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Date : 19980826


Dossier : T-2727-96

Entre :

     JACQUES COHEN

     Demandeur

     - et -

     LE MINISTÈRE DU REVENU NATIONAL,

     DOUANES ET ACCISE

     Défendeur

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE JOYAL

[1]      Voici, en résumé, les motifs du jugement prononcés oralement par le sous-signé le 2 juin 1998, à la fin de l'instruction dans cette affaire.

[2]      La Cour se voit dans l'obligation de déclarer qu'il n'existe aucun motif juridique lui permettant d'accueillir l'appel du demandeur. C'est fort dommage, mais la Loi sur les douanes (ci-après "la Loi") ne permet pas d'y trouver une solution équitable, qui paraîtrait peut-être plus juste, plus humaine et plus conforme à nos valeurs humaines et même institutionnelles.

[3]      Dans ce cas-ci, la saisie est tout à fait légale. Le demandeur a fait certaines déclarations. L'une de celles-ci est fausse, et une fois cela fait, ce n'est pas que le demandeur est un grand voleur ou contrebandier, mais les importations sont sujettes à la saisie. Le demandeur a perdu la valeur de ses biens. Il a même dû subir un procès criminel. Heureusement, il a été acquitté.

[4]      L'on doit se souvenir que la procédure devant moi n'a aucun lien avec la prétendue criminalité des gestes du défendeur. Personne ne prétendrait que cette fausse déclaration est un acte criminel. Même si l'on ajoute à tout cela les déclarations faites aux agents des douanes, ceci n'a pas d'importance. En ce qui a trait à l'appel du demandeur devant cette Cour, qui ne touche que l'aspect civil de l'affaire, la Loi impose ou donne le droit à la saisie, et c'est un droit qui est immuable.

[5]      Il arrive parfois que l'erreur humaine se glisse dans l'administration de la Loi. Il peut y avoir des erreurs d'interpretation, et quelquefois, les conclusions de la part des inspecteurs ou agents des douanes sont mal tirées. Mais en ce qui a trait aux faits devant moi, je dois déclarer que l'intervention humaine n'est pas pertinente. Tout ce qu'un importateur doit faire, c'est de cocher ici ou de cocher là sur les formules d'usage. Pour le reste, un tribunal peut sympathiser dans un cas comme celui du demandeur, mais la Loi l'empêche d'être humain.

[6]      Il est vrai que souvent, un tribunal se permettra certains commentaires soulignant l'aspect humain d'une affaire afin d'indiquer aux parties ce qu'éprouve la Cour. Mais cela ne donne aucun privilège à la Cour. Le rôle, la compétence et la droiture de la Cour lui imposent toujours un respect constant de la règle du droit et de son esprit.

[7]      J'inviterais peut-être le demandeur à lire la décision dans l'affaire Porter c. La Reine, (1989) 3 C.F. 403, sur laquelle on s'est penché assez longuement. Si la doctrine de la saisie est dure et sévère, je dois rappeler au demandeur qu'il a eu le droit, même sans la présence d'un procureur attitré, de présenter sa cause devant cette Cour. Sa présentation fût admirable, mais plus important encore, notre système lui a permis d'avoir son mot à dire. Et cela, la Cour le répète, veut tout dire.

[8]      La décision devant moi doit être une décision juridique. Le demandeur, en l'instance, subit une déception, mais il doit reconnaître que dans son cas, la Loi a été respectée. Le demandeur ne s'y accorde peut-être pas, mais l'essentiel, pour tout système qui se dit juste, c'est que ce principe soit tout de même respecté.

[9]      Je me dois, malheureusement, de rejeter l'appel du demandeur et confirmer la saisie qui a été faite, tout en reconnaissant que dans les cas comme celui-ci, la Loi connaît des incidents pouvant paraître prétentieux et vexants. L'autorité publique se doit, dans toute situation semblable, de s'assurer de la bonne administration de la loi, en conformité avec son texte et ses précédents. L'autorité doit défendre ses lois en nommant un procureur pour représenter l'intérêt public, procureur qui, en l'instance, a exerçé son rôle avec valeur, équilibre et probité. J'en dirais autant des fonctionnaires de la Couronne qui ont témoigné devant la Cour et qui, à mon avis, ont bien respecté leur rôle.

[10]      L'appel est rejeté. Je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.

     L-Marcel Joyal

     J U G E

OTTAWA, Ontario

le 26 août 1998.

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