Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20191022


Dossier : IMM-637-19

Référence : 2019 CF 1319

Ottawa (Ontario), le 22 octobre 2019

En présence de la Juge en chef adjointe Gagné

ENTRE :

GRACIA PAYENZO MFUDI

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Nature de l’affaire

[1]  Les parents de Mme Gracia Payenzo Mfudi, citoyens de la République Démocratique du Congo, ont présenté une demande de super visa pour parents et grands-parents, laquelle leur a été refusée. En prenant en compte la raison de leur visite, l’agente d’immigration n’a pas été convaincue que les parents de Mme Mfudi quitteraient le Canada au terme de leur séjour à titre de résidents temporaires. Par ailleurs, elle a conclu que les critères d’émission d’un super visa n’étaient tout simplement pas rencontrés.

[2]  Mme Mfudi demande le contrôle judiciaire de cette décision et, se représentant seule, elle plaide que ses parents rencontrent généralement les critères prévus dans les instructions ministérielles concernant les demandes de super visa.

II.  Questions en litige et norme de contrôle

[3]  Cette demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

  1. Mme Mfudi a-t-elle qualité pour agir?

  2. Est-ce que la demande de super visa des parents de Mme Mfudi rencontre les critères applicables?

[4]  Je n’ai pas à me prononcer sur la norme de contrôle applicable à la première question puisque si je conclus que Mme Mfudi n’a pas la qualité pour agir dans la présente cause, je dois rejeter sa demande de contrôle judiciaire.

[5]  Par ailleurs dans mon analyse de la décision de l’agente d’immigration de refuser l’émission d’un visa de résidents temporaires aux parents de Mme Mfudi, décision de nature essentiellement discrétionnaire, je dois faire preuve d’un degré élevé de retenue. La norme de contrôle applicable est donc celle de la décision raisonnable (Doret c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 447, au para 19; Canada (Ministre de Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, [2009] 1 RCS 339, 2009 CSC 12, aux paras 46, 53; Dunsmuir c New Brunswick, 2008 CSC 9, au para 47).

III.  Analyse

A.  Qualité pour agir de la demanderesse

[6]  L’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, (LRC (1985), ch. F-7) (Loi) traite de l’identité de la partie qui peut présenter une demande de contrôle judiciaire devant la Cour :

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

[7]  Or, pour déterminer si une partie est directement touchée par l’objet de la demande, « il faut se demander si la question en litige porte directement atteinte à ses droits, si elle lui impose des obligations juridiques ou si elle lui cause directement préjudice » (Douze c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1337, au para 15).

[8]  Ce sont donc les demandeurs de visa eux-mêmes, dont les droits sont affectés par la décision de l’agent d’immigration, et non les membres de leur famille qu’ils entendent visiter au Canada, qui ont un intérêt à attaquer la décision en contrôle judiciaire devant la Cour. Bien que la décision puisse certainement avoir un impact négatif sur les membres de la famille, la Loi prévoit qu’ils n’ont pas l’intérêt pour agir.

[9]  Le nom de Mme Mfudi ne figure pas sur la demande de super visa de ses parents; c’est à ses parents que l’agente d’immigration a refusé un visa au motif qu’ils ne rencontrent pas les critères. Ce sont ses parents qui auraient dû contester la décision (voir également Chinenye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 FC 378, aux paras 17 et 18).

[10]  Bien que mon analyse ait pu s’arrêter ici, puisque Mme Mfudi ne peut pas présenter la demande au nom de ses parents, je vais néanmoins sommairement analyser le bien-fondé de la décision sous étude.

