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Date : 20060331

Dossier : IMM‑4049‑05

Référence : 2006 CF 424

Toronto (Ontario), le vendredi 31 mars 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

 

ENTRE :

MD REAZUL ISLAM

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La présente demande se rapporte à une décision par laquelle une agente des visas a refusé, en date du 20 avril 2005, la demande de résidence permanente présentée par le demandeur au titre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral).

 

I.          Le contexte

[2]               Il est reconnu que le demandeur, étant donné qu’il a présenté une demande avant le 1er janvier 2002, pouvait faire l’objet d’une évaluation selon les critères prévus par le Règlement sur l’immigration de 1978 et par le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le Règlement sur l’IPR). Le demandeur a obtenu 68 points suivant le Règlement sur l’immigration de 1978, tout juste sous le résultat minimal requis de 70 points. Suivant le Règlement sur l’IPR, le demandeur a obtenu 63 points, moins que le résultat minimal requis de 67 points. Dans la présente demande, le demandeur conteste l’évaluation effectuée par l’agente des visas quant à sa compétence de la langue anglaise suivant le Règlement sur L’IPR.

 

[3]               L’article 79 du Règlement sur l’IPR prévoit la manière selon laquelle la compétence en anglais et en français est déterminée. Les portions pertinentes de cet article sont les suivantes :

Compétence en français et en anglais (20 points)

Proficiency in English and French (20 points)

79. (1) Le travailleur qualifié indique dans sa demande de visa de résident permanent la langue — français ou anglais — qui doit être considérée comme sa première langue officielle au Canada et celle qui doit être considérée comme sa deuxième langue officielle au Canada et :

79. (1) A skilled worker must specify in their application for a permanent resident visa which of English or French is to be considered their first official language in Canada and which is to be considered their second official language in Canada and must

a) soit fait évaluer ses compétences dans ces langues par une institution ou organisation désignée aux termes du paragraphe (3);

(a) have their proficiency in those languages assessed by an organization or institution designated under subsection (3); or

b) soit fournit une autre preuve écrite de sa compétence dans ces langues.

(b) provide other evidence in writing of their proficiency in those languages.

[…]

Organisme désigné

Designated organization

(3) Le ministre peut désigner les institutions ou organisations chargées d’évaluer la compétence linguistique pour l’application du présent article et, en vue d’établir des équivalences entre les résultats de l’évaluation fournis par une institution ou organisation désignée et les standards mentionnés au paragraphe (2), il fixe le résultat de test minimal qui doit être attribué pour chaque aptitude et chaque niveau de compétence lors de l’évaluation de la compétence linguistique par cette institution ou organisation pour satisfaire à ces standards.

(3) The Minister may designate organizations or institutions to assess language proficiency for the purposes of this section and shall, for the purpose of correlating the results of such an assessment by a particular designated organization or institution with the benchmarks referred to in subsection (2), establish the minimum test result required to be awarded for each ability and each level of proficiency in the course of an assessment of language proficiency by that organization or institution in order to meet those benchmarks.

[…]

 

 

[4]               Plutôt que de faire évaluer ses compétences linguistiques comme le prévoit l’alinéa 79(1)a), le demandeur a choisi de présenter une preuve écrite de sa compétence en anglais suivant l’alinéa 79(1)b). Par une lettre datée du 7 juillet 2004, on a informé le demandeur que les prétentions écrites qu’il avait fournies n’appuyaient pas le niveau de compétence qu’il avait déclaré avoir dans sa demande de résidence permanente et que d’autres prétentions écrites ne seraient pas acceptées. Cependant, on lui a donné la possibilité de présenter dans les 180 jours de la date de la lettre des résultats de tests linguistiques effectués par un organisme approuvé. On a également informé le demandeur que le défaut de présenter des résultats de tests linguistiques aurait comme conséquence une évaluation de sa demande sur le fondement des renseignements contenus au dossier à ce moment, à savoir les prétentions écrites qui n’avaient pas été jugées satisfaisantes. Le demandeur n’a pas fourni les résultats de tests demandés.

 

[5]               Néanmoins, en avril 2005, le demandeur s’est présenté à une entrevue d’immigration au cours de laquelle l’agente des visas lui a fait passer un « test écrit » et a conclu que son niveau de compétence en anglais était un niveau de « base ». L’agente des visas a par la suite rendu la décision défavorable qui fait l’objet de la présente demande.

