de la gestion de l'instance, à modifier l'ordonnance de Monsieur le juge McNair. Cependant, je ne crois pas que pareilles circonstances existent en l'espèce. En particulier, je ne crois pas que la situation factuelle ait vraiment changé au point de me permettre d'intervenir, en ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire qui a alors été exercé par ce juge. Le seul changement qui se serait produit, selon les demandeurs, se rapporte en fait à la modification de la déclaration. Cependant, cette modification, tout en étendant le fondement que les demandeurs invoquent pour solliciter la réparation demandée, ne modifie pas réellement la réparation elle-même et, en particulier, elle ne change rien aux effets que cette réparation peut raisonnablement avoir pour les groupes qui, en 1989, auraient censément et sont encore censément représentés par les intervenants. Ceci dit, je ne crois pas qu'il soit possible de réviser la décision de Monsieur le juge McNair.

7. Une bonne partie de l'argumentation des demandeurs, en ce qui concerne ces requêtes, était consacrée à une litanie de plaintes se rapportant à la conduite du premier juge et à la façon dont il a permis aux intervenants de participer à l'instruction qu'il présidait. Ces plaintes étaient incluses dans les moyens invoqués par les demandeurs devant la Cour d'appel, mais comme je l'ai dit, la décision de la Cour d'appel reposait sur un fondement fort restreint. Quoi qu'il en soit, et indépendamment de la question de savoir si les plaintes que les demandeurs cherchent à faire valoir au sujet de la conduite du premier juge sont fondées, il ne m'appartient pas de trancher ces questions. De fait, il ne conviendrait absolument pas de faire des commentaires sur la conduite d'un collègue au sujet d'une instruction qu'il a présidée. Toutefois, dans la mesure où la Cour d'appel a examiné la « conduite générale du procès » qui a lieu devant le juge, comme elle l'a dit dans ses motifs, il semble qu'elle n'ait rien à lui reprocher.

8. Je conclus donc que l'on n'a pas réussi à me convaincre de l'existence d'un motif me permettant à juste titre d'intervenir dans l'ordonnance permanente qui a déjà été rendue par Monsieur le juge McNair, et je me propose donc de rejeter les requêtes des demandeurs. J'ajouterais que, sans avoir entendu les arguments sur ce point, j'estime que les intervenants, du fait qu'ils ont déposé les déclarations modifiées et les défenses modifiées, auraient le droit, sans demander d'autorisation, de déposer des interventions modifiées s'ils le jugeaient bon. Si les avocats ne souscrivent pas à cet avis préliminaire que je viens d'exprimer, ils pourront bien sûr soulever la question et si l'un ou l'autre avocat souhaite procéder à des interrogatoires préalables additionnels, je crois qu'il s'agit également d'une question qu'ils pourront à juste titre soulever lorsqu'une conférence sur la gestion de l'instance sera tenue. L'ordonnance de Monsieur le juge McNair prévoit déjà que la conduite des intervenants à l'instruction, à la seconde instruction, comme c'était le cas pour la première instruction, sera assujettie aux ordonnances et directives du juge qui sera en temps et lieu désigné pour présider cette instruction.


[...]

10. J'examinerai maintenant le second ensemble de requêtes, soit celles qui ont été présentées par la NWAC en vue de l'obtention de l'autorisation d'intervenir.

[...]

14. Bref, l'affaire soulève des questions sérieuses se rapportant aux droits des femmes autochtones. Compte tenu de la preuve dont je dispose et malgré les savants arguments que l'avocat des demandeurs a invoqués au sujet du contre-interrogatoire de la présidente de la NWAC, je suis convaincu que la NWAC est particulièrement bien placée pour défendre les intérêts des femmes autochtones, et que ces intérêts entrent fortement en ligne de compte dans ces actions. Je crois qu'à l'instruction, la NWAC sera en mesure de faire valoir un point de vue qui aidera la Cour et qui sera différent du point de vue que les autres intervenants ont déjà fait valoir. Je ne veux aucunement dire que les autres intervenants n'ont pas honnêtement et sincèrement tenté de défendre les intérêts des femmes autochtones lors de la première instruction, mais c'est maintenant une affaire classée et la nouvelle instruction marquera un nouveau départ. Toutefois, l'avocat des demandeurs a selon moi tout simplement tort d'affirmer comme il le fait que les intérêts des femmes autochtones, qui sont différents et que le projet de loi C-31 touche, à mon avis d'une façon particulière, peuvent tout aussi bien être défendus par des hommes et par des femmes. La NWAC est une organisation dont l'objectif est de défendre les intérêts des femmes autochtones et je crois qu'à l'instruction, cette organisation pourra faire une contribution utile.

15. Par conséquent, la NWAC aura l'autorisation d'intervenir et elle pourra déposer une intervention d'ici le 30 juin 2000; le droit de procéder à des interrogatoires préalables et de faire l'objet d'interrogatoires préalables sera déterminé et pourra être invoqué lorsqu'une conférence sur la gestion de l'instance sera tenue, comme pourront l'être les autres questions préliminaires concernant la participation de la NWAC. Dans la mesure où ses droits, à l'instruction, ainsi que le droit de participer à l'instruction, d'assigner des témoins et de procéder à des contre-interrogatoires n'auront pas déjà été déterminés par une ordonnance du juge responsable de la gestion de l'instance, ils seront assujettis aux directives et au contrôle du juge qui sera chargé de présider l'instruction.

[...]

17. J'ai entendu les avocats des intervenants existants et des demandeurs, et j'estime qu'il s'agit d'une affaire dans laquelle il devrait être ordonné aux demandeurs de payer immédiatement les dépens, et ce, quelle que soit l'issue de la cause. Ce n'est pas la première fois que les demandeurs ont cherché en vain à se débarrasser de ces intervenants. À mon avis, les requêtes n'ont pas été présentées d'une façon appropriée, elles n'auraient pas dû être présentées, l'ordonnance rendue par Monsieur le juge McNair s'appliquait et s'applique encore, et j'ai fourni les motifs pour lesquels les requêtes devraient être rejetées. Par conséquent, les dépens des premières requêtes présentées par les demandeurs contre les anciens intervenants seront payables immédiatement quelle que soit l'issue de la cause, les dépens à taxer comprenant les frais de déplacement raisonnables que les avocats ont engagés en vue d'assister à la présente audience.


[18]            Les demanderesses ont ensuite interjeté appel de l'ordonnance du 26 mai 2000 du juge Hugessen. Cet appel a été rejeté dans des motifs exposés oralement le 7 novembre 2001. Les paragraphes suivants sont importants pour ce qui concerne la présente requête :

[...]