B.  Caractère raisonnable du refus d’émettre un super visa aux parents de Mme Mfudi

[11]  Les motifs invoqués par l’agente d’immigration pour refuser les demandes de super visa sont plutôt brefs. Dans ses notes, on peut lire ce qui suit :

(Traduction) Le demandeur n’a pas fourni de preuve d’examen médical ni de preuve d’achat d’une assurance médicale qui satisfait aux exigences pour la délivrance d’un super visa. Le revenu de l’hôte est insuffisant pour répondre aux exigences pour la délivrance d’un super visa. Je ne suis donc pas satisfaite que le demandeur remplit les conditions requises pour la délivrance d’un super visa pour lequel il a postulé. Demande refusée. Il est à noter que l’hôte au Canada est une citoyenne canadienne qui a d’abord présenté une demande d’asile, puis obtenu le statut de résident permanent par le biais d'une demande de travailleur qualifié. Je note que le demandeur a déjà présenté une demande en 2014 qui a été refusée dans le but d’assister à un séminaire. Cela s’est produit pendant la période où la fille était au Canada avec un statut implicite en attente d’une détermination de sa demande d’asile. Il ne semble pas que cette information ait été divulguée au moment de la demande. Également à noter qu’aucun voyage antérieur n’a été démontré. 1 enfant réside en France.

[12]  Les critères d’admissibilité pour l’obtention d’un super visa, qui permet de nombreuses entrées au Canada au cours d’une période de dix ans, font l’objet d’instructions ministérielles publiées sur le site du Ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration : le demandeur doit démontrer que son enfant ou petit-enfant canadien atteint un seuil de revenu minimal; il doit présenter un engagement écrit de soutien financier de la part de l’enfant ou du petit-enfant; il doit démontrer qu’il détient une couverture d’assurance médicale émise par un assureur canadien, valide pour au moins un an à compter de son entrée au Canada; et il doit se soumettre à un examen médical.

[13]  Bien que son mémoire des faits et du droit soit plutôt vague à cet égard, Mme Mfudi a admis lors de l’audience tenue devant moi que ses parents avaient fait un certain nombre d’erreurs lors du dépôt de leur demande.

[14]  Elle a admis qu’ils avaient produit la mauvaise note de couverture d’assurance émise par la Croix Bleue. Selon la preuve produite, seul son père était couvert et la police n’entrait en vigueur que deux mois après l’arrivée de ses parents au Canada (un mois après leur retour à Kinshasa).

[15]  Mme Mfudi a également admis que ses parents n’ont produit que son relevé d’emploi, omettant de produire celui de son conjoint. Elle ne conteste pas qu’à elle seule, elle ne gagne pas le revenu brut familial minimum requis pour supporter la demande de super visa de ses parents.

[16]  Si l’on ajoute à cela le fait que ses parents n’ont pas fourni la preuve de leur examen médical requis par les instructions ministérielles, et qu’ils ont omis de divulguer, à l’endroit réservé à cette fin, qu’on leur avait déjà refusé un visa, on ne peut que conclure que l’agente d’immigration a bien exercé sa discrétion en refusant la demande de super visa.

IV.  Conclusion

[17]  Mme Mfudi n’a malheureusement pas la qualité pour agir comme demanderesse dans la présente cause, ni la capacité de représenter les intérêts de ses parents. Mais même si Mme Mfudi avait eu qualité pour agir, elle ne m’a pas convaincue que l’agente d’immigration a fait erreur en refusant d’émettre un super visa à ses parents.

[18]  Les parties n’ont proposé aucune question d’importance générale pour fins de certification et je suis d’avis que cette cause n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans IMM-637-19

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. Aucune question d’importance générale n’est certifiée.

« Jocelyne Gagné »

Juge en chef adjointe


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

IMM-637-19

 

INTITULÉ :

GRACIA PAYENZO MFUDI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA, ONTARIO

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 4 SEPTEMBRE 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE EN CHEF ADJOINTE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :

LE 22 octobre 2019

 

COMPARUTIONS :

Gracia Payenzo Mfudi

 

SON PROPRE COMPTE

 

Sarah Chênevert-Beaudoin

 

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Ottawa, Ontario

 

pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.