 

II.        Les questions à trancher        

[6]               Lors des observations présentées de vive voix, il a été reconnu que le processus d’évaluation de la demande du demandeur ne s’est pas arrêté lorsque le demandeur a présenté une preuve écrite insuffisante, mais s’est poursuivi jusqu’après l’entrevue au moment où la décision définitive a été rendue. Il est clair que l’agente des visas avait l’intention de donner au demandeur la pleine possibilité de démontrer sa compétence. Cependant, lorsqu’elle permet cela, l’agente des visas est toujours tenue de respecter les dispositions de l’article 79. Par conséquent, la ligne de conduite adoptée soulève deux questions qui doivent être tranchées dans la présente demande.

 

A. Le fait d’empêcher le demandeur de présenter une autre preuve écrite équivalait‑il à une erreur de droit ou à un manquement à l’application régulière de la loi?

 

 

[7]               L’avocat du demandeur prétend que, compte tenu du fait que la décision définitive n’a été rendue qu’après l’entrevue, le fait de refuser au demandeur la possibilité de présenter une autre preuve écrite équivaut à une erreur de droit et à un manquement à l’application régulière de la loi, puisque le Règlement sur l’IPR donne clairement au demandeur la possibilité de subir les tests visés par règlement ou de présenter une preuve écrite. L’avocat du demandeur soutient que si le demandeur avait eu la possibilité de présenter une autre preuve écrite, il aurait pu fournir d’autres documents qui auraient confirmé sa compétence en langue anglaise.

 

[8]               Je suis d’accord avec l’avocat du demandeur.

 

[9]               Bien que la preuve écrite présentée au départ par le demandeur ait été jugée inacceptable, l’agente des visas a donné au demandeur une deuxième chance de satisfaire aux exigences de l’article 79; il pouvait soit subir les tests visés par règlement, soit présenter une preuve écrite. Le fait qu’on ait empêché le demandeur d’exercer une des possibilités lors de la deuxième tentative constitue à mon avis un manquement à l’application régulière de la loi.

 

B. Le fait pour l’agente des visas de faire passer un « test écrit » équivalait‑il à une erreur de droit?

 

[10]           L’avocat du demandeur prétend que bien que le Règlement sur l’immigration de 1978 le permettait, le Règlement sur l’IPR n’accorde pas à l’agente des visas le pouvoir de faire passer son propre « test écrit » à la place du test visé par règlement. Par conséquent, l’agente des visas était tenue d’établir la compétence en anglais du demandeur en se fondant seulement sur la preuve écrite contenue au dossier à ce moment.

 

[11]           En réponse, le défendeur prétend que le demandeur n’a pas subi un préjudice du fait que l’agente des visas lui a fait passer un « test écrit » étant donné que la preuve écrite contenue au dossier à ce moment n’appuyait pas les niveaux de compétence que le demandeur prétendait avoir et, s’il en est, que le « test écrit » servait à fournir un avantage au demandeur.

 

[12]           Je n’accepte pas la prétention du défendeur et je suis d’accord avec le demandeur. Les notes du STIDI de l’agente des visas indiquent qu’elle a tenu compte du « test écrit » malgré le fait que le Règlement ne lui donnait pas le pouvoir de le faire. L’agente des visas n’est pas un « organisme désigné » au sens du paragraphe 79(3) du Règlement sur l’IPR et, à mon avis, elle aurait dû rendre la décision à l’égard de la compétence en anglais du demandeur selon ce que prévoit le Règlement sur l’IPR, à savoir en utilisant la preuve écrite présentée antérieurement par le demandeur et non en prenant en compte un facteur extrinsèque, soit le « test écrit ».

 

III.       Conclusion

[13]           Pour les motifs énoncés, je conclus que la décision rendue par l’agente des visas était une décision déraisonnable, et c’est la norme de contrôle applicable selon ce que les parties ont convenu.

 

ORDONNANCE

 

Par conséquent, j’annule la décision de l’agente des visas et je renvoie l’affaire à un autre agent des visas afin qu’il rende une nouvelle décision.

 

 

« Douglas R. Campbell »

 

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Danièle Laberge, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑4049‑05

 

INTITULÉ :                                       MD REAZUL ISLAM

demandeur

 

                                                            c.

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

                                                            DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                    TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                  LE 29 MARS 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                          LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                         LE 31 MARS 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dan Miller                                                 POUR LE DEMANDEUR

                                                                                

Leanne Briscoe                                         POUR LE DÉFENDEUR

                                                                

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :              

 

Dan Miller

Avocat

Toronto (Ontario)                                     POUR LE DEMANDEUR

                                                                

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada            POUR LE DÉFENDEUR

 

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