2. L'ordonnance ayant initialement accordé leur statut aux intervenants au procès a été rendue par le juge McNair le 14 septembre 1989, qui a donné à ces intervenants le droit de produire des éléments de preuve et de présenter des arguments sur les questions relatives au statut de membre de la bande et au droit à ce statut. Cette ordonnance a fait l'objet d'un appel auprès de notre Cour mais il n'a pas été donné suite à cet appel pendant sept ans, après quoi celui-ci a été rejeté sans audience pour défaut de poursuite.

3. Les ordonnances de gestion de l'instance frappées d'appel sont contestées au motif que le juge Hugessen n'aurait pas convenablement limité la portée de l'intervention, comme l'exige la règle 109(3) des Règles de la Cour fédérale (1998), permettant ainsi une intervention inéquitable et large ne faisant l'objet d'aucune directive. Les appelants ont soutenu qu'il ne devait y avoir aucun intervenant ou, subsidiairement, qu'il ne devait y en avoir qu'un seul, dont la participation se limiterait au dépôt d'observations écrites.

4. À notre avis, le juge chargé de la gestion de l'instance n'a pas commis d'erreur en refusant de modifier l'ordonnance par laquelle le juge McNair a accordé leur statut aux intervenants au procès. Nous sommes d'accord avec sa conclusion selon laquelle cette question a force de chose jugée; à savoir, la même question a déjà été tranchée, l'ordonnance du juge McNair a été portée en appel et les parties sont les mêmes (voir Diamond c. The Western Realty Co., [1924] R.C.S. 308, à la page 315; Angle c. Canada (Ministre du Revenu national), [1975] 2 R.C.S. 248, à la page 254). Nous convenons également que les appelants n'ont présenté aucun fait nouveau de nature à permettre que l'ordonnance du juge McNair soit annulée ou modifiée de manière à ce que sa portée soit limitée en application de la règle 399.

5. Nous estimons qu'il est loisible aux appelants de se fonder sur la règle 385 pour demander au juge chargé de la gestion de l'instance de restreindre les déclarations d'intervention des intervenants au procès de façon à garantir que le procès lui-même n'est pas alourdi par des questions ou des causes d'actions de nature individuelle qui sont accessoires aux questions principales.

6. Quant à l'ordonnance par laquelle le juge chargé de la gestion de l'instance a accordé le statut d'intervenante à l'AFAC, nous ne pouvons trouver aucune erreur susceptible de contrôle ni conclure qu'il a mal exercé son pouvoir discrétionnaire. Le juge Hugessen a conclu que bien qu'il soit vrai que l'AFAC cherche à intervenir pour appuyer la position de la Couronne selon laquelle le projet de loi C-31 [est] constitutionnel, les arguments de l'AFAC offriront un point de vue utile et différent de celui de la Couronne et des intervenants au procès.


[19]            Il est clair que la Cour d'appel fédérale comprenait très bien que les demanderesses ne veuillent pas que les intervenants viennent alourdir le procès en soulevant des questions de nature individuelle qui seraient accessoires aux questions principales. Toutefois, la Cour n'a jamais dit que les intervenants s'étaient adonnés ou s'adonnaient à ce type d'exercice, mais elle a souligné que si cette possibilité préoccupait les demanderesses, elles pouvaient demander au juge chargé de la gestion de l'instance de restreindre les déclarations d'intervention en se fondant sur l'article 385 des Règles.

[20]            Soulignons que les demanderesses n'ont jamais demandé, par requête, que les déclarations d'intervention soient restreintes comme l'avait suggéré la Cour d'appel fédérale. Compte tenu de la position qu'elles adoptent aujourd'hui devant la Cour, le fait qu'elles n'aient pas suivi les conseils de la Cour d'appel fédérale ne leur est pas favorable.

[21]            C'est dans ce contexte que le juge Hugessen a rendu l'ordonnance préalable à l'instance le 26 mars 2004 dans laquelle il disait que [traduction] « la participation des intervenants au procès a fait l'objet des ordonnances rendues par le juge McNair, le 14 septembre 1989 et par le juge Hugessen, le 26 mai 2000 » .

[22]            C'est également dans ce contexte que, suivant une conférence relative à la gestion de l'instance du 27 octobre 2004, j'ai donné une directive le 28 octobre 2004 concernant plusieurs questions, notamment :

[traduction]

Puisque la participation des intervenants au procès a déjà été établie en quelque sorte dans les ordonnances rendues par le juge McNair le 14 septembre 1989 et par le juge Hugessen le 26 mai 2000 et le 26 mars 2004, les intervenants devraient, par requête, demander à la Cour de trancher toute question découlant de leur participation au procès qui n'a pas encore été tranchée dans les ordonnances antérieures ou qui a été confiée au juge du procès y compris le droit de contre-interroger les témoins des autres parties pendant le procès.

L'analyse

Le statut actuel des intervenants

[23]            À mon avis, dans son jugement rendu oralement le 7 novembre 2001, la Cour d'appel a très clairement dit :

1.          le juge Hugessen n'a pas commis d'erreur quand il a refusé de modifier l'ordonnance du juge McNair reconnaissant aux parties la qualité d'intervenants;

2.          la qualité d'intervenants a force de chose jugée et l'ordonnance du juge McNair est définitive;


3.          les demanderesses n'ont présenté aucun nouveau fait permettant d'annuler ou de modifier l'ordonnance du juge McNair de manière à en limiter la portée en conformité avec l'article 399 des Règles.

[24]            La présente requête afin de préciser le rôle des intervenants au procès a été présentée par les intervenants, conformément à mes directives. Pendant la conférence de gestion de l'instance qui a eu lieu avant les directives, les demanderesses ont beaucoup insisté sur le fait qu'il appartenait aux intervenants de présenter une telle requête. J'étais d'accord. La question n'a pas été soulevée à ce moment-là mais je comprends maintenant pourquoi l'avocat des demanderesses a tellement insisté pour que ce soit les intervenants qui présentent la requête. Il a déjà reçu un avertissement concernant les contestations répétées du rôle et du statut des intervenants et il est au courant des conséquences possibles. Voici ce qu'a dit à ce sujet le juge Hugessen au paragraphe 17 de l'ordonnance du 26 mai 2000 :

J'ai entendu les avocats des intervenants existants et des demandeurs, et j'estime qu'il s'agit d'une affaire dans laquelle il devrait être ordonné aux demandeurs de payer immédiatement les dépens, et ce, quelle que soit l'issue de la cause. Ce n'est pas la première fois que les demandeurs ont cherché en vain à se débarrasser de ces intervenants. À mon avis, les requêtes n'ont pas été présentées d'une façon appropriée, elles n'auraient pas dû être présentées, l'ordonnance rendue par Monsieur le juge McNair s'appliquait et s'applique encore, et j'ai fourni les motifs pour lesquels les requêtes devraient être rejetées. Par conséquent, les dépens des premières requêtes présentées par les demandeurs contre les anciens intervenants seront payables immédiatement quelle que soit l'issue de la cause, les dépens à taxer comprenant les frais de déplacement raisonnables que les avocats ont engagés en vue d'assister à la présente audience.


[25]            La présente requête ne vise pas une modification de l'ordonnance du 14 septembre 1989 du juge McNair. Aucun fait nouveau ne m'a été présenté dans la requête relative à l'article 399 des Règles par les demanderesses ou par une autre personne demandant une modification de l'ordonnance. Le statut des intervenants a toujours force de chose jugée. Tout ce qu'il reste à trancher, c'est l'ampleur du rôle que les intervenants devraient jouer au procès. Ce rôle a déjà été décidé en grande partie dans l'ordonnance du juge McNair, qui est une ordonnance définitive et qui n'a pas été modifiée :

[traduction]

[...]

4. Que les intervenants puissent être représentés par des avocats et qu'ils puissent :

a)              présenter des éléments de preuve au procès;

b)              assigner des témoins-experts au procès en conformité avec les Règles de la Cour fédérale;

c)              présenter des observations écrites ou orales au procès.

5. Que le droit des intervenants de contre-interroger les témoins assignés par les autres parties pendant le procès soit décidé par le juge du procès.

[...]

[26]            Ainsi, le juge Hugessen, dans ses ordonnances concernant la gestion de l'instance, de même que la Cour d'appel fédérale ont dit clairement que, comme juge du procès, je devais décider quel droit auraient les intervenants de [traduction] « contre-interroger les témoins assignés par les autres parties pendant le procès [...] » .


[27]            C'est précisément la position adoptée par les intervenants dans la présente requête. Je suis d'accord avec eux. Les intervenants ne sont pas mal intentionnés et ils ne tentent pas d'induire la Cour en erreur comme le prétendent les demanderesses. Ils suivent les directives de la Cour qui ont été avalisées par la Cour d'appel fédérale d'une manière responsable et honnête.

[28]            Les demanderesses disent que la Cour d'appel [traduction] « a abordé la question du rôle des intervenants lors du deuxième procès [et] a avalisé une approche qui restreindrait le rôle des intervenants au procès de façon à "garantir que le procès lui-même n'est pas alourdi par des questions ou des causes d'actions de nature individuelle qui sont accessoires aux questions principales" [soulignements des demanderesses] [...] [et] confirmait également que la participation des intervenants au procès devait être décidée par le juge du procès » . Ce qu'elles veulent dire, selon les explications données lors de l'audition de la présente requête, c'est que la Cour d'appel fédérale, qui voulait éviter toute intervention excessive de la part des intervenants pendant le premier procès, m'a demandé, en tant que juge du procès, d'évaluer de nouveau le rôle des intervenants et de le restreindre.

[29]            La Cour d'appel fédérale n'a rien fait de tel. Le juge Hugessen a déjà dit aux demanderesses, dans son ordonnance du 26 mars 2000, que « [t]outefois, dans la mesure où la Cour d'appel a examiné la "conduite générale du procès" qui a lieu devant le juge, comme elle l'a dit dans ses motifs, il semble qu'elle n'ait rien à lui reprocher » .

[30]            Les demanderesses soutiennent que les intervenants induisent la Cour en erreur. C'est faux.


[31]            Les observations de la Cour d'appel fédérale citées par les demanderesses à l'appui de leurs arguments sont tirées du jugement rendu oralement par la Cour le 7 novembre 2001. Ces propos sont cités hors contexte. La Cour d'appel fédérale mentionnait tout simplement que les demanderesses pouvaient, si elles le voulaient, demander au juge chargé de la gestion de l'instance de restreindre les déclarations d'intervention, conformément à l'article 385 des Règles. Les demanderesses ne l'ont pas fait. La Cour d'appel fédérale n'a rien dit qui permette de penser qu'il faille restreindre les déclarations d'intervention.


[32]            Dans le même jugement, la Cour d'appel fédérale a également dit que « [d]ans une affaire complexe faisant l'objet d'une gestion de l'instance, il est logique de laisser au juge chargé de la gestion de l'instance les questions préalables au procès et au juge du fond la participation des intervenants au procès » . La Cour n'a pas dit que, dans la présente affaire, le juge du procès devait revoir toute la question du statut des intervenants et du rôle qu'ils devraient jouer pendant le deuxième procès. La Cour a fait ces commentaires dans le cadre de son examen de la question de savoir si les ordonnances rendues par le juge Hugessen étaient conformes au paragraphe 109(3) des Règles. Les demanderesses ont dit qu'elles ne l'étaient pas. La Cour a dit le contraire et elle a ajouté : « Il est clair que le juge Hugessen connaissait les exigences de la règle 109(3) et qu'il y a réfléchi » . Le paragraphe 109(3) n'exige pas que toutes les directives soient données lorsque la demande d'intervention est accordée, comme l'ont prétendu les demanderesses. Les ordonnances du juge Hugessen étaient tout à fait correctes parce que, en un sens, elles permettaient que les questions préalables à l'instance soient gérées par le juge chargé de la gestion de l'instance et que la participation au procès soit décidée par le juge du procès. Ces remarques n'étaient ni des directives précises, ni une homologation, ni une « préoccupation exprimée » par la Cour d'appel fédérale concernant la trop grande importance du rôle des intervenants au procès en l'espèce et la nécessité de le restreindre.

[33]            Cependant, il est vrai que, dans le même jugement, la Cour d'appel fédérale a mentionné le statut des intervenants, ainsi que le rôle qu'ils devaient jouer pendant le deuxième procès. Mais elle ne l'a pas fait en la manière invoquée par les demanderesses. C'est au paragraphe 4 que la Cour a dit que le statut des intervenants avait force de chose jugée et que la question avait été tranchée par l'ordonnance du juge McNair et que « les appelants n'ont présenté aucun fait nouveau de nature à permettre que l'ordonnance du juge McNair soit annulée ou modifiée de manière à ce que sa portée soit limitée en application de la règle 399 » .


[34]            Lors de l'audition de la présente requête à Edmonton, la Cour a consacré presque deux journées complètes aux questions des demanderesses et les autres avocats ont également consacré du temps et des efforts alors que les demanderesses qui n'ont fait que soulever, de nouveau, des questions qui avaient force de chose jugée et qu'elles avaient déjà tenté de soulever. Je leur ai permis de le faire parce que l'avocat des demanderesses a très clairement dit à la Cour que les intervenants induisaient la Cour en erreur dans leur présentation et qu'ils étaient mal intentionnés. Il s'agit d'allégations très graves au sujet desquelles j'ai permis que les parties présentent leurs observations. Bien entendu, quand un officier de la justice me dit que les avocats de la partie adverse induisent la Cour en erreur et qu'ils sont mal intentionnés, je veux savoir, par le menu, ce qu'il en est et examiner toute la situation. C'est ce que j'ai fait.

[35]            J'ai dit à plusieurs reprises aux avocats des deux parties qu'ils devaient prendre les moyens nécessaires pour que la question soit portée à procès d'une manière efficace et opportune et je leur ai dit qu'ils devaient être polis et éviter de s'en prendre directement aux avocats des parties adverses. Cette fois, les avocats des demanderesses ont fait fi de ma demande. Cette situation me préoccupe beaucoup puisque non seulement elle soulève des questions d'éthique professionnelle mais elle influe également négativement sur l'administration de la justice dans le présent conflit. Le litige n'a pas progressé et la Cour a consacré une partie du temps qui lui est précieux à régler des questions qui, après examen, se sont clairement avérées avoir force de chose jugée. Parce que les avocats des demanderesses ont insisté sur le fait que les intervenants induisaient la Cour en erreur et qu'ils étaient mal intentionnés, la Cour a été amenée, à tort, à entendre des observations sur des questions qui avaient déjà fait l'objet d'arguments qu'elle avait entendus à satiété et sur lesquelles la Cour, ainsi que la Cour d'appel fédérale s'étaient déjà prononcées. Il s'agit d'une question grave pour ce qui concerne la Cour.


[36]            Le juge Muldoon et le juge Hugessen ont tous deux déjà manifesté leur mécontentement au sujet du comportement des avocats dans la présente affaire. Les propos du juge Muldoon, quand il a examiné la contestation du statut des intervenants présentée par les demanderesses au début du premier procès, m'ont beaucoup frappé :

[traduction]

D'emblée, la présente requête est rejetée. Je dis que la requête constitue un usage quasi abusif du temps de la Cour. Et je le dis parce que l'ordonnance du juge McNair ne pourrait pas être plus claire.

[37]            Bien entendu, la présente requête n'a pas été présentée par les demanderesses. Il s'agit d'une requête présentée par les intervenants qui souhaitent préciser le rôle qu'ils pourront jouer pendant le procès, en conformité avec les ordonnances déjà rendues par la Cour et que les demanderesses ont tenté d'utiliser comme moyen d'examiner de nouveau l'ensemble de la position des intervenants, comme elles ont déjà tenté de le faire sans succès par le passé.

[38]            En outre, je ne suis pas d'accord avec la position du juge Muldoon à plusieurs égards. Pour ce qui touche la requête dont je suis saisie, non seulement l'ordonnance du juge McNair est [traduction] « ne pourrait pas être plus claire » , mais celle que la Cour d'appel fédérale a rendue le 7 novembre 2001 l'est tout autant puisqu'il y est dit que le statut des intervenants a force de chose jugée et que l'ordonnance du juge McNair est définitive.

[39]            En outre, on ne saurait dire que les arguments invoqués par l'avocat des demanderesses en l'espèce constituent [traduction] « un usage quasi abusif du temps de la Cour » ; il s'agit d'un usage réellement abusif du temps de la Cour.

[40]            L'avocat des demanderesses a beaucoup insisté sur la requête présentée au juge Muldoon lors du premier procès et il me demande de ne pas commettre la même erreur que le juge Muldoon en accordant trop de latitude aux intervenants. Quand j'examine le dossier, je suis de nouveau frappé par les termes très clairs du juge Muldoon :

[traduction] Je vais rejeter la présente requête. Les dépens seront décidés à la fin du procès. Et il faudra préparer votre plaidoirie parce que j'ai l'intention d'examiner la question de savoir si les dépens devraient être payés personnellement par l'avocat inscrit au dossier dans la présente requête qui est abusive, qui est absolument contraire à l'ordonnance du juge McNair, absolument contraire - la manière dont les parties se sont comportées, la manière dont elles pensent que devraient procéder les intervenants - absolument contraire. Et là se présente un avocat de dernière minute qui dit : il faut effacer tout cela. Vous savez, trop tard.

Maintenant, cela étant dit, ce qu'il faut faire, c'est aller à procès.

[41]            Encore une fois, la situation en l'espèce est bien différente de celle qu'a affrontée le juge Muldoon quand on lui a demandé de rejeter l'ordonnance du juge McNair, mais cela ne favorise pas les demanderesses. L'avocat n'est pas un [traduction] « avocat de dernière minute » . J'ai devant moi un avocat qui connaît très bien l'historique du conflit; qui sait ce qui a été dit et ordonné en rapport avec les intervenants par les juges de la Cour et de la Cour d'appel fédérale et qui a lui-même présenté la requête visant à limiter le rôle des intervenants devant le juge Muldoon.

[42]            En outre, je ne crois pas qu'il s'agisse d'une situation dans laquelle les dépens devraient être déterminés à la fin du procès. Les dépens devraient être examinés et ordonnés payables immédiatement quelle que soit l'issue de la cause.


Le rôle des intervenants au procès

[43]            Les intervenants soutiennent que leur droit de participer au procès a, dans une certaine mesure, déjà été défini dans l'ordonnance du juge McNair. Je suis d'accord.

[44]            Quand le juge McNair a permis que le CNAC, le CNAC(A) et le NSIA aient qualité d'intervenants dans l'ordonnance du 14 septembre 1989, il leur a donné [traduction] « le droit de présenter une preuve à l'appui de leurs positions respectives au sujet de questions relatives au statut de membre de la bande et au droit à ce statut [...] » .

[45]            Il leur a également donné le droit de :

1.          présenter des éléments de preuve au procès;

2.          assigner des témoins-experts au procès en conformité avec les Règles de la Cour fédérale;

3.          présenter des observations écrites ou orales au procès.

[46]            Il a laissé au juge du procès la décision concernant [traduction] « le droit des intervenants de contre-interroger les témoins des autres parties pendant le procès [...] » .

[47]            Avant d'aborder le contre-interrogatoire, il faut, selon moi, clarifier certaines questions :


1.          quelle restriction (le cas échéant) le paragraphe 3 de l'ordonnance du juge McNair impose-t-il aux droits des intervenants de présenter des éléments de preuve à l'appui de leurs positions respectives « [traduction] au sujet de questions relatives au statut de membre de la bande et au droit à ce statut? » .

2.          quel droit ont les intervenants de participer aux requêtes et aux questions interlocutoires pendant le procès?

3.          quel droit ont les intervenants de présenter leurs propres observations préalables?

[48]            Les demanderesses prétendent que la [traduction] « seule question que les intervenants ont peut-être le droit de poser » est de savoir [traduction] « si le défendeur a satisfait au critère de justification établi par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sparrow » . Elles ont également dit, sur cette question, dans des observations écrites :

[traduction]

[...]


64. Quatrièmement, les questions concernant le statut de membre de la bande et le droit d'en faire partie ne sont pas visées en l'espèce. Comme l'a dit la Cour d'appel, il s'agit, dans le meilleur des cas, de questions qui sont « accessoires » aux questions principales. En d'autres termes, il s'agit de questions qui, selon la Cour d'appel, mais aussi en rétrospective, ne devraient pas se poser au procès. Les principales questions en l'espèce sont celles qui ont été soulevées dans la présente action, savoir : ((i) les droits des demandeurs en vertu de l'article 35 ont-ils été confirmés; (ii) le cas échéant, ces droits ont-ils été violés par le projet de loi C-31; (iii) sinon, les droits sont-ils éteints; (iv) sinon, la Couronne est-elle en mesure de satisfaire au critère de justification établi par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sparrow). Les intervenants ont obtenu le droit de soulever la question des raisons pour lesquelles le projet de loi C-31 a été adopté, mais non celui d'intervenir dans ces questions principales. Autrement dit, de se prononcer sur la raison pour laquelle la Loi sur les Indiens était discriminatoire pour certaines personnes et pourquoi cette discrimination était contraire à l'article 15 de la Charte. Cela n'a rien à voir avec les droits ancestraux ou issus de traités visés à l'article 35.

[...]

73. Premièrement, les intervenants n'ont pas obtenu le droit de soulever les droits ancestraux ou issus de traités. Le juge McNair ne leur a pas permis de soulever ces questions. Il a limité leur intervention aux questions concernant le statut de membre de la bande. Par conséquent, les intervenants n'avaient pas le droit de présenter leur opinion concernant les droits ancestraux ou issus de traités. Et c'est très bien ainsi. Les demanderesses n'avaient pas non plus prévu qu'ils le feraient surtout parce qu'ils avaient indiqué à la Cour qu'ils n'avaient pas du tout l'intention de présenter une preuve de tradition orale.

[...]

80. Les demanderesses veulent également préciser que ce que les intervenants ont à dire concernant l'adoption du projet de loi C-31 ne les intéresse pas. Elles reconnaissent qu'il y aura une plaidoirie complète au sujet de l'application de l'article 15. Ce qui les préoccupe c'est la répétition, les coûts et un processus judiciaire inutilement contradictoire et qui ne sera pas axé sur les questions soulevées dans le litige. Par exemple, pourquoi est-ce que la Cour doit entendre les observations des quatre avocats des intervenants sur des questions qui n'ont rien à voir avec ces derniers (c.-à-d. les droits ancestraux et issus de traités des demanderesses; leur tradition orale; les exposés des faits sur lesquels les parties se sont entendues; comment les parties régleront la question des pièces versées au dossier; la question de savoir si les droits ancestraux ou issus de traités ont été violés; si ces droits sont éteints; le choix d'un interprète; si la preuve de tradition orale constitue une preuve d'expert; pourquoi les experts de la Couronne devraient avoir le droit de donner une preuve d'expert sur la fiabilité d'une preuve de tradition orale; ce que les parties acceptent de verser au dossier des pièces; les nombreuses questions interlocutoires qui seront soulevées dans un long procès entre les parties). Pourquoi l'avocat d'un intervenant doit-il contre-interroger un aîné concernant l'histoire orale alors que l'intervenant n'a pas qualité sur cette question et alors que la Couronne procédera à un contre-interrogatoire? Pourquoi devraient-ils avoir la permission de contre-interroger les représentants des premières nations Tsuu T'ina et Sawridge concernant leur situation financière alors qu'ils n'ont pas obtenu qualité relativement à cette question et que, quoi qu'il en soit, la question n'est pas pertinente? Si la Couronne estime que c'est pertinent elle peut contre-interroger les témoins. Ce que j'essaie de dire, c'est que cette question n'a rien à voir avec la discrimination sexuelle au sens du droit qui, selon eux, se serait produite en vertu de l'alinéa 12(1)b). Cela n'a rien à voir avec le droit d'une personne de demander de faire partie de la bande qui est reconnu par la loi.

[49]            Les intervenants sont d'avis que les [traduction] « questions relatives au statut de membre de la bande et au droit à ce statut » mentionnées dans l'ordonnance du juge McNair, ne sont pas réellement restrictives parce qu'il s'agit de l'objet même du procès.


[50]            Lors de l'audition de la présente requête à Edmonton, l'avocat des demanderesses a soutenu avec vigueur que les intervenants ne s'intéressaient qu'à l'article 15 de la Charte et que, parce que la Couronne pouvait, elle aussi, soulever les questions d'égalité que l'affaire soulève, il n'était pas nécessaire que les intervenants participent activement au procès. J'estime que les demanderesses me demandent tout simplement de mettre de côté les décisions antérieures de la Cour qui confirment que les intervenants ont réellement un rôle utile à jouer, rôle qui n'est pas celui de la Couronne. Qui plus est, je ne crois pas qu'on puisse isoler les aspects du litige qui sont en rapport avec l'article 15 comme le prétendent les demanderesses. À cet égard, l'avocat de l'ACFA a attiré mon attention sur les propos suivants de la juge L'Heureux-Dubé dans Corbière c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien), [1999] 2 R.C.S. 203, aux paragraphes 54 et 67, pour insister sur l'importance d'une approche contextuelle à l'égard de l'article 15 :

54. Toutefois, je dois souligner, et c'est une question dont je vais traiter plus loin, que l'approche contextuelle applicable à l'égard de l'article 15 commande que l'analyse du caractère égalitaire des dispositions se rapportant aux Autochtones prenne en compte et respecte le patrimoine et la spécificité autochtones, ainsi que la reconnaissance des droits ancestraux et issus de traités, et mette l'accent sur l'importance qu'ont pour les Canadiens d'origine autochtone, leurs valeurs et leur histoire.

[...]


67. Dans l'analyse d'une demande mettant en cause des intérêts potentiellement opposés de groupes minoritaires, il faut être particulièrement sensible à leurs réalités et à leurs expériences, ainsi qu'à leurs valeurs, à leur histoire et à leur identité. Il s'agit d'une démarche inhérente à l'analyse subjective-objective, puisque le tribunal doit prendre en considération le point de vue d'une personne possédant les mêmes caractéristiques que le demandeur. Ainsi, en ce qui concerne les droits à l'égalité qui touchent les peuples et les communautés autochtones, il faut évaluer la mesure législative contestée en accordant une attention spéciale aux droits des peuples autochtones, à la protection des droits ancestraux ou issus de traités garantis par la Constitution ainsi qu'à l'histoire des autochtones au Canada, et en faisant montre de respect et de considération à l'égard de la culture de tous les autochtones -- hommes et femmes -- et de leur attachement à cette culture. Il faut toujours garder à l'esprit que le paragraphe 15(1) assure la « protection constante » du droit à l'égalité, quel que soit le contexte dans lequel l'analyse a lieu, et qu'il y ait un ou plusieurs groupes défavorisés ou minoritaires qui soient touchés : voir Andrews, précité, à la page 175; R. c. Turpin, [1989] 1 R.C.S. 1296, à la page 1326. De plus, il convient de rappeler que, dans tous les cas, il faut évaluer l'ensemble des circonstances du point de vue d'une personne qui possède les mêmes caractéristiques que le demandeur et qui est bien informée de ces circonstances.

[51]            Sur ce point, je n'ai pas l'intention de décider ce qui pourrait ou non s'avérer nécessaire pour analyser efficacement toutes les questions dont la Cour est saisie dans la présente affaire, mais je ne suis pas disposé à écarter les intervenants comme le proposent les demanderesses. Sur certaines questions, ils ont un point de vue qui se distingue de celui de la Couronne et, selon moi, ce point de vue aidera beaucoup la Cour à trancher les questions dont elle est saisie. Bien entendu, les demanderesses ont raison de dire que les intervenants ne sont pas des parties et qu'ils ne doivent pas avoir autant de latitude que les parties en cause pendant le procès. Mais il s'agit d'une autre question que les demanderesses ont déjà posée à la Cour et à laquelle la Cour a répondu. Je me fonde encore une fois sur l'évaluation du juge Hugessen dans ses motifs du 26 mai 2000, au paragraphe 12 :

Toutefois, ce n'est pas sur le droit qui s'applique aux interventions que les avocats de la personne qui désire intervenir et des demandeurs ne semblent pas s'entendre, mais sur l'étendue et sur la portée des actions. L'avocat des demandeurs semble croire que ces actions portent essentiellement sur des questions privées intéressant les demandeurs et le gouvernement, dans lesquelles les demandeurs cherchent à revendiquer les droits personnels qui leur sont dévolus par suite des droits issus de traités ou peut-être de la Proclamation royale de 1763 (en parlant de droits personnels, je ne veux pas dire qu'il ne s'agit pas de droits collectifs puisque tous les droits ancestraux sont des droits collectifs, mais il s'agit d'une question n'intéressant essentiellement qu'eux et des actions personnelles intentées par eux). Avec égards, je crois que cette attitude n'est pas réaliste. On fait ainsi l'autruche. Dans la décision dont je viens de faire mention, la Cour d'appel a selon moi résumé d'une façon fort adroite la nature et l'étendue de la présente action lorsqu'elle a dit ce qui suit au sujet de l'affaire dont le juge de première instance était saisi :


« [...] le différend dont il était saisi portait plutôt en réalité sur les prétentions opposées de diverses parties de la collectivité autochtone en ce qui concerne l'établissement des conditions d'appartenance aux bandes indiennes. »

[52]            Selon moi, il ne serait pas opportun, pour l'instant, voire pour l'avenir, que la Cour réponde à l'invitation des demanderesses qui voudraient que la Cour fasse l'autruche et ordonne que, pendant le procès, le rôle des intervenants se limite à l'article 15 de la Charte, et au critère de justification, ou encore qu'elle impose d'autres restrictions qui priveraient la Cour de l'aide des intervenants pour ce qui est de comprendre les répercussions contextuelles des questions dont la Cour est saisie. Au fur et à mesure que le procès se déroulera et que la Cour comprendra mieux les divers points de vue des intervenants concernant la présente affaire, il sera peut-être nécessaire de restreindre leur rôle et leur liberté d'une manière quelconque. Mais il s'agit d'une question d'ajustement pendant le procès.

[53]            Les ordonnances passées de la Cour, la participation antérieure des intervenants ainsi que ma propre évaluation à ce jour de l'apport des intervenants à la présente affaire, me donnent à penser que la Cour pourra beaucoup apprendre des intervenants pendant le procès. Je crois que les intervenants devraient participer aux requêtes pendant le procès, comme ils l'ont fait pour ce qui concerne les requêtes préalables au procès, c'est-à-dire en présentant leurs divers points de vue et en évitant toute répétition. Encore une fois, il sera possible de modifier les règles pendant le procès s'il appert que les intervenants abusent de leur rôle ou qu'ils tentent d'élargir ou de modifier le litige d'une quelconque manière.

[54]            Le même raisonnement s'applique aux observations préliminaires. Je ne vois pas comment les intervenants peuvent aider la Cour si, après avoir obtenu le droit de participer aux observations écrites et orales, ils n'ont pas le droit de présenter des observations préliminaires. Encore une fois donc, ces déclarations ne doivent pas être répétitives et devraient s'en tenir au point de vue que chaque intervenant a été autorisé à représenter et à décrire.

La question des contre-interrogatoires

[55]            Les intervenants demandent la permission de contre-interroger les témoins des demanderesses. En règle générale, les quatre intervenants choisiront une personne qui sera chargée de les représenter tous sauf si, dans une situation en particulier, il devient nécessaire de procéder différemment, auquel cas les intervenants demanderont à la Cour l'autorisation de modifier la procédure.

[56]            Les intervenants ne souhaitent pas contre-interroger les témoins de la défenderesse sauf avec la permission des parties ou de la Cour pour des motifs spéciaux et ils sont d'avis que leurs divers points de vue peuvent aider la Cour s'il leur est permis de poser des questions supplémentaires aux témoins de la Couronne pendant l'interrogatoire principal, avant le contre-interrogatoire des demanderesses.

[57]            L'ordonnance du juge McNair a déjà conféré aux intervenants le droit de [traduction] « présenter des observations écrites ou orales au procès » . Leurs rôles respectifs ont été confirmés dans les ordonnances de la Cour, même si les demanderesses ont tenté à plusieurs reprises d'écarter les intervenants. Les intervenants ont démontré, lorsqu'ils ont comparu devant moi, qu'ils aident la Cour; ils ont évité la répétition et n'ont pas abusé inutilement du temps de la Cour.

[58]            Mis à part l'allégation selon laquelle les intervenants ne peuvent pas réellement aider la Cour, allégation qui a été maintes fois soulevée pendant la présente affaire, les demanderesses prétendent essentiellement que si les intervenants ont le droit de contre-interroger les témoins des demanderesses, le procès durera plus longtemps que nécessaire et que cela fera augmenter les coûts.

[59]            Après avoir confirmé à plusieurs reprises les points de vue utiles que les intervenants apportent à la présente action et puisqu'ils ont obtenu le droit de présenter leurs observations écrites et orales au procès, je ne vois pas pourquoi la Cour devrait aujourd'hui atténuer cet avantage en leur refusant le droit de contre-interroger les témoins pendant le procès pourvu toujours, bien entendu, qu'il n'y ait pas de répétition et que les intervenants s'en tiennent à l'examen des témoins des demanderesses du point de vue que chacun d'eux prétend être utile pour la Cour.

[60]            Il se peut que les demanderesses présentent des éléments de preuve qui viennent contredire les observations écrites et orales que les intervenants ont été autorisés à présenter. Il serait donc tout à fait injuste que les intervenants ne puissent pas contre-interroger les témoins des demanderesses sur les questions qui ont un lien avec leurs propres positions. Mais plus important encore, la Cour ne trouverait aucun avantage à empêcher les intervenants de contre-interroger les témoins des demanderesses sur ces questions.

[61]            Pour des raisons semblables, il me semble important que les intervenants soient autorisés à interroger, dans une certaine mesure, les témoins de la Couronne. La position des intervenants n'est pas celle de la Couronne sur toutes les questions que soulève le litige. Lorsque les intérêts des intervenants ne sont pas contraires à ceux de la Couronne, ces derniers poseront des questions nouvelles supplémentaires après l'interrogatoire principal, lesquelles questions aideront la Cour à mieux comprendre la situation et les questions contextuelles qu'il n'est peut-être pas dans l'intérêt de la Couronne d'explorer. Si leurs intérêts sont contraires à ceux de la Couronne, les intervenants devraient être autorisés à contre-interroger un témoin de la Couronne si et quand cela sera nécessaire.


[62]            La Cour veut à tout prix éviter que les parties ne se répètent, qu'elles élargissent le débat, qu'elles s'approprient les questions des autres parties et qu'elles versent dans la surabondance de documents et de paroles, que ce soit pendant le procès ou à tout autre moment. Je me réjouis que les demanderesses s'intéressent également à ces questions. Mais la requête présentée par les intervenants a pour seul objet d'établir le cadre général de leur participation au procès. En accordant un tel droit général de participation, la Cour n'a pas l'intention d'oublier que les intervenants ne sont pas des parties et que leur but consiste à aider la Cour en décrivant des points de vue qui ne sont pas subsumés ni suffisamment abordés par les demanderesses et la Couronne.

[63]            À tout moment pendant le procès, les intervenants devront démontrer comment ils aident la Cour et ce en quoi leur intervention est utile, que ce soit par contre-interrogatoire ou autrement. Selon moi, pour l'essentiel, la participation des intervenants ne repose pas tant sur la portée générale des droits qui leur ont été conférés (qui devraient être assez larges pour que les intervenants puissent aider la Cour en temps utile) que sur l'exercice de ces droits pendant le procès conformément au statut limité qui leur a été accordé sans que la procédure ne s'en trouve prolongée ni élargie et sans déborder les questions qui ont été définies dans les plaidoiries.

[64]            Au paragraphe 58 de ses observations écrites, l'avocat des demanderesses dit catégoriquement :

[traduction]

Ce n'est pas la position des demanderesses. Elles ne contestent pas le droit des intervenants de participer au procès. Elles ne prétendent pas non plus que les organisations qu'ils représentent n'ont ni intérêt ou préoccupation concernant les questions en litige (même si les demanderesses disent cependant qu'ils n'ont pas un intérêt direct parce qu'ils ne sont pas directement visés). La question que soulèvent les demanderesses vise la portée de leur position et non celle de leur intérêt.

[65]            On se demande comment un avocat, qui a tenté à plusieurs reprises d'évincer les intervenants de la présente affaire et qui, pendant la plaidoirie relative à la requête, à dit clairement que, selon lui, les intervenants ne pouvaient contribuer rien de plus que la Couronne elle-même et qu'ils ne devraient pas avoir le droit de contre-interroger les témoins pendant le procès, peut s'exprimer de la sorte? La requête ne visait qu'une question relativement simple : puisque les droits déjà accordés aux intervenants en vertu d'une ordonnance définitive de la Cour qui a été confirmée par la Cour d'appel fédérale sont larges et puisque les demanderesses n'ont pas tenté de faire modifier cette ordonnance en conformité avec la loi, quelle latitude doit être accordée aux intervenants pour ce qui concerne le contre-interrogatoire des témoins et en sus, leur participation au procès? Il est tout à fait légitime que les demanderesses insistent pour dire que le procès ne doit pas porter sur des questions dont la Cour n'a pas été saisie. Il est également utile que les demanderesses insistent pour dire qu'il s'agit d'un second procès et que la situation est donc différente, à plusieurs égards, de celle du premier procès :

[traduction] Un autre facteur découle également de la position inhabituelle dans laquelle la Cour se trouve. Il ne s'agit pas uniquement d'un deuxième procès. Il s'agit d'un deuxième procès auquel s'appliquent des ordonnances qui permettent aux intervenants de se fonder sur la preuve produite au premier procès, qui exigent que les intervenants décident sur quelles preuves produites ils ont l'intention de se fonder (ce qu'ils ont fait), et qui exigent que les intervenants fournissent des résumés de témoignage anticipé confirmant les preuves supplémentaires qu'ils tenteront de produire avec une exception (ce qu'ils ont également fait). La Cour est donc au courant de la preuve sur laquelle les intervenants se fondent, de la preuve qu'ils veulent produire et des divergences entre les deux. Comme le confirment les résumés de témoignage anticipé des intervenants, la preuve que ces derniers veulent maintenant produire est la même que celle qu'ils ont produite au premier procès. Il s'agit d'une preuve concernant le statut de membre ou le droit à ce statut conféré aux femmes par le projet de loi C-31 qui, encore une fois, est la seule question qu'ils avaient le droit de soulever, selon le juge McNair. En fait, outre le fait de se fonder sur le dossier du premier procès et de présenter une preuve supplémentaire, il s'agit de la seule preuve que la Couronne compte présenter (voir le résumé de témoignage d'Elizabeth Poitras). La seule exception est la preuve que le CNAC a l'intention de présenter par l'entremise de l'ancien ministre des Affaires indiennes, David Crombie, qui est un témoin que les demanderesses veulent assigner quoi qu'il en soit et les preuves d'experts qu'ils ont le droit de déposer.


[66]            Dans une large mesure, bien entendu, des questions semblables se posent concernant tous les participants, du moins lorsque nous aurons lu les résumés de témoignages anticipés de toutes les parties.

[67]            Malgré ces éléments intéressants, les demanderesses n'auraient pas dû utiliser la requête pour tenter, encore une fois, de neutraliser les intervenants en reprenant des questions qui ont force de chose jugée ou pour accuser injustement l'avocat de la partie adverse de manquer de sincérité.

Le comportement général

[68]            Dans le contexte de ce qui sera probablement un procès long et ardu et à cause du grand nombre de questions qui doivent être réglées avant le début du procès, la Cour tient à rappeler les points suivants aux avocats :

1.          les attaques personnelles gratuites dirigées contre les avocats des parties adverses doivent cesser. Elles nuisent à l'administration de la justice;


2.          les requêtes et questions interlocutoires doivent être réglées d'une manière efficace et opportune. Les exigences des Règles de la Cour fédérale, 1998 concernant la présentation et le volume de documents écrits doivent être respectées, sauf décision de la Cour;

3.          si une requête doit prendre plus de deux heures, il serait utile que l'avocat indique le temps qu'il faudra lorsqu'il déposera les documents nécessaires et qu'il mentionne les raisons pour lesquelles il aura besoin de plus de temps;

4.          il n'est ni utile ni convaincant de présenter une surabondance de documents et d'observations.

[69]            La Cour demande aux avocats de veiller à ce que les excès et les lacunes qui ont entouré la présente requête ne se reproduisent plus.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          les intervenants ont le droit de contre-interroger les témoins des demanderesses par l'entremise d'un avocat choisi par les intervenants pour les représenter; chacun d'eux peut également demander à la Cour de l'autoriser à contre-interroger les témoins des demanderesses séparément dans certaines circonstances et sous réserve des restrictions imposées par la Cour;

2.          chaque intervenant est autorisé, après l'interrogatoire principal de la Couronne et avant le contre-interrogatoire par les demanderesses, à interroger les témoins de la Couronne en posant des questions supplémentaires;

3.          dans les circonstances qui s'y prêtent, un intervenant peut demander à la Cour de l'autoriser à contre-interroger les témoins de la Couronne sous réserve des restrictions imposées par la Cour;

4.          la Cour confirme que chaque intervenant peut présenter des observations préliminaires orales ou écrites;


5.          la Cour confirme que chaque intervenant peut présenter des observations concernant les requêtes et les questions interlocutoires pendant le procès;

6.          les droits susmentionnés sont accordés sous réserve de la disposition restrictive générale selon laquelle ils ne doivent être exercés que par les intervenants conformément au statut limité qui leur a été accordé et ils seront en outre assujettis aux conditions que la Cour pourra imposer pendant le procès dans le but d'éviter la répétition et pour faire en sorte qu'aucun intervenant ne déborde du cadre de son statut;

7.          les dépens de la présente requête seront payables immédiatement quelle que soit l'issue de la cause, les dépens à taxer comprenant les frais de déplacement raisonnables que les avocats ont engagés en vue d'assister à la présente audience.

                                                                                  « James Russell »                  

                                                                                                     Juge                           

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIERS :              T-66-86 A & T-66-86 B

INTITULÉ :               BANDE INDIENNE DE SAWRIGDGE

c.

SA MAJESTÉ LA REINE

et

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA (ALBERTA)

NON-STATUS INDIAN ASSOCIATION OF ALBERTA, ASSOCIATION DES FEMMES AUTOCHTONES DU CANADA

et

PREMIÈRE NATION TSUU T'INA     c.

SA MAJESTÉ LA REINE

et

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA

CONSEIL NATIONAL DES AUTOCHTONES DU CANADA (ALBERTA)

NON-STATUS INDIAN ASSOCIATION OF ALBERTA ASSOCIATION DES FEMMES AUTOCHTONES DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                              EDMONTON (ALBERTA)

DATES DE L'AUDIENCE :                          LES 18 ET 19 NOVEMBRE 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

OU DU JUGEMENT :                                   LE JUGE RUSSELL

DATE DES MOTIFS :                                   LE 6 DÉCEMBRE 2004


COMPARUTIONS :

Catherine Twinn                        POUR LA DEMANDERESSE

Twinn Barristers and Solicitors

Slave Lake ( Alberta)

Philp P. Healey                          POUR LA DEMANDERESSE

Aird & Berlis LLP

Kevin Kimmis / James Kindrake                                    POUR LA DÉFENDERESSE

Ministère de la Justice

Edmonton

Mary Eberts                              POUR L'ASSOCIATION DES FEMMES

Eberts Symes Street Pinto & Jull                                    AUTOCHTONES DU CANADA

Toronto (Ontario)                      ET LE CONSEIL NATIONAL DES

AUTOCHTONES DU CANADA

P. Jon Faulds / Derek Cranna                            POUR LE CONSEIL NATIONAL DES

Field LLP                                  AUTOCHTONES DU CANADA (ALBERTA)

Edmonton (Alberta)

Michael J. Donaldson                POUR LA NON-STATUS INDIAN

Burnet, Duckworth & Paulmer LLP                               ASSOCIATION OF ALBERTA

Calgary (Alberta)


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